Année politique Suisse 1990 : Allgemeine Chronik / Schweizerische Aussenpolitik
Organisations internationales
Le Conseil fédéral débloqua, en 1990, un crédit de 15 millions de francs afin de poursuivre sa participation aux différentes actions de l'ONU en faveur de la paix. Ces fonds seront notamment affectés au maintien des casques bleus à Chypre et au Liban. De plus, la Confédération continuera à mettre à disposition de l'organisation un certain nombre d'hommes (observateurs militaires au Proche-Orient) et d'infrastructures (avion, appareils de chiffrage, etc.)
[68]..
Les groupes socialiste et indépendant-évangélique ainsi que la conseillère nationale Bär (pe, BE) déposèrent, suite aux différents événements survenus en 1990, des textes demandant au Conseil fédéral de présenter au parlement un message visant à une
adhésion de la Suisse à l'ONU. En ce qui concerne la motion Bär, l'exécutif souhaita sa transformation en un postulat. Comme le député Ruf (ds, BE) combattit ces deux alternatives, la discussion de cet objet fut renvoyée
[69].
En 1990 aurait dû se conclure le
huitième cycle (dit Uruguay round)
de négociations commerciales multilatérales, initié en septembre 1986 à Punta del Este (Uruguay). Il était censé s'achever lors de la conférence ministérielle de décembre à Bruxelles. Or, le déroulement des discussions fut perturbé par l'émergence d'un environnement moins favorable, caractérisé par la crise du Golfe, l'unification allemande, les problèmes posés en Europe centrale et orientale ainsi que par la détérioration des perspectives économiques. Ces facteurs conduisirent à un déplacement des priorités politiques des différents Etats. Toutefois, le processus de l'Uruguay round fut principalement compromis par les blocages de plus en plus importants survenus dans le
dossier agricole, malgré les impulsions politiques données lors de la rencontre ministérielle informelle d'avril à Puerto Vallarta (Mexique) et lors du sommet des sept principales puissances de juillet à Houston (USA)
[70] .
Dans ce domaine s'affrontèrent les deux groupes désormais traditionnellement représentatifs d'optiques divergentes. D'un côté, les
Etats-Unis et les pays agro-exportateurs du
groupe de Cairns, qui veulent arriver à une suppression presque totale des interventions étatiques dans le secteur agricole, principalement au niveau de la production. De l'autre côté, la
Communauté européenne, les pays de l’AELE, le
Japon et la Corée, qui n'entendent pas livrer leurs agricultures respectives aux seules lois du marché. Lors de la conférence ministérielle de décembre à Bruxelles, la
proposition de compromis – préconisant une réduction de 30% en cinq ans du protectionnisme – fut adoptée, comme base de négociation, par les Etats-Unis et le groupe de Cairns mais rejetée par la CE, le Japon et la Corée. Cependant, pour la première fois, la CE précisa qu'elle pourrait souscrire à des suggestions portant sur le soutien interne, la protection à la frontière et les subventions à l'exportation. La Suisse se déclara prête à négocier sur la base de ce compromis, mais sous quatre conditions. Premièrement, les règles du GATT en la matière doivent tenir compte des objectifs non commerciaux des politiques agricoles. Deuxièmement, la période de mise en application des réformes doit passer de cinq à dix ans. Troisièmement, les mesures de soutien interne autorisées doivent être clairement définies. Quatrièmement, l'étendue de la réduction des subventions et de la protection à la frontière doit être négociable
[71].
.
Bien que les positions se rapprochèrent à la fin de l'année, le maintien de certaines divergences conduisit à l'échec des négociations et au report de la conclusion du cycle Uruguay à 1991. Entre-temps, on espère pouvoir solutionner l'épineux dossier agricole afin que les accords intervenus dans les autres secteurs ne soient pas définitivement perdus
[72]
..
Qu'en est-il des autres domaines — économiquement bien plus importants que l'agriculture — qui posaient aussi problème en 1989, à savoir les textiles, la propriété intellectuelle, les sauvegardes et les services? Depuis l'an passé, de sensibles progrès ont été réalisés dans ces différents secteurs. L'objectif des négociations sur les
services est la création d'un accord général permettant la libéralisation de leur commerce et, de ce fait, l'amélioration des conditions de concurrence sur le plan international. Cet accord permettra aux futurs signataires d'échanger des concessions mutuelles garantissant l'égalité de traitement entre les fournisseurs de services nationaux et étrangers. Lors de la conférence ministérielle de Bruxelles, un projet de traité put être présenté. Cependant, certains points doivent encore faire l'objet de décisions comme, par exemple, l'application de la clause de la nation la plus favorisée, les dérogations, le problème de la main-d'oeuvre étrangère et certaines dispositions additionnelles visant à la libéralisation des services financiers
[73].
.
En ce qui concerne les textiles, il a été possible d'élaborer un projet de traité, après que les Etats-Unis eurent renoncé à leur conception de quotas globaux en matière de restrictions quantitatives à l'importation. Dans le domaine des clauses de sauvegarde, un accord est en bonne voie mais certains points demeurent en suspens (application sélective ou non des clauses de sauvegarde, etc.).
La
propriété intellectuelle est un secteur intéressant tout particulièrement la Suisse. Les discussions ont permis aux différentes positions de se rapprocher, entre autres sous l'impulsion de suggestions faites par la CE, les Etats-Unis, le Japon et la Suisse
[74]. Ainsi, on s'achemine vers une convention portant sur l'ensemble des droits de propriété intellectuelle (droits d'auteur, brevets, marques, indications de provenance, dessins et modèles, secrets d'affaires et topographies de circuits intégrés). Par contre, l'ancrage de l'accord dans le GATT et quelques aspects relatifs aux brevets, le droit d'auteur et les indications de provenance posent toujours problème
[75].
.
Le 31 mai 1990, les autorités fédérales ont officiellement déposé la
demande d'adhésion de la Suisse aux organismes composant ces institutions, à savoir le Fonds monétaire international (FMI) et la Banque mondiale, laquelle regroupe la Banque internationale pour la reconstruction et le développement (BIRD), l'Association internationale de développement et la Société financière internationale (SFI)
[76]
. Les autorités sont d'ores et déjà soutenues par la commission économique extérieure du Conseil des Etats, qui estime une telle participation formelle souhaitable
[77].
.
Lors de sa visite à Berne en mars, le directeur général du FMI,
Michel Camdessus, ne put cependant se prononcer sur le statut qui serait accordé à la Confédération au sein des organes de décision. En effet, elle pourrait y être représentée de façon permanente — option fortement souhaitée par le gouvernement — ou seulement par rotation avec d'autres pays, en fonction de sa quote-part. Une solution à ce problème — telle qu'elle est parfois mentionnée en Suisse — consisterait en la création d'un 236me siège au sein du Conseil administratif du Fonds
[78]..
Les Chambres ont approuvé l'arrêté fédéral permettant à la Suisse de ratifier la Convention européenne sur la reconnaissance de la
personnalité juridique des organisations internationales non gouvernementales (ONG). Proposé par le Conseil de l'Europe en raison de l'importance croissante des ONG dans les relations internationales, l'aide au développement, les rapports Est-Ouest et l'intégration européenne, ce texte permet de surcroît de cerner le caractère spécifique ainsi que les problèmes de fonctionnement de ces entités
[79]..
Le 8 août 1990, après 306 jours de détention,
Emmanuel Christen, l'un des deux délégués du CICR enlevés en octobre 1989 à Saïda (Liban), fut libéré
[80]. Quelques jours plus tard, à savoir le 13 août, son collègue
Elio Erriquez fut également relâché par ses ravisseurs. Cependant, la plus grande incertitude règne quant à l'identité réelle des kidnappeurs
[81]..
Les interrogations suscitées par cette libération différée, alors que les deux hommes avaient été kidnappés en même temps, furent et demeurent nombreuses. Beaucoup de
spéculations coururent, comme celles évoquant un lien éventuel entre la délivrance d'E. Christen et celle, par la France, du terroriste Anis Naccache, celle parlant du versement d'une rançon ou celle mentionnant une relation avec la détention, en Suisse, du pirate de l'air Hariri
[82].. Cependant, tant les autorités fédérales que le CICR démentirent véhémentement toute tractation ainsi que tout contact direct avec les ravisseurs, dont ils affirmèrent ignorer l'identité
[83]..
En Somalie, quatre délégués du CICR furent, en octobre, victimes d'une embuscade tendue par des rebelles du Mouvement national somalien (SNM) aux forces de l'ordre. Lors de celle-ci, l'un des deux représentants helvétiques,
Peter Altwegg, fut mortellement blessé, alors que sa collègue suisse
Antonella Notari et une représentante du Croissant-Rouge somalien furent enlevées; la quatrième personne réussit à s'enfuire. Après une semaine de captivité, les deux femmes furent libérées
[84].
Le rapport, encore non publié, établit par des enquêteurs mandatés par le secrétaire général des Nations Unies disculpe l'ancien directeur du HCR,
Jean-Pierre Hocké, de toutes les accusations portées contre lui en 1989
[85]..
[69] BO CN, 1990, p. 2418 s. ; BaZ, 24.10.90. La motion du groupe socialiste et le postulat du groupe AdI/PEP n'étaient, à fin 1990, pas encore traités; Dé/ib. Ass. féd., 1990, IV, p. 58 et 63. Les différents événements font référence à la crise du Golfe ainsi qu'à l'attitude israélienne dans les territoires occupés puisque, dans les deux cas, la Suisse ne put demander l'application des mesures prises par l'ONU, n'étant pas membre de cette organisation.
[70] Rapp.gest. 1990, p. 343; presse des 24.4. (Puerto Vallarta), 13.7. (Houston), 3.-10.12., 14.12., 18.12. et 19.12.90.
[71] Cf. aussi infra, part. 1, 4c (Politique agricole).
[72] En effet, les négociations sur le cycle Uruguay étant globales, un seul désaccord conduit à l'échec de l'ensemble.
[73] FF, 1991, 1, p. 293 ss.; Rapp.gest. 1990, p. 343.
[74] JdG, 19.5.90 (propositions faites par la Suisse).
[75] FF, 1991,1, p. 293 ss.; 24 Heures, 10.10. (interview du négociateur suisse au GATT, David de Pury) et 13.10.90 (interview d'Arthur Dunkel, directeur du GATT); JdG, 21.11.90 (propriété intellectuelle). Cf. aussi APS 1989, p. 76 s.
[76] FF, 1991, 1, p. 293 ss.; Bund, 17.2.90; LNN, 20.2.90; SGT, 24.2.90; Vat., 6.3.90; presse des 12.3. et 17.5.90; WoZ, 16.3.90. Cf. APS 1989, p. 77 et infra, Pays en développement, pour la SEI.
[78] Presse du 14.3.90; LM, 21.12.90.
[79] BO CE, 1990, p. 497; BO CN, 1990, p. 268. Cf. APS 1989, p. 65.
[80] Rapp.gest. 1990, p. 48; presse des 9.8. et 10.8.90. Cf. aussi APS 1989, p. 66.
[81] Presse des 13.- 15.8.90.
[82] Suisse, 10.8.90 (Naccache); presse du 11.8.90 (rançon). Cf. APS 1988, p. 64 s. (Hariri).
[84] Presse des 7.- 9.10.90 et 12.10. et 15.10.90.
[85] Suisse, 1.4.90. Cf. aussi APS 1989, p. 66.
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