Année politique Suisse 2002 : Chronique générale / Politique étrangère suisse
Relations bilatérales
Deux
Conventions de double imposition avec la République fédérale d’Allemagne et la Lettonie ont été acceptées par les deux Chambres. Celles avec la République d’Ouzbékistan, la République d’Estonie et la République de Lituanie n’ont été examinées que par la chambre haute
[34].
La Suisse a
levé les sanctions contre cet Etat et s’est conformée aux résolutions du Conseil de sécurité des Nations Unies en modifiant l’ordonnance sur les mesures contre le régime des talibans
[35].
Concernant les relations entre la Suisse et l’ancien régime d’apartheid, voir supra, partie I, 1b (Staatsschutz).
Le problème de l’accord aérien est traité dans le chapitre sur les transports (partie I, 6b, Trafic aérien).
Le Chili a rappelé ses ambassadeurs en Suisse et à Cuba. Le gouvernement voulait les informer de la possible présence dans ces deux pays de guerilleros de gauche s’étant évadés il y a quatre ans
[36].
L’ambassadeur américain a été convoqué par les autorités suisses. La position helvétique, similaire à celle de l’UE, concernant les
prisonniers talibans et ceux du réseau terroriste international Al-Qaida détenus sur la base américaine de Guantanamo, lui a été exposée. L’importance accordée à l’application du droit humanitaire à ces détenus a été soulignée
[37].
Le conseiller fédéral
Samuel Schmid s’est rendu à Salt Lake City pour représenter le gouvernement lors de la cérémonie d’ouverture des Jeux Olympiques d’hiver. Il a ensuite rencontré, à Washington, le suppléant du ministre de la défense, Paul Wolfowitz, pour un échange d’opinions sur le terrorisme international et a souligné que la Suisse oeuvrait avant tout en contrôlant de manière stricte sa place financière. Il a également rappelé la position de la Suisse concernant les détenus de Guantanamo et s’est finalement entretenu, à New York, avec le Secrétaire général des Nations Unies Kofi Annan
[38].
La Suisse n’a pas cédé aux exigences des Etats-Unis et n’a pas accordé la garantie de
non-extradition de leurs ressortissants devant la CPI. Elle a réaffirmé sa volonté de s’engager pour l’universalité de ce tribunal. Une telle demande, acceptée entre autres par la Roumanie et Israël, a également été refusée par la Norvège
[39].
Un accord de coopération en matière de poursuite pénale a été signé en septembre (voir infra, visite à l’étranger).
La
catastrophe aérienne d’Überlingen (RFA) a assombri les relations avec les autorités russes. Elle a impliqué un avion de la compagnie russe Bashkirian Airlines, transportant en majorité des enfants, et un avion de fret. Ce sont surtout les déclarations de la société suisse de contrôle aérien Skyguide qui ont été mal perçues. Cette dernière, impliquée dans la collision aérienne en tant que responsable de la surveillance de la région du lac de Constance, a en effet immédiatement mis en cause publiquement l’équipage de l’avion russe. L’attitude du gouvernement a également été critiquée en raison de son manque de présence auprès des autorités russes et de la présentation tardive de ses condoléances aux familles. La délégation helvétique, emmenée par le président de la Confédération, n’a finalement pas assisté à la cérémonie en l’honneur des victimes qui s’est déroulée dans la capitale du Bachkortostan, Oufa, lieu d’origine de la plupart des victimes. Le ministère russe des affaires étrangères avait signifié au préalable à l’ambassadeur suisse à Moscou que la délégation ne serait pas la bienvenue en Russie. Ce refus d’accueillir les autorités à été interprété comme un affront infligé à la Suisse par la Russie. De plus, les dégâts d’images sur place ont été considérables
[40].
Le Conseil fédéral a donné son feu vert à l’ouverture du
Centre de Coopération policière et douanière (CCPD) à Genève. Cet organisme, opérationnel dès l’été de l’année sous revue, se compose d’une quarantaine de collaborateurs des deux pays spécialisés dans la lutte contre la criminalité transfrontalière. Financé paritairement, sa base légale est un protocole complémentaire à l’accord de coopération transfrontalière en matière judiciaire, policière et douanière. Ce protocole a été signé en janvier 2001
[41].
La
Déclaration
du
Conseil
national concernant la nécessité d’un arrêt immédiat des violences au Proche-Orient, proposée par la Commission de politique extérieure du Conseil national, a été rejetée car jugée trop anti-israélienne. Pour ses promoteurs, ce sont avant tout la précipitation et le manque de discussion préalable qui ont causé son rejet. Pour les adversaires, c’est le contenu déséquilibré du texte qui a fait la différence. Il a été soutenu principalement par les socialistes, les verts et quelques bourgeois
[42].
La Suisse s’est toutefois jointe à l’UE, à l’ONU, aux Etats-Unis et à la Russie pour appeler Israël à un retrait des territoires palestiniens occupés et Yasser Arafat à tout mettre en œuvre pour l’arrêt des attentats. Le gouvernement a réaffirmé son attachement au respect du droit humanitaire. Il a lancé des signaux politiques clairs en chargeant le DDPS de
réexaminer sa coopération avec l’Etat hébreux. De plus, il a demandé au Département fédéral de l’économie et au Département fédéral des finances de revoir les échanges entre les deux pays. C’est plus particulièrement le fonctionnement de l’accord de libre-échange conclu avec l’AELE qui etait concerné dans la mesure où il s’agissait d’éviter que des produits issus des colonies bénéficient de cet accord. Le vice-ministre de la défense israélienne a fait part de ses réserves relatives au réexamen de la coopération militaire entre les deux pays
[43].
La
coopération policière a été renforcée avec la création, en automne, d’un centre commun à Chiasso (TI). Financé paritairement, il se consacrera principalement à la criminalité transfrontalière. Il se base sur 2 protocoles additionnels à l’accord de coopération signé en 1998
[44].
L’assassinat jamais élucidé d’un chef de projet de la DDC en 1996 ainsi que le
bilan mitigé de la coopération avaient influencé négativement les relations bilatérales et poussé la Suisse à ne plus considérer l’île comme un pays de concentration de son aide au développement. Les nouvelles autorités ont cependant promis de faire toute la lumière sur le drame. La Suisse a demandé une conclusion judiciaire correcte et honnête de l’affaire
[45].
Lors de son voyage en Asie du Sud-Est, Ruth Metzler-Arnold en a profité pour signer trois accords approuvés par le Conseil fédéral : un traité bilatéral
d’entraide judiciaire en matière pénale, un accord de réadmission ainsi q’un accord sur l’échange de stagiaires. Après celui signé avec Hong Kong, le traité d’entraide judiciaire est le deuxième avec un pays asiatique
[46].
La visite de Pascal Couchepin, accompagné de représentants de l’économie, devait avant tout porter sur les relations économiques entre les deux pays. Le gouvernement hôte a toutefois commenté le postulat du conseiller national genevois Jean-Claude Vaudroz (pdc) intitulé « Reconnaissance du
génocide des Arméniens de 1915 ». Moins contraignant que les textes précédents, il ne demande la reconnaissance du présumé génocide des arméniens que par le Conseil national. Le gouvernement turc, agacé par ce postulat soutenu par 113 députés, a demandé à la Suisse de tout mettre en œuvre pour que les deux pays conservent de bonnes relations. Il a estimé qu’il incombait aux historiens de faire la lumière sur ces événements. Pascal Couchepin a souligné le peu de force d’un postulat, instrument parlementaire peu contraignant. L’ambassadeur de Suisse avait déjà été convoqué pour des explications. Dans sa prise de position, le Conseil fédéral a estimé que la question du jugement des massacres de l’époque relevait de la recherche historique et a rappelé que la Turquie, bien que reconnaissant ces massacres, avait une interprétation différente de celle de nombreux historiennes et historiens concernant la planification des massacres. Il a insisté sur le fait que la politique extérieure de la Suisse voulait contribuer à l’entente turco-arménienne et a estimé que l’adoption du postulat pouvait porter atteinte au dialogue officiel et régulier qui a été établi. Réagissant à la réponse du gouvernement, la Commission fédérale contre le racisme (CFR) l’a jugée insuffisante. Elle a estimé que le dialogue ne pouvait s’instaurer que sur la reconnaissance des souffrances passées et a demandé à l’exécutif et au législatif de les reconnaître
[47].
Le
Grand-Duc Henri de Luxembourg et son épouse Maria Teresa ont été reçus par le Président de la Confédération, Kaspar Villiger. Ils se sont notamment rendus à Genève, ville où les époux ont effectué leurs études
[48].
Le président de la Confédération, Kaspar Villiger, a reçu le
Président de la République Kirghize Askar Akaev. La présence de cet Etat dans le groupe de vote de la Suisse auprès des institutions financières internationales a favorisé le développement d’un partenariat solide. Outre la coopération technique et financière déjà existante, l’Année internationale de la montagne a également été évoquée
[49].
Le
président de la Mongolie, Natsagiin Bagabandi, s’est entretenu avec le Président de la Confédération ainsi qu’avec le ministre des affaires étrangères. Bien que l’aide humanitaire suisse soit déjà active sur place, il a émis le souhait que son pays devienne un pays de concentration de la DDC
[50].
Le roi
Abdullah II de Jordanie et la reine Rania ont rencontré le président de la Confédération. Outre des discussions sur la situation au Proche-Orient, un accord de financement pour des projets de développement a été signé
[51].
La Suisse a accueilli, pour la cinquantième visite d’Etat, la présidente de la
République de Lettonie, Mme Vaira Vike-Freiberga. La Suisse avait été l’un des premiers pays à reconnaître cet Etat après son détachement de l’Union soviétique et avait ouvert une ambassade à Riga en 1992. Les entretiens ont concerné les relations bilatérales, l’intégration européenne, la coopération régionale dans la Baltique et les grands axes de la politique extérieure suisse
[52].
Le
Président soudanais Omer Hassan Ahmed Al-Bashir a saisi l’occasion de sa visite en Suisse pour évoquer les perspectives de paix au Soudan. La Suisse a coprésidé, avec les Etats-Unis, les négociations d’un accord de cessez-le-feu dans les Monts Nouba (Soudan) en début d’année (voir section bons offices). Un accord de protection et de promotion des investissements a été signé
[53].
Le Président de la Confédération
Kaspar
Villiger s’est rendu à Oslo pour y rencontrer, entre autres, le premier ministre Kjell Magne Bondevik et le roi Harald V. Cette visite a permis des échanges d’expériences en matière de politique européenne entre deux pays non membres de l’UE. Les implications pour la Norvège de son adhésion aux accords Schengen/Dublin, objets de négociations entre la Suisse et l’UE, ont également été discutées. Kaspar Villiger s’est également rendu en Slovaquie pour y rencontrer le président Rudolf Schuster ainsi que d’autres hauts magistrats. La Suisse a fait un geste en faveur des régions touchées par les inondations du mois d’août en signant un accord sur le financement de mesures préventives
[54].
Joseph
Deiss s’est rendu au Kosovo pour une visite de travail. Il y a notamment rencontré le représentant spécial du Secrétaire général des Nations Unies, Michael Steiner, Chef de la Mission des Nations Unies. Outre son voyage d’avril (voir infra) en Asie centrale, il a également visité l’Asie du Sud et a été reçu au Bhoutan, au Pakistan, et en Inde. Ces deux derniers pays sont des pays prioritaires de la DDC, mais la coopération a été limitée ces dernières années à la suite de la reprise des essais nucléaires. Un bref passage de 8 heures à Kaboul lui a donné l’occasion de se rendre compte personnellement de la situation. Le ministre des affaires étrangère s’est également rendu au Japon, principal partenaire économique de la Suisse en Asie. En déplacement en Fédération de Russie il a rencontré son homologue russe et s’est entretenu sur la poursuite de la coopération humanitaire, technique et financière. La visite officielle de travail en Iran a permis de rencontrer le président Khatami, d’écouter son avis sur la situation dans la région et de signer une convention de double imposition avec la République islamique. Lors d’une courte visite chez le voisin du Liechtenstein, Joseph Deiss a abordé les implications des négociations bilatérales en cours sur les places financières respectives
[55].
Accompagné de représentants des principales associations économiques,
Pascal
Couchepin s’est rendu en Pologne et en Hongrie en début d’année. Environ un mois plus tard, lors d’un voyage à Rome, il n’a pas obtenu la levée de l’embargo sur les bovins suisses imposé par l’Italie. Les dossiers ayant créé quelques tensions lors des derniers mois (amnistie fiscale, accord sur l’entraide judiciaire ou encore le secret bancaire) n’ont pas été abordés de manière approfondie. Il a également rencontré le président Ion Iliescu lors d’une visite de travail officielle à Bucarest et a participé à l’Assemblée générale de la Banque Européenne pour la Reconstruction et le Développement
[56].
Ruth Metzler-Arnold s’est rendue aux Etats-Unis en février et s’est entretenue avec le ministre américain de la Justice John Ashcroft. Les discussions concernant la lutte contre le terrorisme et la collaboration entre les deux pays se sont poursuivies avec la visite du ministre américain à Berne. Il a loué l’attitude des banques suisses en matière de blocage de fonds. Un accord de coopération en matière de poursuite pénale a été signé en septembre. Il vise à faciliter les échanges d’investigateurs dans la lutte contre le terrorisme
[57].
L’Asie centrale a été une destination privilégiée durant l’année sous revue. Le chef du DFAE Joseph Deiss a été reçu en Ouzbékistan, au Tadjikistan ainsi qu’au Kirghizistan. Ces deux derniers sont des pays de concentration de l’aide au développement suisse. Ces trois Républiques étant membres du groupe de vote de la Suisse auprès des institutions financières internationales (Fonds Monétaire International, Banque Mondiale et Banque Européenne de Reconstruction et de Développement), la consolidation des relations étaient à l’ordre du jour. Le ministre de l’économie Pascal Couchepin s’est également rendu dans la région. Il a été le premier conseiller fédéral à visiter officiellement le Kazakhstan. Il en a profité pour y signer un accord de soutien dans le domaine de la coopération commerciale dans les pays d’Asie centrale
[58]. Le Président kirghize a également rendu visite au Président de la Confédération Kaspar Villiger (voir supra).
Une équipe de médiation composée de représentants suisses et américains est parvenue à faire accepter les modalités d’un accord de cessez-le-feu aux parties au conflit dans les Monts Nouba au
Soudan. Il ne s’agissait pas de régler tout le problème soudanais mais de contribuer à la pacification temporaire d’une partie du pays. Après les négociations au Bürgenstock, du 14 au 18 janvier, le gouvernement de la République du Soudan et le Mouvement de libération du peuple soudanais (SPLM) se sont entendus pour une trêve de six mois renouvelable. Cette supervision conjointe américano-suisse était placée sous la conduite de l’ambassadeur en mission spéciale pour la gestion des conflits Josef Bucher. Une commission de gestion et de contrôle de l’accord, formée des parties au conflit ainsi que de contrôleurs internationaux a été mise sur pied. Cet accord a été reconduit pour six mois en septembre. Quatre experts suisses ont participé à la mission de surveillance. La Suisse n’était cependant pas directement représentée aux négociations inter-soudanaises de Nairobi (Kenya) menées par les Etats-Unis
[59].
Afin que l’action de la Suisse en matière de
promotion civile de la paix et des droits de l’homme repose sur une base légale solide, le Conseil fédéral a transmis un projet de loi y relatif au parlement au mois d’octobre. Il a également demandé un premier crédit-cadre de 240 millions de francs d’une durée minimale de quatre ans pour l’accomplissement de telles tâches
[60].
[34]
FF, 2002, p. 3991 (Convention avec la République fédérale d’Allemagne);
BO CE, 2002, p. 680;
BO CN, 2002, p. 1976;
FF, 2002, p. 4874 (Lettonie);
BO CE, 2002, p. 681;
BO CN, 2002, p. 1979;
FF, 2002, p. 6498 (Convention avec la République d’Ouzbékistan);
BO CE, 2002, p. 1093;
FF, 2002, p. 6552 (Convention avec la République d’Estonie);
BO CE, 2002, p. 1093;
FF, 2002, p. 6524 (Convention avec la République de Lituanie);
BO CE, 2002, p. 1094.
[35]
LT, 2.5.02. Voir également
APS 2000, p. 76.
[38]
NZZ, 22.1 et 12.2.02; communiqué de presse du DDPS du 6.2.02; presse du 13.2.02.
[41] Presse des 24 et 29.1.02.
[42]
BO CN, 2002, p. 453 ss.;
Lib., 21.3.02; presse du 23.3.02.
[43] Presse des 11.4 et 26.4.02.
[45]
LT, 9.2.02;
TG, 9.8.02;
Lib., 14.8.02.
[46] Communiqués de presse du DFJP du 28.6 et du 9.7.02; presse du 10.7.02.
[47] Voir notamment
APS 2001, p. 61 s. sur le même thème; communiqué de presse du DFE du 18.3.02;
TG, 19.3.02; presse du 27.3.02. Le postulat (02.3069), déposé le 18.3.02, n’a pas encore été traité au parlement; presse du 7.6.02 (commentaires de la CFR).
[51] Presse des 4 et 5.10.02.
[54] Presse du 28.5.02 (Norvège);
LT, 16.12.02 et
L’Express, 17.12.02 (Slovaquie).
[55]
LT, 3.5.02 (Kosovo); presse des 22, 23, et 24.4.02 (Asie du Sud); presse du 5.6.02 (Japon); presse du 2.7.02 (Russie);
NF, 28.10.02 (Iran);
NZZ, 26.11.02 (Liechtenstein).
[56]
NF, 12.2.02 et
24 h 13.2.02 (Pologne et Hongrie); presse des 21 et 22.3.02 (Italie); presse du 21.5.02 (Roumanie).
[57] Presse du 2.3.02 (Metzler aux Etats-Unis); presse du 13.6.02 et
24h, 14.6.02 (Ashcroft en Suisse);
LT, 5.9.02 (accord de coopération).
[58]
LT, 4, 5 et 8.4.02 (voyage Deiss);
24
h, 6.5.02 (voyage Couchepin).
[59]
LT, 10.1, 8.3, 12.8 et 23.9.02;
Bund, 15.1.02;
NLZ, 16.1.02; presse du 21.1.02;
24 h, 2.9.02.
[60]
FF, 2002, p. 7063 ss. (projet de loi) et p. 7395 (crédit cadre); presse du 24.10.02.
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