Une étude de Pro Futuris s'est intéressée aux thématiques qui polarisent affectivement la population suisse, ainsi qu'aux compromis qui sont envisagés par les électrices et les électeurs. L'étude parle ainsi de polarisation affective lorsque, suite à une question, «la réaction émotionnelle d'individus aux avis contraires diverge grandement».
Ainsi, les questions de l'immigration, du soutien à l'Ukraine et des mesures de lutte contre les pandémies sont celles qui polarisent le plus les opinions des Suissesses et des Suisses. Contrairement à la grande importance accordée aux thématiques de l'organisation de l'Etat social, de l'égalité des sexes et de la protection des minorités sexuelles ; la polarisation affective relative à ces sujets est la moins importante sur l'ensemble des thématiques prises en compte par l'étude. Les auteur.e.s notent que ceci est marquant notamment parce que près de 60 pour cent des personnes interrogées considèrent l'écart entre les riches et les pauvres comme le clivage principal de la Suisse. L'environnement et les relations avec l'UE sont, elles, des thématiques qui provoquent une réaction émotionnelle moyenne. La polarisation affective est la plus élevée au sein des corps électoraux de l'UDC et du PS. Les électrices et les électeurs de l'UDC sont les moins enclins à faire des compromis, tandis que celles et ceux des Vert-e-s y sont le plus prêts. Selon l'étude, l'égalité des sexes est la thématique pour laquelle les Suissesses et les Suisses sont le plus disposés à faire des compromis. Aussi, une plus haute polarisation affective s'accompagne d'une perception de sa capacité à faire des compromis plus faible.
Pour les chercheuses et les chercheurs, il était important de noter que la société a été ébranlée par la pandémie de Covid-19 et l'invasion russe de l'Ukraine. Ces nouveaux défis politiques ont remis au centre des débats les questions de liberté individuelle ainsi que du pouvoir de l'Etat à l'intérieur et à l'extérieur des frontières. L'âge des personnes interrogées est aussi un facteur polarisant. En effet, l'étude a souligné que plus la personne est âgée, plus elle est «susceptible d'être polarisée sur le plan affectif» et que les jeunes seraient plus facilement prêts à faire des compromis. Aussi, la même observation a été notée concernant l'intérêt politique d'une personne. Plus une personne est active et intéressée en politique, plus elle aurait tendance à être polarisée affectivement. Les personnes s'engageant bénévolement seraient moins enclines à réagir émotionnellement à une position politique opposée. Les chercheuses et les chercheurs avancent deux explications pour ceci. Soit l'exposition à divers avis politiques durant l'engagement bénévole pourrait diminuer la polarisation, soit le bénévolat attire les personnes qui, de base, sont moins enclines à ce type de réactions.
Finalement, cette étude a été réalisée alors que l’atmosphère politique se «durcit» et que les compromis sont plus durs à trouver. Ce point est particulièrement notable, considérant que le système suisse se base sur la capacité des acteurs à trouver des compromis.

Réaction de la population et perspectives durant la pandémie de Covid-19