Année politique Suisse 1992 : Wirtschaft / Landwirtschaft
Politique agricole
Dans son
programme de législature, le gouvernement a mis l'accent sur les modifications à apporter à la politique agricole. Outre le maintien des objectifs traditionnels de l'agriculture (approvisionnement, structure familiale, population décentralisée, etc.), les buts du Conseil fédéral sont principalement de rendre les règles qui la régissent moins interventionnistes, plus préoccupées par des considérations de type environnementales et capables d'indemniser les prestations d'intérêt général. Le 7e rapport sur l'agriculture (voir ci-dessous) a consacré cette nouvelle orientation et la révision partielle de la loi sur l'agriculture (voir ci-dessous) a permis d'entamer sa mise en oeuvre, en particulier par l'introduction de paiements directs non liés à la production. C'est également par le biais du nouveau projet d'arrêté viticole et par une future révision partielle de l'arrêté sur l'économie laitière et de l'arrêté sur le statut du lait que le gouvernement a annoncé vouloir poursuivre ces réformes
[1].
En début d'année, le blocage des négociations de l'Uruguay round était total en raison du
contentieux agricole entre la CE et les Etats-Unis. Le secrétaire général du GATT, A. Dunkel, a certes tenté de faire le forcing pour parvenir à un accord à partir de sa proposition de compromis de 1991
[2]. La CE a cependant déclaré qu'elle entendait aménager ce texte selon ses intérêts, alors que les Etats-Unis n'ont dit vouloir de modifications que dans le sens d'une plus grande libéralisation. Malgré quelques tentatives de conciliation et de rapprochement entre ces deux puissances agricoles, l'impasse est restée complète. On vit même poindre, en automne, un danger de guerre commerciale lorsque les américains annoncèrent des mesures punitives à l'encontre de certains produits exportés par la Communauté. Face aux menaces de représailles des Etats-Unis, la CE fut divisée; la France (plus gros producteur européen) s'est montrée la plus ferme et a refusé toute concession, ce qui l'a quelque peu isolée. C'est d'ailleurs contre elle que se sont orientées les principales menaces américaines
[3].
Devant de tels dangers, la
volonté de reprendre les négociations l'emporta. C'est ainsi que la CE et les Etats-Unis en arrivèrent à la conclusion du compromis de Washington du 19 novembre, qui propose une réduction de 21% du montant des subventions à l'exportation et le plafonnement de la surface des terres plantées en oléagineux. Cependant, la France, soutenue par une partie des pays de la CE, considéra que ce compromis était incompatible avec ses intérêts. II n'a donc pas été question, pour elle, de céder. Elle s'est même engagée à user de son droit de veto au niveau de la CE si besoin était. Cela a provoqué de très fortes dissensions entre la France et ses principaux partenaires (Grande-Bretagne notamment), qui, surtout intéressés à la libéralisation des biens industriels et des services, tenaient à parvenir à un accord. En fin d'année malgré tout, les négociations de l'Uruguay round reprirent entre tous les participants. En raison de l'importance des dissensions, il ne fut toutefois pas possible de faire avancer le dossier agricole
[4].
Vis-à-vis de la proposition de compromis de A. Dunkel, la
Suisse n'a pas changé sa position par rapport à l'an passé: pour elle, l'offre faite est difficilement acceptable. Elle demande ainsi des exceptions à la tarification, des périodes plus longues de transition et une clause de sauvegarde effective pour les petits pays. Elle veut en outre faire admettre concrètement par tous ses partenaires le principe de multifonctionnalité de l'agriculture
[5]. Comme l'an passé, les agriculteurs helvétiques ont massivement protesté contre les négociations relatives à l'Uruguay round, et notamment contre le projet de compromis de A. Dunkel
[6].
Si l'agriculture était formellement exclue de l'accord EEE, ce dernier contenait ce pendant une clause évolutive (art. 19) ayant comme objectif de libéraliser progressivement le commerce agricole. Toutefois, dans le cadre des négociations, des accords ont été conclus bilatéralement entre les Etats de I'AELE et la CE. Pour la Suisse, il s'agissait d'un élargissement réciproque de l'accès au marché dans le domaine des fromages. Par ailleurs, en vue du renforcement de la cohésion économique et sociale prévue par le traité, la Suisse a accordé unilatéralement des suppressions de droits de douane pour divers produits en provenance des pays de cohésion (économiquement faibles) de la CE. Pour ce qui est des produits agricoles transformés, l'accord EEE comprenait plusieurs listes d'éléments, les unes soumises à un libre échange intégral, les autres permettant certaines compensations nécessitées par les différences de prix de revient des produits de base entrant dans la fabrication. En outre, il était prévu que le commerce des spiritueux soit libéralisé, ce qui aurait impliqué un réaménagement du monopole suisse des alcools.
Ces diverses mesures ne purent entrer en vigueur car, bien que le parlement ait adopté les réformes légales nécessaires, le refus en votation populaire le 6 décembre du traité EEE les a rendues caduques
[7].
Par ailleurs, la CE a annoncé une modification de sa politique agricole commune consistant en un remplacement progressif du système des prix subventionnés par l'allocation de versements compensatoires. Si cela va dans le sens des réformes entreprises en Suisse, les autorités helvétiques ont néanmoins déclaré que, de par la baisse des prix que cela entraînerait, des problèmes de concurrence seraient posés aux agriculteurs helvétiques
[8].
En début d'année, le Conseil fédéral a présenté son
7e rapport sur la situation de l'agriculture suisse et la politique agricole de la Confédération. Ce texte, destiné à être la «bible» de l'agriculture helvétique pour les prochaines années, fait suite au 6e rapport paru en 1984
[9]. Outre la description de l'évolution récente et de l'état actuel de l'agriculture helvétique ainsi que des instruments et de la législation agricole fédérale, il présente la nouvelle orientation de la politique agricole, consacrant ainsi des changements qui sont en maturation depuis quelques années. Le rapport souligne que durant la période couvrant la seconde moitié des années quatre-vingts, le nombre d'exploitations a diminué de 6,4%, et ce au détriment des petites exploitations. Le revenu paysan a suivi l'évolution générale vers la hausse, même s'il reste proportionnellement inférieur aux autres professions, surtout en montagne. Notons que l'agriculture occupe 8,8% des dépenses de la Confédération, ce qui constitue le cinquième poste du budget.
Selon le gouvernement, l'évolution récente de l'agriculture a conduit à des degrés de production trop élevés et qui sont devenus difficilement supportables, notamment en ce qui concerne l'écoulement des produits sur le marché. Le corollaire à cette tendance a été un accroissement des atteintes à l'environnement. Par ailleurs, au niveau international, la pression en faveur d'une libéralisation des marchés (GATT et CE) a nettement augmenté. De fait, la paysannerie suisse devra faire face à une forte concurrence. Elle devra donc être plus compétitive, tout en respectant mieux l'environnement et en assurant ses fonctions traditionnelles. Ces bouleversements ont amené le Conseil fédéral à redéfinir les tâches de l'agriculture, dont les principales sont l'approvisionnement satisfaisant de la population, le maintien et l'entretien des sites cultivés, la contribution à la vie économique, sociale et culturelle de l'espace rural ainsi que l'utilisation et l'entretien des bases naturelles de l'existence et du paysage. De même, les objectifs de la politique agricole de la Confédération ont été redéfinis: il s'agit du maintien d'une agriculture paysanne dont l'élément moteur est l'exploitation familiale, de l'harmonisation de la production et de la demande, de l'adaptation de l'intensité d'exploitation aux exigences écologiques, de l'assurance d'un revenu agricole équitable, de la possibilité donnée à l'agriculture de fournir ses prestations à un coût avantageux et de permettre l'importation de produits agricoles d'un volume approprié.
Pour faire face à ces défis, ainsi qu'aux tâches et objectifs qui en découlent, le gouvernement a décidé de donner un röle plus important aux paiements directs; c'est ainsi que les modifications de la loi sur l'agriculture (voir ci-dessous) visant à introduire de nouvelles dispositions à ce sujet et le message y afférent font partie intégrante du rapport
[10].
Les
partis bourgeois ainsi que l'Union suisse des paysans (USP) se sont montrés satisfaits de ce rapport qui constitue, à leurs yeux, un fondement valable et réaliste de la nouvelle politique agricole suisse. Pour leur part, la gauche, les verts et l'Association pour la défense des petits et moyens paysans (VKMB) l'ont trouvé trop timide. Il lui ont notamment reproché la place trop étroite accordée aux paiements directs. Ils ont en outre regretté que l'octroi de ceux-ci ne soit que marginalement lié à des exigences écologiques. Le. VKMB a même présenté un «contre rapport» dans lequel il suggère d'étendre les paiements directs et les soutiens à la protection de l'environnement. Selon cette organisation, aucune exploitation ne devrait disparaître et il faudrait rechercher l'argent nécessaire en diminuant de 25% les dépenses militaires
[11].
Le parlement a pris acte du rapport qui a satisfait bon nombre d'élus. Certains d'entre eux ont cependant mis l'accent sur les objectifs contradictoires qu'il contenait, et surtout sur le problème du financement des nouvelles mesures proposées. Par ailleurs, le Conseil des Etats a transmis la motion de sa commission demandant au gouvernement d'édicter des dispositions afin que les mesures sociales prévues dans le rapport (préretraites, aides au désendettement, etc.) soient applicables le plus vite possible. Le Conseil national a rejeté cette motion, mais a adopté un postulat de sa commission reprenant la même revendication
[12].
Le Conseil fédéral a présenté son message sur la modification de la loi sur l'agriculture visant à introduire des paiements directs. Cette réforme est l'aboutissement de plusieurs années de débats sur le problème du revenu paysan et des prix des produits agricoles. S'inspirant de nombreuses interventions parlementaires, du rapport de la commission Popp, et se plaçant dans la philosophie du 7e rapport sur l'agriculture, le gouvernement, après une procédure de consultation encourageante, a proposé au parlement des nouveaux articles 31a et 31b de la loi sur l'agriculture, qui prévoient l'introduction de paiements compensatoires selon deux modes. Le premier est composé de paiements directs complémentaires de caractère général et non liés à la production. Ceux-ci sont destinés à compenser une politique des prix qui sera à l'avenir plus respectueuse des règles du marché et à rémunérer des prestations d'intérêt public. Ils devront, en outre, encourager l'agriculture de type familial, la protection de l'environnement et la collaboration entre les exploitations. Le montant des paiements directs dépendra d'une série de critères dont, notamment, le type de l'exploitation et sa surface. Le second concerne des paiements directs destinés à soutenir des formes d'exploitation respectueuses de l'environnement. Ceux-ci seront versés sur une base contractuelle et les critères d'octroi devraient être un emploi moindre d'engrais ou de produits de traitement, une attention particulière vouée aux animaux et le respect des mécanismes naturels et des équilibres écologiques.
Les besoins en paiements directs devraient atteindre un montant situé entre 200 et 300 millions de francs par année. Cette somme pourra être partiellement compensée par une baisse des prix à la consommation et un accroissement de certaines recettes. Le surplus de dépenses pour la Confédération devrait se monter à 100 millions de francs.
Dans le même paquet législatif, le gouvernement a encore proposé une modification de la loi visant à adapter la formation professionnelle aux besoins nouveaux, à l'harmoniser avec la loi fédérale sur la formation professionnelle et à permettre la création de nouvelles filières de formation ou de perfectionnement
[13].
Dans un premier temps, le
Conseil des Etats a adopté le projet du gouvernement à l'unanimité. Il n'a effectué que des modifications de détail visant à rassurer les paysans, comme, par exemple, de donner la garantie de la Confédération plutôt que du seul Conseil fédéral en matière de paiements directs
[14].
Le
Conseil national, pour sa part, fit également un bon accueil à cette modification législative. La Chambre fut ainsi généralement unanime pour admettre la nécessité de réformer la politique agricole. La façon de le faire divisa cependant les parlementaires. Les bourgeois, outre qu'ils se sont inquiétés du financement des paiements directs, ont considéré ces derniers principalement sous l'angle d'une compensation des pertes de revenu dues à une dérèglementation progressive, alors que la gauche et les écologistes entendaient donner un plus grand poids aux paiements directs à caractère écologique. Sous la pression de cette minorité, des modifications ont été apportées au projet initial dans le sens d'une écologisation des paiements directs. C'est ainsi que les députés, contre l'avis de leur commission, ont instauré le principe, à moyen terme (5 ans), d'une égalité de volume entre paiements directs économiques et écologiques. Ils ont par contre refusé de subordonner exclusivement le versement de paiements directs à des prestations à caractère écologique. Par ailleurs, la chambre a encore introduit, toujours sous l'impulsion de la gauche et des verts, une limitation de l'octroi de paiements directs en fonction des revenus et de la fortune de l'agriculteur
[15].
Lors de la
procédure d'élimination des divergences, le Conseil des Etats a ramené les critères de limitation d'octroi de paiements directs au seul revenu agricole, sur proposition de compromis d'A. Cottier (pdc, FR). La grande chambre s'est finalement ralliée de justesse à cette proposition, la gauche et les écologistes entendant fermement revenir à la proposition initiale. En revanche, la petite chambre a accepté la disposition introduite par le Conseil national visant à terme à une égalité entre paiements directs généraux et écologiques. Face à ces modifications, des menaces de référendum sont venues des rangs de la droite, libéraux et démocrates du centre en particulier, qui étaient opposés à toute limitation en fonction du revenu ou de la fortune et qui n'ont guère goûté la disposition prévoyant la parité entre paiements directs généraux et écologiques
[16].
Pour sa part, la grande chambre a accepté sous forme de postulat la motion Baumann (pe, BE) invitant le gouvernement à uniformiser les limites de revenus et de fortunes déterminantes pour les paiements directs
[17]. Elle a fait de même avec un texte de V. Darbellay (pdc, VS) proposant d'étendre et de moduler les critères relatifs à la surface de l'exploitation pour le calcul des paiements directs
[18].
En fin d'année, le gouvernement a mis en consultation les
deux ordonnances destinées à mettre en application les modifications de la loi sur l'agriculture. En 1993, 150 millions de francs devraient ainsi être consacrés aux paiements directs généraux et 40 millions pour les paiements directs à caractère écologique. Le texte définit les ayant droit, les montants des paiements ainsi que leurs conditions d'octroi
[19]. Pour les paiements généraux, les paysans doivent exploiter une entreprise d'au moins 3 hectares et n'utiliser comme main d'oeuvre que sept personnes au plus extérieures à leur famille. Les sommes dévolues, pour les entreprises de plus de 10 hectares, seront de 1000 francs par domaine en plaine et de 2000 francs en montagne. En plus, 200 francs par an et par hectare seront versés. Pour les contributions écologiques, l'ordonnance définit quelles sont les formes particulièrement respectueuses de l'environnement qui méritent une indemnisation. Il s'agit de la production intégrée, de la culture biologique, de la détention d'animaux de rente en plein air, des surfaces de compensation écologiques et de certaines surfaces assolées
[20].
Dans le cadre de l'attribution de paiements directs, le Conseil des Etats a transmis comme postulat la motion Delalay (pdc, VS) qui demandait que les
petites exploitations familiales soient favorisées. Certains critères tels que le type de production, l'intensité du travail à fournir et les mesures prises contre les excédents ou en faveur de la qualité devraient ainsi être pris en compte
[21]. Cette même Chambre a par contre rejeté la motion Weber (adi, ZH) qui entendait, pendant une période de transition, lier le financement des paiements directs aux moyens dégagés par la réduction progressive des prix garantis, des quantités dont la prise en charge est assurée, du volume des importations et des subventions en faveur de l'agriculture
[22].
Soucieux de résoudre l'épineux problème du
financement de cette nouvelle politique, le Conseil des Etats a accepté une initiative parlementaire de sa commission, proposée par R. Jagmetti (prd, ZH), et qui entend, afin de financer ces nouveaux paiements directs, soumettre à l'impôt sur le chiffre d'affaire (ICHA) à un taux réduit (1,5%) les denrées alimentaires et les boissons non alcoolisées. La charge supplémentaire que cela créerait pour le consommateur serait largement compensée par la baisse des prix provoquée par l'introduction de paiements directs. Par ailleurs, un tel système ne porterait pas préjudice à l'instauration future d'un nouveau régime financier. D'aucuns ont néanmoins protesté contre cette mesure qui, selon eux, serait prématurée; il vaudrait mieux lutter contre les excédents et inciter les agriculteurs à diminuer leur production
[23]. Le Conseil national a, pour sa part, accepté le postulat Tschuppert (prd, LU) demandant au gouvernement d'examiner les possibilités d'assujettir les produits alimentaires à l'ICHA et de prélever sur l'ICHA existant 1 % en faveur de l'agriculture
[24].
La petite chambre a, par contre, rejeté la motion Weber (adi, ZH) qui demandait que, par le biais d'un arrêté fédéral urgent, le financement des paiements directs soit assuré presqu'exclusivement par les économies qu'une dérèglementation rapide de l'agriculture entraînerait. Le Conseil des Etats a estimé qu'une mutation structurelle trop rapide de l'agriculture serait néfaste pour les paysans et qu'une transition douce était nécessaire
[25].
Le Conseil fédéral a présenté son
message sur les initiatives «pour une agriculture paysanne compétitive et respectueuse de l'environnement»,
déposée par l'USP,
et «paysans et consommateurs – pour une agriculture en accord avec la nature»,
provenant de l'Adl et d'organisations de consommateurs, de paysans et de protection de l'environnement
[26]. Pour le gouvernement, les différentes tâches de l'agriculture qu'elles énumèrent sont globalement comparables à celles mentionnées dans le 7e rapport et mettent en lumière la nécessité d'assigner un devoir de «multi-fonctionnalité» à l'agriculture. Concernant les mesures proposées par les initiants, si, là-aussi, il y a recoupement avec le 7e rapport (paiements directs, amélioration des bases de production, mesures visant à orienter la production), le Conseil fédéral estime néanmoins que cela ne doit pas figurer dans la constitution, mais être réalisé au niveau des lois et des ordonnances. Par ailleurs, il considère que les mesures de protection à la frontière contenues par les deux textes sont tout à fait inadéquates dans le cadre des engagements pris au GATT et du processus d'intégration européenne. En conséquence, il a proposé le rejet de ces deux initiatives.
Cependant, le gouvernement a estimé nécessaire d'inscrire dans la constitution le principe de la «multifonctionnalité de l'agriculture», conformément à la nouvelle orientation de la politique agricole officielle. Il a ainsi proposé un contre-projet direct aux initiatives qui consiste, non pas en un nouvel article constitutionnel, mais en la modification de l'article 31bis 3e alinéa, lettre b permettant de compléter les tâches de l'agriculture pour lesquelles la Confédération peut édicter des dispositions en dérogeant au principe de la liberté du commerce et de l'industrie.
De fait, un
projet d'article fut mis en consultation au printemps 1992. La majorité des partis, cantons et organisations a estimé que le projet du Conseil fédéral était insuffisant et qu'il fallait citer exhaustivement les missions dévolues à l'agriculture et définies dans le 7e rapport. Le texte finalement proposé aux Chambres contient ainsi, parmi les buts de l'activité fédérale dans le domaine agricole, l'encouragement d'«une agriculture productive, respectueuse de l'environnement et des animaux, servant à la sécurité alimentaire du pays, assurant une utilisation durable des bases naturelles de la vie et l'entretien du paysage rural et contribuant à l'occupation décentralisée du territoire». Pour leur part, les promoteurs des deux initiatives ont considéré ce contre-projet comme insuffisant et ont décidé de maintenir leurs textes
[27].
Le Conseil fédéral a décidé, pour des raisons d'économies et d'efficience, de procéder à une réorganisation dans le secteur de l'agriculture au sein du DFEP. Ainsi, l'Administration des blés, organe jusque là indépendant, devrait intégrer l'OFAG, de même qu'une partie de l'Administration des alcools. Pour leur part, les instituts de recherche agricole devraient, dans les années qui viennent, être redimensionnés, ce qui n'exclut pas certaines suppressions de postes. En particulier, l'OFAG a annoncé qu'il envisageait de
fermer la station de recherche de Liebefeld (BE), spécialisée en chimie agricole et en hygiène de l'environnement, certains services pouvant être déplacés (à Zurich notamment) ou privatisés. Cela a soulevé de nombreuses protestations, provenant autant des milieux politiques et agricoles qu'environnementaux. En fin d'année, J.-P. Delamuraz a tenté de se montrer rassurant en déclarant que l'alarme avait été donnée un peu vite et que tous les scénarios devaient être examinés. Pour sa part, le Conseil des Etats a transmis le postulat Petitpierre (prd, GE) demandant que l'existence de la station de recherche soit garantie
[28].
Le Conseil des Etats a accepté une initiative parlementaire de sa commission, née d'une proposition Simmen (pdc, SO), ayant pour but de
généraliser dans l'agriculture le principe des contributions de solidarité introduit par les Chambres en 1991 dans l'arboriculture. Cela répond par ailleurs au but d'une motion du Conseil national adoptée en 1991 et transmise par la petite chambre
[29]. L'initiative, qui suppose une modification de la loi sur l'agriculture, propose que le Conseil fédéral, lorsqu'une organisation agricole perçoit de ses membres des contributions d'entraide, puisse obliger des producteurs non affiliés à participer aussi à de telles actions, pour peu que les mesures d'entraide prévues profitent à tous les agriculteurs, permettent d'adapter les quantités produites à la demande, et favorisent une production respectueuse de la nature et promouvant la qualité des produits. Il serait également nécessaire que plus de 50% des producteurs disposant de plus de 50% des cultures appartiennent à l'organisation en question
[30].
Le Conseil national est entré en matière et a accepté l'initiative, contre l'avis de sa commission, et a chargé cette dernière de préparer la discussion de détail. L'opposition venait des verts et des socialistes qui ont dénoncé les structures sclérosées des associations agricoles auxquelles les petits paysans devraient cotiser, alors que les résultats obtenus dans ce domaine auraient jusqu'à maintenant été dérisoires
[31].
Le Conseil des Etats a décidé de ne pas donner suite à l'initiative du canton de Berne, qui exigeait une modification de la loi sur l'agriculture afin
d'encourager la conversion volontaire d'exploitations agricoles à l'agriculture biologique, sans que des pertes de revenu se fassent sentir pour les exploitants concernés. La Chambre a estimé que le but visé par ce texte était déjà atteint par l'introduction de nouveaux paiements directs à caractère écologique, et qu'il serait malséant de ne soutenir qu'une seule sorte de méthode de production agricole, en oubliant, par exemple, la production intégrée
[32].
Pour sa part, le Conseil national, s'il a également rejeté la disposition visant à encourager l'agriculture biologique, a cependant accepté la seconde partie de l'initiative; celle-ci exige l'introduction d'un label écologique, ce qui permettrait de protéger les produits fabriqués dans des conditions respectueuses de l'environnement. Le Conseil fédéral devra élaborer et présenter un projet allant dans le sens de cette décision
[33].
[1] FF, 1992, Ill, p. 1 ss.
[2] Cf. APS 1991, p. 128 s. La proposition d'A. Dunkel prévoit, jusqu'en 1999, une réduction d'un tiers des subventions à l'exportation et de 20% des soutiens internes ainsi qu'une tarification de toutes les barrières douanières.
[3] NQ, 9.1, 9.2, 27.3, 22.4, 30.9, 13.10, 15.10, 23.10, 31.10 et 12.11.92; presse du 13.1, 14.1 et 12.3.92; Bund, 5.9.92; Suisse, 11.10, 12.10, 14.10, 10.11 et 11.11.92. Cf. supra, part. I, 2 (Organisations internationales).
[4] LM, 12.11.92; NQ, 17-19.11, 26.I I, 27.11, 3.12 et 15.12.92; Suisse, 20.11 et 16.12.92; presse du 24.1 1.92. Le 1er décembre, eut lieu à Strasbourg une grande manifestation d'agriculteurs européens et extra-européens contre le protocole d'accord du 19 novembre: NQ, 28.11.92; presse du 2.12.92.
[5] NQ, 27.11.92. Par ailleurs, répondant à une demande des milieux paysans, le CF a annoncé qu'il examinerait, au ternie de l'Uruguay round, s'il convenait de soumettre le traité auquel auraient abouti les. négociations à une procédure référendaire.
[6] Presse des 7-10.1.92; VO, 3, 16.1.92; LNN, 17.1.92; LID-Pressediensl, 1734, 10.1.92. Cf. aussi supra, part. I, 1b (Politische Manifestationen).
[7] FF, 1992, V, p. 1 ss.; BO CE, 1992, p. 1070 ss.; BO CN, 1992, p. 1718 ss., 1728 ss. et 2218 ss. Cf. supra, part. I, 2 (Europe).
[8] Presse du 23.5.92; BaZ, 24.6.92. Cette nouvelle orientation de la politique agricole commune a mécontenté une bonne partie des paysans européens, notamment en France.
[9] Voir APS 1984, p. 90 s.
[10] FF, 1992, II, p. 140 ss.; NZZ, 23.1.92; SN, 24. 1.92 ; presse du 1.2.92; LID-Dokumentation, 322, 13.2.92; LID-Pressedienst, 1737, 31.1.92.
[11] Presse du 1.2.92; Bund, 3.2.92; Gnueg Heu dune!, 2, 20.2.92.
[12] BO CE, 1992, p. 200 ss. et 229 ss.; BO CN, 1992, p. 1016 ss. et 1156 s.; presse du 19.2, 18.3, 29.4 et 17.6.92; Bund, 11.3.92; NZZ, 13.3 et 30.4.92.
[13] FF, 1992, Il, p. 1 ss.; presse du 13.1.92. Voir aussi APS 1989, p. 105 s., 1990, p. 114 s. et 1991, p. 130 s.
[14] BO CE, 1992, p. 234 ss.; presse du 6.3 et 19.3.92; LID-Pressedienst, 1744, 20.3.92.
[15] BO CN, 1992, p. 1016 ss.; BZ, 4.6.92; Bund, 13.6.92; LNN, 15.6.92; NZZ, 17.6.92; presse du 27.5, 17.6 et 18.6.92.
[16] BO CE, 1992, p. 445 ss., 766 ss., 1070, 1207 ss. et 1363 ; BO CN, 1992, p. 1942 ss., 2217, 2274 ss., 2547 et 2792; FF, 1993, I, p. 9 ss.: presse du 12.6, 23.9 et 6.10.92; Bund et NZZ, 2.9.92; BüZ, 4.9.92; LID-Pressedienst, 1772, 25.9.92 et 1774, 9.10.92. Cette loi est entrée en vigueur le 1er janvier 1993.
[17] BO CN, 1992, p. 2543 s.
[18] BO CN, 1992, p. 2544 s.
[19] En principe, les paysans de plus de 65 ans et ceux dont le revenu est supérieur à 150 000 francs devraient être exclus.
[20] Presse du 24.12.92; LID-Pressedienst, 1785, 28.12.92.
[21] BO CE, 1992, p. 1 125 s.; NF, 12.12.92.
[22] BO CE, 1992, p. 1118 ss.
[23] BO CE, 1992, p. 457 ss.; BZ, 2.6.92; presse du 12.6.92.
[24] BO CN, 1992, p. 631 s.
[25] BO CF, 1992, p. 1118 ss.; presse du 3.12.92.
[26] Pour ces initiatives, leur teneur, leur lancement et leur aboutissement. voir APS 1989, p. 108, 1990, p. 115 et 1991. p. 131.
[27] FF, 1992, VI, p. 284 ss.; presse du 2.4 et 20.8.92; NZZ, 14.5.92; LID-Pressedienst, 1753, 15.5.92. Consultation: presse du 16.5 et 4.7.92; NZZ, 23.6 et 15.7.92; Bund, 24.6.92; LZ, 27.6, 1.7 et 8.7.92; LNN, 30.6 et 8.7.92; SGT, 30.6 et 2.7.92; SN et Bund, 10.7.92; BaZ, 6.1 1.92. Pour des raisons juridiques, le contre-projet du gouvernement devrait être opposé à l'initiative de I'USP.
[28] BO CE, 1992, p. 1126 ss. ; AT, 3.7.92; 24 Heures, 12.10 et 2.12.92; presse du 29.10 et 3.12.92; BZ, 4.11.92; Bund, 14.11.92; NZZ, 18.1 1.92. Le CF a nommé Hans Burger, radical fribourgeois, ingénieur agronome et agriculteur, à la tete de l'Office fédéral de l'agriculture en remplacement de J.-C. Piot: Lib., 18.3.92; presse du 9.4.92.
[29] Voir à ce sujet APS 1990, p. 119 et 1991, p. 135.
[30] BO CE, 1992, p. 77 s., 249 et 452 ss.; presse du 22.4.92. Cette initiative a en outre trouvé l'appui du CF.
[31] BO CN, 1992, p. 2282 ss.; AT, 31.10.92; NZZ, 2.11.92; presse du 1.12.92; LID-Pressedienst, 1782, 4.12.92.
[32] BO CE, 1992, p. 486 s.; Bund, 1.4.92; NZZ, 2.4.92.
[33] BO CN, 1992, p. 2295 s.; presse du 1.12.92.
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