Année politique Suisse 1999 : Wirtschaft / Landwirtschaft
Produits alimentaires
Le Conseil national s’est largement déterminé (127 voix contre 7) pour une motion de sa commission visant à améliorer les
exportations suisses de produits agricoles transformés et à préserver l’emploi dans ce secteur. Pour des raisons principalement juridiques, bien qu’il se soit déclaré d’accord sur le fond, le Conseiller fédéral Couchepin a proposé sans succès aux députés de transmettre cette proposition comme postulat. Le texte charge d’une part le Conseil fédéral de négocier avec l’UE afin que soit mise en œuvre la solution prévue dans le cadre du protocole n° 3 annexé au traité sur l’ EEE (refusé par le peuple en 1992) et d’autre part, dans l’attente de cette décision, d’agir au niveau national pour ménager l’industrie agroalimentaire. Actuellement, c’est encore le protocole no 2 de l’accord de libre-échange de 1972 qui dicte les normes des échanges entre la Suisse et l’Europe. Dans son rapport écrit, le Conseil fédéral a communiqué que l’Europe n’envisageait pas de renégocier substantiellement ce protocole avant la ratification des accords bilatéraux. Le Conseil des Etats a transmis cette motion par 26 voix contre 6
[43].
Préalablement à cette décision, le Conseil national avait déjà transmis deux postulats sur ce sujet émanant du président de l’USP Marcel Sandoz (prd, VD) et du démocrate-chrétien Kühne (SG). Tous deux exprimaient le souhait que le Conseil fédéral engage avec l’UE des négociations sur les produits alimentaires transformés dans les meilleurs délais, ceux-ci n’ayant pas été inclus dans les négociations bilatérales
[44].
Après la décision de la Commission européenne d’interdire l’importation de viande bovine en provenance des Etats-Unis suite à la découverte de résidus d’
hormones, la Confédération a annoncé quelques mois plus tard avoir également décelé de telles substances. Les autorités fédérales ont rayé une société américaine de la liste des fournisseurs agréés et demandé aux USA de prendre des mesures contre l’importateur incriminé. Quelques 1000 tonnes de viande en provenance des Etats-Unis sont consommées chaque année en Suisse. Le VKMB ainsi que le gouvernement du canton de Fribourg ont demandé au Conseil fédéral d’en interdire carrément l’importation
[45].
Le Conseil fédéral a décidé de rendre obligatoire l’étiquetage pour la
viande aux hormones et les
œufs d’élevage en batterie. Interdites en Suisse, ces pratiques ne le sont pas dans d’autres pays et la Confédération ne peut s’opposer à leur importation en vertu des règles de l’OMC. Cette mesure était désirée par les associations de consommateurs et les producteurs suisses. Une ordonnance à ce sujet entrera en vigueur en janvier 2000
[46].
L’affaire des
poulets à la dioxine en Belgique a également touché la Suisse. Environ 41 tonnes de poulet belges susceptibles d’avoir été contaminés par la dioxine ont été vendus sur sol helvétique. Environ 58 tonnes de produits à base d’œufs en provenance de Belgique ont également été importés. L’Office fédéral de la santé publique (OSP) a recommandé aux acheteurs de se débarrasser des produits qui n’avaient pas encore été consommés et a suspendu les importations de poulets belges et des produits dérivés. Par analogie, cette mesure a été étendue à la viande (bœuf et porc), aux produits carnés, aux fourrages et aux produits de base d’origine animale utilisés pour leur préparation. L’office a aussi appliqué cette décision aux produits lactés de ce pays après la découverte d’autres traces de dioxine. Par la suite, l’OFV n’a relevé aucune trace de dioxine dans les poulets belges qu’elle a analysés et les sanctions sur le lait ont été levées
[47].
L’OFSP a décidé de mettre en consultation un projet de modification de la norme régissant le
taux de nitrates dans les aliments. Des études récentes ont démontré que les nitrates n’étaient pas aussi dangereux pour la santé de l’être humain que ce que l’on craignait précédemment. L’Union maraîchère suisse a accueilli avec satisfaction cette nouvelle. Le taux suisse devrait être aligné sur celui de l’UE
[48].
L’Interprofession du
gruyère a accepté le compromis de l’OFAG concernant sa demande d’AOC (appellation d’origine contrôlée). Elle a finalement concédé le droit à 24 fromageries se trouvant à l’extérieur de la zone de production AOC de bénéficier de l’appellation afin de ne pas bloquer le dossier. Ces fromageries hors zone (12 à Berne, 4 à Schwyz, 2 à Lucerne, 2 à Soleure, 2 à Zoug, 1 en Argovie et 1 à Saint-Gall) fabriquent 3% du gruyère suisse. Par ailleurs, le Syndicat interprofessionnel du gruyère français (SIGF) a déposé une demande d’attestation de spécificité pour le gruyère. Le succès de cette requête pourrait amener à ce que le gruyère soit produit légalement dans toute l’UE. L’emmental subit plus durement le passage à la libéralisation. Dans un délai estimé de dix ans, c’est environ la moitié des fromageries qui devrait disparaître
[49].
Le Conseil National a transmis un postulat Sandoz (prd, VD) demandant que les autorités accélèrent le
processus de reconnaissance des appellations d’origine et des indications de provenance. Au début de l’automne, quatre produits (gruyère, fromage de l’Etivaz, eau-de-vie de poire du Valais et une sorte de maïs « Rheinthaler Ribel ») aspirant à une AOC ont vu leurs demandes d’enregistrement officiellement publiées et soumises à l’enquête publique. La requête des producteurs de la viande séchée des Grisons a suivi le même processus, mais pour une indication géographique de provenance (IGP), moins contraignante. Malgré un accord entériné (voir supra), le canton de Berne a fait opposition au dossier d’AOC du Gruyère pour défendre les intérêts des affineurs bernois. Il s’est toutefois rétracté quelques jours plus tard afin de ne pas entraver la crédibilité des AOC auprès de l’UE
[50].
Un
publiforum s’est déroulé à Berne sur le thème du génie génétique et de l’alimentation. Pendant quatre jours, 28 citoyens ont débattu avec 18 spécialistes. A 15 contre 13, les participants ont prôné la voie d’un
moratoire sur la production des OGM dans l’attente d’une meilleure évaluation des risques. Organisé pour la deuxième fois seulement en Suisse, le publiforum doit permettre aux scientifiques et aux néophytes de nouer le dialogue et se veut un complément aux sondages tout comme un instrument de démocratie. L’OFEFP a adhéré à la conclusion du publiforum dans son avant-projet de loi
Gen-lex et a proposé une interdiction provisoire de dix ans de la dissémination des plantes transgéniques. Seuls les essais scientifiques seraient autorisés
[51].
L’
ordonnance sur les denrées alimentaires a été révisée par le Conseil fédéral. Désormais, tout produit incluant plus de 1% d’OGM devra porter la mention compatible avec la terminologie européenne de : « modifié par génie génétique ». Le seuil de 1% devrait éviter de considérer des produits naturels involontairement contaminés (par exemple lors du transport) comme modifiés génétiquement
[52].
Le Conseil national a refusé (56 voix contre 41) de transmettre une motion Vollmer (ps, BE) demandant une adaptation de la déclaration obligatoire sur les denrées alimentaires modifiées génétiquement. L’auteur exigeait que la dérogation prévue à titre de disposition transitoire soit supprimée, ceci pour que ce genre de produits soit plus facilement reconnaissable. Dans sa réponse écrite, le Conseil fédéral avait recommandé de rejeter cette motion, arguant que la transparence sur la
provenance des produits était garantie, y compris pendant la période transitoire de huit mois. Selon lui, ce délai constituait un minimum à laisser au marché des denrées alimentaires, ceci en raison des capacités de livraison. La chambre du peuple a par contre transmis comme postulat une motion Wittenwiler (prd, SG) qui priait le Conseil fédéral de régler dans le cadre du message Gen-lex, la question de la
responsabilité des producteurs pour les éventuels dommages causés par les OGM
[53].
Le Conseil national a transmis comme postulat une motion du groupe écologiste déposée en 1997 qui demandait la révision de la loi sur les denrées alimentaires. Cette requête concerne l’attribution d’un
droit de recours aux associations suisses défendant les consommateurs et engagées en faveur de la promotion de denrées alimentaires dont le mode de production est en accord avec la nature. Par cette disposition, les associations pourraient notamment recourir contre les décisions concernant la mise sur le marché de produits génétiquement modifiés
[54].
Deux variétés de
maïs américain recelant des traces d’OGM ont été interdites de commerce par l’OFAG qui a exigé la destruction de deux cents treize hectares déjà ensemencés. Après de longues tergiversations, c’est l’importateur qui a dédommagé les cultivateurs grâce aux discussions menées par l’USP. Suite à cette affaire, l’OFAG a concocté une ordonnance afin d’augmenter le seuil de tolérance des OGM dans les semences importées de 0% à 0,5%, pour des raisons de « pragmatisme ». Les organisations écologistes ainsi que l’OFEFP ont contesté cette modification. L’OFEFP avait auparavant refusé d’accorder une autorisation à un projet d’essai de plantation extérieure de maïs génétiquement modifié à Oftringen (AG). Selon lui, les risques d’une propagation de pollen génétiquement modifié étaient trop grands et non contrôlables. Cette décision s’est également appliquée à la station fédérale d’agriculture de Changins (VD) qui désirait tester des pommes de terre transgéniques. Cette dernière a déposé un recours. Par ailleurs, l’OFAG a publié pour la première fois dans une ordonnance une liste de fourrages autorisés comprenant 15 produits à base d’OGM, mais ne devant pas atteindre l’homme car détruits après l’ingestion par les animaux
[55].
[43]
BO CN, 1999, p. 1637 ss.;
BO CE, 1999, p. 734 s.43
[44]
BO CN, 1999, p. 505 s. (Sandoz) et 1327 (Kühne).44
[45]
24h, 30.4 et 14.7.99;
Lib., 19.8.99 (Fribourg).45
[46] Presse du 4.11.99.46
[47] Presse du 2-7.6 et 11.9.99 (OFV);
NZZ, 15.7.99 (sanction levée).47
[48]
LT, 23.7.99;
NZZ, 15.2.99.48
[49]
Lib., 14.7.99. Voir aussi
APS 1998, p. 135 s. (AOC);
LT, 6.10.99 (SIGF);
Bund, 26.10.99 (emmental).49
[50]
BO CN, 1999, p. 506 (Sandoz).
TG, 7.10.99 (AOC et IGP);
Lib., 17.11 et 24.11.99 (BE).50
[51] Presse des
5.6 et 8.6.99. Voir aussi
APS 1998, p. 140. (publiforum). Presse du 31.7.99 (Genlex). Le CF a finalement repoussé l’examen du projet de loi Gen-lex au début de l’an 2000 (
LT, 24.12.99).51
[53]
BO CN, 1999, p. 146 s. (Vollmer) et 2185 s. (Wittenwiler).53
[54]
BO CN, 1999, p. 145 s.54
[55] Presse du 29.3 et 17.4.99 (essais);
24h, 1.6.99 (recours).
LT, 8.5, 22.5 et 28.5.99 et
24h, 10.6.99 (maïs américain);
24h, 9.9.99 (15 produits).55
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