Année politique Suisse 1990 : Infrastruktur und Lebensraum / Energie
 
Energie hydro-électrique
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Débits minimaux
Les difficultés rencontrées en Suisse par toute forme, même atténuée, de réglementation du secteur électrique, sont parfaitement illustrées par le long cheminement parlementaire de la loi sur la protection des eaux et, plus particulièrement, par les normes concernant les débits minimaux. Après une délicate procédure d'élimination des divergences, qui s'est poursuivie durant quatre années, le Conseil des Etats s'est finalement rallié, lors de sa session d'hiver, à la dernière version de la chambre du peuple. La fixation des débits minimaux, dissension majeure entre les deux hémicycles, est, matériellement, l'article central de la loi. Dans ce domaine, la chambre des cantons voulut introduire des exceptions visant à permettre aux cantons ainsi qu'aux petites entreprises hydro-électriques de descendre au-dessous des minima prescrits par le droit fédéral, dérogations toujours refusées par le Conseil national. Celui-ci obtint donc gain de cause, permettant ainsi à la révision législative de conserver une certaine substance.
Généralement, ces minima furent l'objet d'un affrontement entre, d'une part, les représentants des cantons de montagne — particulièrement actifs au Conseil des Etats — qui firent systématiquement obstacle à toute proposition de réglementation et, d'autre part, une majorité de la chambre basse et le Conseil fédéral, qui entendirent sauvegarder les derniers cours d'eau. La chambre du peuple dut cependant faire certaines concessions à celle des cantons, dont la renonciation à l'inscrisption du principe de causalité dans la loi [53]. Par contre, elle transmit, sous forme de postulat, une motion Aliesch (prd, GR) souhaitant une révision de la loi sur la protection des eaux permettant aux autorités concédantes de percevoir des droits d'eau plus conformes au marché [54] .
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Barrages
La discussion concernant le projet, très controversé, d'extension des installations hydro-électriques du Grimsel (BE), s'est vue enrichie, en 1990, par un rapport des offices fédéraux de l'énergie (OFEN) et de l'économie des eaux (OFEE). Selon celui-ci, cette construction serait conforme à ses buts puisqu'elle permettrait une meilleure utilisation du potentiel hydraulique, notamment par le transfert de la production énergétique de l'été vers l'hiver. Cependant, ces constats ne disent rien des répercussions de Grimsel-Ouest sur l'environnement ni de son adéquation avec les nécessités de l'approvisionnement helvétique. Néanmoins, fortes de ces positions, les Forces motrices de l'Oberhasli, instigatrices de ce dessein, ont décidé de poursuivre sa réalisation. Elles ont cependant requis un délai afin de procéder à des ajustements (notamment au niveau de certains captages et des bassins différentiels), qui devraient être intégrés à la demande de concession en 1991 [55] .
Après que le Conseil d'Etat valaisan et le Tribunal fédéral ont rejeté plusieurs recours du WWF à l'encontre du projet Cleuson-Dixence (VS), la procédure est en attente d'une décision du tribunal administratif cantonal. Cette construction, visant à optimaliser les installations existantes de la Grande Dixence et, par là, à doubler sa puissance de turbinage, demeure très contestée. Le WWF, la jugeant irrecevable sur les plans juridique et écologique, était cependant prêt à lever ses recours, moyennant le respect de trois conditions: la restitution d'un débit minimal en aval du barrage, la renonciation à de nouveaux captages ainsi que le déplacement d'une fenêtre d'excavation. A ce jour, aucune suite n'a été donnée à ses propositions [56] .
Entre 1978 et 1979, des fissures apparurent dans le mur du barrage du Zeuzier (VS). Remis en état sous les auspices du DFTCE et de l'OFEE, ce barrage fait l'objet d'une dissension entre Confédération et Etat du Valais à propos des origines des dommages. Pour les autorités fédérales, ces derniers proviennent des travaux de la galerie de sondage du Rawyl; pour le canton, ils sont issus des mouvements tectoniques de la région. Appelé à trancher, par la commission fédérale d'estimation, entre ces deux positions, l'expert estima que le barrage-voûte du Zeuzier n'était pas acceptable dans les conditions géologiques du Rawyl. En réponse à une question du conseiller aux Etats Delalay (pdc, VS), le Conseil fédéral assura qu'il n'y avait aucun risque pour la sécurité des populations concernées [57].Cette polémique amena le canton du Valais à déposer une initiative au niveau fédéral dans laquelle il demande l'instauration d'une responsabilité civile illimitée pour les exploitants d'installations hydro-électriques [58] .
La décision du gouvernement cantonal grison autorisant l'installation de pompage du Val Curciusa (GR), sous certaines conditions (dont des débits minimaux plus élevés), a été attaquée, au Tribunal fédéral, par six organisations nationales de protection de l'environnement. Arguant de lacunes dans l'étude d'impact ainsi que d'omissions juridiques, elles s'opposent à un projet évalué à 400 millions de francs, comprenant la construction d'un réservoir de 60 millions de m3 [59] .
La problématique des droits de retour préoccupe les cantons de montagne fortement dotés en aménagements hydro-électriques. Ainsi, le peuple du canton du Valais a accepté, par 84% des suffrages, la nouvelle loi sur l'utilisation des forces hydrauliques • réglementant, notamment, le retour des concessions en la matière et la participation de l'Etat dans les équipements de ce type [60] .
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Lignes à haute tension
A fin décembre 1989, l'initiative cantonale "Pour que Vaud reste beau" a abouti, dotée de 14 600 signatures. Elle demande que le tronçon le plus contesté de la ligne à haute tension Galmiz (FR)-Verbois (GE), traversant la région de La Côte, soit enterré et souhaite l'inscription des treize sites vaudois concernés dans l'inventaire fédéral des paysages [61] .
L'interrogation quant au possible enterrement d'une ligne à très haute tension (400 000 V) est également posée par le comité d'action contre cette dernière entre Pratteln (BL) et la centrale nucléaire française de Fessenheim. Soutenu par les écologistes français et bâlois ainsi que par le président du Conseil général du Haut-Rhin, il fonde son opposition essentiellement sur la protection du paysage [62] .
 
[53] Deux autres divergences majeures, le centime du paysage et les unités bétail-fumure, sont respectivement traitées dans infra, part. 1, 6d (Protection des eaux) et supra, part. 1, 4c (Production animale). BO CE, 1990, p. 324 ss., 398 ss., 463 ss., 933 ss. et 1053 s. ; BO CN, 1990, p. 576 ss., 1668 ss. et 2220 s.; TW, 7.2.90; Suisse, 9.6. et 3.12.90; TA, 28.9.90.
[54] BO CN, 1990, p. 699 s.
[55] Presse du 16.1.90; Bund, 7.7., 9.8. et 29.12.90; 24 Heures, 30.7.90; NZZ, 14.8.90 (rapport des offices fédéraux); Lib., 29.10.90; BZ, 29.12.90. Cf. aussi APS 1989, p. 134.
[56] Suisse, 3.5. et 1.6.90; NF, 1.6.90; Lib., 29.10.90.
[57] BO CE, 1989, p. 851; Bund, 9.1.90; Suisse, 12.2.90 ; NF, 15.2.90. Cf. aussi APS 1989, p. 135.
[58] Délib. Ass. féd., 1990, IV, p. 23.
[59] BüZ, 31.10. et 4.12.90; Vr et TW, 8.11. et 4.12.90 (décision des autorités); CdT, 4.12.90.
[60] NF, 28.3., 23.5., 2.6., 5.6.-7.6. et 11.6.90; BüZ et TA, 6.6.90; 24 Heures, 7.6.90; CdT, 8.6.90; BaZ, 9.6. et 11.6.90.
[61] JdG, 5.1.90. Cf. APS 1989, p. 135.
[62] 24 Heures, 11.6.90. Il s'agirait d'une ligne aérienne de 100 km qui traverserait les forêts alsaciennes et les contreforts jurassiens.