Année politique Suisse 1987 : Sozialpolitik / Gesundheit, Sozialhilfe, Sport
 
Politique de la santé
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Coûts de la santé
La recherche d'une plus grande efficacité du système médical et le contrôle de l'explosion des dépenses figurent une fois encore au premier plan des préoccupations de la politiqùe de la santé. L'accroissement fulgurant des frais médico-pharmaceutiques, en particulier des frais d'hospitalisation, n'est qu'en partie imputable au renchérissement. Il s'explique avant tout par l'intensification de l'offre médicale tant sur le plan des effectifs que des équipements, par l'augmentation des salaires réels du personnel soignant et des médecins hospitaliers ainsi que par des exigences accrues de la population à l'égard des prestations médicales. Des différents remèdes déjà proposés, aucun ne semble véritablement en mesure d'endiguer l'inflation des coûts de la santé. Les deux initiatives en matière d'assurance-maladie sur lesquelles le peuple devra se prononcer s'attaquent davantage au financement des coûts qu'à leur cause. Ces deux initiatives ainsi que la votation populaire relative à la révision de l'assurance-maladie et maternité seront traitées dans le chapitre I, 7c (Assurance-maladie et maternité).
L'ensemble des dépenses du système de santé, qui occupe actuellement près de 8% de la population active, a passé entre 1975 et 1984 de 9,8 à 16,5 milliards de francs, soit une augmentation de 68,5%. Sur ces 16,5 milliards, 37% sont supportés par les pouvoirs publics, 28% par les caisses-maladie et assurances sociales et 35% par les personnes qui paient directement une assurance-maladie ou un traitement. Si la répartition des coûts entre les divers secteurs, hôpitaux, médecins, médicaments, ne s'est guère modifiée, en revanche celle des charges a évolué aux dépens des caisses-maladie et, par conséquent, des assurés [1].
A la veille des élections fédérales, la Société suisse pour la politique de la santé a voulu connaître l'attitude des partis politiques face à la santé publique. Si les trois partis gouvernementaux bourgeois et le Parti libéral se sont faits les ardents défenseurs d'une responsabilité individuelle en la matière, le Parti socialiste, allié en la circonstance à d'autres forces de la gauche, a préconisé une conception plus étatiste. Dans chaque camp en présence, on a relevé une concordance entre le programme politique et la réalité parlementaire. Si tous les partis sont d'accord sur l'urgence d'endiguer les coûts de la santé, les moyens pour y parvenir diffèrent notablement. Tandis que les partis bourgeois insistent sur la réduction des prestations financières, la gauche souhaite pour sa part un contrôle sur la formation des prix [2].
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Médicaments
Après un échec en 1983, le renouvellement du concordat intercantonal sur les médicaments a été approuvé en procédure de consultation, a indiqué l'Office intercantonal de contrôle des médicaments (OICM). Ainsi, les cantons pourront conserver leur autonomie dans ce domaine. Le nouveau texte, qui s'efforce d'instituer en Suisse une base légale répondant aux exigences actuelles, prévoit notamment que l'OICM sera seul habilité en matière d'enregistrement de nouveaux médicaments. Autre innovation, le nouveau concordat contient des dispositions pénales afin d'en faciliter l'exécution et d'unifier la pratique dans les cantons [3].
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Fécondation artificielle
L'initiative populaire "Contre l'application abusive des techniques de reproduction et de manipulation génétique à l'espèce humaine", lancée en 1985 par le journal "Der Schweizer Beobachter", a abouti. Face à l'absence d'un cadre légal fédéral régissant les techniques de fécondation artificielle et les abus qui peuvent en découler, les initiants souhaitent que soit inscrit un nouvel article constitutionnel donnant mandat à la Confédération d'édicter des prescriptions sur les manipulations du patrimoine génétique humain et de veiller à assurer le respect de la dignité humaine et de la protection de la famille. Elle exige notamment l'interdiction de la commercialisation de la reproduction par les mères porteuses et au moyen des banques de spermes et la définition des limites légales des expériences sur les embryons. Quant aux adversaires de ladite initiative, ils la jugent superflue, l'Académie suisse des sciences médicales ayant déjà formulé des directives médico-éthiques pour le traitement de la stérilité par fécondation in vitro et le transfert d'embryons [4].
Au parlement, le conseiller national Zwygart (pep, BE) a déposé une motion chargeant le Conseil fédéral de créer les bases légales permettant de prendre des mesures relatives aux manipulations génétiques [5]. Le Conseil des Etats, pour sa part, estimant opportun de soumettre la fécondation artificielle à des règles de droit fédéral, a invité le Conseil fédéral à présenter un rapport sur ce sujet. Ce faisant, il a donné suite à une initiative du canton de Saint-Gall demandant que l'Assemblée fédérale édicte sans tarder des normes législatives dans le domaine de la fécondation artificielle chez l'être humain afin de combler un vide juridique. Pour Jean-François Aubert (pl, NE), président de la commission, il est préférable que la création de la vie humaine, dans la mesure où elle doit être réglementée, le soit dans les mêmes termes pour toute l'étendue du pays. Il a cependant mis les députés en garde contre l'adoption de dispositions trop restrictives afin de ne pas imposer les vues morales de la majorité à une minorité qui ne les acceptera pas. Tant le risque de voir se créer des normes législatives entre cantons que la gravité du processus de la procréation ont incité les sénateurs à confier la législation à la Confédération. Face à l'absence d'une base constitutionnelle et à la longueur des procédures fédérales, plusieurs cantons ont déjà pris les devants en débattant de cet important problème [6].
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SIDA
La propagation du virus du SIDA est un sujet de préoccupation majeure tant pour la population que pour les autorités. De maladie clinique et isolée, l'épidémie est devenue un véritable problème de société obligeant chacun à redéfinir ses responsabilités. En l'absence d'un remède universel, la prévention demeure à ce jour la seule parade efficace. Dans cet esprit prophylactique, l'Office fédéral de la santé publique (OFSP) et l'Aide suisse contre le SIDA ont lancé une imposante campagne d'information mobilisant toutes les ressources de la communication de masse et ayant pour objectif de changer les attitudes des personnes face à la maladie [7]. Cependant, le ton résolument direct et franc de la campagne a suscité quelques réserves dans une partie de l'opinion publique et au sein de la classe politique. S'il y a eu unanimité quant à l'opportunité du combat contre ce fléau, d'aucuns, milieux proches de l'Eglise, démocrates-chrétiens et nationalistes, ont regretté l'absence de considérations morales dans les recommandations données à la population. Pour leur part, socialistes et radicaux se sont opposés à un rôle moralisateur de l'Etat. Quant à Flavio Cotti, chef du DFI, il a déclaré qu'il n'appartenait pas à l'Etat de faire de la propagande pour des conceptions morales. Si, dans une première phase, elle avait vanté les mérites du préservatif, la campagne de publicité a dans son deuxième message tout de même défendu les vertus de la monogamie [8].
Cependant, les efforts déployés n'auront d'effets positifs qu'à plus ou moins long terme et, pour l'heure, la Suisse détient le triste record du plus haut taux d'Europe de cas de SIDA par habitant. La progression par doublement annuel du nombre de cas recensés s'est à nouveau confirmée en passant de 192 en 1986 à 355 en 1987. Sur ces 355 cas, environ 65% sont des homo-sexuels, 20% des toxicomanes et 10% des hétérosexuels, les 5% restant étant composés de personnes ayant contracté la maladie lors de transfusions sanguines, d'hémophiles et de nourrissons dont la mère était séropositive. Comme les statistiques l'indiquent, la maladie a commencé à briser les groupes dits à risques pour toucher d'autres catégories de la population. A ce propos, il est plus juste de parler de comportements à risques élevés plutôt que de groupes à risques [9]. Pour Flavio Cotti, la forte progression de cas de SIDA décelés en Suisse a deux raisons principales: l'anonymat garanti qui incite les porteurs du virus à s'annoncer sans crainte et le fait que les Suisses disposent de plus de moyens que d'autres nations pour faire du tourisme dans des pays où le SIDA est une véritable épidémie. Ajoutons à cela l'entrée en vigueur, en décembre 1987, de l'ordonnance révisée sur la déclaration des maladies transmissibles par l'homme qui prévoit que les diagnostics de SIDA doivent être obligatoirement déclarés, mais sans indiquer l'identité du porteur [10].
Le Conseil fédéral a élaboré une conception globale de lutte contre le SIDA. Il a estimé nécessaire d'affecter des moyens financiers beaucoup plus importants aux efforts de prévention et d'information. Ainsi, aux 3,5 millions de francs déjà inscrits dans le budget 1987, s'est ajouté un crédit supplémentaire de 8,3 millions. La conception globale repose sur quatre points fondamentaux: examen continu de la maladie, prévention, encadrement sanitaire et psychologique des personnes contaminées ou malades et recherche. Chaque année, les crédits progresseront pour atteindre 12,6 millions en 1988 et 13,2 millions en 1989 et 1990. En outre, un crédit de 1,5 millions a été attribué à la recherche appliquée. D'autres crédits, à débloquer en coordination avec le Fonds national suisse de la recherche scientifique, seront consacrés à des travaux relatifs aux conséquences économiques ou psychologiques du SIDA. Les cantons auront également un rôle à jouer dans la stratégie de lutte contre cette épidémie puisqu'il leur incombera la responsabilité de l'information à l'égard des jeunes des établissements scolaires. La prise en charge médicale leur revient également [11]. La Suisse, pour l'instant, se refuse à appliquer une politique répressive et coercitive à l'égard des sidatiques et des séropositifs et à légitimer d'une manière ou d'une autre un fichage de la population par l'Etat [12]. Les partis le sont également, à l'exception de l'extrême droite qui préconise un dépistage systématique du SIDA pour les requérants d'asile et plus généralement pour tous les étrangers. Pour atteindre une plus grande efficacité, le Conseil fédéral, mais aussi les cantons, ont décidé la création d'organes de coordination [13].
Un autre problème crucial lié au SIDA est celui des coûts médicaux auxquels les assurances doivent faire face. Si les grandes compagnies peuvent couvrir les frais de traitement, il n'en va pas de même pour celles plus modestes. On est en droit de se demander si les caisses-maladie ne vont pas imposer des réserves ou des clauses d'exclusion afin d'alléger quelque peu leurs charges. Le Concordat des caisses-maladie suisses estime que le SIDA doit être traité comme tout autre maladie. Toutefois, s'il devait continuer à progresser rapidement, la lutte contre ce virus exigerait la participation financière de la Confédération en vertu de la loi sur les épidémies [14].
 
[1] P. Gygi / A. Frei, Das schweizerische Gesundheitswesen, Basel 1987.
[2] LNN et TA, 17.9.87; SGT, 18.9.87.
[3] 24 Heures, TA, 1.7.87; BaZ, JdG et NZZ, 24.10.87; NZZ et SGT, 30.11.87. Cf. aussi APS, 1983, p. 145.
[4] FF, 1987, II, p. 1233 ss. Cf. aussi APS, 1985, p. 517.
[5] Délib. Ass. féd., 1987, III, p. 108.
[6] BO CE, 1987, p. 517 ss.
[7] Presse du 4.2.87.
[8] Presse du 21.3.87. Cf. aussi interpellation Ruckstuhl, pdc, SG: BO CN, 1987, p. 476.
[9] Presse du 26.1.88.
[10] RO, 1987, p. 1297 ss.
[11]Conception globale: presse du 9.4.87. Crédits: BO CN, 1987, p. 812 ss.; BO CE, 1987, p. 330 s. Cf. aussi APS, 1986, p. 157 s.
[12] JdG et La Suisse, 10.6.87.
[13] JdG et NZZ, 28.10.87.
[14] BaZ, 17.2.87; TA, 14.4. et 21.8.87; NZZ, 30.4.87; La Suisse, 29.9.87.