Année politique Suisse 1986 : Politique sociale / Population et travail
 
Conventions collectives du travail
D'une statistique établie par l'OFIAMT, il est ressorti qu'en mai 1986, 66,9% des 299 conventions collectives du travail (CCT) prises en considération contenaient une clause relative au renchérissement, mais que 15,7% seulement prévoyaient une adaptation automatique au coût de la vie. Cet automatisme, appelé aussi échelle mobile des salaires, signifie que les salaires sont adaptés au renchérissement sans qu'il y ait de négociations préalables entre les partenaires sociaux. En 1986, la majeure partie des clauses prévoyant une échelle mobile subordonnaient l'adaptation des salaires à une ampleur minimale de la variation des prix. Pour toutes les autres CCT qui contenaient des clauses relatives au renchérissement (51,2% des 299), il s'agissait de dispositions prévoyant l'ouverture de négociations. Celles-ci ont pour effet de provoquer des négociations salariales sans dénonciation de la convention dès que les prix à la consommation subissent une variation déterminée [15].
Représentants syndicaux et patronaux ont signé une nouvelle CCT dans l'industrie horlogère. Commencées le 14 mars 1985, les négociations ont abouti le 1 er juin 1986 avec l'entrée en vigueur de la CCT. Parmi les acquis déterminants pour les syndicats, la FTMH a cité, entre autres, l'introduction de la semaine de 40 heures dès le début de 1988, les modalités prévues pour l'aménagement du temps de travail, aux termes desquelles les employeurs devront obligatoirement négocier avec le syndicat les nouvelles formules qui découleront de l'introduction de nouvelles technologies, le renforcement de la protection contre les licenciements pendant la grossesse et pour les travailleurs employés depuis dix ans dans la même entreprise et le versement d'un treizième salaire. La CCT mentionne expressément le principe de l'égalité et décrit dans le détail les mécanismes d'intervention syndicale en cas de désaccord entre une travailleuse et l'entreprise lorsqu'il s'agit d'égalité de salaire. De plus, parallèlement aux discussions de rémunération, le syndicat a obtenu l'inscription du principe de l'égalité de promotion entre hommes et femmes. Du côté patronal, on s'est déclaré satisfait de l'accord conclu et encore davantage de l'état d'esprit dans lequel se sont déroulées les négociations. La Société suisse des entrepreneurs (SEE) a décidé de ne pas donner suite aux revendications des travailleurs de la construction qui demandaient une hausse de 3% des salaires réels. La SSE a refusé d'entrer en matière, jugeant cette revendication excessive et inadaptée à la situation économique dans le secteur de la construction. De leur côté, les organisations syndicales concernées ont déclaré ne pas vouloir signer de nouvelle convention collective de travail de trois ans si elle excluait indirectement d'autres accords sur l'augmentation des salaires réels [16].
Une nouvelle CCT dans l'industrie du bois, signée entre l'Association suisse de l'industrie du bois et les syndicats entrera en vigueur le ler janvier 1987. Principales innovations, la durée du travail hebdomadaire sera abaissée de 45 à 44' heures et les travailleurs de plus de 50 ans qui auront à leur actif plus de vingt années de service se verront attribuer une cinquième semaine de vacances. L'Association de l'industrie chimique bâloise et les syndicats sont tombés d'accord sur une nouvelle CCT. Dès 1988, la durée du travail sera de 41 heures par semaine sans réduction de salaire [17].
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Conflits collectifs du travail
La fréquence des grèves est restée extrêmement faible. Seuls deux conflits collectifs du travail ont éclaté en Suisse en 1986, et un seul a entraîné un débrayage pendant une journée au moins, l'interruption d'activité étant restée limité à quelques heures dans l'autre cas. L'unique conflit (1985: 3) d'une durée d'un jour au moins a touché une entreprise (10) de la branche de la menuiserie, et avait pour objet le licenciement d'ouvriers. Le nombre de travailleurs impliqués s'était élevé en tout à 36 (366) et celui des journées perdues à 72 (662). Un accord a pu être trouvé et l'entreprise a annulé les licenciements prononcés. Mais ceux-ci deviendront effectifs à la fin de l'année, avec la fermeture de la succursale. S'agissant de l'autre conflit collectif du travail, il a trouvé son origine dans le différend qui a opposé l'Association suisse de l'industrie graphique aux membres de l'Union suisse des lithographes. Et cette dernière d'organiser dans tout le pays des assemblées de protestation assorties d'interruptions du travail de quelques heures pour contraindre l'association patronale précitée à signer une convention professionnelle garantissant les acquis des travailleurs [18].
Le Conseil national a rejeté, par 84 voix contre 39, une initiative parlementaire déposée par le communiste genevois Magnin demandant une modification de la Constitution fédérale en vue de garantir le droit de grève à tous les travailleurs, y compris aux fonctionnaires des administrations publiques. Les partisans de l'initiative ont indiqué que le droit de grève était un droit fondamental qui devait être également reconnu au personnel de la fonction publique et qu'il fallait en finir avec la discrimination dont il faisait l'objet. Pour sa part, la majorité bourgeoise a justifié son hostilité en arguant que le droit de grève n'avait pas sa place dans le secteur public, car là, les conditions de travail sont déterminées par la loi, et qu'il constituerait le cas échéant, un moyen de pression contre le peuple et le parlement [19].
 
[15] La Vie économique, 59/1986, p. 570 ss. Le CF a rendu quatorze décisions étendant le champ d'application de CCT (Rapp. gest., 1986, p. 316).
[16] Horlogerie: 24 Heures, 14.6.86; VO, 24, 14.6.86; Le Gutenberg, 29/30, 17.7.86; NZZ, 3.9.86; USS, 26, 10.9.86; SAZ, 38, 18.9.86; cf. aussi infra, part. I, 7d (Condition de la femme). Bâtiment: TA, 4.12.86; 5.12.86; VO, 49, 11.12.86.
[17] Bois: NZZ, 27.12.86. Chimie: BaZ, 27.6.86; NZZ, 20.12.86.
[18] La Vie économique, 60/1987, p. 163. L'unique grève de plus d'un jour a éclaté à fin septembre dans l'entreprise de menuiserie Schlatter à Biasca (TI), mais dont le siège principal est à Saint-Gall (USS, 38, 22.10.86). Conflit USL-IGS: USS, 38, 10.12.86; 39, 17.12.86; Le Gutenberg, 50/51/52, 11.12.86; presse du 18.12.86. Syndicats et conflits du travail: C. Roig e.a., Syndicalisme au futur, Lausanne 1986.
[19] BO CN, 1986, p. 612 ss. Cf. aussi USS, 19, 11.6.86. L'interdiction du droit de grève a été introduit en 1927 dans le statut des fonctionnaires. Seuls les cantons du Jura et de Genève accordent expressément le droit de grève aux fonctionnaires.