Année politique Suisse 1995 : Economie / Agriculture
Politique agricole
Le souverain avait à se prononcer en début d'année sur le nouvel article constitutionnel élaboré par les chambres en contre-projet à l'initiative, entre-temps retirée, de l'Union suisse des paysans (USP). Cet article était censé fournir les bases constitutionnelles de la vaste réforme du monde agricole qui vise à rapprocher ce dernier de l'environnement et du marché. A cet effet, le texte soumis à l'approbation du peuple et des cantons énumérait d'autres tâches que celle traditionnelle de l'approvisionnement du pays, telles que l'utilisation durable des ressources naturelles, l'entretien du paysage ainsi qu'une occupation décentralisée du territoire. En outre, pour garantir une assise constitutionnelle à la nouvelle conception de l'aide financière au monde paysan, le projet du parlement consacrait le principe des paiements directs.
Le souverain a rejeté de justesse l'initiative avec près de 51% de non - soit moins de 30 000 voix de différence - et 12 4/2 cantons. Le rejet le plus net est provenu des cantons de Soleure, Bâle-Ville, Bâle-Campagne et Glaris. Les six cantons romands ont accepté le 3nouvel article, le canton de Vaud l'approuvant même à plus de 71%. Parmi les cantons alémaniques, seuls les cantons de Lucerne, de Thurgovie et d'Obwald ont fait de même. Avec le rejet des deux autres objets soumis en votation (voir infra), ce vote est apparu comme l'expression d'une aspiration populaire à des réformes plus importantes que celles proposées
[1].
Article constitutionnel sur l'agriculture
Votation du 12 mars 1995
Participation: 37,9%
Oui: 836 215 (49,1%) / 8 2/2 cantons
Non: 866 107 (50,9%) / 12 4/2 cantons
Mots d'ordre:
- Oui: PRD (1*), PDC, UDC, PL (1*), PEP, PdL (ex-PA), DS; USP, UPS, Vorort, USAM, Migros.
- Non: PS (1*), PE, Lega, PdT, AdI; VKMB, USS, CSCS, WWF, organisations de défense du consommateur, COOP, Denner.
* Recommandations différentes des partis cantonaux
Lors de la campagne, les
partisans du nouvel article - les partis bourgeois, l'USP ainsi que les principales associations économiques du pays - ont souligné que le texte proposé avait le double avantage de fournir une base constitutionnelle adéquate à la poursuite des réformes en direction de plus de marché et d'écologie, tout en laissant suffisamment de marge de manoeuvre au législateur pour procéder par étapes et ainsi éviter une précipitation qui pourrait être fatale à une grande partie des paysans. Selon les défenseurs du projet, l'opposition à cet article relevait souvent d'un fondamentalisme écologique irréaliste, prônant la conversion immédiate de l'ensemble de la population paysanne à l'agriculture biologique sans tenir compte du fait que la demande pour des produits "bio" ne constitue qu'une part minime (20%) du marché agricole. Le monde paysan a souligné pour sa part que cet article avait le mérite de consacrer constitutionnellement le principe des paiements directs, garantissant ainsi que cette source de revenu jugée indispensable ne serait pas remise en cause à l'avenir par des volontés d'économies intempestives. Les paysans ont également dénoncé la campagne importante des gros distributeurs, lesquels voudraient, sous couvert de considérations écologiques, confiner l'agriculture à la production biologique, ayant ainsi le champ libre pour importer massivement des produits agricoles traditionnels étrangers
[2].
Les
opposants - principalement les partis socialiste et écologiste, l'Association alémanique des petits et moyens paysans (VKMB) ainsi que les associations de consommateurs et de défense de la nature - ont en revanche argué que cet article ne constituait qu'une réforme illusoire ou du moins beaucoup trop timide, qui n'apportait rien de nouveau par rapport à la situation existante. Ils ont regretté notamment que le projet n'affirmait pas plus nettement la nécessité d'une écologisation de la production agricole, ne spécifiant pas par exemple que les paiements directs devaient avant tout financer une production biologique ou intégrée
[3].
L'
analyse Vox a révélé que le vote des partisans et des opposants correspondait au clivage gauche droite. En effet, tandis que la gauche de l'électorat a massivement rejeté l'article constitutionnel, le centre et la droite l'ont majoritairement soutenu, les sympathisants du PDC et de l'UDC y étant le plus favorables. Par ailleurs, parmi les motivations de ceux ayant refusé l'article, l'aspiration à une réforme plus importante en direction du marché et de l'environnement a été prédominante. Pour les partisans en revanche, c'est la volonté de soutenir la paysannerie et de lui garantir des ressources financières suffisantes qui a constitué la motivation principale
[4].
Les citoyens helvétiques étaient également appelés à se prononcer sur une modification de la loi sur l'agriculture. Cette modification, attaquée en référendum par le VKMB, devait permettre aux organisations agricoles de percevoir auprès de l'ensemble des producteurs de chaque secteur une contribution de solidarité allant jusqu'à 2% de leur chiffre d'affaires. Le produit de cette contribution devait servir à financer des opérations de marketing visant à faciliter l'écoulement de la production agricole.
A une large majorité de plus de 66%, le peuple a rejeté cette modification. A l'instar de ce qui s'est passé pour l'article constitutionnel, le rejet le plus massif a été le fait des cantons de Soleure, Bâle-Ville, Bâle-Campagne et Glaris. De même, l'accueil le plus favorable est provenu des cantons ayant approuvé l'article sur l'agriculture, même si en l'occurrence, seuls trois cantons - à savoir Vaud, Fribourg et Jura - l'ont acceptée
[5].
Modification de la loi sur l'agriculture
Votation du 12 mars 1995
Participation: 37,9%
Oui: 569 950 (33,6%)
Non: 1 126 721 (66,4%)
Mots d'ordre:
- Oui: PRD (2*), PDC (1*), UDC (1*), PL (1*); USP, UPS, Vorort, USAM.
- Non: PS (1*), PE, Lega, DS, PdT, AdI, PEP; VKMB, USS, CSCS, WWF, organisations de défense du consommateur, COOP, Denner, Migros.
- Liberté de vote: PdL (ex-PA)
* Recommandations différentes des partis cantonaux
Lors de la campagne, les
partisans de ces contributions - principalement les partis bourgeois, l'USP, et les organisations économiques - ont mis en avant que celles-ci constituaient des instruments indispensables pour permettre à l'agriculture de faire face à la libéralisation du marché agricole. Ils ont également fait valoir que dans la mesure où ce système de contributions obligatoires était en vigueur dans les pays européens, il fallait donner aux paysans indigènes la possibilité de lutter à armes égales. Enfin, le texte soumis à l'approbation populaire prévoyait que l'argent récolté serve à des actions de promotion des produits biologiques, ce qui, selon les défenseurs de la modification, rendait sans objet les critiques souvent d'ordre écologique des détracteurs de cette mesure
[6].
Pour les
opposants - les partis socialiste et écologiste, le VKMB ainsi que les gros distributeurs - cette modification ne faisait au contraire que renforcer le pouvoir d'une bureaucratie paysanne sclérosée et contribuait, par conséquent, au statu quo. Selon eux, on ne pouvait s'attendre à ce que les "agrofonctionnaires", responsables en grande partie de la situation catastrophique de l'agriculture helvétique, usent à bon escient des sommes récoltées. De plus, s'il s'agissait d'insuffler un esprit entrepreneurial dans le monde paysan, c'était au niveau de chaque producteur que cette révolution culturelle devait avoir lieu. Les associations de paysans biologiques ont souligné pour leur part qu'il était inacceptable que leurs membres soient forcés à financer des campagnes de promotion pour des produits peu conformes au respect de l'environnement
[7].
L'
analyse Vox a révélé que les partisans avaient été sensibles avant tout à la solidarité que cette modification permettait d'introduire dans le monde paysan, estimant équitable que l'ensemble des agriculteurs finance le travail d'organisations paysannes dont tous bénéficient. Parmi les opposants en revanche, le caractère inutile de la révision ainsi que l'opposition au financement d'organisation agricoles sclérosées auraient constitué les principales motivations. De nombreux électeurs auraient néanmoins déterminé leur vote sur les conseils d'un tiers (partis, organisations, personnalités), ce qui s'expliquerait par la technicité du sujet
[8].
Suite à cette votation, le commission du Conseil national a proposé une motion chargeant le gouvernement de
supprimer dans la loi sur l'alcool ainsi que dans l'arrêté sur l'économie laitière
les articles qui prévoient la possibilité de prélever des contributions de solidarité dans les secteurs fromagers et fruitiers. Le Conseil national a néanmoins rejeté cette motion à une courte majorité
[9].
Le Conseil des Etats a recommandé à une très large majorité le rejet de l'initiative "paysans et consommateurs - pour une agriculture en accord avec la nature" déposée en 1991 par l'AdI et différentes organisations de consommateurs, de paysans et de défense de la nature. Il a estimé en effet cette dernière trop extrémiste en matière d'exigences écologiques ainsi que contraire aux accords du GATT en matière d'importations. Par ailleurs, contrairement au gouvernement qui avait fait part de son intention de ne pas proposer, faute de temps, de contre-projet à l'initiative, le Conseil des Etats a tenu à soumettre aux citoyens un projet alternatif, estimant le risque trop important de voir l'initiative acceptée, tant le désir de réformes était grand dans la population. Aussi,
il a adopté un contre-projet proposé par une minorité de sa commission, lequel, tout en reprenant les dispositions non contestées de l'article rejeté en mars par le peuple et les cantons au sujet de la multifonctionnalité de l'agriculture, soumettait désormais le versement des paiements directs au respect de conditions écologiques minimales
[10].
Défendant également le principe du contre-projet, la commission du Conseil national a néanmoins jugé que la proposition de la petite Chambre ne prenait pas suffisamment en compte les revendications des vainqueurs des votations du mois de mars, et n'avait de ce fait que peu de chances de l'emporter en votation populaire. Par conséquent, elle a élaboré un projet plus exigeant du point de vue du respect de l'environnement et plus à même, selon elle, de satisfaire les consommateurs. En effet, d'une part, outre de soumettre également l'octroi de paiements directs au respect d'exigences écologiques minimales, la version de la commission prévoit l'adoption par la Confédération de normes obligeant les producteurs à déclarer la provenance, la qualité et les méthodes de fabrication de leur produits; d'autre part, elle proscrit l'utilisation abusive d'éléments fertilisants, de produits chimiques et autres matières auxiliaires. Par rapport à l'initiative "paysans et consommateurs", l'article proposé à la Chambre du peuple renonce néanmoins à des prescriptions trop détaillées en matière de protection des animaux ainsi qu'à toute mention d'une taxe d'incitation sur les engrais.
En plénum, la grande Chambre, de même que le gouvernement, a donné sa préférence de manière très nette à l'article proposé par sa propre commission, à l'exception de quelques députés automobilistes et agrariens, qui ont appuyé sur proposition du député Weyeneth (udc, BE) la version du Conseil des Etats, et des députés de l'AdI favorables à l'initiative "paysans et consommateurs". De nombreux orateurs ont fait valoir que ce projet était susceptible de faire l'objet d'un large consensus au sein de la population. Le seul aspect du contre-projet à faire l'objet d'une discussion a porté sur l'alinéa stipulant que les agriculteurs devraient fournir la preuve du respect d'exigences à caractère écologique pour pouvoir prétendre à des paiements directs. Les groupes bourgeois ont tenu à préciser que cet alinéa ne devait en aucun cas être interprété comme excluant le versement à l'avenir des paiements directs complémentaires. Le rapporteur de la commission, le libéral Gros (GE) ainsi que le conseiller fédéral Delamuraz ont tenu à les rassurer en insistant sur le fait que l'alinéa concerné signifiait uniquement qu'à l'avenir les paiements directs pour prestations écologiques constitueraient la part principale des aides publiques au monde agricole.
Au
Conseil des Etats, de nombreux sénateurs agrariens et démocrate-chrétiens - qui s'inquiétaient également que le projet du Conseil national puisse être interprété comme réservant exclusivement aux paysans écologiques le versement de paiements directs - auraient voulu renvoyer à la Chambre du peuple une proposition Bieri (pdc, ZG) stipulant explicitement que les paiements directs pourraient être à l'avenir encore versés pour des prestations d'intérêt public. Cependant, devant l'urgence de mettre sous toit avant la fin de la session le contre-projet si l'on entendait l'opposer à l'initiative populaire,
le Conseil des Etats s'est rallié à une courte majorité à la version de la grande Chambre
[12].
Suite à cette décision,
les auteurs de l'initiative populaire ont fait part de leur satisfaction face à la version adoptée. Ils
ont annoncé qu'ils
envisageaient de retirer leur initiative. La décision à ce sujet sera prise en début 1996
[13].
Le gouvernement a mis en consultation en automne les
propositions concernant la deuxième étape de la réforme de l'agriculture suisse ("Politique agricole 2002") entamée en 1993 avec l'introduction des paiements directs. Conformément à ce qu'exigent les accords du GATT, le projet prévoit une
libéralisation très importante du secteur primaire, l'Etat se désengageant de nombreuses productions. Parmi celles-ci, c'est sans doute la production laitière qui subirait les bouleversements les plus significatifs pour le monde agricole étant donné son importance pour le revenu paysan (30% de celui-ci). En effet, selon le projet du gouvernement, les prix du lait et du fromage ne seraient plus garantis par l'Etat, mais déterminés par la loi de l'offre et de la demande. Cette libéralisation signifierait la disparition de la Butyra et la privatisation de l'Union suisse du fromage. Les contingents laitiers seraient néanmoins maintenus afin d'éviter un effondrement des prix fatal à l'agriculture. De plus, le prix du lait affecté à la production fromagère continuerait à être artificiellement abaissé par le biais d'une subvention, afin de permettre l'écoulement du fromage helvétique à l'étranger. Les propositions mises en consultation prévoient également que le secteur des céréales serait touché par cette libéralisation, notamment par l'abaissement des droits de douane sur les céréales importées. Les productions viticole, maraîchère et de viande connaîtraient une libéralisation similaire. En revanche, la betterave sucrière et la pomme de terre bénéficieraient encore de l'ancien régime, le gouvernement étant de l'avis que ces deux aliments de base ne doivent en aucun cas manquer au pays. Le Conseil fédéral a en outre souligné que cette vaste réforme, qui devrait commencer en 1997 et se clore en 2002, pourrait signifier une baisse annuelle des prix de 5% dès son achèvement. Cette baisse des prix serait compensée par une hausse du montant des paiements directs, le gouvernement prévoyant d'augmenter ceux-ci de 175 millions de francs par an jusqu'à un plafond de 3 milliards en 2002. Ces paiements directs ne permettront pas néanmoins de compenser totalement les effets de la concurrence: les gouvernement estime que le nombre d'exploitations baissera de 2% chaque année et passera de 94 000 en 1990 à 70 000 en 2002
[14].
Sur le référendum lancé fin 94 contre les accords du GATT et son non-aboutissement, cf. supra, part. I, 2 (Organisations internationales).
Le Conseil fédéral a mis en vigueur les ordonnances d'application relatives à la signature des accords du GATT. Outre l'abolition des contingentements quantitatifs au profit de ceux tarifaires, une des innovations majeures concerne le démantèlement progressif des contingents individuels, lesquels permettaient à certains importateurs de vivre de rentes de situation. Désormais, pour une partie des produits carnés (salami, coppa, jambon cru, viande séchée), les contingents tarifaires seront mis aux enchères, alors que pour les autres produits, la distribution des contingents se fera selon le "principe du lévrier". Lors de la procédure de consultation, ces mesures ont été passablement contestées, les milieux des producteurs craignant que les produits étrangers n'inondent le marché agricole helvétique alors que les organisations de défense du consommateur, les distributeurs ainsi que les paysans biologiques exigeaient une libéralisation plus rapide. Par ailleurs, en ce qui concerne les fruits, les légumes ainsi que les fleurs, le gouvernement a prévu des droits de douane variant selon les saisons afin de pallier à la disparition du "système des trois phases" qui jusque là avait permis de protéger ces productions: ainsi, durant la période cruciale, ceux-ci seront prohibitifs (par exemple 600 francs pour 100 kilos de fraises) alors que pendant le reste de l'année ils seront très bas (3 francs pour 100 kilos de fraises), de sorte qu'en moyenne les droits de douane correspondront aux limites autorisées par le GATT.
La question des contingents individuels a par ailleurs fait l'objet d'une motion Salvioni (prd, TI) demandant au gouvernement de supprimer totalement le système des contingents individuels dont jouissent certains importateurs dans le domaine des produits agricoles. Le Conseil des Etats a transmis cette motion comme postulat.
Le Conseil national a pour sa part transmis comme postulat une motion Schmied (udc, BE) demandant au gouvernement de soumettre les produits agricoles importés aux mêmes exigences en matière de label et de qualité que les produits helvétiques. La grande Chambre a suivi l'avis du gouvernement pour lequel les règles du GATT ne permettent pas d'exiger des produits importés le respect des exigences relativement élevées de la législation helvétique.
Bien que les négociations entre la Confédération et l'UE portant sur la réduction voire la suppression des différents obstacles à la libre circulation de certains produits agricoles n'aient pas abouti pendant l'année sous revue, les deux parties ont trouvé un terrain d'entente sur certains points. En effet, les négociateurs helvétiques se sont rapprochés sensiblement des exigences de l'UE sur les produits laitiers, le vin, ainsi que sur les fruits et légumes. Au sujet de la production fromagère, ils ont donné leur accord pour abolir immédiatement les limitations à l'importation ainsi que pour diminuer, et dans un second temps supprimer, les subventions à l'exportation. Dans le secteur de la viande, la position de la Suisse a été en revanche beaucoup plus restrictive, même si Berne n'a pas exclu des concessions sur les contingents tarifaires. En échange, l'UE s'est engagée à prendre des mesures réciproques. Les représentants suisses n'ont pas obtenu de la part des négociateurs européens que les produits agricoles transformés (tels que le chocolat) soient mis sur la table des discussions, les négociateurs de l'Union faisant savoir que ce volet n'était pas compris dans le mandat qui leur avait été délivré par les ministres européens.
L'USP a publié des
chiffres concernant le nombre d'exploitations écologiques. En 1994, quelques 15 550 exploitations, couvrant 28% de la surface agricole utile, ont pratiqué la production intégrée, ce qui représente une augmentation de 67% par rapport à 1993. La production biologique a concerné 1360 exploitations, couvrant 2% de la surface agricole utile (augmentation de 12% par rapport à 1993). En l'an 2000, 90% des exploitations devraient s'être converties soit à la production intégrée soit à la production biologique
[19].
Le Conseil des Etats a transmis comme postulat une motion Onken (ps, TG) chargeant le gouvernement d'élaborer un plan d'action visant à offrir de
meilleurs débouchés aux produits agricoles ainsi qu'aux spécialités régionales et répondant aux critères du développement durable. Selon le motionnaire, le prélèvement de taxes d'incitation sur les produits suisses et étrangers n'étant pas conformes aux critères du développement durable ainsi qu'une meilleure information des consommateurs constitueraient, parmi d'autres, des mesures à même de faciliter l'écoulement des produits écologiques. La Chambre des cantons a suivi le gouvernement selon lequel des nombreuses réformes en cours allaient déjà dans le sens de la motion
[20].
La grande Chambre a pour sa part transmis comme postulat une motion Baumann Ruedi (pe, BE) demandant au gouvernement de prendre les mesures nécessaires pour que les
paiements directs soient versés uniquement aux détenteurs d'exploitations écologiques (culture biologique, production intégrée, élevage contrôlé en plein air) après une période transitoire courant jusqu'en l'an 2000. Le Conseil national a suivi l'avis du gouvernement qui, tout en soulignant que le but à poursuivre à long terme était bien celui de n'octroyer les paiements directs qu'à des exploitations écologiques, a fait valoir que le délai impératif que contenait la motion était inacceptable étant donné qu'on ne pouvait prévoir le rythme avec lequel la conversion de l'agriculture à l'écologie se ferait
[21].
Le Conseil national a également transmis comme postulat une motion Berger (udc, VD) demandant au gouvernement de proposer une modification de l'article de la loi sur l'agriculture concernant les
paiements directs pour prestations écologiques. Le motionnaire demande notamment que les différentes prestations énumérées par la loi qui donnent droit aux paiements directs soient remplacées par une seule et unique formulation (par exemple la production intégrée). En outre, le motionnaire requiert que les différentes appellations écologiques qui fleurissent sur le marché répondent aux exigences auxquelles est soumis le versement des paiements directs écologiques
[22].
Le Conseil des Etats a transmis un postulat Schüle (prd, SH) enjoignant le gouvernement de présenter un rapport sur les mesures qu'il entend prendre pour
mettre fin aux subventions dont bénéficient les organisations agricoles situées en amont et en aval de la production agricole. Selon le postulant, ces mesures sont indispensables pour déréguler l'agriculture helvétique. De plus, les ressources ainsi dégagées pourraient être affectées au versement des paiements directs
[23].
Révisant l'ordonnance sur la recherche agronomique, le gouvernement a décidé de réduire le nombre de stations de recherches agronomiques de 7 à 6. Il a en effet décidé de ne pas maintenir l'Institut de recherches de Liebefeld (BE) comme entité indépendante et de le rattacher au Centre national de Zurich-Reckenholz. Le gouvernement a également tenu à ce que la recherche agronomique traite principalement à l'avenir des questions ayant trait au passage d'une agriculture axée sur la production à une agriculture compétitive et respectueuse de l'environnement.
Le gouvernement a présenté en juin son message concernant le Paquet agricole 95. Celui-ci comprend différentes mesures intermédiaires entre la première et la deuxième étape ("Politique agricole 2002") de la réforme agricole. En premier lieu, le gouvernement a proposé la prorogation des arrêtés sur la production végétale visant à prévenir la surproduction de blé. Ces arrêtés, qui sont en vigueur jusqu'à fin 1996 uniquement, doivent en effet être prolongés afin que ne soit pas créé un vide juridique le temps de la mise sous toit de la nouvelle politique.
Le second objet soumis à l'approbation des chambres concerne des modifications de la loi sur l'agriculture visant la suppression des obstacles techniques au commerce avec l'UE dans le secteur de la protection des plantes et dans celui des matières auxiliaires de l'agriculture. Il s'agit notamment de mettre en place le système du passeport phytosanitaire, lequel signifie que les contrôles, effectués jusqu'à présent aux frontières, seront transférés à l'intérieur du pays auprès des producteurs et des commerçants.
En troisième lieu, il est proposé d'approuver la Convention internationale sur la protection des végétaux (CIPV) dont la ratification permettrait à la Suisse de participer de plein droit à l'élaboration de normes uniformisées de lutte contre l'introduction et la propagation d'organismes nuisibles pour les plantes.
Les quatrième et cinquième objets concernent respectivement un
complément à l'arrêté sur la viticulture et une
modification de la loi sur la protection de la nature et du paysage. Le complément à l'arrêté sur la viticulture est rendu nécessaire par l'entrée en vigueur de la loi sur les denrées alimentaires qui rend caduques les deux ordonnances qui jusqu'alors régissaient le contrôle du commerce du vin. La modification de la loi sur la protection de la nature et du paysage a pour buts, d'une part, de renforcer la protection pénale dans le commerce des plantes menacées d'extinction, d'autre part, de transférer les contrôles du commerce international opérés à la frontière dans les entreprises concernées. Cette mesure permettra de bénéficier d'effets de synergie, étant donné la mesure parallèle prise pour les contrôles phytosanitaires.
Le Conseil des Etats a adopté à l'unanimité les différents objets
[25].
[1]
FF, 1995, II, p. 1313 ss.; presse des 13.3 et 14.3.95. Voir aussi
APS 1994, p. 112.1
[2] Presse des mois de janvier, février et mars 1995. Il est à noter également que le Vorort, lors de sa prise de position en faveur du projet, a mis en garde les citoyens que le rejet de ce dernier pourrait conduire les paysans à se retourner contre les accords du GATT, au sujet desquels un référendum était alors pendant:
JdG, 17.2.95. A ce sujet voir supra, Part. I, 2 (Organisations internationales).2
[3] Presse des mois de janvier, février et mars 1995.3
[4] P. Sciarini / L. Marquis / B. Wernli,
Analyse des votations fédérales du 12 mars 1995, Vox no 56, Adliswil 1995.4
[5]
FF, 1995, II, p. 1313 ss.; presse des 13.3 et 14.3.95. Voir aussi
APS 1994, p. 112.5
[6] Presse des mois de janvier, février et mars 1995.6
[7] Presse des mois de janvier, février et mars 1995.7
[8] P. Sciarini / L. Marquis / B. Wernli,
Analyse des votations fédérales du 12 mars 1995, Vox no 56, Adliswil 1995.8
[9]
BO CN, 1995, p. 2584 s.9
[10]
BO CE, 1995, p. 780 ss.; presse du 23.6.95. Voir aussi
APS
1993, p. 126.10
[12]
BO CE, 1995, p. 1217 ss. et 1296;
BO CN, 1995, p. 2732;
FF, 1996, I, p. 233 ss.; presse du 15.12.95.12
[13]
LZ et
NZZ, 21.12.95.13
[14] Presse du 26.10.95.14
[19]
24 Heures, 31.5.95; presse du 14.9.95.19
[20]
BO CE, 1995, p. 791 s.20
[21]
BO CN, 1995, p. 2403. Le parlement a par ailleurs pris connaissance d'une pétition de l'association contre les fabriques d'animaux demandant que la culture biologique soit soutenue dans une plus grande mesure. Les députés n'ont pas donné suite à cette pétition, estimant que ses revendications étaient déjà satisfaites:
BO CE, 1995, p. 755 s.;
BO CN, 1995, p. 2162 s.21
[22]
BO CN, 1995, p. 1597.22
[23]
BO CE, 1995, p. 792 s. Pour les contributions de solidarité, cf. supra.23
[25]
FF, 1995, IV, p. 621 ss.;
BO CE, 1995, p. 1224 ss.; presse du 28.6.95.25
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