Année politique Suisse 1997 : Allgemeine Chronik / Schweizerische Aussenpolitik
Politique économique extérieure
Les Chambres fédérales ont tour à tour pris acte du rapport du Conseil fédéral sur la
politique économique extérieure 1996/1+2. Au cours des discussions relatives à cet objet, plusieurs voix se sont élevées pour demander au gouvernement d'inclure dans les versions futures de ce document un chapitre consacré aux relations monétaires et financières, proposition qui a reçu l'aval de l'exécutif. L'examen de ce rapport a été suivi par l'adoption de cinq arrêtés fédéraux ayant trait à la politique économique extérieure de la Suisse: l'arrêté fédéral portant approbation des Accords entre les Etats de l'AELE et les Républiques d'Estonie, de Lettonie et de Lituanie, celui approuvant l'Accord sur l'assurance directe entre la Confédération et le Liechtenstein, l'arrêté fédéral portant approbation de la Convention avec les Etats-Unis relative à l'extension du champ d'application de l'Accord OMC sur les marchés publics, celui approuvant l'extension du champ d'application de l'Accord OMC sur les marchés publics, et enfin l'arrêté fédéral portant approbation des modifications de la liste LIX-Suisse-Liechtenstein
[57].
Fort de l'accord préalable du Conseil fédéral concernant une garantie contre les risques à l'exportation de 340 millions de francs au maximum, le groupe Asea Brown Boveri (ABB) a obtenu des autorités chinoises une commande de plusieurs turbines hydroélectriques destinées à la réalisation du
barrage des Trois Gorges le long du Fleuve Yangtsé. Vivement préoccupées par les répercussions sociales et écologiques que cette infrastructure entraînera, plusieurs organisations de développement et de défense de l'environnement ont protesté tout au long de l'année contre le soutien de la Suisse à ce projet
[58].
Les résultats enregistrés en 1997 par l'industrie suisse de l'armement ont confirmé la
tendance à la hausse que connaît ce type d'exportations depuis la remontée spectaculaire amorcée en 1996. Ainsi, les ventes de matériel de guerre à l'étranger ont atteint la valeur globale de 294,31 millions de francs, soit 61,37 millions de plus qu'en 1996. Leur proportion par rapport à l'ensemble des marchandises helvétiques exportées a ainsi crû de 0,23% à 0,26%. Pour la seconde année consécutive, le principal acquéreur d'armes helvétiques a été Oman (61,51 millions), suivi de l'Allemagne (37,9 millions) et des Etats-Unis (34,1 millions)
[59].
Suite à l'autorisation octroyée par les autorités fédérales en automne 1996, l'entreprise Pilatus de Stans (NW) a livré dix-sept avions de type
PC-9 à la Croatie. Destinés à l'entraînement des pilotes de l'armée croate, ces appareils n'ont pas été munis de points d'ancrage sous les ailes qui permettraient éventuellement de les armer
[60].
Signée à Paris en 1993 et ratifiée par la Suisse l'année d'après, la
Convention sur l'interdiction totale et complète des armes chimiques est entrée en vigueur à la fin du mois d'avril. Cet accord auquel 165 pays ont apporté leur paraphe rend illicites non seulement la production et l'utilisation de "gaz de combat" mais également leur conservation, ce qui contraint les Etats signataires à détruire les stocks en leur possession
[61].
Trois ressortissants suisses - deux marchands d'armes bernois et un fonctionnaire travaillant comme armurier à l'Office fédéral des exploitations des Forces terrestres - ont été arrêtés dans le courant du mois de février pour infractions à la loi sur le matériel de guerre. Les trois prévenus ont en effet été accusés d'avoir soutenu plus ou moins directement un important
trafic d'armes en faveur d'organisations criminelles italiennes. Par ailleurs, l'industriel suisse
Dieter Bührle a été l'objet d'une plainte déposée auprès du Ministère public de la Confédération par la Communauté de travail pour le contrôle de l'armement et l'interdiction d'exportation d'armes (ARW). Cette dernière l'a en effet accusé - en qualité de président de l'entreprise zurichoise T&T - d'avoir voulu exporter de l'Autriche vers l'Iran des pièces de rechange pour canons, violant ainsi la loi fédérale sur le matériel de guerre. La société T&T a toutefois réfuté ces accusations
[62].
Munie de plus de 150 000 signatures, la
pétition de la Campagne suisse
contre les mines antipersonnel a été classée par le parlement. Les députés des deux Chambres ont en effet estimé que les différentes revendications contenues dans la pétition étaient désormais largement réalisées suite à l'inscription dans la loi sur le matériel de guerre de l'interdiction expresse de fabriquer, de procurer à titre d'intermédiaire, d'importer, d'exporter ou encore d'entreposer ce type d'armement
[63].
Après la Chambre du peuple en 1996, le Conseil des Etats a à son tour pris acte - sans discussion aucune - du
rapport du gouvernement sur la politique suisse
en matière de maîtrise des armements et de désarmement
[64].
La campagne qui a précédé le vote du mois de juin sur l'initiative populaire "
Pour l'interdiction d'exporter du matériel de guerre" s'est largement focalisée sur la question hautement controversée de l'impact que cette disposition pourrait avoir sur le marché de l'emploi en Suisse. A ce titre, des interprétations fort divergentes ont été données au sujet du nombre de places de travail qui auraient pu disparaître en cas d'acceptation de cette revendication par le souverain: Reconnaissant que cette interdiction pourrait entraîner des suppressions d'emplois de l'ordre de 1000 à 2000 postes de travail, les partisans de l'initiative - à savoir le PS, les écologistes et plusieurs oeuvres d'entraide - ont toutefois motivé le bien-fondé de leur démarche en invoquant les lacunes contenues dans les versions révisées des lois sur le matériel de guerre et sur le contrôle des biens à usages civil et militaire. La relative petitesse de ce chiffre n'a alors pas manqué de radicalement trancher avec le nombre de 120 000 emplois avancé par les opposants à cette initiative au rang desquels ont figuré en premier lieu la Société suisse des constructeurs de machines (VSM), l'Association suisse des industries de l'aéronautique (ASIA), le Vorort ainsi que l'ensemble des partis bourgeois. Dans une période caractérisée par une relative tension sur le marché de l'emploi en Suisse, les considérations d'ordre économique ont alors largement pris le pas sur les arguments éthiques des partisans de l'initiative, puisque celle-ci a été rejetée par le peuple par 1 243 869 voix contre 361 164, ainsi que par tous les cantons
[65].
Initiative populaire "Pour l'interdiction d'exporter du matériel de guerre"
Votation du 8 juin 1997
Participation: 35,5%
Non: 1 243 869 (77,5%)
Oui: 361 164 (22,5%)
Mots d'ordre:
- Oui: PS, PES; Déclaration de Berne, Pain pour le prochain, WWF, CSCS.
- Non: PRD, PDC, UDC, PLS, PdL, PEP, AdI, DS; Vorort, Centre patronal.
- Liberté de vote: USS, FTMH.
L'
analyse Vox sur les résultats de ce scrutin a permis de montrer que l'orientation idéologique des votants ainsi que leurs préférences partisanes ont eu une incidence significative sur le comportement de vote. Ainsi, les personnes situées à gauche de l'échiquier politique ont soutenu dans une large mesure l'initiative alors que celles se déclarant du centre ou de la droite l'ont très clairement repoussée. Il est toutefois à signaler qu'une majorité de sympathisants du PS a rejeté l'initiative. Si aucune différence de vote n'a réellement pu être mise en évidence selon le statut professionnel, la catégorie sociale, l'âge, le sexe ou la formation des votants, l'interdiction d'exporter du matériel de guerre a en revanche été moins fortement repoussée en Suisse romande et en ville qu'en Suisse alémanique et à la campagne. Concernant les motifs invoqués par les votants à l'appui de leur décision, il apparaît très clairement que ce sont les craintes de voir disparaître de nombreuses places de travail en Suisse qui ont incité les détracteurs de cette initiative à la balayer, alors que du côté des partisans, plus de la moitié des raisons avancées a fait référence à des valeurs pacifistes ou éthiques
[66].
Le parlement a décidé de ne pas donner suite à une
initiative du canton de Genève qui souhaitait que la loi fédérale sur le matériel de guerre soit modifiée afin de permettre aux cantons qui le désirent de légiférer de manière plus restrictive sur le courtage du matériel de guerre. Après avoir rappelé que les opérations de courtage pour du matériel ne se trouvant jamais sur territoire helvétique tombent désormais sous le coup de la version révisée de la loi sur le matériel de guerre, les Commissions de la politique de sécurité des deux Chambres ont fait savoir qu'il était inconcevable de donner pareille compétence aux cantons sous peine de provoquer de fâcheuses inégalités de traitement, et par là de créer une grave insécurité juridique
[67].
[57]
BO CN, 1997, p. 417 ss., 486 ss. et 835 s.;
BO CE, 1997, p. 30 ss. et 422;
FF, 1997, II, p. 1386 s. et 1464; presse du 14.1.97 (Accord Suisse-USA).57
[58]
SoZ, 2.2.97; presse des 5.8, 16.8, 25.8, 26.8 et 21.11.97;
NQ, 18.8.97;
JdG, 19.8.97. Cf. également
APS 1996, p. 82 s.58
[59] Presse du 6.2.98. Voir aussi
APS 1996, p. 83.59
[60]
TA, 18.1.97; presse du 20.1.97.60
[61]
TW, 22.4.97;
SZ, 26.4.97; presse du 29.4.97. Voir aussi
APS 1993, p. 76 et
1994, p. 77.61
[62] Presse des 7.3 et 23.5.97.62
[63]
BO CN, 1997, p. 507 s.;
BO CE, 1997, p. 699 s. Voir aussi
APS 1996, p. 71 s. et 84 s.63
[64]
BO CE, 1997, p. 420 s. Voir aussi
APS 1996, p. 83.64
[65]
FF, 1997, IV, p. 334 ss.;
BaZ, 1.2.97;
SHZ, 20.2.97;
NZZ, 15.3, 4.4, 26.4, 6.5 et 17.5.97; presse des 3.4, 12.4, 21.4, 10.5, 16.5, 21.5, 28.5, 31.5, 2-4.6, 9.6 et 31.7.97;
JdG, 26.5.97;
SoZ, 1.6.97. Cf. également
APS 1996, p. 84 s. Il est à relever que peu de temps après que le souverain se soit clairement prononcé contre l'initiative visant à interdire l'exportation de matériel de guerre, le CF a fixé l'entrée en vigueur de la loi révisée sur le contrôle des biens au 1er octobre de l'année sous revue. L'entrée en vigueur de la nouvelle loi sur le matériel de guerre n'interviendra pour sa part que dans le courant de l'année 1998:
Bund, 26.6.97;
NZZ, 27.6 et 1.10.97;
SHZ, 9.10.97.65
[66] M. Delgrande / W. Linder,
Analyse des votations fédérales du 8 juin 1997, Vox no 61, Berne 1997.66
[67]
BO CN, 1997, p. 52 s.;
BO CE, 1997, p. 911 s.67
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