Année politique Suisse 1995 : Infrastruktur und Lebensraum / Verkehr und Kommunikation
Trafic routier
Le Conseil national a adopté le postulat Loeb (prd, BE) invitant le gouvernement à étudier la possibilité de créer, dans les quartiers périphériques des grands centres urbains, des
zones oranges analogues aux zones bleues qui, à la différence de ces dernières, permettraient une durée de stationnement plus longue (par exemple de deux à trois heures). Le but de cette mesure est de permettre à ceux qui ne sont que de passage pour quelques heures dans les centres-villes de parquer dans la périphérie leur véhicule et d'emprunter les transports publics, ce que les zones bleues ne permettent pas faute de temps
[20].
Le Conseil des Etats a transmis une motion Loretan (prd, AG) chargeant le Conseil fédéral de soumettre un projet de modification de la loi sur la circulation routière qui permette de déléguer aux cantons un certain nombre de tâches ayant trait à la circulation. Selon le motionnaire, cette délégation, qui toucherait entre autres les services de contrôle technique des véhicules appartenant à la Confédération (PTT et armée), permettrait de substantielles économies. Le motionnaire demande également de créer les bases légales nécessaires à la privatisation des différents services liés à la circulation routière.
Le Conseil national a rejeté une motion Friderici (pl, VD) et une motion Martin (prd, VD) demandant au gouvernement d'autoriser la circulation sur l'ensemble du pays des
camions de plus de 28 tonnes transportant du bois, ce afin de relancer l'économie forestière. Il a suivi en effet l'avis du gouvernement ainsi que celui de sa commission pour lesquels déroger à la limite des 28 tonnes uniquement pour les transporteurs de bois constituerait une inégalité de traitement injustifiable. La Chambre du peuple a également rejeté pour des raisons similaires une motion Deiss (pdc, FR) demandant au Conseil fédéral d'
assouplir, en faveur des transporteurs indigènes de légumes,
les dispositions interdisant la circulation pendant la nuit et le dimanche, ce afin de permettre des temps de livraison plus courts
[22].
Par ailleurs, la presse a révélé que la limite des 28 tonnes connaissait d'importantes failles. Selon elle, pas moins de
60 000 trajets illicites seraient effectués
par des 40 tonnes chaque année, la plupart transitant par la Suisse romande. L'Office fédéral de la police a demandé aux polices cantonales d'effectuer des estimations au sujet de ces infractions. Il a en outre appelé les cantons à intensifier les contrôles
[23].
Au milieu de l'année, le chef du DFTCE a mis en consultation un projet de loi concernant la taxe poids lourd liée aux prestations. Cette dernière remplacerait l'actuelle taxe forfaitaire, conformément à l'adoption par le peuple et les cantons en 1994 d'un article constitutionnel autorisant la Confédération à mettre sur pied une taxe de ce type. Selon le projet du gouvernement, les camionneurs suisses et étrangers circulant sur le territoire helvétique devraient débourser quelque 1,6 centime par tonne et par kilomètre parcouru. Cette nouvelle mesure fiscale permettrait de dégager quelque 750 millions de francs par année, soit quatre fois plus que le produit de la taxe actuelle. A. Ogi a présenté cette nouvelle taxe poids lourd comme l'une des mesures d'application de l'initiative des Alpes ainsi que comme l'un des instruments fiscaux permettant le financement des NLFA. Il a également souligné que son projet reposait avant tout sur le principe de la vérité des coûts, le montant de la taxe ayant été calculé pour qu'une meilleure couverture des coûts du transport routier soit garantie. Ainsi, certains coûts internes, tels que ceux d'infrastructure, de même que certains coûts externes, tels que ceux dus aux accidents, au bruit ou encore ceux liés aux dommages aux bâtiments résultant de la pollution, ont été pris en compte. Les autres coûts liés à l'environnement et à la santé ne seraient en revanche pas couverts. Le ministre helvétique des transports a en outre fait valoir que cette taxe avait la faveur des pays membres de l'UE, puisque, d'une part, elle s'appliquait également aux camions helvétiques et européens et que, d'autre part, ces derniers envisageaient la mise sur pied d'une taxe similaire au sein de l'Union. Quant à la réalisation technique de cette redevance, le projet du DFTCE prévoit qu'elle se ferait au moyen d'un compteur électronique dont chaque poids lourd devrait être muni.
Lors de la
procédure de consultation, les réactions au projet du gouvernement ont été plutôt négatives. L'Association suisse des transports routiers (ASTAG) y a réagi de manière très critique, menaçant même de lancer un référendum si le Conseil fédéral ne revoyait pas à la baisse le montant de la taxe. Elle a mis en cause notamment la hausse trop importante à ses yeux des charges que cette taxe signifierait et qui entraînerait une chute de la compétitivité des entreprises de transports suisses. L'ASTAG, de concert avec l'USAM, a également fait valoir que si le transport routier signifiait des coûts non négligeables pour la collectivité, il était par ailleurs facteur de bien-être économique, lequel serait menacé par les conséquences de cette taxe sur les prix et sur la consommation. L'Automobile Club suisse (ACS) et le Touring Club suisse (TCS) ont quant à eux mis en doute la validité des calculs du DFTCE concernant les coûts du transport routier. Les partis bourgeois n'ont guère accueilli plus favorablement le projet, estimant, d'une part, que le montant de la taxe était trop élevé, et, d'autre part, que son introduction n'avait de sens que si l'UE adoptait une redevance similaire. L'UDC a en outre estimé que cette taxe désavantagerait encore davantage les régions montagneuses et périphériques, lesquelles dépendent plus du transport routier. Les seules réactions positives sont provenues des partis écologiste et socialiste ainsi que de l'Association Transport Environnement (ATE) et du Service d'information pour le transport public (Litra). Le PS et l'ATE ont même souhaité que le montant de la taxe soit progressivement augmenté jusqu'en 2004, date de la mise en vigueur de l'initiative des Alpes, afin de s'assurer, d'une part, que le transport routier couvre l'ensemble de ses coûts et, d'autre part, que cet instrument soit à même d'inciter les transporteurs routiers à utiliser le rail. Les cantons ont quant à eux eu des réactions contrastées. Les cantons de montagne et ceux périphériques, notamment ceux du Jura et des Grisons, ont demandé de pouvoir être exemptés, ne serait-ce que partiellement, de la nouvelle taxe, arguant principalement que celle-ci frappait inéquitablement les régions qui ne disposent pas d'infrastructures ferroviaires suffisantes. Les cantons urbains ont en revanche été plus favorables au projet du gouvernement, même s'ils ont exprimé leurs craintes quant aux coûts supplémentaires que la mise en oeuvre de la loi entraînerait pour leurs finances
[25].
Face à cet accueil plutôt négatif, le Conseil fédéral a retiré son projet, ayant l'intention néanmoins d'en proposer un plus consensuel dans le courant 1996. Il a relevé que nombre de critiques étaient injustifiées. Ainsi, au sujet des conséquences de la taxe pour l'économie, il a estimé que le renchérissement ne dépasserait pas 0,2%. De même, au sujet des conséquences pour les régions de montagne, il a souligné qu'une partie du produit de la redevance aurait été plus spécialement attribuée aux cantons de ces régions.
A son tour, la grande Chambre a adopté le projet de révision de la loi sur les amendes d'ordre visant notamment à adapter celles-ci au coût de la vie. L'opposition à cette révision est provenue essentiellement des députés automobilistes et libéraux qui ont proposé de ne pas entrer en matière, estimant que le projet du gouvernement ne poursuivait qu'un but fiscal. La majorité de la Chambre du peuple a estimé cependant que cette hausse était indispensable pour rétablir l'effet dissuasif des amendes d'ordre. Elle a en outre rejeté des propositions de plusieurs députés bourgeois visant à élever le montant maximal des amendes non pas de 100 à 300 francs, mais uniquement de 100 à 250 francs, voir 200 francs. Enfin, elle a suivi la volonté du Conseil des Etats de ne pas encourager la délation, puisqu'elle a également biffé la possibilité de punir un contrevenant sur dénonciation d'un particulier.
La seule divergence importante entre les deux chambres a concerné la possibilité pour le gouvernement d'adapter tous les cinq ans les amendes au renchérissement. Sur proposition d'une minorité bourgeoise de sa commission et contrairement à la petite Chambre qui avait approuvé sur ce point le projet du gouvernement, le Conseil national n'a pas voulu que les augmentations éventuelles à venir échappent au parlement. Le Conseil des Etats s'est rallié, lors d'une seconde lecture, à cette décision.
Avant même l'élimination des divergences entre les deux Conseils, le gouvernement, désireux d'aller de l'avant, a mis en consultation l'
ordonnance d'application relative à cette révision. Conformément aux déclarations du chef du DFJP devant le parlement selon lesquelles le montant des amendes augmenterait non pas de manière linéaire, mais selon le danger que le contrevenant fait encourir aux autres usagers, le projet du Conseil fédéral a notamment proposé que les amendes pour excès de vitesse soient augmentées d'un montant variant suivant le lieu de l'infraction. Ainsi, un dépassement de vitesse de 20 km/h en zone urbaine coûtera 300 francs au contrevenant, 240 francs hors de localités et 180 francs sur l'autoroute. Le projet du gouvernement prévoit également une hausse très importante des amendes pour stationnement illicite - jusqu'à dix fois les montants actuels pour un stationnement sur un trottoir ou sur une piste cyclable. Les partis et les cantons ont accueilli favorablement l'ordonnance proposée par l'exécutif. Seule la proposition du Conseil fédéral de ne plus faire poursuivre pénalement les excès de vitesse de 16 à 20 km/h a été vivement critiquée par les cantons ainsi que par l'Association des victimes de la route. Le DFPJ a déclaré que le projet final de l'ordonnance correspondrait sur ce point au statu quo. L'ordonnance devrait entrer en vigueur en automne 1996
[29].
Le Conseil national a classé un postulat
Wiederkehr (adi, ZH) demandant au gouvernement de préciser, dans l'
ordonnance sur la construction et l'équipement des véhicules routiers, que seules les calandres fabriquées avec des matériaux flexibles amortissant les chocs sont autorisées. Il a été convaincu par les explications du Conseil fédéral selon lesquelles les bases légales nécessaires existent déjà
[30].
La décision du Conseil fédéral de lever la limitation la vitesse à 80 km/h sur l'autoroute de contournement de la ville de Lucerne a suscité de vifs émois en Suisse centrale. Cette décision, prise suite à une plainte du TCS auprès du Conseil fédéral, a été en effet considérée comme une intrusion de la Confédération dans les compétences cantonales, la loi autorisant les cantons à limiter à 80 km/h la vitesse à proximité des grands centres urbains. Ils ont également souligné que cette mesure avait prouvé son efficacité puisque tant les émissions toxiques, le bruit que les accidents avaient diminué. Le gouvernement a quant à lui justifié sa décision en affirmant au contraire que limiter la vitesse pour des raisons écologiques constituait désormais une mesure disproportionnée. Pour le Conseil fédéral en effet, la plupart des voitures étant désormais équipées de catalyseurs, la quantité de substances polluantes émises ne dépendait plus autant qu'auparavant de la vitesse des véhicules. Le Conseil d'Etat lucernois s'est résolu à appliquer la décision, estimant qu'un recours auprès du Conseil fédéral n'avait que peu de chances d'aboutir. Il a également envisagé de construire de nouvelles parois antibruit. La décision de l'exécutif a par ailleurs plongé dans l'incertitude le canton de Berne, qui, ayant introduit une telle limitation de vitesse aux abords de sa capitale, doit également faire face à une plainte du TCS. Le canton de Zurich, prévoyant d'introduire cette mesure, a aussi dénoncé le flou juridique que créait la décision du gouvernement au sujet du partage des compétences entre cantons et Confédération.
A l'instar du Conseil des Etats en 1993, le Conseil national a décidé de ne pas donner suite à une
initiative du canton de Thurgovie qui demandait d'introduire les limitations de vitesse dans la loi sur la circulation routière. L'objectif déclaré de l'initiative était d'
accorder au parlement la compétence dans ce domaine, qui relève actuellement du Conseil fédéral et des cantons. La grande Chambre a suivi l'avis de sa commission qui estimait qu'il était plus judicieux de laisser à ces derniers la possibilité de réagir rapidement, et qu'il était peu souhaitable d'aboutir à une politisation de cette question
[32].
Le Conseil des Etats a adopté le projet concernant certaines modifications de la
loi sur la circulation routière et
de celle sur la surveillance des assurances. Ces amendements devraient permettre de libéraliser le marché de l'assurance responsabilité civile pour les véhicules ainsi que d'adapter la législation helvétique au droit européen. Le Conseil des Etats s'est contenté d'introduire dans la loi la possibilité pour les assurés de résilier dans un délai plus bref leur contrat d'assurances. Il a en effet estimé que cette mesure se justifiait, étant donné les possibles hausses de primes que le système pourrait signifier pour certains assurés ainsi qu'en raison de la nécessité de mieux faire jouer la concurrence entre les différentes compagnies. A son tour, la grande Chambre a facilement adopté le projet du gouvernement. Elle a en outre suivi la petite Chambre quant à la modification introduite
[33].
[20]
BO CN, 1995, p. 954 s.20
[22]
BO CN, 1995, p. 2096 ss. (Friderici et Martin) et p. 2659 s. (Deiss). Au sujet de la motion Martin, voir aussi
APS 1994, p. 121.22
[23] Presse du 19.4.95. Les données fournies en cours d'année ont confirmé que de nombreux trajets illégaux étaient effectués, même si les polices cantonales n'ont pas été à même de donner des chiffres précis:
JdG, 29.4.95;
Bund, 30.5.95. Par ailleurs, cette question a fait l'objet d'une interpellation Vollmer (ps, BE) au CN:
BO CN, 1995, p. 1670.23
[25]
BüZ, 17.10.95;
BaZ, 25.10.95; presse du 2.11.95;
QJ, 18.11.95;
Lib., 23.11.95.25
[29] Presse du 12.4.95;
24 Heures, 2.6 et 7.10.95;
BaZ, 4.7.95;
NZZ, 24.7.95;
NF, 18.12.95.29
[30]
BO CN, 1995, p. 953 s.30
[32]
BO CN, 1995, p. 499 ss. Cf. également
APS 1993, p. 155.32
[33]
BO CE, 1995, p. 403 ss., 592 ss. et 797;
BO CN, 1995, p. 1210 ss. et 1692;
FF, 1995, III, p. 514 ss. Voir également
APS
1994, p. 156.33
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