Année politique Suisse 2007 : Chronique générale / Défense nationale
 
Armement
Le Conseil fédéral a approuvé trois conventions sur la coopération en matière d’armement entre la Suisse, d’une part, la Belgique, le Danemark et l’Irlande, d’autre part, ainsi qu’une prolongation de la convention de coopération avec l’Espagne [29].
Les chambres ont adopté, sur recommandation du Conseil fédéral, une motion de la conseillère nationale lucernoise Ida Glanzmann-Hunkeler (pdc), qui chargeait le gouvernement d’inscrire dans la loi sur le matériel de guerre une interdiction générale des armes à sous-munitions qui présentent un risque humanitaire sérieux en raison de leur manque de fiabilité et/ou de leur imprécision [30].
En début d’année, deux conseillers nationaux ont déposé conjointement des interventions visant à reporter à fin 2012 le délai fixé pour l’assainissement des buttes pare-balles dans les stands de tir. Le Conseil fédéral a proposé d’accepter ces deux interventions [31].
L’initiative populaire fédérale « pour l’interdiction d’exporter du matériel de guerre » a officiellement abouti au mois d’octobre, avec 109 224 signatures valables [32].
La question contestée de l’exportation du matériel de guerre est traitée dans la partie I, 2 (Politique économique extérieure) et infra.
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Programme d’armement 2007
Le Conseil fédéral a présenté son message concernant le programme d’armement 2007 (arrêté fédéral sur l’acquisition de matériel d’armement) au mois de février, pour un montant total de 581 millions de francs, soit en nette baisse par rapport à l’année précédente (1,503 milliard de francs). Celui-ci comprenait un système de conduite des Forces terrestres (2ème étape), un accroissement de la capacité de l’infrastructure de télécommunication et un simulateur de tir au laser pour le char Leopard. L’acquisition de nouveaux véhicules blindés de transport de troupes, devisée à quelque 500 millions de francs, a été reportée à 2008, ce qui explique le faible montant proposé. Au Conseil national, une minorité emmenée par le socialiste Rudolf Rechsteiner (BS) a proposé de ne pas entrer en matière sur le projet, estimant que le programme d’armement proposé n’apportait pas de véritables réponses aux dangers que constituent notamment les menaces d’attentat terroriste contre une centrale nucléaire. Les rapporteurs de la majorité de la commission ont tenu à souligner, quant à eux, que ce programme d’armement serait en phase à la fois avec la politique de sécurité de la Suisse et avec l’état actuel des finances de la Confédération, et que, dans ce cadre, l’armée pourrait accomplir ses missions. Répondant aux membres de la minorité de la commission, le conseiller fédéral Samuel Schmid a estimé que, face aux risques d’attentats terroristes, la seule protection des centrales nucléaires n’était pas suffisante, et qu’il fallait également assurer la protection des barrages hydrauliques, des usines de production d’électricité, de certaines zones frontalières et de bien d’autres installations. Par 116 voix contre 43, le plénum a décidé d’entrer en matière sur le projet, avant de rejeter largement trois propositions de minorité, soutenues par les Verts et les socialistes, et qui visaient à ce que le programme d’armement soit revu à la baisse. Au vote sur l’ensemble, l’arrêté fédéral a été adopté par 116 voix contre 45, la moitié du groupe socialiste s’abstenant de prendre position. Au Conseil des Etats, ce projet n’a pas été contesté par les députés, qui l’ont adopté à l’unanimité [33].
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Importation et exportation de matériel de guerre
L’initiative populaire « pour l’interdiction d’exporter du matériel de guerre », lancée par le GSsA et soutenue par le PS et les Verts, a formellement abouti en fin d’année. Sur 109 530 signatures déposées, 109 224 ont été déclarées valables [34].
En 2007, la Suisse a exporté pour 464,5 millions de francs de matériel de guerre vers 66 pays (2006 : 397,6 millions de francs). Cela représente une augmentation de 16,8% par rapport à l'année précédente et 0,24% (2006 : 0,21%) des exportations totales du commerce extérieur suisse au cours de l’année 2007 [35].
Le Conseil fédéral a décidé de suspendre de manière temporaire la livraison au Pakistan de 21 systèmes de défense anti-aérienne « Skyguard » et sa munition, pour un montant de 136 millions de francs, et cela malgré le fait que le Pakistan a pourtant déjà reçu 6 des 21 premiers systèmes promis. Le Conseil fédéral a notamment justifié cette décision au regard de la situation qui règne au Pakistan (instauration de l’état d’urgence) [36].
Le Conseil fédéral a autorisé en début d’année, et contre la volonté de la conseillère fédérale Micheline Calmy-Rey, l’exportation de 100 mitrailleuses avec leur munition à destination de l’Arabie Saoudite, et cela malgré une situation des droits de l’homme jugée « pas idéale » [37].
Dans sa réponse à une question du conseiller national Josef Lang (pe, ZG) relative à l’exportation de chars Piranha par la société Mowag à destination de la Roumanie, et l’utilisation prévue de ceux-ci par ce dernier pays en Irak et en Afghanistan, le Conseil fédéral a précisé que l'engagement des troupes roumaines et de leur matériel de guerre n'intervenait pas dans le cadre d'une guerre contre l'Irak ou l'Afghanistan, mais suite à des résolutions adoptées par le Conseil de sécurité de l'ONU. Il a ajouté que l’utilisation de ces chars en Irak et en Afghanistan n’entrait pas dans le cadre de conflits entre Etats, mais d’opérations visant au rétablissement et au maintien de l'ordre social et étatique. Le gouvernement à donc estimé que ces exportations ne posaient pas problème [38].
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Loi sur les armes
La Commission de la politique de sécurité du Conseil des Etats (CPS-CE) s’est prononcée, par 9 voix contre 1 et 3 abstentions, contre la motion déposée en 2006 par la conseillère aux Etats Anita Fetz (ps, BS), qui visait à abolir la remise de munitions de poche devant être conservées à domicile, et ce même aux militaires actifs, afin d’éviter des tragédies et d’accroître la sécurité tant publique que domestique. La commission s’est cependant inspirée de cette motion Fetz pour déposer à son tour une motion qui en reprend les grandes lignes, en lui apportant deux nuances toutefois : 1) si la munition sera bien conservée à l’arsenal, la commission a prévu que le Conseil fédéral puisse revenir en arrière sur ce point en cas de guerre ou de troubles graves ; 2) la fin du maintien de la munition à domicile ne s’appliquera pas aux troupes de première intervention, c’est-à-dire aux soldats (1000 à 2000 militaires sur 120 000) étant susceptibles d’être appelés en urgence à protéger des aéroports ou d’autres infrastructures importantes. Cette motion a été approuvée par 11 voix contre 1 au sein de la commission.
Lors de son examen au Conseil des Etats, la député socialiste Anita Fetz, satisfaite de la motion de la CPS-CE, a décidé de retirer sa propre motion. Lors du débat, et malgré une proposition de rejet du député Hans Hoffmann (udc, ZH), qui estimait les propositions de la commission inadéquates, le Conseil des Etats a adopté la motion de sa commission par 35 voix contre 5. Le Conseil national s’est saisi de cet objet au mois de septembre. La CPS-CN a proposé, par 14 voix contre 7 et 2 abstentions, d’amender la motion en question, en précisant que « le Conseil fédéral procédera au moins une fois par législature à une réévaluation de la situation en matière de sécurité ». Suite à des débats animés, une minorité emmenée par Ulrich Schlüer (udc, ZH) a proposé de rejeter cette motion, au titre que les mesures proposées ne résoudraient pas les questions de sécurité sous-jacentes. Le plénum ne l’a toutefois pas suivie et a finalement adopté la motion en question par 100 voix contre 72, l’UDC, la moitié du groupe radical et quelques démocrates-chrétiens se prononçant cependant contre celle-ci. En décembre, le Conseil des Etats s’est rallié, sur proposition de sa commission, à la version modifiée [39].
Les Verts, le PS et le GSsA, soutenus par une cinquantaine d’organisations (dont Pro Familia Vaud ou la Fédération des médecins suisses), ont lancé début septembre une initiative populaire intitulée « Pour la protection face à la violence des armes ». L’objectif des initiants est d’interdire la détention au domicile des militaires du fusil d’assaut ou du pistolet d’ordonnance [40].
Le Conseil d’Etat genevois a décidé, début septembre, d’offrir aux soldats la possibilité de déposer volontairement et gratuitement leur arme de service à l’arsenal dès le 1er janvier 2008. Le DDPS, réaffirmant la primauté du droit fédéral en la matière, a demandé des explications au gouvernement genevois. Ce dernier n’a toutefois pas fait marche arrière [41].
La révision de la loi fédérale sur les armes est traitée dans la partie I, 1b (Strafrecht).
 
[29] NZZ, 15.11.07.
[30] BO CN, 2007, p. 1141 ; BO CE, 2007, p. 708.
[31] Motion Theophil Pfister (udc, SG) : objet parlementaire 07.3228 ; initiative parlementaire Jakob Büchler (pdc, SG) : objet parlementaire 07.429.
[32] FF, 2007, p. 6823 s. Voir APS 2006, p. 88.
[33] FF, 2007, p. 1717 ss. ; BO CN, 2007, p. 707 ss. ; BO CE, 2007, p. 734 s. ; FF, 2007, p. 7065 s.
[34] FF, 2007, p. 6823 s. Voir APS 2006, p. 88.
[35] Communiqué de presse du DFE, 18.2.08.
[36] Lib., 15.11.07. Voir APS 2006, p. 87.
[37] TA, 31.5.07. Voir APS 2006, p. 87.
[38] BO CN, 2007, Annexes IV, p. 160 s.
[39] BO CE, 2007, p. 596 ss. et 1166 s. ; BO CN, 2007, p. 1471 ss. Voir APS 2006, p. 88.
[40] FF, 2007, p. 5881 ss. ; LT, 4.9.07.
[41] LT, 1.11.07 ; NZZ, 11 et 12.10.07.