Année politique Suisse 1994 : Infrastruktur und Lebensraum / Erhaltung der Umwelt
Protection des sites et de la nature
Le Conseil fédéral a mis en vigueur, au 1er octobre, l'
ordonnance sur la protection des bas-marais d'importance nationale. Ce texte comporte un inventaire de 728 objets protégés (environ 0,3% de la superficie de la Suisse) regroupant les deux tiers des 1084 objets mis en consultation en 1990. Le solde devrait recevoir une base légale pour sa protection en 1995
[51].
Face à la
contestation des cantons alpins contre les protocoles de la Convention des Alpes qui, selon eux, empêcheraient le développement de ces régions, le gouvernement a élaboré un protocole supplémentaire intitulé "
population et économie". Ce dernier reprenait les propositions faites par le Groupement suisse pour les régions de montagne (SAB). Ayant pour objectif de garantir un "développement durable" pour les régions alpines, celles-ci se focalisent notamment sur la participation des collectivités locales à tous les échelons de décision, la collaboration transfrontalière, le développement de labels de qualité pour les produits alpins ou l'indemnisation pour prestations écologiques effectuées par l'agriculture
[52].
En mars, lors de la réunion ministérielle sur la Convention des Alpes à Paris, R. Dreifuss a ainsi suggéré à ses partenaires (représentants de l'Allemagne, de la France, de l'Italie, de l'Autriche, de la Slovénie, du Liechtenstein et de Monaco) d'adopter ce protocole additionnel. Ceux-ci ont
rejeté la proposition helvétique mais ont cependant accepté d'intégrer ses dispositions dans le protocole consacré à l'aménagement du territoire
[53].
Le DFI a ensuite mis en
consultation l'ensemble des cinq protocoles de la Convention des Alpes (agriculture de montagne, protection de la nature et entretien des paysages, aménagement du territoire et développement durable, tourisme et transports) discutés à Paris. La majorité des cantons alpins (10 sur 15, soit UR, SZ, OW, GL, GR, TI, VS, NW, AR, AI et ZG comme canton non alpin) ainsi que le SAB, le PDC, le PRD, l'UDC, le PdL (ex-PA) et les organisations économiques les ont sévèrement critiqués et les ont rejetés. Malgré les amendements apportés, ils seraient, selon eux, beaucoup trop unilatéralement axés sur la protection et ne feraient pas de place pour le développement économique des régions alpines. En revanche, le PS, l'AdI, le PL, les DS, les Verts et les organisations de protection de l'environnement se sont prononcés favorablement sur ces protocoles et ont soutenu leur ratification
[54].
Au vu de ces protestations, le Conseil fédéral, lors de la réunion ministérielle de Chambéry (F) en décembre,
n'a
pas signé les trois protocoles déjà prêts et, sans s'y opposer, a choisi d'attendre la rédaction finale des deux autres (tourisme et transports) pour réexaminer le dossier, reportant ainsi toute décision à plus tard. D'ici là, la Suisse devrait pratiquer la politique de la Convention sur une base volontaire grâce à sa propre législation. La Convention devant entrer en vigueur en mars 1995, la Confédération ne devrait plus avoir qu'un statut d'observateur. Contrairement à certaines attentes, elle ne s'est pas retrouvée isolée à Chambéry puisque l'Autriche et le Liechtenstein ont également refusé de signer les trois protocoles, l'Autriche en raison de certaines garanties qu'elle exige de voir figurer dans le texte sur les transports et le Liechtenstein par solidarité avec ses voisins
[55].
La décision du gouvernement a par ailleurs répondu aux préoccupations exprimées par le postulat Danioth (pdc, UR) transmis par le Conseil des Etats. Ce texte demande en effet que le Conseil fédéral négocie les protocoles d'application de la Convention des Alpes en veillant à ce que les intérêts des populations montagnardes, notamment en termes d'activité économique, soient pris en compte au même titre que les besoins de la protection de l'environnement
[56].
Dans la
procédure d'élimination des divergences relative à la révision de la loi sur la protection de la nature et du paysage, le
Conseil des Etats, sur proposition de sa commission, est revenu sur les décisions de la grande chambre dans le cadre du débat sur le
droit de recours des organisations de protection de l'environnement (et des communes). La version du Conseil national, défendue en l'occurrence par E. Delalay (pdc, VS), entendait limiter le droit de recours des organisations nationales aux seuls objets de signification nationale ou concernant plusieurs cantons et, pour les autres cas, laisser la liberté aux cantons de définir eux-mêmes les organisations compétentes. Les sénateurs ont refusé de telles restrictions et ont en outre biffé une proposition Maître (pdc, GE) supprimant tout droit de recours contre des projets déclarés d'utilité publique. Ils ont en général estimé que le droit de recours ne saurait par trop être restreint, car il représente un des piliers de l'Etat de droit et qu'il est nécessaire que la nature puisse bénéficier de représentants pouvant défendre ses intérêts
[57].
Malgré diverses vélléités d'en revenir à sa position initiale, le
Conseil national s'est finalement rallié aux vues de la petite chambre. Il a néanmoins maintenu une divergence pour ce qui est du moment où un recours peut être intenté. Tandis que le Conseil des Etats avait situé cet instant immédiatement après la décision en première instance de l'autorité, la grande chambre a choisi une solution plus rapide en le plaçant avant. Les promoteurs de cette solution ont souligné que cela permettrait à l'autorité de prendre une décision en toute connaissance de cause. Les opposants ont souligné que cela risquait de provoquer un encombrement procédural, organisations et communes étant contraintes de s'opposer a priori à tout projet
[58].
Le Conseil fédéral a présenté son message sur la
Convention des Nations Unies sur la diversité biologique adoptée lors du sommet de la terre de Rio de Janeiro de 1992. Ce texte a essentiellement pour objectif la conservation de la diversité biologique, l'utilisation durable de ses éléments ainsi que le partage équitable des avantages tirés de l'utilisation des ressources génétiques. Pour atteindre ces buts, ces accords prévoient des inventaires des espèces existantes, la détection et la réduction des activités qui leur sont dommageables, l'amélioration des écosystèmes dégradés, des mesures de protection lors de l'utilisation d'organismes génétiquement modifiés et la promotion du transfert vers les pays en voie de développement de technologies nécessaires à une utilisation durable des ressources biologiques
[59].
Les
Chambres ont accepté de ratifier cette convention. Ne désirant pas modifier un texte approuvé par la plupart des pays industrialisés, le Conseil national a rejeté des propositions de minorités roses-vertes dont le but était de renforcer explicitement la position des pays du Sud dans le cadre d'une déclaration interprétative réglant les relations commerciales en matière de propriété intellectuelle, de transferts technologiques et de biotechnologie. Pour sa part, le Conseil des Etats a refusé une proposition de non-entrée en matière de C. Schmid (pdc, AI). Ce dernier a notamment affirmé que la Suisse ne pouvait assumer une telle convention, notamment quant à la charge financière nouvelle qu'elle supposerait
[60].
Le Conseil fédéral a proposé au parlement de se prononcer en faveur d'un amendement à la
Convention du 3 mars 1973
sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d'extinction. Ce nouveau texte a pour but de permettre aux organisations supranationales ayant pour objectif une intégration économique régionale, en l'occurrence l'UE, de participer également, aux côtés des Etats, à la protection des espèces menacées en réglementant leur commerce. Les Chambres l'ont adopté à l'unanimité
[61].
A l'initiative du gouvernement, le parlement a également accepté d'adhérer à la
Convention sur la conservation des espèces migratrices appartenant à la faune sauvage, texte datant de 1979 et auxquels 44 Etats sont parties, ainsi que l'UE. Cet accord vise à protéger les espèces migratrices au plan mondial ainsi que leur habitat et leur biotope. Si la législation suisse est déjà suffisante pour faire face aux obligations de cette convention, cette dernière permettra néanmoins une meilleure coordination des efforts de protection au niveau international
[62].
L'OFEFP, en publiant les "
listes rouges des espèces animales menacées en Suisse", a voulu lancer un cri d'alarme à ce sujet. En effet, sur les 2745 espèces recensées, 41% seraient menacées de disparition. Les espèces les plus touchées sont les batraciens (95%) et les reptiles (80%). La dégradation de leurs biotopes en est la cause principale
[63].
Alors que le Conseil des Etats avait transmis en 1993 la motion Simmen (pdc, SO), le Conseil national a préféré accepter ce texte sous forme de postulat. Dans le but de sauvegarder les forêts tropicales, celui-ci prévoit de
rendre obligatoire la déclaration de l'ensemble des essences et des produits du bois, déclaration qui devrait comporter le nom de l'essence et celui de son pays d'origine. Il propose également d'autoriser le principe de la déclaration facultative sous forme de label indiquant que le bois provient d'une région où est pratiquée l'exploitation durable. La grande chambre s'est rangée à l'avis du Conseil fédéral selon lequel l'introduction d'une déclaration obligatoire serait techniquement impossible et que, reconnaissant néanmoins la légitimité des préoccupations de la motionnaire, il valait mieux introduire le label écologique. Elle a également transmis comme postulat deux motions de sa commission de l'environnement de teneur identique et a accepté un postulat de cette instance demandant au gouvernement d'oeuvrer par divers moyens à la préservation de la forêt tropicale. Dans le même élan, elle a adopté une pétition déposée par le Fonds Bruno Manser reprenant l'idée d'une déclaration obligatoire du bois et des produits du bois. Pour sa part, H. Wick (pdc, BS) a retiré sa motion dont le texte était le même que celui de R. Simmen
[64].
Une nouvelle
Convention sur le commerce du bois tropical a été adoptée par 23 pays producteurs et 27 pays consommateurs, dont la Suisse. Ce texte prévoit notamment que, d'ici l'an 2000, toutes les essences doivent provenir de forêts dont l'exploitation est autorisée et contrôlée. Même si, dans une déclaration séparée, les pays industrialisés ont affirmé vouloir s'appliquer les mêmes exigences pour les arbres feuillus, les pays en voie de développement ont regretté que les bois non-tropicaux ne soient pas inclus dans la convention et ont considéré ceci comme une discrimination économique à leur égard
[65].
Afin de résoudre le problème du manque de fonds publics pour assumer de façon satisfaisante la protection des biens culturels, un groupe d'experts institué par l'administration fédérale a proposé, dans une étude, un modèle alternatif de prise en charge du patrimoine helvétique. Pour les biens privés, la solution serait de favoriser la protection grâce à des
incitations sur le plan fiscal et non plus uniquement par le biais de subventions. Il s'agirait également, pour les pouvoirs publics, de ne plus considérer le patrimoine uniquement sous son angle historique, mais comme un élément à part entière de l'économie de la construction ou du tourisme
[66].
En automne 1993, de violents orages ont créé d'importantes inondations au Tessin et en Valais, provoquant des dégâts d'un montant s'élevant à plusieurs centaines de millions de francs. Après avoir dépêché l'armée sur place, la Confédération s'est engagée à utiliser toutes les possibilités de subventionnement pour participer financièrement à l'effort des cantons touchés. Le Conseil fédéral a également proposé d'octroyer une
aide fédérale extraordinaire pour réparer les dommages dus aux intempéries. Sous forme d'arrêté, ce projet consiste en des contributions aux coûts des travaux de première urgence, des travaux de déblaiement, de remise en état des routes n'appartenant pas aux réseaux national ou principal, d'ouvrages de protection contre les crues, des infrastructures et des bâtiments et installations officiels. Par ce biais, la Confédération devrait participer à hauteur de 80% des dépenses à la charge du secteur public, soit au total 209 millions de francs. Le parlement a adopté ce projet ainsi que la clause d'urgence à la quasi unanimité
[67].
[51] Presse du 8.9.94;
NZZ, 9.9.94.51
[52]
NQ, 21.3.94;
JdG, 23.3.94. Voir aussi
APS 1989, p. 181 s.,
1991, p. 197 et
1993, p. 185.52
[53]
NQ et
24 Heures, 25.3.94.53
[54]
BüZ, 20.7, 29.7, 13.8, 7.9 et 8.9.94;
Bund, 20.7 et 23.9.94;
NZZ, 22.7, 23.8, 21.9 et 18.11.94;
LNN, 17.8, 10.9, 15.9 et 11.10.94;
NQ, 23.8.94;
CdT, 16.9.94;
NF, 20.9 et 30.9.94;
BZ, 22.9.94; presse des 27.9, 23.11 et 26.11.94;
LZ, 30.9.94;
24 Heures, 10.12.94.54
[55] Presse des 13.12 et 21.12.94;
NQ, 14.12.94.55
[56]
BO CE, 1994, p. 1342 ss.56
[57]
BO CE, 1994, p. 203 ss. et 862; presse des 7.1 et 11.3.94. Voir aussi
APS 1989, p. 181,
1990, p. 194,
1991, p. 197 s.,
1992, p. 195 s. et
1993, p. 185 s.57
[58]
BO CN, 1994, p. 1119 ss. et 2432 ss.;
SGT et
Bund, 20.4.94; presse du 17.6.94;
BaZ, 23.9.94. Peu avant le débat parlementaire, les principales organisations de protection de l'environnement ont protesté énergiquement contre toute tentative de démantèlement de leur droit de recours et ont brandi l'arme du référendum à cet effet: presse du 2.2.94.58
[59]
FF, 1994, III, p. 189 ss.;
BaZ, 26.5.94;
NZZ, 27.5.94. Voir aussi
APS 1992, p. 186.59
[60]
BO CE, 1994, p. 937 ss.;
BO CN, 1994, p. 1337 ss.;
NZZ, 5.9.94;
BaZ, 16.9.94; presse des 22.9 et 29.9.94.60
[61]
FF, 1994, II, p. 366 ss.;
BO CN, 1994, p. 963 s.;
BO CE, 1994, p. 930.61
[62]
FF, 1994, III, p. 917 ss.;
BO CE, 1994, p. 863;
BO CN, 1994, p. 2376 s.;
BaZ, 26.5.94;
NZZ, 27.5.94.62
[63] Presse du 13.9.94.63
[64]
BO CN, 1994, p. 1381 ss.;
NZZ, 21.1, 29.1, 12.3, 2.9 et 16.9.94;
Bund, 22.1, 27.1 et 21.5.94;
SGT, 21.6.94;
Ww, 4.8.94; presse du 22.9.94. Voir aussi
APS 1993, p. 186.64
[65]
NZZ, 27.1.94;
Bund et
BZ, 28.1.94.65
[66] Presse du 16.11.94.66
[67]
FF, 1994, II, p. 1275 ss.;
BO CN, 1994, p. 1007 ss., 1117 et 1248 s.;
BO CE, 1994, p. 664 ss., 735 et 775; presse des 15.3, 5.5 et 14.6.94.67
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