Année politique Suisse 1999 : Infrastructure, aménagement, environnement / Transports et communications
 
Politique des transports
L’Office fédéral des transports (OFT) a retenu une nouvelle offre du consortium BLS, CFF et Hupac SA pour l’exploitation d’une autoroute roulante au Lötschberg-Simplon. Sur demande de l’OFT, le consortium a modifié son offre de 1998 afin de diminuer les coûts. De 2000 à 2003, la Confédération devra vraisemblablement verser des subventions comprises entre 27 et 29 millions de francs par an, soit une subvention moyenne d’environ 375 francs par camion dès 2002 [1].
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Accord bilatéral sur les transports
Après l’accord sur les transports terrestres conclu au niveau ministériel avec l’UE à la fin de l’année précédente, les milieux écologistes et syndicalistes ont fait pression sur le gouvernement afin d’obtenir des mesures d’accompagnement efficaces aux accords. En février, ils ont remis au conseiller fédéral Leuenberger un projet de loi concernant des mesures d’accompagnement strictes pour tempérer les effets de l’accord sur les transports avec l’UE et réaliser les buts de l’initiative des Alpes. Une augmentation des contrôles policiers sur les camions, un doublement de la redevance poids lourds forfaitaire et une limitation du nombre des 40 tonnes (t) suisses ont été demandés. Le DETEC a indiqué que ces revendications seraient examinées dans le cadre des mesures d’accompagnement à l’accord. En février, le Conseil fédéral a doublé les taux de la redevance forfaitaire sur le trafic des poids lourds avec effet au 1er janvier 2000 [2].
L’exécutif a ensuite mis en consultation, avec les sept accords bilatéraux, les mesures d’accompagnement pour la phase transitoire de l’accord sur les transports terrestres avec l’UE, qui devraient permettre à la Suisse de garantir les objectifs et les instruments de sa politique de transfert du trafic marchandises de la route au rail. Ces mesures sont réunies en un projet d’arrêté fédéral transitoire sur le transfert du trafic, qui fixe les diverses étapes nécessaires pour appliquer l’article constitutionnel sur la protection des Alpes et garantir les fonds indispensables pour la période transitoire. L’objectif principal consiste à limiter entre 1,2 et 1,5 million les trajets routiers transalpins en 2004. En 2008, les courses en camion devraient être réduites à une fourchette de 700 000 à 1 million d’unités. Pour y parvenir, l’exécutif a proposé plusieurs mesures. Concernant la circulation routière, le contrôle des poids lourds, à la charge des cantons, sera intensifié (temps de conduite, de repos, poids, vitesse maximale). Pour les transporteurs suisses, des contingents de 40 t équivalant à la moitié de ceux des transporteurs européens seront autorisés. Pour les courses à vide ou légères ayant des réductions de tarif, les camionneurs suisses auront droit à 22 000 trajets dans le trafic de transit contre 220 000 pour ceux de l’UE. Pour assurer la promotion du rail, le Conseil fédéral soutiendra davantage le trafic combiné afin de réduire le prix des sillons. La Confédération subventionnera le prix des parcours et participera financièrement à l’aménagement de nouveaux terminaux de transfert rail/route sis à l’étranger. Les parcours initiaux et finaux du trafic combiné non accompagné seront exonérés pour moitié de la RPLP. La réglementation sur les zones radiales sera allégée. De plus, la Confédération demandera aux CFF de réduire d’au moins 5% par année les coûts d’infrastructure par train de transit, et la division marchandises des CFF devra augmenter sa productivité d’au moins 5% annuellement. En revanche, le Conseil fédéral a renoncé temporairement à une taxe sur le transit alpin. L’ensemble de l’opération a été devisé à 2,25 milliards de francs sur dix ans [3].
L’accord sur les transports terrestres a été accueilli dans l’ensemble positivement par les milieux consultés. Seuls la Fédération suisse des cheminots (SEV) et Pro Bahn Schweiz se sont montrés réellement sceptiques. Nombreux ont critiqué l’octroi de contingents de 40 t durant la période transitoire et jugés les taux de la RPLP trop bas pour permettre le transfert du trafic transalpin sur le rail. Pratiquement tous les milieux ont qualifié de nécessaires les mesures d’accompagnement, mais de grandes divergences sont apparues quant à leur forme et mise en œuvre. Seul le Centre Patronal les rejeta catégoriquement; l’Union suisse des arts et métiers aurait préféré les séparer de l’accord. Concernant le transfert, les partis gouvernementaux ont exigé un objectif annuel de 650 000 camions au maximum dès 2007. Les associations écologistes, le comité de l’initiative des Alpes et la SEV ont souhaité un objectif maximal de 500 000 trajets pour la même date, ainsi que des objectifs intermédiaires. Pratiquement tous les milieux consultés ont demandé que la Confédération augmente ses dépenses pour promouvoir le transport ferroviaire. Les partis gouvernementaux ont souhaité un plafond de dépenses annuel de 300 millions de francs, les CFF de 350 millions et les associations écologistes de 500 millions. Le Vorort, par contre, s’est opposé à une telle augmentation. Les avis ont été partagés sur la répartition des contingents de 40 t entre les transporteurs suisses: les associations écologistes et la SEV ont souhaité que les transporteurs suisses obtiennent la moitié du contingent de ceux de l’UE; les partis gouvernementaux, la CGC, les associations de transport routier et le Vorort ont réclamé un contingent identique. Ces derniers ont également contesté que l’octroi de ces contingents soit subordonné à l’obligation d’utiliser également le rail. Le renforcement des contrôles du trafic lourd à été généralement approuvé. Les cantons se sont déclarés prêts à participer au contrôle des poids lourds, à condition que les contributions pour la surveillance policière de la circulation soient à nouveau versées par les taxes sur les carburants. Plusieurs milieux concernés, dont les associations écologistes et la Conférence des gouvernements cantonaux, ont réclamé l’inscription dans la loi sur la circulation routière de l’interdiction de circuler la nuit et le dimanche. Finalement, l’UDC a estimé incontournable une modification de l’article constitutionnel sur la protection des Alpes en raison de l’accord sur les transports terrestres [4].
Le Conseil fédéral a publié en juin son message relatif à l’approbation des sept accords sectoriels entre la Suisse et la CE après avoir signé les accords bilatéraux avec l’UE à Luxembourg à la fin juin (voir supra, part. I, 2, Europe: UE). Deux accords sectoriels concernent le domaine des transports: l’accord sur le transport aérien (voir plus loin) et l’accord sur les transports terrestres. Ce dernier a engendré une nouvelle loi sur le transport des personnes et des marchandises par le rail et la route qui modifie la loi fédérale sur la circulation routière et celle sur le transport des voyageurs. Les mesures d’accompagnement se trouvent dans la loi fédérale sur le transfert du trafic transalpin de marchandises de la route au rail et dans un arrêté financier en faveur de la promotion du trafic combiné. L’accord sur les transports de marchandises et de voyageurs par rail et par route coordonne la politique des transports entre la Suisse et les Etats de l’UE [5]. Il promeut la mobilité durable et la protection de l’environnement, ainsi que la fluidité du trafic par le libre choix des moyens de transport. Il prévoit l’ouverture progressive et réciproque des marchés des transports routiers et ferroviaires des voyageurs et des marchandises. En Suisse, le relèvement de la limite des poids lourds à 34 t aura lieu en 2001 et sera porté à 40 t en 2005. Parallèlement, une forte augmentation de la redevance routière permettra de reporter le transport des marchandises de la route au rail. La redevance principale, la RPLP, sera introduite en 2001 et différenciée en fonction de 3 catégories de normes d’émission. Dès 2005, la moyenne pondérée des redevances ne dépassera pas 325 francs pour un véhicule jusqu’à 40 t, parcourant un trajet de 300 km à travers la chaîne alpine. Toutefois, la suisse fixera les redevances valables jusqu’à l’ouverture du premier tunnel de base ou au 1er janvier 2008 au plus tard à un niveau inférieur au montant maximum. La Suisse a déclaré son intention de fixer le montant en 2005, 2006 et 2007 à 292.50 francs en moyenne et à 350 francs au maximum. Une taxe sur le transit alpin (TTA) pourra être introduite, elle ne dépassera pas 15% du tarif global. Durant la période transitoire, la Communauté européenne aura droit à un contingent annuel de 250 000 camions de 40 t pour 2000, de 300 000 en 2001 et 2002 et de 400 000 en 2003 et 2004. En outre, un traitement fiscal privilégié sera accordé aux camions circulant à vide ou transportant des produits légers pour un contingent de 220 000 véhicules par année jusqu’en 2005. L’accord prévoit dès son entrée en vigueur une libéralisation du transport de marchandises entre les territoires des parties et du transport de marchandises en transit à travers le territoire des parties. La libéralisation du grand cabotage (par exemple: Zurich-Berlin-Amsterdam) se fera par étapes de 2001 à 2005, année de libéralisation totale. L’interdiction de circuler la nuit sur le territoire suisse entre 22 heures et 5 heures a été maintenue avec des exemptions non discriminatoires. Concernant les transports ferroviaires et combinés, les parties se sont engagées à mettre en place une offre ferroviaire et de transport combiné compétitive par rapport à la route. La Suisse et la CE devront améliorer l’interconnexion de leur réseau ferroviaire. La CE améliorera la capacité des voies d’accès nord et sud aux NLFA. Les formalités pesant sur le transport ferroviaire et routier seront simplifiées et des normes sévères de protection des émissions de gaz, de particules et de bruit émis seront introduites. Des clauses de sauvegarde unilatérales, consensuelles et en cas de crise figurent dans l’accord. Des mesures fiscales ou non fiscales limitées seront prises en cas de graves distorsions dans les flux de trafic à travers l’arc alpin [6].
La loi fédérale sur le transport de marchandises et de voyageurs par rail et par route modifie la loi sur la circulation routière (LCR) et la loi sur le transport des voyageurs (LTV) [7]. La LCR prévoit que Conseil fédéral fixe les poids autorisés des véhicules jusqu’à un maximum de 40 t, ou 44 t pour le transport combiné. Il détermine également la charge par essieu. La fixation du poids maximum se fait en parallèle avec le niveau des redevances routières [8]. La LTV prévoit des dispositions ad hoc sur l’admission à la profession de transporteur routier [9].
La nouvelle loi fédérale sur le transfert du trafic transalpin de marchandises de la route au rail définit les objectifs, les mesures et la procédure pour le transfert progressif du fret transalpin sur le rail. Elle sera valable jusqu’à l’entrée en vigueur d’une loi d’application de l’article sur la protection des Alpes, mais au plus tard jusqu’à fin 2010. L’exécutif a fixé un nombre annuel de 650 000 courses de camions à travers les Alpes. L’objectif devra être atteint le plus rapidement possible, toutefois au plus tard une année après la mise en service du tunnel de base du Saint-Gothard (vers 2013). La loi énumère les principaux instruments nécessaires pour atteindre ce but (réforme des chemins de fer, RPLP, arrêté sur le transit alpin de 1991, accord de juin 1999 entre la CE et la Suisse sur le transport des marchandises et des voyageurs par rail et route). Après déduction des frais d’exécution, le produit de la RPLP servira en premier lieu à financer ces mesures principales. Les recettes non affectées à cette fin alimenteront le fonds pour les grands projets ferroviaires. La loi entrera en vigueur en même temps que l’accord bilatéral sur les transports terrestres. Des mesures d’accompagnement seront prises afin de renforcer et accélérer le transfert de 2001 à 2004 [10].
Ces mesures d’accompagnement ont pour objectif d’améliorer les conditions-cadres routières et ferroviaires, d’augmenter la productivité des chemins de fer et de renforcer le transfert durant la phase transitoire. Concernant la route, les contrôles du trafic routier lourd seront intensifiés. L’accord européen relatif aux équipages des véhicules effectuant des transports internationaux par route (AETR) devra être ratifié. Le Conseil fédéral pourra appliquer des mesures de gestion du trafic pour garantir la fluidité du transit à travers les Alpes, et édicter des vitesses minimales pour les camions sur les tronçons de montagne afin de garantir la sécurité de la circulation. L’octroi de contingents de 40 t destinés aux transporteurs suisses pourra être subordonné à l’utilisation du chemin de fer. Pour des contingents de courses à vide et avec des produits légers, les transporteurs suisses obtiendront 10% des contingents accordés à l’UE, soit 22 000 par année de 2001 à 2004. Concernant le rail, une partie des contributions pour le trafic combiné sera utilisée pour réduire le prix des sillons. L’autre partie des subventions permettra à la Confédération de commander et d’indemniser des offres supplémentaires concernant le trafic combiné transalpin accompagné et non accompagné. La Confédération participera financièrement à la construction d’installations de transbordement supplémentaires en Suisse ou dans les zones frontalières étrangères. Le crédit 1999-2003, prévu pour des besoins nationaux, sera augmenté de 120 millions de francs pour les investissements à l’étranger. De 2003 à 2008, il est prévu d’accroître de 60 millions le crédit destiné aux terminaux. La réglementation actuelle des zones radiales sera supprimée. Les entreprises pourront accéder avec des camions de 44 t aux terminaux, indépendamment de leur lieu d’implantation. L’exécutif envisage une exonération forfaitaire de la RPLP correspondant à une distance forfaitaire déterminée (par exemple: 40 km) pour chaque conteneur transporté sur les parcours initiaux ou terminaux. L’exécutif encouragera le trafic ferroviaire des marchandises au niveau international et accélèrera les formalités douanières. La mise en service du tunnel de base du Lötschberg devra se faire si possible au début 2007. Entre 2005 et fin 2007 au plus tard, la fiscalité sera inférieure de 10% au montant prévu, soit de 292,50 francs en attendant la mise en service du Lötschberg. Concernant les gains de productivité des chemins de fer, on comptera sur la concurrence instaurée par la réforme des chemins de fer. Les CFF devront réduire annuellement les coûts de l’infrastructure, de 1999 à 2002, d’au moins 5% par train de transit. Des exigences analogues seront formulées lors de la commande de l’infrastructure de transit du BLS. La Confédération allouera des contributions financières en faveur du trafic intérieur combiné non accompagné sur les axes est-ouest et nord-sud avec raccordement au trafic d’importation et d’exportation. Finalement, les fonds nécessaires seront garantis au moyen un arrêté fédéral «allouant un plafond de dépenses pour promouvoir le trafic combiné» entre 2000 et 2010, afin d’appliquer l’article sur la protection des Alpes [11]. Le plafond de dépenses concerne uniquement les mesures d’accompagnement. Il s’élève à 2,850 milliards de francs et garantira le financement des indemnités et des réductions du prix des sillons destinés au trafic combiné. Les fonds proviendront en premier lieu du produit de l’impôt sur les huiles minérales et, de 2001 à 2004, des recettes des contingents. L’arrêté s’étend sur une période de onze ans, soit jusqu’en 2010 [12].
A la session d’été, le Conseil national a classé une motion des Verts demandant des mesures supplémentaires pour faciliter le transfert de la route au rail, jugeant le montant de la redevance (325 francs), négociée par la Suisse avec l’UE, trop bas et le contingent de 40 tonnes trop élevé. Le Conseil fédéral a proposé de classer l’objet, ayant adopté le message sur les sept accords bilatéraux contenant des mesures d’accompagnement dans le secteur des transports terrestres [13].
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Accord bilatéral sur le transport aérien
L’accord bilatéral sur le transport aérien a été approuvé dans son principe par tous les destinataires de la consultation qui ont jugé très positifs la libéralisation et le renforcement de la concurrence dans ce secteur. Mais, les Verts et l’ATE ont demandé qu’une partie du bénéfice économique de l’accord soit affectée à des mesures de protection de l’environnement. Le Vorort s’est opposé à toute mesure d’accompagnement éventuelle [14].
L’accord sur le transport aérien règle, sur la base de la réciprocité, l’accès des compagnies aériennes suisses au marché européen libéralisé [15]. Contrairement aux autres accords, il prévoit une extension du droit communautaire à la Suisse. Toutefois, les droits de trafic seront octroyés aux transporteurs aériens suisses de manière progressive: 3e (par exemple: Zurich-Paris) et 4e (Paris-Zurich) libertés dès l’entrée en vigueur de l’accord, 5e (Zurich-Paris-Madrid) et 7e (Paris-Madrid) deux ans plus tard, la 8e liberté (Paris-Lyon) sera négociée cinq ans après l’entrée en vigueur de l’accord. Les compagnies suisses pourront aménager librement leurs tarifs et leurs horaires de vol, sans autorisations de prix ou plans de vol. L’accord permettra également la liberté d’investissement dans les compagnies aériennes. Finalement, la directive concernant la suppression des commerces hors taxes dans les aéroports n’a pas été reprise dans l’accord [16].
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Débats parlementaires sur l’accord sur les transports terrestres
Les Chambres fédérales, après avoir approuvé l’entrée en matière sur les sept accords sectoriels bilatéraux, se sont penchées spécifiquement sur les modifications législatives s’y rapportant. Pour l’approbation des sept accords, voir supra, part. I, 2 (Europe: UE).
Le Conseil national a traité, lors de la session spéciale d’août, la loi fédérale concernant le transport de marchandises et de voyageurs par rail et par route. Il y a mentionné les interdictions de circuler la nuit (de 22h00 à 05h00) et le dimanche pour les poids lourds destinés au transport de marchandises. Le projet a été accepté par 133 voix contre 2 et 9 abstentions [17].
Au Conseil des Etats, les sénateurs ont créé deux divergences avec le National. Premièrement, ils ont souhaité supprimer de la loi les précisions d’heures concernant les interdictions de circuler la nuit et le dimanche pour des motifs formels, estimant que cette disposition devait être réglée dans la LCR (solution à laquelle adhérera ensuite le Conseil national). Deuxièmement, ils ont souhaité que le poids des véhicules soit fixé en même temps que les redevances routières, et non en parallèle avec celles-ci. Le vote sur l’ensemble a recueilli la majorité [18]. De retour au Conseil national lors de la session d’automne, les divergences introduites par la petite Chambre ont recueilli l’approbation de la commission. Dans le vote final, le projet a été approuvé par 154 voix contre 33 et 7 abstentions (opposition de droite, à majorité UDC). Au Conseil des Etats, il a obtenu l’unanimité [19].
Le Conseil national s’est ensuite penché sur la loi fédérale visant à transférer sur le rail le trafic de marchandises à travers les Alpes. Une minorité radicale et UDC a proposé que seul le trafic lourd de marchandises en transit de frontière à frontière à travers les Alpes soit transféré. Par 118 voix contre 63, les conseillers nationaux ont repoussé cette proposition jugée discriminatoire pour les transporteurs étrangers. Le point culminant du débat concerna la date à partir de laquelle le trafic marchandises devrait être ramené à 650 000 trajets. La majorité de la CTT souhaitait atteindre l’objectif au plus tard en 2007, soit à l’ouverture du tunnel du Lötschberg. Une minorité bourgeoise souhaitait suivre l’exécutif, soit à l’ouverture du Gothard (vers 2013). Une minorité écologiste demanda de limiter le trafic lourd à 500 000 courses annuelles en 2007, la réduction devant se faire par étapes de 100 000 courses annuellement. La minorité bourgeoise l’emporta finalement par 93 voix contre 88. Le groupe UDC souhaitait biffer l’article sur l’objectif de transfert; les députés s’y opposèrent par 128 voix contre 50. En outre, l’interdiction de discriminer les transporteurs suisses sera précisée dans la loi. Le National a accepté ensuite plusieurs amendements de la majorité de la CTT. L’octroi d’une moitié des contingents suisses sera soumis à la condition d’utiliser le trafic marchandises ferroviaire, cinq wagons de chemins de fer donnant droit à un contingent. L’autre moitié des contingents sera répartie entre les cantons qui tiendront compte des exigences des transporteurs. La vente et l’achat de contingents seront interdits. Les transports en trafic combiné à l’intérieur des zones radiales de 30 kilomètres, qui se rendent vers la gare de transbordement la plus proche, seront exonérés de la redevance sur le trafic des poids lourds liée ou non aux prestations. Les transports en trafic combiné qui quittent ces zones seront soumis à la totalité de la redevance. Dans des cas de rigueur, ils pourront exceptionnellement être affranchis de la limite de poids et exonérés de la redevance. Au vote sur l’ensemble, le projet a été approuvé par 115 voix contre 15 et 24 abstentions (opposition essentiellement UDC) [20].
Le Conseil des Etats a décidé, par 25 voix contre 19, que l’objectif des 650 000 trajets devait être atteint le plus rapidement possible, sans mention de délai. En cas de difficultés pour atteindre l’objectif de transfert, le Conseil fédéral devra édicter des dispositions transitoires. Les sénateurs ont souhaité qu’un tiers des recettes de la redevance perçue sur les contingents de camions de 40 t et de véhicules circulant à vide ou chargés de produits légers soit destiné aux cantons, deux tiers à la Confédération pour financer les mesures liées au transfert. Pour ces véhicules, la petite Chambre a voulu que l’exécutif définisse d’entente avec les cantons le nombre de contingents suisses. Et pour les 40 t, l’exécutif veillera à l’égalité de traitement des transporteurs suisses et étrangers. Le Conseil fédéral pourra subordonner l’octroi d’une moitié des contingents suisses à certaines conditions non précisées; l’autre moitié sera répartie entre les cantons. Les sénateurs ont décidé que les trajets effectués en trafic combiné non accompagné donneront droit à un remboursement forfaitaire. Ils ont refusé la solution des zones radiales du National, et ajouté de nouveaux frais imputables dans la loi fédérale concernant l’utilisation de l’impôt sur les huiles minérales à affectation obligatoire (concernant la participation de la Confédération aux frais de construction des routes nationales). Des notions de sécurité et de protection ont été introduites à l’unanimité pour l’entretien courant des routes. Le vote sur l’ensemble a obtenu l’unanimité [21].
De retour au Conseil national, les délibérations ont porté à nouveau sur le nombre de courses annuelles maximum sur les axes de transit de la région alpine, ainsi que sur la date pour concrétiser l’objectif. Entre une proposition de majorité de la CTT, trois de minorités bourgeoises et une proposition subsidiaire du groupe UDC, la proposition de majorité l’emporta. La limitation du trafic lourd de marchandises à 650 000 courses annuelles devra se réaliser le plus rapidement possible, mais au plus tard deux ans après l’ouverture du tunnel de base du Lötschberg (2008 ou 2009). Le produit de la redevance sur les contingents de camions de 40 t et de véhicules circulant à vide ou chargés de produits légers servira à financer les mesures pour transférer le trafic lourd de marchandises à travers les Alpes de la route au rail, sans mention de répartition pour les cantons. Cette redevance n’est pas la RPLP, ses recettes doivent servir à financer les mesures d’accompagnement pour le transfert. Concernant la répartition des contingents suisses, prévue pour les courses de véhicules de 40 t et de véhicules circulant à vide ou légers, la grande Chambre a maintenu, pour l’octroi d’une moitié des contingents, son paramètre de cinq wagons pour un contingent. L’autre moitié des contingents sera répartie entre les cantons. Les députés ont maintenu l’exonération de la redevance sur le trafic des poids lourds liée ou non aux prestations pour les transports en trafic combiné à l’intérieur des zones radiales de 30 km [22].
Le Conseil des Etats a repris le dossier à la session d’automne. Il s’est rallié au National concernant la limitation pour le trafic lourd de marchandises et le délai à respecter, suivant sa CTT par 22 voix contre 18. Cet objectif a été considéré comme un but idéal vers lequel il fallait tendre plutôt qu’une nécessité absolue à réaliser. Cette vision des choses a été d’ailleurs confirmée par l’exécutif. La Chambre des cantons a maintenu sa version concernant le produit de la redevance perçue sur les contingents (40 t et véhicules à vide ou chargés de produits légers): un tiers aux cantons, deux tiers à la Confédération. Elle a également maintenu sa position concernant l’octroi des contingents suisses qu’elle n’a pas souhaité détailler. De plus, les sénateurs ont refusé la version du National ayant trait aux zones radiales. Les trajets effectués dans le trafic combiné non accompagné donneront droit à un remboursement forfaitaire [23].
Poursuivant le processus de la navette, le Conseil national a refusé une nouvelle fois l’attribution aux cantons d’un tiers des recettes provenant de la perception de la redevance sur les contingents de camions de 40 t et de véhicules circulant à vide ou légers. La grande Chambre a néanmoins accepté la version plus souple du Conseil des Etats pour l’octroi des contingents suisses et pour le remboursement forfaitaire pour les trajets effectués dans le trafic combiné non accompagné [24]. Le Conseil des Etats s’est finalement rallié au National pour l’ultime divergence. Les recettes de la redevance sur les contingents susmentionnés iront uniquement à la Confédération pour financer les mesures de transfert du trafic lourd de marchandises à travers les Alpes [25]. Dans les votes finaux, la grande Chambre a accepté le projet de loi par 145 voix contre 36 et 14 abstentions (opposition de droite, à majorité UDC); la Chambre des cantons par 33 voix contre 6 [26].
Dans l’arrêté fédéral allouant un plafond de dépenses pour promouvoir le trafic combiné, le National a suivi la majorité de sa CTT en votant un montant plus élevé que celui de l’exécutif, soit 3,3 milliards de francs de 2000 à 2010. Il a décidé de promouvoir l’ensemble du trafic marchandises par rail; l’exécutif ne parlait que du trafic combiné. Les contributions d’investissement aux terminaux, versées dans le cadre de programmes pluriannuels, seront fondées sur des bases de financement propres. De plus, à partir de 2000, une enveloppe de 300 millions de francs par année sera débloquée pour financer les mesures de transfert. Avec l’entrée en vigueur de la RPLP ou l’ouverture du tunnel du Lötschberg, et si l’objectif de transfert est atteint, l’enveloppe annuelle sera ramenée progressivement à son niveau de 1999. Au vote sur l’ensemble, le projet a recueilli 126 voix contre 29 et 3 abstentions [27].
Le Conseil des Etats s’en est tenu au montant proposé par l’exécutif, soit 2,85 milliards de francs. En outre, il a été plus précis que le National en souhaitant promouvoir uniquement le trafic ferroviaire de marchandises, soit des réductions du prix des sillons et des indemnités (et non l’ensemble du trafic). Le vote sur l’ensemble a recueilli l’unanimité [28]. Au National, les députés ont maintenu leur version: l’ensemble du trafic marchandises par rail sera promu. Le montant du plafond plus élevé a également été maintenu par 92 voix contre 75 [29]. Le Conseil des Etats a ensuite campé sur sa position concernant ce montant [30]. Sur cette ultime divergence, le Conseil national a finalement cédé, suivant la minorité de la commission soutenue par les groupes radical et UDC. C’est par 81 voix contre 77 que la grande Chambre a donc accepté de limiter le plafond des dépenses à 2,85 milliards de francs [31].
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Vérité des coûts
Le National a prorogé de deux ans le délai pour traiter l’initiative parlementaire Bundi (ps, GR) à laquelle le Conseil national avait donné suite en 1995. Le délai avait déjà été prolongé de deux ans en 1997. L’initiative demande une modification de la Constitution afin de proclamer le principe de la transparence des coûts en matière de transport. Elle charge en outre la Confédération de veiller à ce que les transporteurs couvrent, conformément au principe de la responsabilité causale, tous les frais qui peuvent leur être imputés, coûts externes inclus [32].
Le Fonds national suisse de la recherche scientifique (FNRS) a en outre publié les résultats de trois études menées dans le cadre du programme de recherche «Transport et environnement» concernant la vérité des coûts dans le domaine des transports. La facture impayée des accidents et de la pollution causés chaque année par le trafic routier individuel a été estimée à 7 milliards de francs. Quant aux déficits des transports publics, ils coûtent aux contribuables 2,6 milliards de francs chaque année. Selon les auteurs des études, le transport par rail devrait mieux contribuer à couvrir ses coûts en augmentant les contributions versées à la Confédération pour l’utilisation de l’infrastructure ferroviaire [33].
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Initiatives populaires
L'initiative populaire fédérale «Pour plus de sécurité à l'intérieur des localités grâce à une vitesse maximale de 30 km/h assortie d'exceptions», lancée en 1997 par l'Association transports et environnement, a abouti avec 112 395 signatures valables [34].
Le Conseil national a traité l’initiative populaire «visant à réduire de moitié le trafic motorisé afin de maintenir et améliorer les espaces vitaux» (initiative pour la réduction du trafic). De nombreux députés ont jugé l’initiative irréaliste, car elle obligerait la Suisse à renoncer à de nombreux accords internationaux et nuirait à l’accord bilatéral sur les transports conclu avec l’UE. En outre, le développement de l’économie helvétique pourrait se trouver compromis par l’initiative, et les régions périphériques se trouveraient marginalisées et pénalisées. Une minorité de droite de la CTT proposa de déclarer nulle l’initiative, car irréalisable. Les députés s’y sont opposés par 120 voix contre 36. Les groupes libéral, radical, démocrate-chrétien et UDC ont recommandé un rejet catégorique sans contre-projet. Dans l’examen de détail, plusieurs minorités se sont toutefois manifestées en faveur d’un contre-projet ou même de l’initiative (minorité rose-verte). Pourtant, aucune proposition ne fit recette auprès des conseillers nationaux qui ont préféré rejeter l’initiative sans contre-projet. Dans le vote sur l’ensemble, le projet fut accepté par 105 voix contre 39 et 24 abstentions [35]. La Chambre haute a ensuite rejeté à l’unanimité l’initiative sans contre-projet. Lors des votations finales, l’arrêté fédéral y relatif a été accepté par la petite Chambre et le National, respectivement par 38 voix contre 0 et 110 voix contre 30 et 32 abstentions [36].
Le Conseil fédéral a transmis aux Chambres un message concernant l’initiative populaire «Pour un dimanche sans voitures par saison – un essai limité à quatre ans». Les initiants souhaitaient transformer les routes, quatre dimanches par année, en lieux de divertissement. L’exécutif a jugé qu’une interdiction étatique était inadéquate pour inciter à un comportement correct ou à l’amélioration de la qualité de la vie. Il a en outre estimé que les régions moins bien munies en transports publics seraient pénalisées par l’initiative. Elle lèserait également certaines branches de l’économie dépendant du tourisme – notamment dans les régions isolées. Les pays voisins de la Suisse ne comprendraient guère le blocage du trafic routier privé aux frontières suisses ces dimanches-là, a estimé l’exécutif. La Suisse pourrait même se voir infliger des sanctions pour générer un surcroît de trafic dans les pays voisins. Le Conseil fédéral a donc recommandé un rejet de l’initiative sans contre-projet [37].
En fin d’année, le Touring Club Suisse a lancé une initiative «Avanti – pour des autoroutes sûres et performantes» demandant à la Confédération de résoudre les problèmes de capacité des infrastructures de transport et de développer et entretenir les infrastructures des routes et du rail. Elle demande concrètement que les travaux pour améliorer la capacité des tronçons des routes nationales (Genève – Lausanne, Berne – Zurich, Erstfeld – Airolo) soient entrepris dans un délai de dix ans au plus tard après acceptation de l’initiative [38].
 
[1] NZZ, 6.3.99; TA, 29.5.99. Voir également APS 1998, p. 180.1
[2] Presse du 3.2.99; DETEC, communiqué de presse du 18.6.99; TG, 11.1.99.2
[3] Presse du 16.3.99.3
[4] Presse du 20.2.99; TA, 3.2.99; LT, 3.4.99. Voir également APS 1998, p. 181 ss.4
[5] FF, 1999, p. 6266 ss.5
[6] FF, 1999, p. 5440 ss. Voir aussi APS 1998, p. 181 ss.6
[7] FF, 1999, p. 5753 ss.7
[8] FF, 1999, p. 5753.8
[9] FF, 1999, p. 5754 s.9
[10] FF, 1999, p. 5776 ss. 10
[11] FF, 1999, p. 5787. 11
[12] FF, 1999, p. 5600 ss. 12
[13] BO CN, 1999, p. 1317 s. 13
[14] FF, 1999, p.5440 ss. 14
[15] FF, 1999, p. 6243 ss. 1
[16] FF, 1999, p. 5440 ss. Voir également APS 1998, p. 181 ss.16
[17] BO CN, 1999, p. 1509 ss. 17
[18] BO CE, 1999, p. 693 ss. 18
[19] BO CN, 1999, p. 1692 et 2302 s.; BO CE, 1999, p. 991; FF, 1999, p. 7931 ss. 19
[20] BO CN, 1999, p. 1514 ss. et 1530 ss. 20
[21] BO CE, 1999, p. 697 ss. 21
[22] BO CN, 1999, p. 1692 ss. 22
[23] BO CE, 1999, p. 780 ss. 23
[24] BO CN, 1999, p. 1848 ss. 24
[25] BO CE, 1999, p. 864 s. 25
[26] BO CN, 1999, p. 2304; BO CE, 1999, p. 992; FF, 1999, p. 7925 ss. 26
[27] BO CN, 1999, p. 1542 ss. 27
[28] BO CE, 1999, p. 712 ss. 28
[29] BO CN, 1999, p. 1708 ss. 29
[30] BO CE, 1999, p. 784 s. 30
[31] BO CN, 1999, p. 1850 ss.; FF, 1999, p. 8036. 31
[32] BO CN, 1999, p. 2669. Voir aussi APS 1995, p. 170. 32
[33] Presse du 14.9.99. 33
[34] FF, 1999, p. 2765. Voir aussi APS 1997, p. 183. 34
[35] BO CN, 1999, p. 29 ss. Voir APS 1997, p. 183. 35
[36] BO CE, 1999, p. 540 ss. et 598; BO CN, 1999, p. 1405; FF, 1999, p. 4658 s. 36
[37] FF, 2000, p. 461 ss. Voir également APS 1998, p. 183. 37
[38] FF, 2000, p. 107 ss. 38