Année politique Suisse 1984 : Allgemeine Chronik / Schweizerische Aussenpolitik
Politique économique extérieure
Parmi les
mesures de soutien à l'exportation, la Garantie contre les risques à l'exportation (GRE) constitue sans doute l'un des instruments les plus efficaces au service de notre industrie. Créée pendant la grande crise économique d'avant-guerre, elle commémorait en 1984 son cinquantenaire. Depuis 1978, toutefois, la GRE se trouve dans une situation financière déficitaire. Les avances consenties par la Confédération n'ont cessé d'augmenter pour atteindre 599 millions en 1984. Pour tenter d'assainir quelque peu son assise financière, la DFEP a soumis à la procédure de consultation un avant-projet visant à augmenter de 44% le montant des émoluments, à remodeler la structure des tarifs et à supprimer la garantie contre les risques monétaires
[53].
La part des exportations d'armements sur le total des ventes de marchandises suisses à l'étranger n'a cessé de s'amenuiser au cours de ces dernières années. En 1984, sa quote-part ne représentait plus que le 0,65%, alors qu'en 1982, elle se situait encore à 0,89%. Le dossier controversé du Pilatus PC-7 turbo-traîner a rebondi à la suite de la publication de documents confidentiels de la fabrique de Stans, donnant des indications détaillées sur les possibilités de transformer cet appareil en un avion de combat. Tout en s'opposant à un postulat du conseiller national Bäumlin (ps, BE) chargeant les autorités de modifier l'ordonnance sur le matériel de guerre, afin de soumettre à autorisation les ventes à l'étranger d'avions légers, le Conseil fédéral a indiqué que l'éventuelle militarisation du PC-7 pourrait l'inciter à durcir les conditions de son exportation. Une commission d'enquête a d'ores et déjà été instituée par le DMF pour faire toute la lumière sur cette affaire
[54].
Le Conseil fédéral entend par ailleurs réglementer davantage les livraisons de matériel destiné à des installations nucléaires. Pour la Suisse, qui a ratifié le Traité de non prolifération des armes nucléaires en 1977, il s'agit de ne pas fournir de matériel aux pays refusant le contröle de l'Agence internationale de l'énergie atomique. Pour compléter les mesures de contrôle en vigueur, le gouvernement a modifié l'ordonnance qui règle ces opérations. Elle soumet, entre autres, les industriels à l'obligation d'annoncer certaines exportations destinées à l'enrichissement ou au retraitement du combustible nucléaire. Enfin, un accord de coopération sur l'utilisation pacifique de l'énergie nucléaire a été signé entre la Suisse et l'Egypte. Cet accord-cadre donnera à l'industrie suisse d'exportation la possibilité de participer avec d'autres pays à la réalisation d'un vaste projet nucléaire
[55].
Les
négociations engagées au sein des
institutions multilatérales pour tenter d'accélérer le démantèlement des barrières douanières et des restrictions quantitatives aux échanges se sont poursuivies. L'entrée en vigueur en janvier 1984 de la cinquième des huit tranches des réductions tarifaires prévues au GATT à l'issue du Tokyo Round constitue à cet égard une nouvelle étape dans le renforcement du système multilatéral des échanges. Notre pays a même procédé en juillet à la mise en vigueur de la sixième tranche, prévue initialement pour le début 1985. Cette réduction anticipée représente la contribution de la Confédération aux efforts déployés par l'OCDE en vue de rétablir un climat de confiance dans les échanges internationaux. Le développement du commerce mondial n'en demeure pas moins encore fortement entravé par des obstacles techniques non tarifaires et par un retour au bilatéralisme. Lors de la 40e session des parties contractantes du GATT, les Etats-Unis notamment ont insisté sur la nécessité de faire avancer le dossier relatif à la libéralisation des échanges de services
[56].
La dynamique du libre-échange instauré en Europe occidentale a reçu une nouvelle impulsion en 1984 par l'affirmation d'une volonté politique commune de resserrer les liens entre les pays de
l'AELE et les pays de la
Communauté européenne (CE). Réunis pour la première fois depuis la conclusion des accords de libre-échange en 1972 à Luxembourg, les ministres des Etats membres des deux groupes ont fixé les lignes directrices de la future coopération économique en Europe. Le document adopté au terme de la réunion confere ainsi une certaine importance à l'harmonisation des normes et à la suppression des obstacles non tarifaires aux échanges. Le texte va cependant au-delà de la simple création d'un grand marché européen homogène pour les produits industriels. Il postule notamment la promotion d'une collaboration accrue entre la CE et l'AELE dans des domaines aussi variés que la recherche et le développement, l'environnement et la protection des consommateurs. A la suite du sommet de Luxembourg, diverses mesures destinées à convertir les déclarations de principe en actions concrètes ont été approuvées. A l'occasion de la conférence ministérielle de l'AELE à Visby (Suède), les pays membres ont arrêté un programme de travail portant sur des questions telles que les obstacles techniques, les règles d'origine, les formalités douanières et les aides gouvernementales accordées aux producteurs nationaux. Au cours de ces deux réunions, la Suisse a entre autre plaidé en faveur d'une suppression totale des subventions destinées aux crédits à l'exportation
[57].
Si pour la première fois depuis le début de la crise l'ensemble des PVD a été en mesure d'assurer le paiement du service de sa dette
[58], il n'en demeure pas moins qu'aucune forme de solution aux
problèmes de l'endettement n'a encore été unanimement reconnue. Dans ce climat d'incertitude qui caractérise la situation actuelle, tous les observateurs s'accordent à dénoncer la hausse des taux d'intérêt aux Etats-Unis. Chaque augmentation d'un point de ces taux. d'intérêt correspond, en effet, à une charge supplémentaire de près de 3,5 milliards de dollars sur une dette extérieure de près de 900 milliards de dollars. Dans les pays du tiers monde, mais aussi dans le monde occidental, les avertissements se sont multipliés pour demander à Washington de plafonner les taux d'intérêt pour les prêts bancaires. Lors du sommet de Londres, les sept pays les plus industrialisés ont acceptées une nouvelle fois de négocier le rééchelonnement des dettes pour les Etats engagés dans une politique de redressement économique. Pour leur part, les repésentants des onze pays d'Amérique latine, qui se sont réunis en juin à Carthagène (Colombie), ont signé un document commun contenant un certain nombre de propositions concrètes pour résoudre le délicat problème de la dette extérieure de cette région du monde. Ainsi se trouve amorcé la première étape d'un long processus qui verra sans aucun doute les données du problème se modifier, d'autant plus que la solution de la crisé de l'endettement ne peut être totalement dissociée de l'examen des relations Nord-Sud et des discussions relatives à la réforme du système monétaire international
[59].
Diverses mesures économiques et commerciales en faveur des pays en développement ont à nouveau été instituées ou renforcées. Le Conseil national a ainsi approuvé à une très large majorité un
crédit additionnel pour la participation de la Suisse à l'augmentation du capital de la Banque interaméricaine, de la Banque africaine et de la Banque asiatique de développement, ainsi que l'adhésion de la Suisse à la Société interaméricaine d'investissement. Le montant de ce crédit s'élève à 120 millions de francs, dont seuls 20 millions sont à verser, le reste étant constitué par des garanties. L'octroi de ce crédit a suscité certaines critiques de la part de l'Action nationale et des socialistes. Ces derniers reprochent, en effet, aux organismes multilatéraux de patronner des projets qui favorisent les industries d'exportation au détriment des exploitations locales. Pour contribuer à soulager le fardeau de la dette extérieure contractée par la plupart des pays d'Amérique latine, la Confédération a conclu avec certains d'entre eux (Pérou, Equateur et Brésil) un accord de consolidation des dettes résultant des crédits commerciaux garanti par la GRE
[60].
Un certain nombre de contentieux ont assombri quelque peu les relations économiques bilatérales privilégiées que la Suisse entretient avec la plupart des pays membres de la CE. Ces derniers ont ainsi protesté à diverses reprises contre l'introduction dans notre pays de redevances routières, adoptées par le peuple et les cantons lors de la double votation de février. Présentées par les autorités helvétiques comme un simple «péage routier», ces taxes sont considérées par les gouvernements européens comme une nouvelle entrave au transport international et contraire à l'esprit des accords de libre-échange signés par la Suisse en 1972. Le Parlement européen a ainsi approuvé une résolution dans laquelle il demande l'abrogation ou, du moins, l'application non discriminatoire des redevances routières perçues à partir de janvier 1985 par la Confédération. Des menaces de rétorsion ont même été proférées par certains pays, tels que la République fédérale d'Allemagne, la France et l'Italie
[61].
En dépit de nombreux points de friction, les contacts avec la
France sont restés intenses tout au long de l'année. Le chef du DFEP s'est entretenu à Paris avec son homologue français, notamment sur les discriminations et les taxes parafiscales dont sont victimes certains produits suisses. Le contentieux le plus sérieux demeure toutefois celui de l'industrie pharmaceutique. L'accord conclu en 1978 prévoit entre autres la promotion des investissements suisses en France dans ce secteur. Or les filiales suisses hésitent à investir car les prix de vente très bas imposés aux médicaments en France ne leur permettent pas d'obtenir des rendements suffisants. Aux termes des pourparlers, aucune entente n'est intervenue sur ce dossier de première importance. La France a néanmoins manifesté sa volonté de rechercher des solutions propres à aplanir ce contentieux
[62].
Le chef du DFEP a reçu en mars à Berne le ministre du commerce extérieur d'Italie. Cette visite a notamment permis de débattre des procédures d'autorisation imposées par l'Italie à l'importation des produits textiles suisses. Ces mesures restrictives ont été levées en juillet
[63].
Le fléchissement de nos échanges avec les
pays de l'Est, observé ces deux dernières années, a cédé le pas à une légère reprise. Au cours de l'année, nos exportations vers ces pays ont augmentés en moyenne de 10,1 %. Si nos importations en provenance de la Bulgarie, de l'Union soviétique et de la Tchécoslovaquie ont singulièrement regressé, celles des autres Etats membres du COMECON se sont fortement accrues. En dépit de cette hausse des échanges, le bloc socialiste n'en demeure pas moins confronté à de sérieuses difficultés financières. C'est ainsi qu'au terme de laborieux pourparlers préliminaires, des négociations ont été entamées en octobre à Paris entre la Pologne et ses 17 principaux pays créanciers sur le rééchelonnement de sa dette. Le montant total des dettes polonaises envers la Suisse, arrivées à échéance et devant être échelonnées, s'élevait en 1984 à 240 millions de francs. Un nouvel accord de rééchelonnement avec la Yougoslavie a également été signé par la Suisse au cours de l'année
[64].
Le commerce avec les
Etats-Unis d'Amérique a continué de se développer de manière réjouissante. La fermeté du dollar et la vigueur de la reprise économique ont entraîné une augmentation de nos exportations supérieure à la moyenne. Cette évolution positive est toutefois entravée par des litiges croissants dans le domaine du droit économique. C'est ainsi que la Suisse a finalement décidé d'accéder à la demande d'entraide judiciaire formulée par Washington dans l'affaire Marc Rich, dont la société zougoise, spécialisée dans le commerce des matières premières, est accusée de fraude fiscale aux Etats-Unis. D'autre part les autorités helvétiques ont également accordé l'entraide judiciaire demandée parce pays dans la fameuse affaire «Santa Fe», une affaire exemplaire d'opérations de bourse, dites d'« initiés». Par ailleurs, les fortes tendances protectionnistes qui règnent aux Etats-Unis n'ont pu être totalement enrayées, notamment dans les secteurs des machines-outils et des textiles. Lors de sa visite officielle en février à Washington, le chef du DFEP a exposé la position de la Suisse face à ces foyers conflictuels bilatéraux
[65].
[53] FF, 1984, II, p. 42 ss.; Ww, 43, 25.10.84; L'Hebdo, 4, 24.1.84. Cf. APS, 1983, p. 80.
[54] BO CN, 1983, p. 388 s.; LM, 27.7.84. Voir aussi TA, 27.6.84; 10.11.84; L'Hebdo, 31, 2.8.84: TAM, 43, 3.11.84; APS, 1983, p. 80.
[55] Révision de l'ordonnance: RO, 1984, p. 209 ss.; Suisse, 22.2.84. Accord avec I'Egypte: 24 Heures, 14.11.84.
[56] RO, 1983, p. 1715 ss. et 1984, p. 616 ss. JdG, 21.2.84; Ww, 9, 1.3.84; NZZ, 10.3.84; 29.11.84; 1.12.84 (40e session). Voir aussi B. Bondy, Protektionismus. Herausforderung der achtziger Jahre, Zürich 1983. Cf. APS, 1978, p. 70; 1979, p. 80; 1982, p. 68.
[57] Déclaration de Luxemburg: NZZ, 6.4.84; Bund, 9.4.84; presse du 10.4.84; cf. APS, 1972, p. 36 s. Réunion de Visby: NZZ, 21, 23, et 25.5.84. Voir aussi NZZ, 10.3.84; 31.3.84; 7.11.84; 22.12.84.
[58] En 1983, le tiers monde a versé aux pays industrialisés 92 milliards de dollars pour le service de sa dette, alors qu'il n'a reçu que 85 milliards de dollars sous forme d'aide, de crédits, d'investissements et de transferts de capitaux (FF, 1985, I, p. 302).
[59] Sommet de Londres: Suisse, 10.6.84. Réunion de Carthagène: Suisse, 24.6.84. Problème de l'endettement international : FF, 1984, I, p. 853 ss. (Rapport sur les risques de l'endettement international); Suisse, 16.2.84; NZZ, 12.5.84; L'Hebdo, 23, 7.6.84; 26, 28.6.84; 27.5.84.
[60] FF, 1984, III, p. 829 ss.; BO CN, 1984, p. 1864 ss.; Rapp. gest., 1984, p. 279. Cf. APS, 1983, p. 83. Pour l'adhésion de la Suisse au «Club des 10» cf. infra, part I, 4b (Währung).
[61] Presse du 14.11.84; NZZ, 20.11.84; Ww, 47, 22.11.84. Voir aussi NZZ, 11.10.84 (RFA); LM, 22.11.84 (France); 24 Heures, 22.11.84 (Italie). Cf. infra, part. I, 6 b (Generelle Verkehrspolitik).
[62] NZZ, 6.7.84; TA, 7.7.84. Cf. APS, 1983, p. 81.
[63] 24 Heures, 18.4.84; CdT, 23.11.84.
[64] Pologne : Suisse, 30.8.84. Yougoslavie: NZZ, 1.2.84. Voir aussi FF, I, 1985, p. 355 s. ; Suisse, 2.8.84 ainsi que APS, 1983, p. 82.
[65] TLM, 1.2.84; 5.2.84; Bund, 6.2.84; NZZ, 8.2.84; 24 Heures, 8.2.84. Cf. APS, 1983, p. 80 s. et infra, part I, 4b (Banken).
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