Année politique Suisse 1989 : Chronique générale / Politique étrangère suisse
Organisations internationales
En réponse au postulat de la commission des pétitions du Conseil national — transmis par la grande chambre — le Conseil fédéral a recommandé l'adhésion de notre pays à la
convention de l'ONU contre le racisme. Une telle adhésion, qui serait une conséquence logique de la politique suisse dans le droit humanitaire, entraînerait une modification du Code pénal helvétique
[43].
Les Chambres ont accordé, à l'unanimité, un crédit d'engagement de 121 millions de francs à la
Fondation des immeubles pour les organisations internationales (FIPOI) à Genève. Celui-ci est destiné à la construction d'un immeuble qui abritera les bureaux du Haut Commissariat pour les réfugiés (HCR). C'est en vertu de la tradition d'accueil et du rôle joué par Genève dans ce contexte que ce montant a été octroyé
[44].
Le Conseil national a également accepté, sans opposition, d'adhérer à la Convention de la Commission internationale de l'Etat civil (CIEC) tendant à réduire le nombre des cas d'apatridie. Par ce texte, les enfants nés de père juridiquement apatride ou réfugié acquièrent la nationalité de leur mère dès leur naissance
[45].
Par son message de novembre 1989, le Conseil fédéral a proposé de ratifier la Convention du Conseil de l'Europe sur la
reconnaissance de la personnalité juridique des organisations non gouvernementales. Paradoxalement, ces dernières ne bénéficient d'aucun statut international légal alors qu'elles sont d'une extrême importance tant au niveau politique que numérique. Ce texte a pour but d'assurer la reconnaissance de plein droit, dans les autres Etats contractants, de la personnalité et de la capacité juridiques qu'une ONG a obtenues dans le pays de son siège statutaire. Occupant le cinqième rang des pays de siège des ONG, cette norme intéresse donc particulièrement la Suisse
[46].
En mai, la Suisse a
participé pour la première fois en tant que membre à part entière au troisième sommet des pays francophones de Dakar (Sénégal). Auparavant simple observateur, ce changement d'attitude est à rechercher dans les volontés conjuguées de René Felber et Jean-Pascal Delamuraz ainsi que dans les expériences retirées des deux premières rencontres. Dans sa déclaration liminaire, Klaus Jacobi — secrétaire d'Etat au DFAE et chef de la délégation suisse — a néanmoins spécifié que la Suisse se réservait la possibilité de ne pas prendre part aux débats et résolutions de nature politique
[47]. Les Chambres ont accepté d'accorder un statut officiel à la section suisse de l'Association internationale des parlementaires de langue française. De cette façon, elle bénéficiera d'un minimum d'infrastructures, ce qui lui permettra de revaloriser son rôle
[48].
Le parlement a adopté à l'unanimité l'arrêté fédéral augmentant les contributions ordinaires de la Confédération au Comité international de la Croix-Rouge (CICR). Actuellement fixées à 45 millions de francs par an, elles passeront à 50 millions de francs par an en 1990 et 1991, puis à 55 millions de francs en 1992 et 1993. Selon le gouvernement, le rôle essentiel du CICR dans la plupart des conflits, les liens particuliers l'unissant à la Confédération, le parallélisme entre sa mission et les objectifs de la politique suisse et la nécessité d'assurer, par une infrastructure appropriée, la présence active du CICR tant dans notre pays qu'à l'étranger justifient un tel accroissement
[49].
En février 1989, le CICR décida du redéploiement de ses activités au Liban, abandonnées à la suite des risques pesant sur son personnel peu après l'affaire Winkler
[50]. Cette décision n'a pas été sans conséquence puisque, le 6 octobre de la même année, deux de ses délégués suisses, Emanuel Christen et Elio Erriquez, ont été enlevés dans la ville de Saïda, au sud du Liban. Depuis lors, aucune organisation ou groupement actif dans ce pays n'a revendiqué cet acte ni fait connaître de quelconques volontés
[51]. Cependant, des menaces de mort ont plané à plusieurs reprises sur les deux otages, sans que l'on ne puisse en vérifier la teneur ni l'authenticité
[52].
Après avoir été confronté à de multiples difficultés, dont la constitution et la diffusion d'un dossier anonyme l'incriminant, le haut commissaire pour les réfugiés, le Suisse Jean-Pierre Hocké, a démissionné. Si sa personnalité a toujours été contestée, la crise financière que connaît actuellement le HCR a très probablement affaibli sa position. De plus, les allégations de l'émission télévisuelle alémanique «Rundschau» quant à des dépenses somptuaires du haut commissaire n'ont pas contribué à sa réhabilitation
[53].
[43] BO CN, 1989, p. 574 ss.; NZZ, 22.12.89. Cf. aussi supra, part. I, 1b (Grundrechte).
[44] FF, 1989, I, p. 1185 ss. et III, p. 1626; BO CE, 1989, p. 467 s.; BO CN, 1989, p. 2225 s.
[45] BO CN, 1989, p. 1462. Le Conseil des Etats a adopté cette convention en 1988.
[46] FF, 1989, III, p. 1473 ss.
[47] Suisse, 19.3. et 23.5.89; LM, 22.5.89; BZ et TW, 24.5.89; Documenta, 1989, no 2, p. 27.
[48] BO CN, 1989, p. 1 107 ss. et 1809; BO CE, 1989, p. 543 ss. et 624. Cf. aussi infra, part I, 8b (Das Verhältnis zwischen den Sprachregionen).
[49] FF, 1989, I, p. 569 ss. et III, p. 914; BO CN, 1989, p. 1058 s.; BO CE, 1989, p. 468 s.
[50] Suisse, 23.1. et 24.1.89; JdG, 7.2.89. Pour l'affaire Winkler, cf. APS 1988, p. 64 s.
[51] Rapp.gest. 1989, p. 29 ss.; presse du 7.10.89; Suisse, 18.10.89; LM, 19.10.89.
[52] 24 Heures, 7.10.89; L'Hebdo, 9.11. et 2.1.12.89.
[53] 24 Heures, 28.9. et 6.10.89; presse du 27.10.89; L'Hebdo, 5.10. et 2.11.89.
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