Année politique Suisse 1979 : Politique sociale / Groupes sociaux
Condition de la femme
La condition de la femme en Suisse a été à nouveau au centre des préoccupations de nombreux milieux et fait l'objet de plusieurs enquêtes. C'est ainsi que la commission fédérale pour les questions féminines a publié un rapport partiel sur la position de la femme dans la société et l'économie. Ce document regroupe des informations et des recommendations sur la situation de la femme dans la vie professionnelle, dans . l'instruction et la formation, dans la vie politique et publique. Il démontre, si besoin était, que la femme ne jouit pas des mêmes droits que l'homme et qu'elle est encore victime de toutes sortes de discriminations tant sur le plan légal que dans la vie quotidienne
[19]. D'autre part, le conseiller national Hubacher (ps, BS) a interrogé le gouvernement sur l'opportunité de créer un bureau à la condition féminine, tel qu'il existe dans de nombreux pays européens
[20].
De son côté, le Conseil fédéral a décidé de recommander le
rejet de l'initiative populaire pour l'égalité des droits entre hommes et femmes. Toutefois, il a proposé au parlement un
contre-projet qui reprend à son compte les revendications essentielles formulées par les promoteurs de celle-ci
[21]. Ce sont avant tout les dispositions transitoires, et notamment celle qui exigeait la suppression de toutes les inégalités dans un délai de cinq ans, qui ont fait sourciller nos autorités. Du reste, de vives critiques avaient été adressées ti leur encontre lors de la procédure de consultation au terme de laquelle seuls les partis de gauche, l'USS et certaines organisations féminines avaient soutenu l'initiative saris réserve
[22]. Pour le gouvernement, la solution idéale consisterait à insérer le principe de l'égalité des sexes dans le projet des experts pour une révision totale de la Constitution et de renvoyer les mesures concrètes à une loi spéciale.
Si un vaste consensus politique semble progressivement se former sur la nécessité d'améliorer la protection de la maternité, en revanche on bute toujours sur trois pierres d'achoppement. D'abord l'exigence d'une assurance obligatoire, question qui se pose en étroite relation avec l'assurance-maladie, puisque cette dernière prend en charge les frais occasionnés par la maternité. Ensuite, la protection contre les licenciements en cas de grossesse et d'accouchement. Enfin, le problème de l'institution d'un congé parental et notamment de son coût. Sur ces trois points, on constate qu'un front uni des femmes est quasiment inexistant et que seul un clivage traditionnel gauche/droite alimente les polémiques
[23]. Néanmoins, le Conseil des Etats a adopté deux motions d'origine démocrate-chrétienne amendées et acceptées en 1978 déjà par le National. Seules les précisions données par la motion Josi Meier (pdc, LU) en matière de résiliation de contrats durant le congé de maternité et la grossesse ont été quelque peu atténuées. De plus, la chambre des cantons a tenu à préciser que l'assurance-maternité devait rester une branche de l'assurance-maladie et conserver par conséquent un caractère facultatif
[24]. En revanche, la commission du Conseil national a reporté l'étude de l'initiative parlementaire de G. Nanchen (ps, VS) sur la politique familiale à une date ultérieure. Elle devrait se prononcer sur cet objet dès que l'initiative populaire «pour une protection efficace de la maternité» aura été déposée et que le gouvernement se sera prononcé
[25].
Malgré l'échec des deux scrutins populaires de septembre 1977 et mai 1978, le débat public sur
l'avortement n'a rien perdu de son actualité. La commission du Conseil national chargée d'étudier les diverses initiatives sur l'interruption non punissable de la grossesse a terminé ses travaux en automne 1979. Elle a d'abord étudié les initiatives parlementaires Christinat (ps, GE) et Girard-Montet (prd, VD) qui préconisaient toutes deux d'abandonner aux cantons le soin d'introduire dans leur législation la solution du délai. Puis elle a examiné attentivement le projet centralisateur du député Condrau (pdc, ZH) qui demandait une modification du Code pénal suisse. Au terme de ses délibérations, la commission a soumis pour avis au Conseil fédéral trois variantes. Une réglementation fédérale prévoyant une modification du Code pénal dans le sens de l'indication médico-sociale avec abandon de l'avis médical conforme (projet de la majorité de la commission). Une loi spéciale réglementant l'indication médico-sociale sur le plan fédéral et donnant aux cantons la compétence d'introduire la solution du délai (projet de la minorité I). Enfin une proposition d'attribuer aux cantons la liberté d'appréciation en matière d'avortement, proposition qui s'inspire de quatre initiatives cantonales et de celle du libéral genevois Gautier (projet de la minorité II)
[26]. Plusieurs associations féminines ont pris position en faveur de la solution fédéraliste élaborée par la minorité I de la commission et une nouvelle organisation, l'Association suisse pour le droit à l'avortement (ASDA) a même été créée
[27]. Comme nous l'avons déjà précisé, une nouvelle initiative intitulée «Droit à la vie» a été lancée au début de l'année par des milieux de tendance plutôt conservatriCE, Elle vise avant tout à bloquer l'évolution vers une libéralisation de l'avortement
[28].
[19] Die Stellung der Frau in der Schweiz, Bericht der eidg. Kommission für Frauenfragen, Teil 1: Gesellschaft und Wirtschaft, (Bern) 1979. Cf. presse du 17.11.79; CSS, 43, 21.11.79. Voir également Rencontre: Femmes. Kermesse du PdT 29.9.1979, Genève (1980) et T. Held / C. Reichenau / V. Ritter, « Frauen in der Bundesversammlung», in Questions au féminin, 1979, no 1/2.
[20] Délib. Ass. féd., 1979, II, p. 46; Lib., 272, 27.8.79.
[21] Conseil fédéral : FF, 1980, I, p. 73 ss. ;cf. presse du 15.11.79 ; CSS, 44, 28.11.79 ; 24 Heures, 12, 16.1.80. Cf. également APS 1975. p.131; 1976, p.129.
[22] Soutien sans réserve: notamment PS, PST. USS et Alliance des sociétés féminines suisses. Approbation avec réserve: notamment TI. Approbation mitigée (faute de mieux): notamment GE, PRD, PDC et CSC. Rejet: 22 cantons et notamment PL, Adi et associations d'employeurs en général. Cf. Division fédérale de la justice, Récapitulation des résultats de la consultation sur l'initiative populaire « pour l'égalité des droits entre hommes et femmes», (Berne) 1978. Voir également presse du 1.2.79.
[24] BO CE, 1979, p. 93 ss.; presse du 15.3.79. Pour les délibérations de la commission du CE, cf. presse du 21.2.79. Cf. en outre APS, 1978. p. 125.
[25] NZZ, 90, 19.4.79; CSS, 15, 25.4.79. Cf. APS, 1978, p. 125.
[26] Cf. rapport de la commission in FF, 1979, II, p. 1021 ss. Les informations fournies par la presse (presse du 19.I.79; NZZ, sda, 177, 22.5.79; presse du 28.8.79) sont incomplètes. Cf. en outre TW, 16, 20.1.79; CSS, 3, 24.1.79; APS, 1978, p.126 s. G. Condrau a retiré son initiative au profit de la proposition de la majorité; A. Christinat et G. Girard en ont fait de même en faveur de la proposition de la minorité 1. Par contre, A. Gautier est resté ferme sur son initiative et demande, tout comme la minorité II, l'étude des initiatives cantonales de BS, GE, NE et VD.
[27] Organisations féminines: OFRA (TW, 149, 29.6.79; JdG, ats, 150, 30.6.79); femmes socialistes (JdG, ats, 272, 22.11.79). ASDA: VO, 191, 5.10.79; 196, 12.10.79; presse du 11.10.79.
[28] Cf. supra, part. I, 1b (Menschenrechte).
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