Année politique Suisse 2009 : Chronique générale / Défense nationale
Organisation militaire
Suite aux accidents de la Kander et de la Jungfrau qui ont vu 11 militaires se tuer (voir infra), l’armée a mis en place des
cours de formation de gestion du risque pour les cadres de l’armée. Les partis de gauche ont estimé que cette réaction n’était pas suffisante ou était sous-développée
[14].
En août, Ueli Maurer a présenté sa
vision des réformes à mener dans l’armée. Il a dit vouloir réduire les effectifs à 80 000 hommes contre les 120 000 du moment. Cette annonce pouvait paraître surprenante car sa propre vision et celle de son parti poussait plutôt à une augmentation du nombre de militaire au sein d’une armée de milice traditionnelle. Il a également souhaité cibler les interventions internationales sur les compétences spécifiques de l’armée suisse (sanitaire, sauvetage et protection atomique et chimique) et réduire les moyens octroyés aux armes lourdes (artillerie et chars)
[15].
Au mois de septembre, la décision provisoire d’octobre de l’année précédente concernant la
fin de la garde avec l’arme chargée a été adoptée définitivement. Le DDPS a rétabli l’ancien règlement où le magasin de l’arme était plein mais sans mouvement de charge
[16].
En mars, les discussions sur le projet de modification de la LAAM présenté au début de l’année précédente ont repris dans le cadre d’une procédure d’élimination des divergences. Après la décision du Conseil des Etats de maintenir sa position de l’année précédente, les deux chambres s’opposaient encore sur trois volets du projet. Le Conseil des Etats souhaitait maintenir les cours de répétitions à l’étranger pour certaines formations de troupe tandis que le Conseil national s’y opposait. La chambre des cantons a en outre estimé que l’engagement de militaires à l’étranger pour une durée de plus de trois mois dans le cadre de la promotion de la paix et pour le service d’assistance exigeait une approbation du parlement au plus tard lors de la deuxième séance suivant l’engagement, alors que celle du peuple a considéré que l’aval devait être donné au plus tard lors de la séance suivant l’engagement. Enfin, la chambre haute a jugé que l’engagement de troupes pour protéger les représentations suisses à l’étranger nécessitait la consultation des seuls présidents des CPS et des commissions de politique extérieure (CPE), quand la chambre basse a estimé que la consultation devait s’adresser à tous les membres de ces mêmes commissions. Les chambres ayant maintenu leur position respective sur ces trois points de désaccord, la convocation d’une conférence de conciliation a été nécessaire. Le Conseil national a rejeté les propositions de la conférence de conciliation par 108 voix contre 63 suivant ainsi une minorité de la CPS-CN soutenue par la majorité des membres des groupes socialistes, verts et UDC. En conséquence, le projet a été liquidé BO CN, 2009, p. 967 ss. et 1152 ss.; BO CE, 2009, p. 17 ss. et 473 s.; LT, 21.1 et 11.6.09; NZZ, 23.1 et 11.6.09. Voir APS
2008, p. 85 ss..
En juin, une motion Eichenberger-Walther (plr, AG) a été déposée et ensuite adoptée par le Conseil national. Elle demande au Conseil fédéral de créer des bases légales pour des mesures plus pointues en matière de non-recrutement ou d'exclusion de l'armée. Ces mesures devaient ainsi déployer leurs effets avant et pendant toute la durée des obligations militaires. Le Conseil fédéral a répondu au mois d'août qu'il partageait cet avis et qu'il étudiait un nouveau projet de révision de la LAAM à proposer au parlement BO CN, 2009, p. 1802 s..
En août, le Conseil fédéral a présenté son message sur un nouveau projet de modification de la LAAM. Ce projet allégé a fait suite au classement du projet de modification de la LAAM de 2008 (voir supra). Il ne contient donc plus les éléments contestés et reprend les autres dispositions présentées en mars 2008, à savoir les renseignements sur les candidats à une fonction de cadre, la remise de l'arme personnelle, la vente d'immeubles militaires et les prestations commerciales du DDPS. Au Conseil des Etats, une proposition de renvoi David (pdc, SG) souhaitant donner un signal clair au Conseil fédéral de la volonté de mettre en place un débat de fond sur les orientations de l’armée a été refusée par 21 voix contre 19. Le Conseil des Etats a toutefois modifié le projet. Au vote sur l’ensemble, le projet du Conseil fédéral a été adopté à l’unanimité FF, 2009, p. 5331 s.; BO CE, 2009, p. 1248 ss. Voir APS 2008, p. 85 ss..
En début d’année, le Conseil fédéral a lancé une procédure de consultation concernant la révision partielle de la loi sur l’assurance militaire (LAM). Il souhaitait aligner les prestations sur celles de l’assurance accident (LAA) au sein de la caisse nationale suisse d’assurance en cas d’accident (CNA). Les synergies en matière de gestion qui auraient résulté de la revue des prestations devaient permettre une économie de l’ordre des 10 millions de francs. L’accueil du projet a été mitigé. Le PS, le PLR et l’UDC ont rejeté la révision. Les opposants estimaient que les coûts étaient redistribués dans les comptes de la Confédération et doutaient donc des possibilités d’économie. Ils critiquaient également la perte de couverture des assurés et la référence à la LAA alors que cette dernière était en discussion au parlement. Au vu de ces discussions, le Conseil fédéral a décidé d’attendre la finalisation de la révision de la LAA avant d’entamer une révision de la LAM FF, 2009, p. 481; DFI, Communiqué de presse, 14.1 (consultation) et 28.10.09 (suspension)..
En septembre, le Conseil des Etats a adopté une motion Maury Pasquier (ps, GE) demandant au Conseil fédéral d’introduire dans la révision de la loi sur le matériel de guerre (LMG) une interdiction du financement des armes interdites par la Convention d'Oslo
sur les armes à sous-munitions afin de permettre sa ratification. La députée a estimé que bien que la convention interdît l'assistance, l'encouragement et l'incitation à la production des armes à sous-munitions, la LMG ne disait rien sur le financement par des personnes physiques ou morales des entreprises étrangères qui produisaient des armes interdites par cette même loi BO CE, 2009, p. 864 ss. Voir APS
2008, p. 92..
En juillet, la justice militaire a décidé de ne pas inculper le supérieur direct du commandant de la compagnie de transport aérien qui avait vu 4 de ses hommes tués et un disparu dans
l’accident de bateau sur la Kander. En septembre, elle a par contre décidé de lancer des procédures à l’encontre du commandant de la compagnie qui avait organisé l’exercice sur la Kander de juin 2008 ainsi que des deux guides présents lors de
l’accident de la Jungfrau en juillet 2007
. Ils devaient tous répondre d’homicide par négligence. Le commandant a été reconnu coupable de lésions corporelles et d’homicides par négligences multiples en octobre. Il a été condamné à une peine conditionnelle privative de liberté de 18 mois et à l’exclusion de l’armée. Les deux guides de montagnes ont eux été acquittés en novembre de l’année sous revue. L’accusation a fait appel
[22].
Au mois d'avril, le Conseil fédéral a donné son avis concernant le rapport de la commission de gestion du Conseil national (CdG-CN) de novembre 2008 sur les circonstances de la nomination de Roland Nef au poste de chef de l’armée. Dans son rapport, la CdG-CN avait recommandé au Conseil fédéral de prendre des mesures pour améliorer le processus de sélection des personnes amenées à occuper des postes à très haute responsabilité, de mener une réflexion de fond sur l’implication du Conseil fédéral lors de la procédure de sélection de certaines fonctions sensibles de l’administration fédérale, de mettre en place des ajustements au niveau du déroulement du contrôle de sécurité relatif aux personnes (CSP) et finalement de régler de manière contraignante la situation juridique relative au versement d’indemnités lors d’une cessation d’un commun accord des relations de travail. Dans sa réponse, le Conseil fédéral a refusé de subordonner le service spécialisé du CSP à la Chancellerie fédérale. Il estimait que 90% des CSP se faisaient pour le DDPS et que l'exécution de ces procédures exigeait une très bonne connaissance des domaines concernés. Il a par contre proposé des modifications prenant en compte, totalement ou partiellement, les autres recommandations de la CdG-CN. Il a notamment accepté la recommandation demandant une exécution du CSP avant même la nomination pour les postes à très haute responsabilité et celle posant clairement l'indépendance du service spécialisé CSP FF, 2009, p. 2989 ss. et 3045 ss. (CF). Voir APS
2008, p. 91..
A la fin du mois de février, le Conseil fédéral a
nommé le divisionnaire André Blattmann à la tête de l’armée sur proposition du chef du DDPS, Ueli Maurer. Ce titulaire d’un MBA de 52 ans originaire de Hinwil (ZH) assurait l’intérim au poste de chef de l'armée depuis le départ de Roland Nef. Il a ainsi été promu au grade de commandant de corps. Cette nomination a été jugée surprenante par divers commentateurs car elle s’est faite aux dépens du divisionnaire Hans-Ulrich Solenthaler (62 ans) dont la conception de l’armée se rapprochait fortement de la vision conservatrice du chef du DDPS et de l'UDC DDPS, Communiqué de presse, 25.2.09; SGT, 7.2.09; presse du 26.2.09..
Le DDPS a estimé que l’engagement subsidiaire de sécurité de l’armée lors du WEF de Davos (GR) s’est déroulé sans accident ou incident grave en 2009. L’armée a engagé jusqu’à 4500 militaires pour 71 044 jours de service du 19 janvier au 5 février dans le service d’appui aux autorités civiles du canton des Grisons. Les coûts pour l’armée ont été estimés à près de 2 millions de francs supplémentaires à ce qu’auraient coûté des cours de répétition ordinaires DDPS, Communiqué de presse, 9.1, 1.2 et 6.2.09..
Au mois de mars, le Conseil fédéral a présenté son message concernant l’arrêté fédéral sur l’engagement de l’armée en service d’appui au profit du canton des Grisons dans le cadre des mesures de sécurité lors des rencontres annuelles du World Economic Forum (WEF) de 2010 à 2012 à Davos. Le gouvernement a estimé que les menaces étaient similaires que lors de la période de 2007 à 2009. Il a ainsi proposé, suite à la demande que lui avait faite le canton des Grisons au mois de juin de l’année sous revue, l’engagement annuel de 5000 militaires au maximum en service d’appui pour aider le canton des Grisons dans la mise en place de mesures de sécurité dans le cadre de ces rencontres annuelles. L’armée n’accomplirait pas de tâches de service d’ordre et, par rapport aux dépenses pour des manœuvres ordinaires, cet engagement occasionnerait des coûts supplémentaires d’environ 1,5 million de francs par an. Le gouvernement a en outre prévu de participer aux frais de sécurité. Au Conseil national, une proposition de non entrée en matière a été faite par la députée Fässler-Osterwalder (ps, SG) en raison du caractère privé des rencontres annuelles organisées par le WEF. Cette proposition a été rejetée par 117 voix contre 56. Lors de la discussion par article, une minorité Lang (pe, ZG) a proposé de prendre une décision concernant la sécurité pour la rencontre de 2010 et de ne pas traiter des années suivantes. Cette dernière a été rejetée par 114 voix contre 50. Au vote sur l’ensemble, le projet du Conseil fédéral a été approuvé par 114 voix contre 55, seuls les groupes socialiste et écologiste ont rejeté le projet. Au Conseil des Etats, le projet n’a pas rencontré d’opposition et a été adopté à l’unanimité FF, 2009, p. 1603 ss.; BO CN, 2009, p. 1112 ss., BO CE, 2009, p. 795 s. Voir APS 2006, p. 82 s. .
[16]
TG, 1.9.09. Voir
APS
2008, p. 85.
[22]
NZZ, 20.7, 11.9, 21.10, 22.10, 21.11, 24.11 et 26.11.09.
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