Année politique Suisse 2010 : Infrastructure, aménagement, environnement / Transports et communications
 
Chemin de fer
En début d’année, la CTT-CN a présenté le projet de loi sur les organes de sécurité des entreprises de transports publics (LOST), qu’elle a élaboré suite à l’échec, l’année précédente, du projet gouvernemental portant le même titre. S’il reprend tels quels les éléments non contestés de la première tentative, le nouveau projet exclut la possibilité de déléguer à des tiers les tâches relevant de la police des transports, afin de rallier le PS et l’UDC qui avaient catégoriquement refusé leur privatisation. Il définit en outre précisément les tâches respectives de la police des transports et du service de sécurité. Concernant l’armement éventuel des policiers des transports, la commission a renoncé à légiférer, préférant confier au gouvernement la compétence d’en décider en fonction de l’évolution de la situation. Le Conseil fédéral a émis un avis très favorable sur l’ensemble du projet, ne formulant aucune critique, ni même la moindre réserve. Il a par ailleurs souligné la nécessité de remplacer la loi du 18 février 1878 concernant la police des chemins de fer, en raison de son obsolescence manifeste [42].
Lors de la session de printemps, le Conseil national a approuvé l’entrée en matière sans opposition. Lors de la discussion par article, l’armement des agents de la police des transports a une nouvelle fois suscité la controverse. Une minorité Lachenmeier-Thüring (ps, BS) a proposé d’exclure expressément la possibilité pour ces agents de porter des armes à feu, estimant que ni leur sécurité, ni celle des usagers des transports publics ne l’exigent, d’autant plus que l’arrestation et la poursuite pénale sont de la compétence des polices cantonales auxquelles la police des transports ne fait que remettre les contrevenants. À l’inverse, Max Binder (udc, ZH), au nom de la commission, a rappelé que le choix de cette dernière de confier au Conseil fédéral la compétence de déterminer l’équipement de la police des transports en fonction des risques effectifs résultait d’un compromis entre partisans et adversaires du précédent projet. Par 113 voix contre 30, les députés ont suivi leur commission et rejeté la proposition minoritaire. Une minorité Markus Hutter (plr, ZH) a en outre proposé de permettre non seulement à la police des transports, mais aussi au service de sécurité d’arrêter provisoirement les resquilleurs à des fins d’identification et de maintien de la sûreté. La commission a répliqué que l’attribution d’une compétence policière à des agents ne disposant pas de la formation correspondante était problématique, en pratique comme du point de vue de l’Etat de droit, et revenait d’ailleurs peu ou prou à supprimer la distinction entre service de sécurité et police des transports. Là encore, le plénum a suivi sa CTT, par 128 voix contre 30. Les autres dispositions n’ont pas suscité de discussion et, au vote sur l’ensemble, le projet de LOST a été adopté par 152 voix contre 5.
Au Conseil des Etats, le projet a reçu un accueil très favorable. Sur proposition de leur commission, les sénateurs l’ont toutefois amendé afin d’obliger toute entreprise de transport qui gère sa police des transports à offrir ses prestations aux autres entreprises de transport à des conditions comparables, l’OFT étant par ailleurs habilité à statuer en cas de litige. Au vote sur l’ensemble, la chambre des cantons a adopté le projet ainsi modifié à l’unanimité. La chambre basse ayant tacitement éliminé cette unique divergence, la LOST a été adoptée en votation finale à l’unanimité par les deux conseils [43].
À l’automne, l’OFT a lancé une procédure d’audition concernant l’ordonnance d’application de la LOST. La controverse au sujet de l’armement éventuel de la police des transports a ainsi été ravivée. Le gouvernement a proposé de renoncer à armer les policiers, estimant que la situation ne l’exige pas. Si les entreprises de transport ont partagé cette opinion, la Conférence des directeurs cantonaux de la police et le syndicat des officiers de police ont au contraire jugé nécessaire d’autoriser le port d’armes à feu [44].
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NLFA, ZEB, Rail 2030 et autres infrastructures ferroviaires
L’OFT et les CFF ont rendu public le concept « Rail 2030 ». Selon le mandat du Conseil fédéral, l’OFT a d’abord déterminé les besoins à l’horizon 2030 et les travaux nécessaires pour les satisfaire, avant d’élaborer deux variantes, respectivement à 12 et à 21 milliards de francs, cette dernière incluant le trafic régional. Pour répondre à la croissance de la demande, le concept retenu privilégie l’augmentation du nombre de trains, l’allongement des trains et des quais de gare à 400 mètres, ainsi que la généralisation des trains à deux niveaux avec l’adaptation en conséquence des gabarits des tunnels. La construction de voies ferrées supplémentaires et de tunnels joue ainsi un rôle tout à fait secondaire dans la stratégie présentée (à l’exception des tunnels du Heitersberg, dans la variante 1, et du Zimmerberg, dans la variante 2). Les projets prioritaires de la variante 1 concernent les axes Genève-Lausanne-Viège et Genève-Berne-Zurich-St-Gall, pour le trafic voyageurs « grandes lignes », et les axes Lausanne-Neuchâtel-Bienne-Berne-Aarau-Zurich et Bâle-gare de triage du Limmattal-Rotkreuz, pour le trafic marchandises. La variante 2 comprend en outre des projets visant à développer le trafic marchandises au St-Gothard et le trafic régional dans les régions de Bâle, de Berne, de Lucerne, de Saint-Gall et de Zurich, ainsi que les liaisons de Zurich en direction de Zoug, de Lucerne et du Tessin et celle entre Lugano et Locarno. Plusieurs projets âprement discutés ces dernières années (troisième voie Lausanne-Genève, achèvement du Lötschberg, tunnel du Wisenberg, etc.) ont été exclus des variantes et relégués au troisième rang de priorité. Le concept ne règle pas la question du financement, mais l’OFT a communiqué diverses options encore à l’étude. En l’état, les investissements nécessaires sont estimés, selon la variante, de 300 à 600 millions de francs par an de 2017 à 2030. L’OFT a évoqué la possibilité de prolonger le fonds pour les transports publics (FTP) et de l’alimenter par la part fédérale aux recettes de la RPLP, une part de l’impôt sur les huiles minérales et 0,1% de TVA. L’introduction d’une redevance sur les titres de transports de 5-10% du prix (taxe sur la mobilité), l’affectation au FTP de la part des cantons à la RPLP, la hausse du prix du sillon ou la conclusion de partenariats publics-privés sont également étudiées. Après la soumission du concept aux cantons pour avis, la mise en consultation d’un avant-projet de message est prévue d’ici à l’été 2011.[45].
Lors de la consultation, la priorité accordée au trafic voyageurs « grandes lignes » sur le plateau a été critiquée par les cantons de montagne et périphériques. La relégation des projets de développement de l’axe ferroviaire du Gothard dans la seconde variante a suscité la colère du Comité du St-Gothard, réunissant des représentants des treize cantons sis sur cet axe. Les cantons de Berne et du Valais ont quant à eux vivement déploré l’exclusion du projet d’achèvement du tunnel du Lötschberg (cf. infra), alors que les cantons de Glaris, des Grisons, de Saint-Gall, de Schwytz et de Zurich ont réclamé le passage à la cadence semi-horaire de la liaison Coire-Zurich par les trains Intercity. Si les cantons du plateau se sont montrés majoritairement favorables au concept, le canton de Genève a fustigé l’abandon du projet de troisième voie entre Lausanne et Genève et celui d’Argovie s’est élevé contre la relégation du tunnel du Wisenberg. Quant au financement, les cantons ont unanimement rejeté les mesures proposées par l’OFT, dénonçant une tentative de transfert de charges. La Conférence des directeurs cantonaux des transports a ainsi catégoriquement refusé l’affectation de la part cantonale de la RPLP à Rail 2030, rappelant que, s’agissant d’une tâche fédérale, il incombe à la Confédération de pourvoir à son financement [46].
Ouvert en 2007, le tunnel du Lötschberg a déjà atteint sa capacité limite, a annoncé la compagnie BLS au printemps. Son succès est tel que l’offre de sillons, en particulier en matière de trafic marchandises transalpin, ne parvient plus à satisfaire la demande et que des goulets d’étranglement sont apparus, notamment entre Berne et Thoune, dans la vallée de l’Aar, et entre Bâle et Olten (tunnel du Wisenberg). Afin de répondre à la demande croissante, la société a jugé nécessaire l’achèvement du tunnel, par l’équipement du second tube sur le tronçon Ferden-Mitholz, et la construction d’une troisième voie sur le tronçon Gümlingen-Münsingen (BE). Selon les résultats d’une étude réalisée sur mandat de BLS, l’achèvement est techniquement réalisable dans un délai de 12 ans pour un montant total de 1,33 milliard de francs. Une variante réduite, se limitant à l’équipement du second tube, coûterait quant à elle 790 millions de francs. L’achèvement du tunnel permettrait d’offrir une cadence semi-horaire pour le trafic voyageurs et de doubler la capacité pour le trafic marchandises. Les gouvernements bernois et valaisan ont accueilli avec enthousiasme les résultats de cette étude et se sont engagés à intervenir auprès de la Confédération afin que celle-ci intègre le Lötschberg à la variante 1 du projet Rail 2030. Ils ont par ailleurs proposé de financer les travaux au moyen des amortissements que verse BLS à la Confédération à raison de 75 millions de francs par an. Afin de mener la lutte sur le terrain fédéral, les deux cantons ont créés un « comité pour le Lötschberg » [47].
À la suite du Conseil des Etats l’année précédente, le Conseil national a adopté, par 96 voix contre 45, la motion Bieri (pdc, ZG) chargeant le Conseil fédéral de réexaminer les mesures de lutte contre les nuisances sonores générées par le trafic ferroviaire et, le cas échéant, d’en proposer d’autres à titre complémentaire dans le cadre de l’élaboration du message Rail 2030 [48].
Après la décision de principe du Conseil fédéral, en toute fin d’année 2009, de ne pas proposer au parlement d’augmenter les ressources destinées à l’entretien des infrastructures des CFF et des chemins de fer privés, l’ancienne régie a mandaté un audit externe concernant les investissements nécessaires pour rattraper le retard accumulé en matière d’entretien et de renouvellement de son réseau. L’expertise a conclu au bon état d’ensemble du réseau CFF, mais elle a souligné un retard d’investissements de l’ordre de 1,35 milliard de francs accumulé au cours des quinze dernières années, résultant principalement des coupes budgétaires décidées par la Confédération. Globalement, les experts ont évalué les moyens financiers supplémentaires nécessaires pour la période 2011-2016 à 850 millions de francs par an de sorte à couvrir le rattrapage du retard d’investissements (130 millions), l’entretien ordinaire du réseau (410 millions), la mise aux normes des tunnels et la conformation aux exigences de la loi sur les handicapés (150 millions), l’élimination des défauts structurels (quais, passages sous voies, approvisionnement électrique ; 140 millions) et les coûts imputables à la croissance du trafic (20 millions). Au total, la facture approcherait ainsi les 6 milliards de francs. Des mesures d’économies peuvent y contribuer à hauteur de 100 millions de francs par an, grâce à la suppression de 300 à 350 emplois au sein de la division Infrastructure et à la simplification des procédures internes. Pour le solde, la direction des CFF a jugé inévitable une augmentation de la contribution de la Confédération dans le cadre de la convention de prestation, une hausse des tarifs du trafic voyageurs ne suffisant pas [49].
Vu l’importance du montant, l’OFT a mandaté une contre-expertise. Le Conseil fédéral n’en a toutefois pas attendu le résultat pour adopter le message sur le financement de l’infrastructure ferroviaire suisse (CFF et chemins de fer privés) et sur la convention sur les prestations entre la Confédération et les CFF pour les années 2011-2012. Ce projet concrétise l’harmonisation du financement de l’infrastructure des CFF et des chemins de fer privés entérinée par les chambres lors de l’adoption, en 2008, de la loi sur la réforme des chemins de fer 2. Le gouvernement y définit les objectifs de développement de l’infrastructure ferroviaire financée ou cofinancée par la Confédération, ainsi que les moyens alloués pour les années 2011 et 2012. Le message comporte une modification de la loi sur les Chemins de fers fédéraux (LCFF) ramenant, à titre transitoire, de 4 à 2 ans la période du financement, ainsi que trois projets d’arrêtés fédéraux. Si le premier concerne l’approbation de la convention sur les prestations entre la Confédération et les CFF, les deuxième et troisième portent respectivement sur le financement de l’infrastructure des CFF et des chemins de fer privés suisses pour les années 2011 et 2012. Globalement, le Conseil fédéral demande un crédit de 4542 millions de francs pour les années 2011 et 2012, à raison de 3322 millions pour l’infrastructure des CFF (+332 millions par rapport à la convention 2007-2010) et 1220 millions pour celle des chemins de fer privés (+87 millions). Ces montants sont uniquement destinés à garantir l’entretien et l’exploitation de l’infrastructure existante. En raison du programme de stabilisation des finances fédérales, le gouvernement a renoncé à proposer des investissements pour le développement du réseau ferroviaire [50].
À peine une semaine après l’adoption du message gouvernemental, l’OFT a publié les résultats de la contre-expertise, qui a conclu à la nécessité d’augmenter les moyens alloués à l’entretien du réseau des CFF, dans une mesure toutefois moindre que ne l’avait revendiqué l’ancienne régie. En effet, en tenant compte du potentiel d’économies dû aux gains d’efficience et en proposant d’étaler les travaux, les spécialistes mandatés par l’OFT ont estimé à 500 millions de francs par an les moyens supplémentaires nécessaires à l’entretien de l’infrastructure ferroviaire pour la période 2011-2016. Ce montant demeure toutefois largement supérieur à la hausse de la contribution proposée par le Conseil fédéral dans le projet de convention de prestations 2011-2012 (+160 millions de francs par an). Un financement complémentaire devra ainsi être trouvé lors de l’élaboration de la convention pour les années 2013 à 2016, de sorte à couvrir la facture globale de 3,5 milliards de francs. L’OFT a notamment souligné que, contrairement à la hausse de la subvention 2011-2012, les moyens supplémentaires pour la période 2013-2016 ne pourront pas être prélevés sur le fonds FTP sans remettre en cause la réalisation des projets de développement de l’infrastructure ferroviaire (ZEB). Réagissant simultanément au message du Conseil fédéral et à la contre-expertise, le directeur général des CFF, Andreas Meyer, a estimé absolument nécessaire l’octroi par la Confédération de 140 millions de francs supplémentaires pour 2011 et 2012, afin d’éliminer les goulets d’étranglements les plus graves [51].
Lors de la session d’automne, le Conseil des Etats est entré en matière sur le projet gouvernemental sans la moindre opposition. Les sénateurs ont adopté sans discussion et à l’unanimité la modification de la LCFF et l’arrêté fédéral portant approbation de la convention sur les prestations entre la Confédération et les CFF. Concernant l’infrastructure des CFF, une minorité Hêche (ps, JU) a repris à son compte la revendication du directeur des CFF et proposé de relever le plafond de dépenses de 140 millions de francs à 3462 millions de francs. La chambre haute a rejeté, par 19 voix contre 17, cette proposition, après que le président de la CTT-CE, Christoffel Brändli (udc, GR), a rappelé que cette hausse entraînerait nécessairement une coupe d’un montant identique dans d’autres projets financés par le fonds pour les transports publics (FTP). Au vote sur l’ensemble, les sénateurs ont unanimement approuvé ce deuxième arrêté. S’agissant de l’infrastructure des chemins de fer privés, la chambre haute a décidé, par 23 voix contre 16, d’augmenter la contribution de la Confédération, en la portant à 1279 millions, selon une proposition de la majorité de la CTT-CE visant à satisfaire une demande exprimée par les cantons, qui s’inquiétaient de l’écart entre la proposition du Conseil fédéral et les besoins exprimés par les entreprises (1,444 milliards de francs). Au vote sur l’ensemble, la chambre des cantons a adopté ce troisième arrêté par 32 voix contre 4.
Au Conseil national, la modification de la LCFF et la convention sur les prestations entre la Confédération et les CFF n’ont pas suscité de discussion et ont été adoptées, respectivement à l’unanimité et par 170 voix contre 1. Sur proposition de la majorité de la CTT-CN, les députés ont ensuite décidé, par 110 voix contre 67, d’augmenter de 140 millions de francs le crédit consacré à l’infrastructure des CFF. Au vote sur l’ensemble, ils ont adopté ce deuxième arrêté par 146 voix contre 30. Quant à l’infrastructure des chemins de fer privés, la chambre basse a suivi le Conseil des Etats, par 152 voix contre 4. Lors de l’élimination des divergences, le Conseil des Etats s’est tacitement rallié à la chambre du peuple au sujet de la hausse du financement destiné au réseau des CFF [52].
Le Conseil national a par ailleurs adopté tacitement un postulat Segmüller (pdc, LU) confiant au gouvernement l’examen de mesures visant à combler le retard en matière d’entretien du réseau CFF [53].
En raison de l’augmentation de la proportion de camions semi-remorques dans le trafic poids lourds transalpin, il sera nécessaire de réaménager les tunnels sur les voies d’accès au tunnel du Gothard, de telle sorte que leur gabarit passe de 3,8 à 4 mètres de hauteur. Interpellé dans la presse par l’entreprise de transport combiné Hupac, l’OFT a indiqué qu’il étudiait le problème de concert avec les CFF, qui doivent lui soumettre des propositions au début de l’année 2011. A priori, près de cent tunnels sont concernés et les travaux pourraient coûter de 250 à 600 millions de francs. L’office a évoqué la possibilité de les financer grâce aux recettes des taxes routières ou à travers la convention de prestations avec les CFF [54].
La Délégation de surveillance de la NLFA (DSN) s’est inquiétée du raccordement de l’axe suisse nord-sud au réseau ferroviaire allemand. En raison des nombreuses oppositions au projet d’élimination du goulet d’étranglement sur le tronçon Bâle-Karlsruhe (D), la mise en service des deux voies supplémentaires dédiées au trafic marchandises ne surviendra pas d’ici à l’ouverture du tunnel de base du Gothard, en 2017. La DSN a invité les CTT des chambres à se saisir du problème [55].
Les travaux de percement du tunnel de base du Ceneri (15,4 km), à partir du portail sud, à Vezia, près de Lugano, ont débuté au printemps de l’année sous revue. Leur achèvement est prévu d’ici à mi 2012 [56].
À l’automne, le percement du tube est du tunnel de base du Gothard s’est achevé après onze ans de travaux [57].
Contrairement au Conseil national l’année précédente, le Conseil des Etats a rejeté tacitement la motion Reymond (udc, GE) demandant la publication des comptes de résultat des lignes voyageurs intervilles des CFF préalablement à l’examen par les chambres des projets d’extension du réseau ferroviaire (ZEB). À la suite de leur CTT, les sénateurs ont estimé que l’évaluation de ces projets exige une approche globale et, donc, en aucun cas une démarche se limitant à des comparaisons interlignes et à des considérations de politique régionale, comme le proposait le motionnaire [58].
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Réforme des chemins de fer
Le Conseil fédéral a adopté le message sur la deuxième partie de la réforme des chemins de fer 2, laquelle vise principalement à adapter le réseau ferroviaire suisse aux normes techniques en vigueur dans toute l’Europe de sorte à garantir l’interopérabilité des réseaux nationaux et ainsi abolir les obstacles techniques entravant le trafic international. Outre la reprise des premier et deuxième paquets ferroviaires de l’UE, le projet prévoit l’introduction du système de mise au concours des concessions pour le transport des voyageurs par bus et rend possible son introduction pour le transport par rail. Le gouvernement propose également de renforcer la Commission d’arbitrage dans le domaine des chemins de fer (CACF) en lui permettant d’ouvrir d’office des enquêtes et de prendre des décisions en cas d’irrégularités dans l’accès au réseau. Le projet comporte par ailleurs une base légale obligeant les gestionnaires de l’infrastructure ferroviaire à prendre en charge les coûts des services de protection (pompiers, services de sauvetage, etc.) mis à disposition par les cantons. Enfin, la réforme prévoit l’attribution au Conseil fédéral de la compétence de déterminer la valeur-limite d’alcoolémie applicable à la conduite des bateaux [59].
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Trains à grande vitesse
Les chambres ont adopté une motion du sénateur Claude Janiak (ps, BL) chargeant le Conseil fédéral d’allonger de cinq ans les délais pour la réalisation du raccordement de l’aéroport de Bâle-Mulhouse au réseau ferroviaire. Ce projet est censé bénéficier du soutien de la Confédération pour un montant de 25 millions de francs au titre de la première phase du raccordement aux lignes à grande vitesse à condition toutefois que les travaux débutent d’ici à fin 2010 et s’achèvent au plus tard en 2015. Or, en raison du statut trinational de l’aéroport, l’élaboration du projet s’est avérée très complexe, exigeant notamment de longues négociations entre les partenaires des trois pays, de telle sorte que les travaux ne peuvent débuter en 2010. Si l’arrêté fédéral voté en 2005 laissait au gouvernement la possibilité de proroger ces délais, la motion transmise par les chambres l’y oblige [60].
En fin d’année, le Conseil fédéral s’est exécuté et a approuvé le prolongement général de cinq ans des délais de construction et de mise en service des projets relatifs au raccordement de la Suisse orientale et occidentale au réseau européen de lignes à grande vitesse (LGV). Ainsi, les travaux doivent désormais démarrer d’ici à 2015 et les raccordements concernés entrer en service au plus tard en 2020 [61].
S’agissant plus particulièrement du raccordement de la Suisse orientale au réseau européen à grande vitesse, le Conseil fédéral a approuvé trois conventions de financement avec les CFF concernant des adaptations des installations d’accueil et du plan des voies à Sargans et des transformations d’installations à St-Gall et sur le tronçon Rorschach-Staad. Comme précédemment, ce cinquième paquet de conventions est financé par le fonds FTP à hauteur de 37,2 millions de francs, le solde étant à la charge des communes concernées. La mise en service des nouvelles installations surviendra au plus tard à fin 2012 [62].
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CFF
Les CFF ont annoncé la création par CFF Cargo et Hupac d’une société commune pour le trafic alpin de marchandises entre l’Allemagne et l’Italie, baptisée SBB Cargo International. Les deux entreprises suisses entendent par là unir leurs forces face à la concurrence croissante des compagnies étrangères actives sur l’axe nord-sud, notamment dans la perspective de l’ouverture du tunnel de base du Gothard. Selon les deux parties, la nouvelle entreprise, forte de 480 emplois, aura l’avantage de bénéficier à la fois du savoir-faire ferroviaire de CFF Cargo et de l’expérience d’Hupac en matière de transport combiné. La filiale de l’ancienne régie espère ainsi réduire ses frais structurels de moitié et accroître sa productivité en se concentrant sur le trafic national. Ce transfert des activités internationales de CFF Cargo entraînera la suppression de 157 emplois au sein de celle-ci d’ici à 2013, mais sans licenciement, a assuré le directeur de CFF Cargo, Nicolas Perrin [63].
Le Tribunal fédéral a finalement donné raison à l’OFT dans l’affaire du passager muni d’un billet de 2e classe mais circulant en 1ère classe. Les CFF ne peuvent pas infliger une sanction identique à un passager circulant sans billet et à un autre circulant avec un billet pour une prestation de valeur inférieure et doivent instituer un système de sanction différencié afin de respecter le principe d’égalité garanti par la Constitution fédérale. En fin d’année, l’UTP a annoncé l’instauration d’un nouveau régime de sanction. À compter de juin 2011, les resquilleurs devront s’acquitter d’une amende de 100 francs, tandis que les voyageurs en possession d’un billet insuffisant devront payer un supplément de 75 francs [64].
Au terme d’âpres négociations, les CFF et les organisations du personnel ont conclu une nouvelle convention collective de travail réformant totalement le système salarial de l’ancienne régie. En lieu et place d’un régime à 29 classes de salaires récompensant l’ancienneté à travers une progression automatique, le nouveau système se fonde principalement sur les exigences des postes de travail, les prestations individuelles des collaborateurs et les conditions du marché pour fixer la rémunération. Cette réforme, en particulier la généralisation du salaire au mérite, vise à accroître la productivité et la compétitivité de l’entreprise [65].
Le tribunal arbitral a tranché le litige entre la direction des CFF et les syndicats au sujet des négociations salariales pour 2010, en décidant une hausse de 0,5% de la masse salariale et l’octroi d’une prime unique de 650 francs par collaborateur au titre de gratification pour le bon exercice 2009. Les syndicats, qui réclamaient une augmentation compensant au minimum le renchérissement, ont fait part de leur déception [66].
Les CFF ont conclu le « contrat du siècle » avec la firme Bombardier pour la livraison de 59 rames de train à deux niveaux pour un montant de 1,9 milliard de francs. L’annonce du choix de l’entreprise canadienne, au détriment de l’allemande Siemens et de la suisse Stadler Rail, a suscité une brève polémique, initiée par le conseiller national Peter Spuhler (udc, TG), par ailleurs patron de Stadler Rail, lequel a dénoncé une décision contraire aux intérêts de l’économie suisse et exprimé des doutes sur le prix relativement bas proposé par Bombardier (de 200 millions de francs inférieur aux offres de Siemens et Stadler). Stadler et Siemens ont toutefois décidé de ne pas recourir contre la décision des CFF [67].
Le TAF a enjoint les CFF de respecter la loi fédérale sur le travail en ramenant le temps de travail quotidien moyen de leurs collaborateurs à 9 heures au maximum. La direction de l’ancienne régie n’avait jusque là appliqué cette règle qu’aux employés travaillant par série de 7 jours consécutifs sans congé. Donnant raison à l’OFT, les juges ont rappelé la validité générale de la limite légale de la durée quotidienne moyenne du travail [68].
L’annonce, à quelques jours d’intervalle, des démissions de Jürg Schmid et Thomas Remund, respectivement directeur de la division voyageurs et responsable des finances des CFF, a suscité passablement de commentaires et d’interrogations dans la presse comme au parlement. Six cadres supérieurs ont en effet quitté la direction du groupe depuis l’accession de Andreas Meyer à la direction générale exécutive, en 2007. La presse a évoqué la manière relativement brutale avec laquelle Meyer assume la conduite du groupe et la faible marge de manœuvre laissée aux directeurs de division pour expliquer ces départs. Interpellé par la conseillère nationale Chiara Simoneschi-Cortesi (pdc, TI), le Conseil fédéral a tout d’abord souligné les causes fort diverses de ces démissions avant de rappeler que leur nombre n’a rien d’inhabituel s’agissant d’une entreprise confrontée à des défis importants, comme le sont les CFF actuellement. En tant que propriétaire, il a par ailleurs exclu toute intervention dans la politique du groupe en matière de recrutement du personnel dirigeant, cette compétence incombant au Conseil d’administration [69].
Le Conseil fédéral a adopté le message sur la modification de la loi fédérale sur les Chemins de fer fédéraux (LCFF) relative l’assainissement de la caisse de pension des CFF (CP CFF). Conformément à ce qu’il avait annoncé au terme de la consultation, l’année précédente, le gouvernement propose que la Confédération contribue à l’assainissement à hauteur de 1,148 milliard de francs. Ce montant couvre les surcoûts liés aux prestations vieillesse versées jusqu’en 2006, lors du passage du système de primauté des prestations à celui de primauté des cotisations, ainsi que les pertes générées par l’abaissement du taux d’intérêt technique de 4% à 3,5%. Il ne permettra pas à lui seul de redresser le taux de couverture de la CP CFF, qui s’élevait à 84,4% à fin 2009. C’est pourquoi le conseil de fondation de la caisse et la direction des CFF ont annoncé, en 2009 déjà, des mesures complémentaires consistant en une participation substantielle des CFF (1,32 milliard) et de leur personnel (1,22 milliard), de sorte à retrouver une couverture complète d’ici à 2019.
Lors de la session d’hiver, le Conseil des Etats est entré en matière sur cette modification de la LCFF. Lors de la discussion par article, une minorité Stähelin (pdc, TG) a proposé d’introduire une disposition excluant explicitement la possibilité pour les institutions de prévoyance d’autres entreprises concessionnaires de solliciter une contribution similaire de la part de la Confédération. Jugeant inutile cette précision, dans la mesure où la LCFF ne concerne en aucune manière ces autres entreprises, les sénateurs ont rejeté, par 26 voix contre 15, cette proposition d’amendement et adopté, sans autre débat et à l’unanimité, la loi telle que présentée par le Conseil fédéral [70].
Pour la cinquième année consécutive, les CFF ont réalisé un exercice bénéficiaire en 2010 avec un excédent de recettes de 298,3 millions de francs (2009: 369,8 millions). Ce bénéfice est principalement imputable aux bons résultats des segments voyageurs et immobilier. Le nombre de voyageurs a crû de 6% pour s’établir à 347,1 millions (2009: 327,5 millions) et le nombre de voyageurs-kilomètres parcourus a augmenté de 5% à 17,5 milliards (2009: 16,677 milliards). Le résultat net du segment voyageurs a une nouvelle fois progressé pour s’établir à 292,6 millions de francs contre 280,6 millions en 2009. Bien que, contrairement à l’année précédente, les CFF n’aient pas réalisé de ventes immobilières majeures en 2010, le segment immobilier a dégagé un résultat d’exploitation de 246,7 millions de francs (2009 : 361,9 millions). Après versement des indemnités compensatoires au segment infrastructure (150 millions de francs) et paiement des intérêts et mensualités de remboursement du prêt accordé par le groupe CFF pour l’assainissement de la caisse de pension (79,2 millions de francs), le résultat du segment immobilier a régressé de 46,4% pour atteindre 3,3 millions de francs (2009: 6,2 millions). En dépit de la hausse de sa prestation de transport, le trafic des marchandises est demeuré nettement déficitaire avec un résultat de -64 millions de francs (2009: -62,5 millions), notamment en raison de la faiblesse de l’euro. CFF Cargo a pourtant enregistré une hausse de ses prestations de 12,3% pour atteindre 13 milliards de tonnes-kilomètres nettes (2009: 11,67 milliards). La direction du groupe a rappelé son objectif d’un résultat équilibré à moyen terme grâce à la réorientation stratégique en cours depuis 2009. La dette du groupe s’est par ailleurs une nouvelle fois péjorée de 763,2 millions de francs pour s’inscrire à 8,068 milliards de francs (2009 : 7,304 milliards). Cela résulte particulièrement d’investissements à hauteur de 965,8 millions pour le renouvellement du matériel roulant et de la contribution du groupe à l’assainissement de la CP CFF pour un montant de 938 millions de francs. Enfin, après la perte de 6,5 millions enregistrée l’année précédente, le segment infrastructure a retrouvé les chiffres noirs, affichant un bénéfice de 4,8 millions de francs [71].
 
[42] FF, 2010, p. 821 ss. (CTT-CN) et 845 ss. (CF). Cf. APS 2009, p. 163.
[43] BO CN, 2010, p. 216 ss., 1058 et 1163; BO CE, 2010, p. 668 ss. et 753; FF, 2010, p. 3863 ss.
[44] NZZ, 20.11.10.
[45] Presse du 24.3.10.
[46] Presse du 24.3.10; NZZ, 31.3.10; CdT, 10.4.10 (Gothard).
[47] Bund, 17.3.10 (BLS); NF, 24.3.10; presse du 30.10.10 (comité).
[48] BO CN, 2010, p. 225 s. Cf. APS 2009, p. 161.
[49] Presse du 20.2.10. Cf. APS 2009, p. 162.
[50] FF, 2010, p. 4495 ss. Concernant la loi sur la réforme des chemins de fer 2, cf. APS 2008, p. 161 s.
[51] Presse du 29.6.10; LT, 5.7.10 (Meyer).
[52] BO CE, 2010, p. 911 ss., 1319 ss. et 1357; BO CN, 2010, p. 1895 ss., 2032 ss. et 2186; FF, 2010, p. 8265 s. (LCFF), et 2011, p. 3323 ss. (arrêtés). Cf. APS 2009, p. 163.
[53] BO CN, 2010, p. 1652.
[54] TA, 28.5.10 (Hupac); presse des 28.10, 29.10 et 9.11.10.
[55] NZZ, 17.4.10.
[56] NZZ, 13.4.10.
[57] Presse du 8 au 16.10.10.
[58] BO CE, 2010, p. 440. Cf. APS 2009, p. 161.
[59] FF, 2011, p. 857 ss.; BaZ, NZZ et QJ, 21.10.10. Cf. APS 2009, p. 163 s.
[60] BO CE, 2010, p. 184; BO CN, 2010, p. 1000 ss. Concernant l’arrêté fédéral sur le crédit d’engagement pour la première phase du raccordement aux lignes à grande vitesse, cf. APS 2005, p. 150.
[61] NZZ, 18.12.10.
[62] SGT, 14.5.10.
[63] Presse du 5.2 et du 6.7.10. Cf. APS 2009, p. 165.
[64] Presse du 9.9 (TF) et du 11.11.10 (UTP). Cf. APS 2009, p. 164 s.
[65] AZ, NZZ, QJ et TG, 27.11.10.
[66] NLZ, 9.3.10.
[67] Presse du 31.3, du 14.5 (décision), du 28.5 (Stadler) et du 2.6.10 (Siemens).
[68] NZZ, 10.4.10.
[69] BO CN, 2010, p. 785; presse du 27.5 au 5.6.10.
[70] FF, 2010, p. 2295 ss.; BO CE, 2010, p. 1145 ss. Cf. APS 2009, p. 165 s.
[71] Presse du 31.3.11. CFF, communiqué de presse, 30.3.11. Cf. APS 2009, p. 166 s.