Année politique Suisse 1997 : Allgemeine Chronik / Schweizerische Aussenpolitik
Europe: EEE et UE
Après s'être penché en 1996 sur l'initiative populaire "Négociations d'adhésion à l'UE: que le peuple décide!" des Démocrates suisses/Lega, le Conseil national a entamé l'examen de l'initiative concurrente intitulée "Pour notre avenir au coeur de l'Europe". Lancé par les jeunes du Comité "Né le 7 décembre" au lendemain du scrutin négatif de 1992 sur l'entrée de la Suisse au sein de l'Espace Economique Européen, ce texte propose de déléguer au seul gouvernement la faculté de négocier, conclure et ratifier l'accession de la Confédération à l'EEE. Bien qu'ayant permis de réactiver le débat sur l'intégration de la Suisse au sein de l'Europe, le traitement de l'initiative des jeunes n'a fait que confirmer une fois de plus la polarisation persistante des positions partagées par les différents groupes parlementaires sur cette délicate question. Contraints de rejeter l'initiative compte tenu de son non respect des formes constitutionnelles en matière d'adhésion aux traités internationaux, les pro-européens n'ont cependant pas manqué de saluer la volonté politique des jeunes initiants d'enrayer la logique d'isolement dans laquelle se trouve plongée la Suisse depuis cinq ans. Les nombreuses interventions des députés favorables à l'Europe ont à ce titre laissé entrevoir une légère différence d'appréciation quant à la voie à suivre en matière d'intégration: Si les groupes socialiste et libéral - estimant que l'EEE ne représente plus une étape suffisamment attrayante en raison des modifications subies par cet accord depuis 1992 - se sont dès lors clairement prononcés en faveur de l'adhésion à terme de la Suisse à l'Union européenne, plusieurs députés radicaux et démocrates-chrétiens ont tenu à défendre l'alternative médiane que constitue à leurs yeux l'option EEE bis. L'ensemble des députés proeuropéens n'ont en revanche parlé que d'une seule voix concernant la priorité absolue à accorder aux négociations bilatérales en tant que première étape du rapprochement de la Suisse vers l'Europe.
Si les opposants traditionnels à toute forme d'intégration - à savoir, le groupe UDC dans sa majorité, le parti de la liberté et les Démocrates suisses/Lega - ont à leur tour invoqué comme principal argument de rejet le non respect des dispositions constitutionnelles en matière de traités internationaux tel que consacré par l'initiative des jeunes, certains d'entre eux n'ont pas manqué de réitérer leurs critiques de fond sur la construction européenne. Ayant fait la quasi-unanimité des voix contre elle en raison des moyens retenus par les initiants dans leur quête d'une Suisse au coeur de l'Europe, l'initiative du Comité "Né le 7 décembre" a finalement été rejetée, sans contre-projet, par 104 voix contre 6, 42 députés ayant quant à eux préféré s'abstenir. Compte tenu des différentes pressions exercées par le monde politique sur le mouvement "Né le 7 décembre", et au vu du faible soutien accordé par la grande Chambre à leurs revendications, les jeunes proeuropéens se sont alors résignés à retirer leur initiative.
Rejetée en 1996 par le parlement pour les mêmes motifs d'ordre constitutionnel que ceux invoqués contre l'initiative des jeunes, l'initiative des Démocrates suisses/Lega "
Négociations d'adhésion à l'UE: que le peuple décide!" a en revanche été soumise au verdict populaire au début du mois de juin. Compte tenu de l'hostilité unanime des partis gouvernementaux et de l'Action pour une Suisse indépendante et neutre (ASIN) à l'encontre de ce texte, la campagne qui précéda le scrutin fut étonnamment calme en comparaison des débats enflammés que suscite généralement la question européenne. Craignant de pécher par excès d'optimisme à un moment où l'ensemble des observateurs s'accordaient à reconnaître l'échec programmé de l'initiative, huit associations proeuropéennes - regroupées au sein d'une "Plate-forme suisse Oui à l'Europe" - décidèrent néanmoins de relancer le débat sur l'intégration en publiant à cette fin un manifeste appelant la population à rejeter massivement l'initiative des Démocrates suisses/Lega, d'une part, et prônant un rapprochement rapide de la Confédération vers l'UE, d'autre part. Face à cette offensive qui reçut l'appui de nombreux parlementaires, les auteurs de l'initiative créèrent à leur tour un comité de soutien à leurs revendications auquel ne vinrent toutefois s'associer que des représentants de l'Union démocratique fédérale (UDF) et du parti catholique populaire (KVP). Contrairement aux craintes partagées par certains politiciens quant à un brusque réflexe de fermeture de la part de l'opinion publique, ce déséquilibre des forces en présence fut largement confirmé le soir de la votation, puisque l'initiative des Démocrates suisses/Lega a été
très nettement rejetée par le peuple - 1 189 440 voix contre 416 720 -, ainsi que par tous les cantons
[7].
L'
analyse Vox sur les résultats du scrutin a permis de mettre en évidence une prépondérance de votes négatifs dans tous les groupes de population observés: Ainsi, ni le sexe, ni l'âge, ni le statut professionnel ou encore la religion ne semblent avoir joué un rôle significatif dans l'attitude du vote. Un rejet équivalent de l'initiative a par ailleurs été observable au sein des grandes villes et à la campagne, de même qu'en Suisse alémanique et en Suisse romande. Il s'est toutefois avéré que l'opposition aux revendications des Démocrates suisses/Lega a été nettement moins virulente parmi les personnes se sentant proches de l'UDC qu'au sein des sympathisants des autres partis gouvernementaux. L'analyse du comportement du vote par rapport à l'axe idéologique gauche-droite a d'ailleurs révélé que le rejet de l'initiative a eu tendance à s'accroître à mesure que l'on se rapprochait de la gauche de l'échiquier politique. L'examen des raisons avancées par les votants pour justifier leur décision a finalement montré que la question de l'adhésion de la Suisse à l'UE n'a joué qu'un rôle secondaire dans le résultat du scrutin, du fait que les opinions se sont avant tout formées sur la base des motifs d'ordre constitutionnel invoqués par les autorités. Ainsi, l'analyse Vox est parvenue à la conclusion que le rejet à plus de 70% de l'initiative ne pouvait en aucun cas être interprété comme un témoignage d'ouverture en faveur de l'entrée de la Confédération au sein de l'Union européenne
[8].
Initiative populaire "Négociations d'adhésion à l'UE: que le peuple décide!"
Votation du 8 juin 1997
Participation: 35,4%
Non: 1 189 440 (74,1%)
Oui: 416 720 (25,9%)
Mots d'ordre:
- Oui: PdL, DS, Lega dei Ticinesi, UDF, Parti catholique populaire.
- Non: PS, PRD, PDC, UDC, PES, PLS, PEP, AdI; Vorort, Centre patronal, USS.
Les débats sur une éventuelle adhésion de la Suisse à l'EEE (voie EEE bis), voire à l'Union européenne ont été, en 1997, largement évincés par la priorité absolue accordée par la classe politique et par les médias aux négociations bilatérales. La perspective de leur conclusion avant la fin juin, puis les efforts déployés par la suite en vue de relancer le processus bilatéral dans l'espoir de le mener à terme avant la fin de l'année ont en effet relégué au second plan les discussions concernant un rapprochement plus significatif de la Confédération vers l'Europe. Peu satisfaits de cette absence de vision à moyen et long termes, les partisans de l'adhésion de la Suisse à l'UE ont néanmoins tenté à plusieurs reprises de relancer le débat sur l'intégration européenne. A ce titre, la "Plate-forme suisse Oui à l'Europe" - née du rassemblement de huit organisations proeuropéennes - invita le Conseil fédéral à réactiver sa demande d'adhésion à l'Union sitôt les négociations bilatérales achevées. Cette revendication, formulée au lendemain du vote sur l'initiative des Démocrates suisses/Lega, fut reprise par la suite par le comité "Né en 1848", auteur d'un manifeste en faveur de l'entrée de la Suisse au sein de l'UE et auquel plus de 2000 personnalités des mondes politique, économique, médiatique et culturel apposèrent leur signature.
Le mutisme quasi total dans lequel s'était jusqu'ici retranchée la classe politique à l'égard de toute tentative plus ambitieuse de rapprochement de la Suisse vers l'Europe fut soudainement brisé à la suite des difficultés rencontrées dans le cadre des négociations bilatérales au début du mois de novembre. Face à l'impasse qui se dessinait alors, les conseillers fédéraux Jean-Pascal Delamuraz et Moritz Leuenberger se déclarèrent en effet favorables à l'ouverture d'un nouveau
débat public sur l'adhésion de la Confédération à l'UE. Cette impulsion en faveur de la relance du processus d'intégration ne fut toutefois que de courte durée en raison de la reprise active des pourparlers à l'échelon bilatéral dont le caractère prioritaire fut réaffirmé par le Conseil fédéral à la fin du mois de novembre
[10].
Trois ans après son entrée en vigueur, le Traité sur l'Espace économique européen (
EEE) a fait l'objet d'un
bilan extrêmement positif à l'occasion d'une conférence de presse donnée par le secrétaire général de l'AELE, Kjartan Johannsson. Reconnaissant que les pays de l'AELE membres de l'EEE - à savoir la Norvège, l'Islande et le Liechtenstein - sont contraints de s'aligner sur le droit européen, le diplomate islandais a cependant déclaré que cette absence de droit de codécision était en grande partie compensée grâce à la participation active de ces trois Etats aux travaux des quelque 200 comités chargés d'élaborer la législation communautaire. Concernant la Suisse, K. Johannsson a regretté que celle-ci ne profite pas davantage de la possibilité qui lui est offerte de faire entendre son point de vue lors des réunions internes de l'AELE consacrées à l'EEE. A l'occasion de la commémoration du 5e anniversaire du refus par le peuple suisse d'adhérer à l'EEE, le député UDC et président de l'ASIN,
Christoph Blocher, a pour sa part apprécié d'une toute autre manière la valeur de cet accord. Qualifiant ce dernier de "contrat colonial" qui aurait non seulement conduit en Suisse à une restriction des droits populaires, mais aussi à une diminution de la prospérité et du niveau des salaires, le tribun zurichois s'est dès lors réjoui de la voie en solitaire empruntée par la Confédération depuis 1992. Il l'a d'ailleurs fait savoir dans le cadre d'une opération de relations publiques sans précédent au cours de laquelle une brochure d'information louant les vertus de l'"Alleingang" a été acheminée auprès de 3,6 millions de ménages. L'appréciation de la situation portée par le député UDC n'a cependant pas manqué de trancher avec les constats nettement plus pessimistes dressés par le monde économique et la classe politique dans sa majorité
[11].
Le Conseil des Etats a décidé de ne pas donner suite à l'initiative déposée fin 1995 par le
canton du Jura qui demandait que la Confédération réactive la demande d'ouverture de négociations d'adhésion avec l'Union européenne et qu'elle s'engage, indépendamment du processus bilatéral, pour de rapides pourparlers en vue d'une entrée de la Suisse au sein de l'UE. Pareille requête a en effet été jugée malvenue en raison des conséquences néfastes qu'elle ne manquerait pas d'avoir sur le bon déroulement des négociations bilatérales sectorielles ainsi que sur le climat politique en Suisse
[12].
Pour le détail des négociations bilatérales dans le domaine des transports, voir infra, part. I, 6b (Politique des transports).
Trois ans après leur lancement officiel, les négociations bilatérales sectorielles entre la Suisse et l'Union européenne n'ont toujours pas connu la percée décisive qui aurait permis aux deux parties de conclure d'ici à la fin 1997 un accord politique global dans les sept domaines faisant l'objet de pourparlers. Cette impossibilité d'élaborer un compromis qui puisse satisfaire à la fois les intérêts helvétiques et communautaires fut d'autant plus surprenante au regard des prévisions faites en début d'année quant à la conclusion probable des négociations avant l'été. Cependant, après avoir achoppé durant de nombreux mois sur l'épineux dossier de la libre circulation des personnes, le processus bilatéral s'est heurté à une
incompatibilité totale de vues entre négociateurs suisses et européens au sujet des
transports terrestres. Soucieuses de garantir le transfert du trafic de transit de la route au rail conformément aux exigences de la politique suisse en matière de transports, les autorités fédérales fixèrent dans le courant du mois de janvier à 600 francs le montant maximal des taxes à prélever à partir de 2005 sur chaque camion de 40 tonnes effectuant la traversée Bâle-Chiasso. Tablant pour leur part sur une ponction maximale de 340 francs pour le même trajet, les Quinze ne manquèrent pas de rejeter sans autre forme de procès les prétentions suisses qui furent qualifiées de prohibitives. Les divergences de vues entre la Berne fédérale et Bruxelles dans le domaine des transports routiers ne se limitèrent toutefois pas au seul montant des taxes, mais concernèrent également la clause de sauvegarde non fiscale et unilatérale demandée expressément par la Confédération ainsi que l'établissement d'un certain quota annuel de 40 tonnes autorisés à circuler sur le territoire suisse avant 2005. Compte tenu des profondes dissensions existant sur ces aspects bien précis du dossier des transports, les négociations bilatérales ne tardèrent pas à devenir le théâtre d'un
véritable bras de fer durant lequel la Suisse fut peu à peu amenée à revoir ses ambitions premières à la baisse, sous peine de provoquer la rupture définitive des pourparlers. Soumises à un ultimatum de la part de l'Union concernant le montant des taxes routières, les autorités fédérales proposèrent en avril d'imposer les poids lourds de manière différenciée en fonction de leurs émissions polluantes. Le système envisagé par la partie helvétique prévoyait à ce titre d'abaisser le niveau moyen des taxes à 460 francs (inflation non comprise), ce qui demeura cependant trop élevé aux yeux de la Commission européenne. L'intransigeance de l'UE à l'égard des positions défendues par la Suisse fut d'ailleurs couronnée par le refus des Quinze de convoquer en mai un Conseil extraordinaire des ministres européens des transports dont il était initialement attendu l'achèvement des négociations sectorielles dans ce domaine
[13].
Après l'intense activité diplomatique déployée jusqu'alors par les deux parties en vue d'achever les pourparlers bilatéraux avant l'été, l'annulation de cette réunion fut à l'origine d'une période de léthargie de quatre mois durant laquelle le rythme des rencontres entre les négociateurs suisses et européens connut un fort ralentissement. Sur le plan interne, cette
nouvelle crise du processus bilatéral fut diversement appréciée par les principaux acteurs de la scène politique suisse. La consternation que provoqua ce blocage parmi les milieux économiques conduisit ces derniers à revendiquer davantage de flexibilité de la part du gouvernement de manière à ce que les négociations puissent encore aboutir avant la fin 1997 et non pas en 1998 comme le laissa alors entrevoir le conseiller fédéral Moritz Leuenberger. A l'inverse des partis gouvernementaux qui ne tardèrent pas à réaffirmer leur soutien à la stratégie poursuivie par le Conseil fédéral, plusieurs formations politiques et associations aux sensibilités différentes, voire même contradictoires (ASIN, Association transport et environnement, PES, Comité de l'Initiative des Alpes) laissèrent quant à elles planer la
menace latente d'un référendum au cas où le gouvernement serait amené à faire de trop grandes concessions à l'UE dans l'optique de relancer les pourparlers en matière de transports. Soumis à des pressions tant sur le front intérieur qu'à la table des négociations, le Conseil fédéral s'est trouvé en fait tout au long de l'année dans la délicate position consistant à concilier les revendications très rigides des groupes à capacité référendaire sur le plan national avec les appels à la flexibilité sans cesse proférés par les Quinze
[14].
En dépit de la faible marge de manoeuvre dont elles disposaient, les autorités fédérales soumirent de
nouvelles propositions à l'Union dans le courant du mois d'octobre. Portant principalement sur des taxes routières ramenées à 410 francs en moyenne à partir de 2005, sur un subventionnement temporaire du trafic ferroviaire à travers l'arc alpin (à raison de 200 millions de francs par année au maximum dès 2006) ainsi que sur de solides clauses de sauvegarde unilatérales, cette offre fut parallèlement doublée d'exigences dans d'autres secteurs des négociations, à savoir l'octroi des 5e et 7e libertés (cabotage) aux compagnies aériennes suisses et la participation d'experts helvétiques aux différents comités chargés d'assister la Commission européenne et le Conseil des Quinze dans leurs travaux. Au terme d'un examen approfondi des diverses concessions accordées par la Confédération, les Quinze refusèrent cependant une nouvelle fois de convoquer un Conseil extraordinaire des ministres des transports qui aurait permis de lancer la phase finale des négociations. Face à ce camouflet qui devait anéantir définitivement tout espoir de conclure le processus bilatéral avant la fin de l'année, le gouvernement helvétique se déclara alors prêt à renoncer à l'établissement d'une clause de sauvegarde non fiscale en tant que mesure propre à éviter un afflux massif de poids lourds sur le territoire suisse. Bien que jugé de façon positive par la Commission européenne, ce nouveau signe d'ouverture de la part des autorités fédérales n'en demeura pas moins insuffisant aux yeux des ministres des affaires étrangères des Quinze qui - après avoir tiré un rapide bilan de l'ensemble des négociations en cours avec la Suisse à la fin du mois de novembre - réitérèrent leur intention de mener à bon port le processus bilatéral pour autant que la Confédération fasse preuve de davantage de flexibilité dans le domaine des transports. Cette pression constante exercée par les Quinze conduisit les autorités fédérales à assouplir une fois encore leurs prétentions en matière de fiscalité routière, puisque celles-ci laissèrent miroiter une éventuelle diminution de 250 à 200 francs du montant moyen des charges qui seront prélevées sur les poids lourds de 34 tonnes durant la période comprise entre 2001 et 2005. Réunis à la mi-décembre, les ministres européens des transports prirent acte avec satisfaction des pas importants accomplis par la Suisse depuis son offre du mois de janvier. En se déclarant prêts à continuer les négociations dans le secteur des transports terrestres sur la base des "coûts réels d'infrastructure", les Quinze s'attaquèrent cependant au fondement même de la politique des transports poursuivie par la Berne fédérale, puisque celle-ci vise l'internalisation des coûts externes liés au trafic routier
[15].
L'attention portée de manière quasi exclusive par les médias et le monde politique aux pourparlers sur les transports eut pour corollaire la mise en veilleuse de nombreux
points techniques non encore résolus dans les autres secteurs des négociations. En dépit du compromis politique auquel étaient parvenus négociateurs suisses et européens en décembre 1996, le domaine de la libre circulation des personnes a continué d'être l'objet de tractations sur différents points cruciaux. Parmi ceux-ci ont notamment figuré le calcul des seuils au-delà desquels la Suisse pourrait être habilitée à actionner la clause de sauvegarde lui permettant de freiner un éventuel afflux massif de ressortissants européens sur son marché du travail, le problème de la libéralisation de certaines prestations de service, l'éventuelle flexibilisation du régime d'accès à la propriété immobilière par des étrangers (Lex Friedrich) ainsi que différentes questions touchant au domaine des assurances sociales (assurance-maladie et assurance-chômage). Dans le cadre des pourparlers relatifs à l'agriculture, plusieurs Etats-membres de l'Union ont demandé à pouvoir bénéficier de concessions tarifaires supplémentaires pour des produits tels que l'huile d'olive, le vin, la viande et les fromages. Ces revendications se sont toutefois avérées d'une importance mineure en comparaison des doutes que l'UE a émis en fin d'année quant à la compatibilité de l'offre suisse avec les règles de l'OMC. A dire vrai, plusieurs points des négociations considérés jusqu'ici comme acquis furent soudainement remis en question par certains pays membres de l'Union, à l'image du système complexe de clauses de sauvegarde et de contingents provisoires élaboré en 1996 dans le domaine de la libre circulation des personnes. Signe d'un certain durcissement de la part des Quinze à l'égard d'un processus s'éternisant, cette nouvelle forme de pression opérée sur la Suisse par l'UE fut particulièrement patente au mois de novembre durant lequel Bruxelles déclara qu'aucun des sept dossiers n'avait alors atteint un degré de maturité qui puisse justifier le lancement, au niveau politique, de la phase finale des négociations. C'est toutefois dans l'optique d'aplanir les divergences restantes que les négociateurs suisses et européens élaborèrent en fin d'année un plan de travail commun comprenant une liste d'une trentaine de questions litigieuses à résoudre d'ici au mois de mars 1998
[16].
Lancés en 1996 lors de l'ouverture de la Conférence intergouvernementale (CIG), les travaux de
révision du Traité de Maastricht se sont poursuivis tant bien que mal jusqu'à la tenue en juin du Sommet d'Amsterdam (Pays-Bas) à l'issue duquel les dispositions adoptées par les Quinze se révélèrent nettement en deçà des objectifs initialement fixés. N'ayant notamment pu s'entendre sur les réformes institutionnelles à entreprendre au terme de cette rencontre, les pays membres de l'UE décidèrent alors de renvoyer cette question cruciale jusqu'à l'entrée des premiers Etats d'Europe centrale dans l'Union. Ce relatif échec de la rencontre d'Amsterdam fut néanmoins compensé dans une certaine mesure par le lancement officiel de l'élargissement de l'UE vers l'Europe de l'Est lors du Conseil européen de Luxembourg qui se déroula à la mi-décembre. Ainsi, les Quinze entameront dès avril 1998 des négociations d'adhésion avec la Pologne, la République tchèque, la Hongrie, la Slovénie, l'Estonie et Chypre qui pourraient intégrer l'Union à partir de 2004-2005. Les Etats d'Europe orientale candidats à l'adhésion lors d'une seconde phase - à savoir, la Slovaquie, la Roumanie, la Bulgarie, la Lituanie et la Lettonie - bénéficieront pour leur part de négociations préliminaires dans le cadre de la
Conférence européenne dont le premier sommet se tiendra à Londres en mars 1998. Bien que ce processus d'élargissement s'annonce d'ores et déjà comme une entreprise semée d'embûches, il n'en pose pas moins la question de l'isolement grandissant de la Suisse au sein d'une Europe qui ne cesse de s'étendre
[17].
Consécutivement à l'entrée de l'Italie puis de l'Autriche dans l'
Espace Schengen, la Confédération fait désormais figure d'île au sein de cette vaste zone à laquelle participent également le Benelux, l'Allemagne, la France, l'Espagne et le Portugal. Analysant les répercussions que cette situation d'insularité pourrait avoir pour la Suisse, le Département fédéral de justice et police a redouté que le pays se transforme en une plaque tournante européenne pour le crime organisé ou en une terre de prédilection pour les réfugiés n'ayant pu obtenir l'asile auprès de l'un des neuf Etats-membres de l'Espace Schengen. Dans l'optique d'éviter ces conséquences fâcheuses pour la Confédération, le Conseil fédéral a alors décidé à la fin du mois d'octobre d'entamer des négociations avec l'Italie sur la coopération transfrontalière dans le domaine de la sûreté intérieure et sur la conclusion d'un accord de réadmission visant à combattre les mouvements migratoires illégaux. Concernant l'Autriche, il est à relever que le ministre de l'intérieur Karl Schlögl et le conseiller fédéral Arnold Koller ont signé en fin d'année une déclaration d'intention en vue d'instituer une meilleure coopération le long de la frontière séparant les deux pays
[18].
A la suite d'un rapport rédigé par une commission d'enquête du Parlement européen dénonçant le rôle important joué par la Suisse dans les affaires de
fraude douanière au sein de l'UE, la Confédération a été l'objet de fortes pressions de la part de l'Union afin que les autorités fédérales coopèrent davantage avec les instances communautaires compétentes. Rejetant en grande partie les accusations qui lui étaient adressées, la Suisse a néanmoins consenti à signer un accord sur une assistance administrative renforcée dans le domaine douanier. Ce protocole qui enjoint les autorités fédérales à fournir à l'UE des renseignements sur le trafic de marchandises transitant sur le sol helvétique devrait permettre à la Suisse de réduire sa fonction de "plaque tournante" dans certains trafics, comme celui des cigarettes
[19].
[7]
FF, 1997, IV, 334 ss.; presse des 18.2, 21.4, 6.5, 30.5, 31.5, 4.6, 5.6 et 9.6.97;
24 Heures, 3.3, 6.5, 10.5 et 2.6.97;
SGT, 8.4 et 20.5.97;
NZZ, 21.4, 30.4 et 12.5.97;
JdG, 28.4.97;
NLZ, 29.4 et 7.5.97;
AZ, 3.5 et 24.5.97;
SZ, 10.5.97;
TW, 21.5.97;
Lib., 24.5 et 6.6.97;
NF, 28.5.97. Cf. également
APS 1996, p. 62 s.7
[8] M. Delgrande / W. Linder,
Analyse des votations fédérales du 8 juin 1997, Vox no 61, Berne 1997.8
[10] Presse des 8.11 et 29.12.97;
NQ, 10.11.97;
Lib., 13.11 et 4.12.97.10
[11]
JdG, 28.2, 1.5 et 5.12.97;
NZZ, 1.3.97; presse du 6.12.97;
NQ, 8.12.97;
24 Heures, 30.12.97.11
[12]
BO CE, 1997, p. 618 s.; presse du 18.6.97. Voir aussi
APS 1995, p. 72.12
[13]
BaZ, 17.1.97;
24 Heures, 20.1.97;
Lib., 23.1.97;
SoZ, 26.1 et 25.5.97;
JdG, 8.2.97; presse des 23.1, 19.2, 11.3, 12.3, 11.4, 14-17.4, 21.4, 25.4, 26.4, 28-30.4, 16.5, 21.5, 23.5 et 24.5.97;
NQ, 27.1 et 24.2.97;
Lib., 10.3.97;
Bund, 14.3.97;
Express., 12.4.97;
SN, 21.4.97;
NZZ, 24.4.97.13
[14]
NQ, 12.3, 11.4, 20.5 et 16.6.97;
TW et
Bund, 13.3.97;
Bund, 10.4 et 13.5.97; presse des 23.4, 28.4, 14.5, 15.5, 17.5, 21.5, 27.5, 29.5, 30.5, 2-4.6, 6.6, 14.8, 16.9, 4.12 et 6.12.97;
JdG, 2.6 et 1.9.97.14
[15] Presse des 4.6, 5.6, 18.6, 8.7, 17.7, 25.7, 8.10, 11.10, 14.10, 15.10, 17.10, 21-24.10, 30.10, 1.11, 3.11, 6.11, 7.11, 11.11, 15.11, 19-21.11, 25.11, 12.12, 13.12 et 18.12.97;
24 Heures, 10.6.97;
Lib., 11.6 et 4.12.97;
NQ, 16.6, 12.8, 15.9 et 15.12.97;
NZZ, 2.12.97.15
[16]
BaZ, 25.1.97;
Express, 18.2 et 21.11.97; presse des 19.2, 15.3, 19.4 et 18.12.97;
Bund, 14.3.97;
Lib., 26.3, 23.4, 29.4, 25.10, 10.11 et 24.11.97;
24 Heures, 18.4.97;
JdG, 25.4 et 11.9.97;
NZZ, 18.9.97;
QJ, 6.12.97. Voir aussi
APS 1996, p. 65 ss.16
[17]
TA, 11.3, 25.3, 3.10, 19.12 et 20.12.97;
NQ, 26.3, 20.6, 15.7, 18.7, 25.11, 12.12 et 15.12.97;
JdG, 3.6 et 13.6.97; presse du 17.7.97;
24 Heures, 9.9.97;
QJ, 13.10.97;
NZZ, 15.12.97. Cf. également
APS 1996, p. 68. Signé au mois d'octobre, le Traité d'Amsterdam consacre notamment la reconnaissance de normes nationales en matière de protection de l'environnement ainsi qu'un renforcement des droits fondamentaux. Par ailleurs, les Accords de Schengen font désormais partie de l'acquis communautaire:
JdG, 28.11.97. 17
[18]
NQ, 7.7 et 24.10.97; presse des 19.7, 18.11 et 6.12.97;
TA, 22.7.97;
SGT, 23.7.97;
NF, 24.7 et 27.10.97;
24 Heures, 25.7 et 1.12.97;
CdT, 25.10 et 20.11.97;
JdG, 30.10.97;
NZZ, 20.12.97. Voir aussi
APS 1995, p. 74.18
[19] Presse des 10.1, 16.1, 24.1, 29.1, 8.2, 20.2, 13.3 et 10.6.97;
Bund, 11.1.97;
TA, 17.1 et 29.1.97;
24 Heures, 18.1 et 21.2.97;
SHZ, 24.4.97.19
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