Année politique Suisse 1995 : Infrastructure, aménagement, environnement / Transports et communications
Chemins de fer
Le parlement a approuvé sans opposition l'arrêté fédéral concernant la
Convention relative aux transports internationaux ferroviaires (COTIF). Cet arrêté portait sur des modifications d'ordre institutionnel au sein du comité administratif veillant à la bonne application de cette convention, ainsi que sur des améliorations en matière de responsabilité en cas de dommages, pertes ou retards
[41].
Le Conseil national a transmis un postulat Gadient (udc, GR) invitant le gouvernement à étudier la possibilité d'instaurer des
liaisons directes entre la Romandie et les Grisons. Selon l'auteur du postulat, de telles liaisons épargneraient aux voyageurs de pénibles changements de train, accroissant ainsi l'attractivité touristique des Grisons. Il a également transmis un postulat Pini (prd, TI) demandant au gouvernement d'examiner les moyens d'améliorer la
ligne du Gothard du point de vue de la propreté dans les wagons, de la durée du trajet et de sa rentabilité
[42].
A l'instar du Conseil des Etats,
le Conseil national a adopté la
révision de la loi sur les chemins de fer visant à réduire les inégalités de traitement entre les CFF et les entreprises de transports concessionnaires (ETC) ainsi qu'à responsabiliser à l'avenir plus les cantons. De nombreux orateurs ont néanmoins exprimé leurs craintes que le gouvernement ne veuille, par cette révision, transférer aux cantons des charges financières plus importantes. La principale
divergence avec la petite Chambre a concerné la question de l'instance compétente pour trancher les litiges entre les cantons et la Confédération au sujet des prestations qu'ils seront amenés à fournir conjointement. Le Conseil national n'a en effet pas suivi la Chambre haute qui voulait instituer une commission paritaire, au sein de laquelle des représentants de la Confédération et des cantons auraient siégé. Il a préféré s'en tenir au projet du gouvernement qui prévoit que le DFTCE soit seul compétent. En seconde lecture, le Conseil des Etats s'est rallié à la position de la grande Chambre
[43].
La
controverse concernant la construction d'un ou de deux tunnels ainsi que leur financement s'est poursuivie en 1995. En début d'année, deux événements ont notamment contribué à échauffer les esprits. D'une part, la prise de position du conseiller national zurichois
Blocher (udc) en faveur, pour des raisons financières, de la construction du seul tunnel du Gothard n'a pas manqué de susciter de vives réactions tant de la part du conseiller fédéral Ogi que des cantons bernois et romands
[44]. D'autre part, la
publication d'un rapport commandé à un bureau londonien par le DFTCE a confirmé les craintes de ceux qui, à l'instar du chef des finances O. Stich, doutaient fortement de la rentabilité des NLFA. L'étude des experts anglais a en effet souligné que la rentabilité des transversales alpines reposait sur certaines conditions, dont la réalisation ne pouvait de loin pas être tenue pour garantie. Plus précisément, l'expertise a mis en évidence le fait que, pour avoir une chance de rembourser les prêts en 2070, il serait indispensable d'augmenter de 15% les tarifs du transport ferroviaire et d'accroître, dans la même mesure, les coûts du transport routier afin que le rail conserve sa compétitivité. De plus et surtout, ces hausses devraient être valables à l'échelle européenne - ce qui présuppose une politique de coordination en la matière - afin d'éviter que les transporteurs routiers ne préfèrent contourner la Suisse. En conclusion de leur étude, les experts londoniens ont souligné que si ces conditions devaient ne pas être remplies, les intérêts mêmes des emprunts pourraient être difficiles à rembourser, ce qui signifierait un accroissement incontrôlable de la dette
[45].
Au printemps, face à cette polémique croissante,
le Conseil fédéral - qui depuis l'été 1994 n'avait pu s'exprimer d'une seule voix -
a affirmé sa volonté de réaliser les deux tunnels simultanément, rejetant ainsi l'option d'échelonnement des deux projets défendue par O. Stich au profit de celle chère à A. Ogi. Le gouvernement a justifié sa volonté en faisant référence notamment aux engagements européens de la Suisse, à la nécessité de respecter les choix populaires ainsi qu'aux dangers que la décision de ne construire qu'un seul tunnel ne manquerait pas de faire courir à la cohésion nationale. Sur la question du financement en revanche, le gouvernement a décidé de ne pas soumettre, contrairement à ce qui était prévu, le deuxième crédit d'engagement de huit milliards de francs au parlement, estimant que
l'aspect financier devait être repensé. Prenant acte des conclusions de l'expertise londonienne, il a souligné notamment que le financement des deux NLFA ne devait pas se baser principalement sur des emprunts, mais sur des contributions à fonds perdus provenant de différents impôts indirects. Ces taxes permettraient de financer au fur et à mesure la construction des transversales alpines et diminueraient la charge financière que devront assumer les générations futures. Afin de repenser totalement l'aspect financier, le Conseil fédéral a cependant chargé un groupe de travail, composé des plus hauts fonctionnaires du DFF et du DFTCE, d'élaborer des propositions
[46].
Les membres de ce groupe ont rendu leur rapport à la fin de l'été. Estimant qu'il était indispensable de réduire le coût des NLFA de 18 à 13 milliards de francs (prix 1995) si l'on entendait avoir une chance de les financer, les experts du DFF et du DFTCE ont proposé deux variantes signifiant un redimensionnement conséquent
des projets initiaux. Selon les deux scénarios, seuls les tunnels de base seraient en effet construits, du moins dans un premier temps, sans les voies d'accès ni le raccordement de la Suisse orientale. La première variante, estimée à 11,3 milliards de francs, consisterait à construire simultanément les deux tunnels de base, mais en réduisant le Lötschberg à une seule voie. La seconde variante, d'environ 12,4 milliards de francs, reviendrait à construire le seul tunnel de base du Gothard dans une première étape, renvoyant à plus tard la construction du Lötschberg (sur deux voies), qui ne serait opérationnel qu'en 2015. Dans les deux variantes, la ligne du Gothard - à laquelle s'ajouteraient les tunnels du Monte-Ceneri (TI) et du Zimmerberg (ZH) - absorberait la quasi-totalité du trafic de marchandises, ce qui, selon les estimations des experts, serait à la mesure de ses capacités. Le groupe de travail a justifié le sacrifice du Lötschberg en soulignant que la nécessité de cette transversale n'était pas absolue pour le trafic de marchandises. Au sujet du renoncement aux voies d'accès, les membres du groupe de travail ont estimé que les nouvelles technologies ferroviaires (train à caisson inclinable) apportaient des solutions suffisamment efficaces, notamment du point de vue de la rapidité. Enfin, selon les hauts fonctionnaires des deux départements, la Suisse ne manquerait cependant pas à ses engagements européens, puisque le temps de parcours n'augmenterait pas de plus de dix minutes.
Au sujet du financement,
le groupe de travail a envisagé un plan d'action spécial
qui ne ferait appel à l'emprunt que dans une proportion de 25% (500 millions de francs par an) et serait alimenté par les deux tiers du produit de la future redevance poids lourd liée aux prestations (400 millions de francs par an), par une taxe ferroviaire ponctionnée sur le trafic voyageurs et marchandises (50 millions) ainsi que par une hausse de 10 centimes des droits sur les carburants (600 millions). A ces recettes s'ajouterait, comme prévu dans l'arrêté voté en 1991, une partie du revenu actuel des droits de douanes sur les carburants (450 millions). L'ensemble de ces ponctions ne serait effectué que le temps d'achever les différents projets et servirait également - conformément aux souhaits exprimés par les partis gouvernementaux - à couvrir le financement d'autres infrastructures (Rail 2000, raccordement de la Suisse romande au réseau à grande vitesse, programme antibruit). Pour en accroître l'acceptabilité politique, ces nouvelles taxes alimenteraient en outre le compte routier pour un montant de 300 millions de francs annuels
[47].
Le Conseil fédéral a
mis en consultation les propositions de ce rapport, réaffirmant toutefois sa préférence pour la construction simultanée des deux tunnels. Il a en outre ajouté que les trois nouvelles mesures de financement proposées - à savoir la hausse de 10 centimes sur les carburants, la taxe ferroviaire et le prélèvement des 2/3 du produit de la taxe poids lourd - seraient soumises sous la forme d'un seul article constitutionnel à l'approbation du peuple et des cantons
[48].
Lors de la procédure de consultation, les
réactions n'ont de loin pas été positives. Ainsi, les
cantons romands et bernois ont accueilli assez froidement les propositions du groupe de travail, rejetant catégoriquement la variante consistant à construire prioritairement le tunnel du Gothard ainsi qu'émettant des doutes sur la sécurité et la rentabilité d'un tunnel du Lötschberg sur une seule voie. Les cantons de Suisse orientale ont quant à eux rejeté la proposition de renoncer au raccordement avec leur région. Enfin, ceux de Suisse centrale, de concert avec le Tessin et Zurich, ont exigé que les voies d'accès soient réalisées en même temps que le tunnel de base, même s'il fallait renoncer pour ce faire à toute construction au Lötschberg. Sur la question du financement, les cantons se sont exprimés de manière plus unanime et plus positive, même si certains ont proposé un recours plus massif à l'emprunt ou une hausse de la TVA. Les
associations de défense des utilisateurs de la route ont à l'inverse critiqué principalement le mode de financement. Le Touring Club suisse (TCS), l'Association suisse des transports routiers (ASTAG) et la Fédération routière suisse (FRS) ont rejeté la proposition d'augmenter le prix de l'essence, estimant inadmissible que ce soient les utilisateurs de la route qui financent pour près de 70% les projets ferroviaires. L'ASTAG a réitéré son opposition catégorique au montant de la taxe poids lourd
[49]. L'Association Transport Environnement (ATE) et le Service d'information des transports publics (LITRA) ont en revanche accueilli favorablement les propositions du Conseil fédéral en matière de financement, envisageant même une hausse du prix de l'essence plus importante. Concernant la question des deux variantes, l'ACS, la FRS et l'ATE se sont exprimés en faveur de la construction en priorité du tunnel de base du Gothard, les autres organisations s'abstenant de prendre position sur ce point.
Les partis gouvernementaux ont accueilli de manière globalement positive les propositions du Conseil fédéral, même si les partis bourgeois ont émis quelques réserves sur le mode de financement. Ainsi le parti radical s'est opposé à la hausse du prix de l'essence, du moins tant qu'un fonds d'investissement pour les transports publics ne serait pas créé à l'instar de celui qui existe pour la route. L'UDC et le PDC ont également exprimé le souhait que la solution du financement spécial soit, dans un second temps, abandonnée en faveur d'un fonds pour les transports publics. De plus, conformément à ce qu'ils avaient déclaré lors de la consultation sur la taxe poids lourd liée aux prestations, les partis bourgeois se sont opposés à la version retenue en la matière par le gouvernement. Au sujet des deux variantes à choix, les partis socialiste et radical ont exprimé leur préférence pour la construction simultanée des deux tunnels. Tiraillée entre ses sections bernoise et zurichoise, l'UDC n'a pas voulu s'exprimer à ce sujet, laissant au Conseil fédéral le soin de trancher. Après avoir exprimé sa préférence pour la réalisation en priorité du tunnel du Gothard, le PDC est, quant à lui, revenu sur sa position devant la profonde émotion, voire les menaces de dissidence, exprimées par la section valaisanne.
Ayant renoncé à soumettre au parlement le crédit de 8 milliards de francs nécessaires à la construction proprement dite des tunnels, le Conseil fédéral a proposé cependant d'accorder un
crédit de transition de 855 millions de francs pour les NLFA. Cette somme doit garantir que les travaux préliminaires déjà entrepris puissent continuer sans interruption. De ces 855 millions de francs, seuls 160 millions seront utilisables immédiatement pour la construction des puits d'attaque au Gothard, les 695 autres millions restant bloqués tant que le gouvernement n'aura pas trouvé de solutions satisfaisantes pour le financement global des NLFA
[51].
Le
Conseil des Etats a approuvé à une large majorité ce crédit de transition. Il n'a pas suivi une proposition de renvoi Weber (adi, ZH) qui voulait différer ce crédit jusqu'à ce que le gouvernement propose un concept de financement global et clair. La petite chambre a également rejeté une proposition Loretan (prd, AG) demandant de n'allouer que 210 millions de francs. Elle a en revanche accepté - à l'instigation des députés Piller (ps, FR) et Cavadini (pl, NE) - que 210 millions de francs, et non pas seulement 160 millions, soient immédiatement utilisables par le gouvernement afin que la construction des puits d'attaque puisse commencer également au Lötschberg
[52].
Le
Conseil national a lui aussi adopté ce crédit de transition. Il a suivi la petite Chambre pour que les 210 millions nécessaires à la réalisation des puits d'attaque des deux tunnels soient immédiatement débloqués. La Chambre du peuple a par ailleurs rejeté une proposition de non-entrée en matière Steinemann (pdl, SG) qui voulait enterrer le projet des NLFA. Il a également repoussé une proposition Diener (pe, ZH) de suspendre toute allocation de crédit tant que la question du financement global des transversales alpines n'était pas résolue. Le gouvernement, soutenu par la commission du Conseil national, a en effet convaincu le plénum que ce crédit de transition permettrait uniquement une planification des NLFA et ne préjugeait en rien quant à leur réalisation. Enfin, la grande Chambre a rejeté tant une proposition Diener (pe, ZH) que celle du député vaudois Friderici (pl) qui demandaient de limiter les travaux, la première, au seul Gothard, la seconde, au seul Lötschberg
[53].
Le Conseil national a également transmis un postulat Strahm (ps, BE) priant le gouvernement de prendre des mesures pour que l'
adjudication publique et la passation des mandats concernant les NLFA se fassent de manière à permettre le jeu de la libre concurrence. L'auteur du postulat invite également l'exécutif à examiner les possibilités permettant une gestion rationnelle des risques ainsi que celles concernant l'institution d'une responsabilité solidaire entre les différents fournisseurs par le biais d'un consortium
[54].
A l'instar du Conseil des Etats, le Conseil national a pris acte du
rapport du gouvernement sur le projet Rail 2000. Le document de l'exécutif prévoit de réduire, dans un premier temps, des trois quarts le nombre de projets afin de maintenir une enveloppe de 7,4 milliards de francs. Soumises au plénum par des députés radicaux, automobilistes, verts et indépendants, différentes propositions de renvoi demandant de lier ce projet aux NLFA, d'établir un calendrier et un plan de financement pour les prochaines étapes - voire de procéder à des adaptations des deux arrêtés fédéraux de 1986 - ont été repoussées assez aisément, même si de nombreuses critiques ont été parallèlement adressées au gouvernement. Celui-ci a mis en garde la minorité romande sur le fait que le renvoi du rapport signifierait retarder pour une période indéterminée plusieurs projets de Rail 2000 la concernant au premier chef
[55].
Dans un rapport paru en début d'année,
la commission de gestion du Conseil national a pour sa part mis en évidence
un certain nombre de dysfonctionnements dans la conduite et la surveillance du projet Rail 2000. Parmi ceux-ci, il a été relevé que le DFTCE n'avait pas assuré entre 1987 et 1990 une surveillance efficace des CFF. Plus particulièrement, ce département n'aurait pas affecté suffisamment de moyens à cet effet, sous-estimant les problèmes liés à la réalisation du projet et surestimant la capacité des CFF de pouvoir les maîtriser seuls. En outre, les estimations financières auraient été effectuées avec une légèreté coupable. La commission a reconnu que les faits incriminés remontaient pour la plupart à la période précédant l'arrivée d'A. Ogi à la tête du DFTCE. Prenant position sur le rapport, le Conseil fédéral a rejeté ces critiques. Selon lui, au moment de l'évaluation des coûts, on ne pouvait prévoir les répercussions de la législation sur la protection de l'environnement, responsable à son avis en grande partie de l'explosion des coûts. Par ailleurs, le DFTCE n'aurait pas pu effectuer une surveillance accrue du fait du manque de personnel, pénurie qui était à la connaissance du parlement et à laquelle ce dernier n'a pas remédié. Le gouvernement a également ajouté qu'il avait réagi vigoureusement en 1990 en resserrant sa surveillance et que, depuis cette année, un organe de contrôle avait été mis en place
[56].
Le parlement n'a pas été satisfait des réponses du gouvernement. Estimant notamment que le Conseil fédéral n'avait pas défini de manière suffisamment précise la surveillance qu'il entendait exercer à l'avenir à l'égard des CFF (surveillance ou haute surveillance, surveillance politique ou surveillance de la gestion d'entreprise) ainsi que les rôles et les compétences respectifs du DFTCE et de l'Office fédéral des transports (OFT), le parlement a transmis une motion de la commission de gestion du Conseil national lui demandant de s'exprimer sur ces questions.
En automne,
la commission de gestion du Conseil des Etats a également rendu un rapport sur la conduite du projet Rail 2000 par le DFTCE. A la différence de sa consoeur de la grande Chambre, elle s'est penchée sur la période d'élaboration du projet de 1982 à 1987. La commission a notamment dénoncé l'absence de consultation et la précipitation avec lesquelles le dossier avait été mené, cette dernière étant due à la volonté de profiter d'une conjoncture particulièrement favorable aux transports publics dans l'opinion publique et la classe politique. En outre, à l'instar de ce qu'avait souligné le rapport du Conseil national, la commission a relevé de nombreux manquements dans l'estimation des coûts. L'inflation, notamment, n'aurait pas été prise en compte et les mesures en faveur de l'environnement amplement sous-estimées à 200-300 millions de francs alors que leur coût actuel se situe entre 3 et 7 milliards de francs. De façon plus générale par ailleurs, les concepteurs de Rail 2000 n'auraient pas donné suffisamment d'informations sur l'aspect financier du projet, ne signalant pas au parlement la grande marge d'erreur de leurs estimations et omettant d'attirer son attention sur le fait qu'au moins 2 milliards de francs d'investissements pris sur le budget ordinaire des CFF s'ajoutaient aux 5,4 milliards soumis à l'approbation des députés. Enfin, selon les auteurs du rapport, les principaux responsables de ces dysfonctionnements seraient le conseiller fédéral de l'époque, Léon Schlumpf (udc, GR), le collège gouvernemental dans son ensemble, ainsi que le directeur de l'OFT et la direction générale des CFF de l'époque
[58].
A l'instar de la Chambre des cantons, le Conseil national a rejeté une initiative du canton de Berne demandant que la nouvelle
ligne du projet Rail 2000 entre Matstetten (BE) et Rothrist (AG) soit enterrée pour des raisons de protection du paysage. Il a estimé que cette variante, également défendue par le canton de Soleure, était beaucoup trop coûteuse. Conformément à cette décision, il a rejeté une motion Vollmer (ps, BE) ainsi qu'une motion Ruf (ds, BE) demandant toutes deux au gouvernement de soumettre au parlement un projet sur les mesures de financement de la variante défendue par le canton de Berne
[59].
Le Conseil national a transmis une motion de la commission des transports du Conseil des Etats demandant au gouvernement de présenter au parlement une proposition de
modification de l'arrêté portant sur Rail 2000 s'il devait s'avérer possible, grâce aux nouvelles technologies (rames à caisson inclinable et voitures à deux étages), de renoncer entièrement ou partiellement à la construction des nouveaux tronçons prévus pour la deuxième étape. Il a également transmis comme postulat une motion Baumberger
(pdc, ZH) demandant au Conseil fédéral de réaliser, lors de la deuxième étape de Rail 2000, la
ligne reliant Winterthour (ZH) à l'aéroport de Zurich. Selon le motionnaire, cette ligne serait indispensable à la Suisse orientale ainsi qu'au transit du trafic ferroviaire international par l'aéroport. La grande Chambre a suivi le gouvernement qui a fait valoir qu'il était prématuré de se prononcer sur cette question avant de connaître les conclusions d'études devant déterminer les tronçons à construire lors de la deuxième étape
[60].
La Confédération ainsi que les différents cantons intéressés ont poursuivi leurs discussions pour élaborer une position commune au sujet des raccordements de la Suisse occidentale au réseau français de trains à grande vitesse. Si rien n'a été décidé cette année au sujet des quatre alternatives possibles - à savoir Genève-Mâcon, Genève-Annecy-Chambéry, Lausanne-Vallorbe-Dôle et le raccordement de Bâle vers les TGV Est et Rhin-Rhône - le projet de liaison TGV Genève-Mâcon a cependant été relancé en fin d'année lors d'une rencontre entre A. Ogi et Bernard Pons, nouveau ministre français des transports. La France, qui auparavant avait exprimé sa préférence pour un raccordement de la Suisse romande par la ligne Chambéry-Annecy, a en effet estimé que de nouveaux éléments lui faisaient voir le dossier sous un angle nouveau. Des investisseurs privés suisses et français se seraient en effet déclarés disposés à assumer la plus grande partie du risque financier de cette construction. Le projet de réaliser en plusieurs étapes la liaison ainsi que la perspective de voir créer en Suisse un fonds pour les transports publics qui contribuerait de manière importante au financement du projet expliqueraient également le changement d'attitude des autorités françaises. Les deux ministres ont décidé de lancer une étude sur la rentabilité et le financement de ce tronçon.
Le groupe industriel allemand Daimler-Benz est entré dans le capital de Swissmetro - train souterrain ultra-rapide à sustentation magnétique - pour un montant de 500 000 francs. Le groupe fait désormais partie du conseil d'administration du projet, ce qui permettra - étant donné la participation de ce géant de l'industrie allemande à une infrastructure similaire en Allemagne - un échange de savoir-faire intéressant pour les concepteurs helvétiques.
Suite aux accidents ferroviaires de 1994, la direction des CFF a établi un
programme pour améliorer la sécurité. Le système de communication sera notamment renouvelé, les transmissions téléphoniques étant remplacées par des appels radio. Un dispositif permettant d'arrêter automatiquement les convois qui ne respectent pas un feu rouge sera également installé. Enfin, des spécialistes en sécurité seront formés. 1,5 milliard de francs seront dépensés jusqu'en l'an 2000 pour financer ces différentes mesures
[63].
Suite à la demande des directeurs cantonaux de justice et police de créer un
corps de police destiné à assurer la sécurité des voyageurs, le Conseil fédéral a mis en consultation un projet d'ordonnance qui prévoit la possibilité pour les entreprises de mettre sur pied leur propre service de sécurité. Ces agents pourraient procéder à des contrôles d'identité ainsi qu'arrêter provisoirement des suspects avant de les remettre à la police compétente
[64].
Le Conseil national a transmis un postulat Bircher (pdc, AG) demandant au gouvernement d'accélérer l'
acquisition de nouveau matériel roulant tant pour les trains de marchandises que pour ceux destinés au trafic de voyageurs. Ce matériel devrait permettre des convois plus silencieux et garantir un maximum de sécurité. Il a également transmis comme postulat une motion Meier (pe, ZH) exigeant de consacrer au moins 50 millions de francs du budget des CFF à des
mesures de protection contre le bruit [65].
Selon les
comptes 1995 des CFF,
le déficit de la régie fédérale a augmenté de 150% par rapport à 1994 passant de 198 millions à 496 millions de francs (produits: 6,24 milliards de francs; charges: 6,74 milliards). Ce déficit record est, entre autres, le résultat de la baisse du trafic de voyageurs, dont les recettes (1,58 milliard de francs) ont chuté de 7,3%, et de celle du trafic de marchandises dont le chiffre d'affaires (1,03 milliard) a reculé de 8%. Les CFF ont expliqué ces chiffres catastrophiques, en ce qui concerne le trafic de voyageurs, par l'introduction de la TVA ainsi que les difficultés du secteur touristique, et, en ce qui concerne le trafic de marchandises, par la cessation du trafic de détail Cargo domicile. L'apport financier de la Confédération et des cantons a augmenté de 13,3% pour atteindre 2,75 milliards
[66].
En dépit de multiples efforts d'économies, les CFF n'ont pas pu présenter un
budget 1996 équilibré. Celui-ci prévoit un déficit de 263 millions de francs (produits: 6,498 milliards; charges: 6,761 milliards). L'apport de la Confédération devrait cependant diminuer de 4,3%, passant de 2,582 milliards de francs à 2,432 milliards. Cette baisse s'explique par la participation accrue des cantons aux coûts non couverts du trafic régional, conformément à la révision cette année de la loi sur les chemins de fer. Comme par le passé, les CFF ne seront pas en mesure de fournir une contribution d'infrastructure. Le parlement a facilement approuvé ce budget. Le Conseil national a notamment rejeté une proposition du PDL demandant de renvoyer ce budget au Conseil fédéral
[67].
Le DFTCE a présenté de nouvelles propositions concernant la réforme de la régie fédérale. Ainsi, il a envisagé de séparer complètement le secteur de l'infrastructure de celui de l'exploitation. Seul ce dernier reviendrait aux CFF alors que le secteur de l'infrastructure relèverait de la compétence d'un nouvel office ad hoc. De plus, conformément aux exigences de l'Union européenne, des compagnies privées indigènes ou étrangères pourraient également avoir accès à l'infrastructure ferroviaire helvétique. Enfin, les CFF seraient transformés en une société anonyme de droit public et le statut de fonctionnaire aboli afin d'accroître l'autonomie et la flexibilité de l'entreprise.
Ces propositions de réforme - beaucoup plus ambitieuses que celles faites en 1994 par le gouvernement - ont été vivement critiquées par la direction des CFF ainsi que par la Fédération des cheminots (SEV). Acceptant le principe d'une différenciation accrue de l'exploitation et de l'infrastructure, la direction s'est en revanche déclarée opposée à une séparation complète de ces deux secteurs qui, selon elle, ne pourrait mener qu'à des dysfonctionnements importants eu égard à leur forte imbrication. Une telle mesure induirait par ailleurs une diffusion néfaste des responsabilités. Faisant écho à ces critiques, le syndicat des cheminots a en outre répété son opposition à une privatisation même partielle de la régie, estimant qu'une telle réforme n'apporterait aucune amélioration au niveau des prestations et ne se ferait qu'au détriment du personnel.
Devant cette opposition très vive,
le Conseil fédéral a présenté les grandes lignes d'un projet corrigé qu'il devrait soumettre au parlement en 1996. Si le gouvernement entend encore séparer les secteurs de l'exploitation et de l'infrastructure, ces derniers ne seraient distincts que d'un point de vue organisationnel et seraient chapeautés par un toit commun sous la forme probablement d'un holding chargé de leur coordination. Le Conseil fédéral n'a néanmoins pas exclu que, dans un deuxième temps, ces deux secteurs soient totalement disjoints. Concernant l'accès pour les compagnies ferroviaires privées aux infrastructures étatiques, celui-ci serait strictement réglementé, la régie fédérale gardant la priorité. Enfin, le statut juridique des CFF devrait être transformé soit sous la forme d'une société anonyme de droit public, soit sous celle d'un établissement de droit public doté de la personnalité juridique
[69].
Première dans l'histoire des chemins de fer helvétiques, l'
exploitation de la ligne entre Schaffhouse et Rorschach (SG) - jusqu'alors propriété des CFF - pourrait passer en mains privées. En effet, la Mittelthurgaubahn, forte du soutien des cantons concernés, a proposé de reprendre l'exploitation de cette ligne quelque peu délaissée par la régie fédérale. Les CFF ont proposé un contre-projet, craignant que cette privatisation ne constitue un précédent. Le Conseil fédéral devrait rendre sa décision en 1996
[70].
Le Conseil national a approuvé, à l'instar du Conseil des Etats et à la quasi-unanimité, le projet d'extension de la concession dont bénéficie le
chemin de fer Aigle-Leysin (VD) et qui doit permettre à ce dernier de prolonger sa ligne de Leysin jusqu'à la Berneuse
[71].
[41]
BO CE, 1995, p. 401 s.;
BO CN, 1995, p. 1562 s.41
[42]
BO CN, 1995, p. 1614 (Gadient) et p. 2206 s. (Pini). Voir
APS 1994, p. 158.42
[43]
BO CN, 1995, p. 276 ss., 768 s. et 1016;
BO CE, 1995, p. 284 ss., 400 s. et 441;
FF, 1995, II, p. 423 ss. Voir aussi
APS
1994, p. 158.43
[44] Les cantons romands et bernois ont dénoncé - notamment lors d'une manifestation de soutien au Lötschberg qui s'est tenue à Berne et qui a réuni les milieux économiques et politiques des cantons concernés - le fait que cette proposition ne prenne en compte que les intérêts du pôle économique zurichois, négligeant totalement ceux de la Suisse occidentale. Ils ont en outre souligné que, si seules des considérations d'équilibre budgétaire devaient être prises en compte, la construction du Lötschberg s'imposait, son coût étant moins élevé et sa réalisation plus rapide: presse du 4.2.95.44
[45] Presse du 30.1.95;
NQ, 7.2 et 8.2.95 (prise de position de C. Blocher); presse du 8.2.95 (rapport des experts). Voir également
APS 1993, p. 157 et
1994, p. 160. Outre le coût global des NLFA, l'étude londonienne a également analysé la rentabilité des différentes variantes en discussion. Ainsi, elle a estimé que la construction de la seule galerie de base du Gothard, à laquelle s'ajouteraient uniquement dans un second temps les voies d'accès, était la solution la plus économique. Les autres alternatives retenues par l'étude londonienne se classent ainsi (par ordre de coût croissant): la construction simultanée du Gothard et des voies d'accès, la construction du Lötschberg suivie de celle du Gothard, la construction échelonnée inverse des deux axes, la construction simultanée des deux axes.45
[46] Presse des 21.2, 7.3, 12.5 et 13.5.95;
SGT, 28.2.95;
NQ, 28.6.95;
TA, 21.7.95. Sur la question du financement, il est à noter en outre que le parlement a transmis une motion Danioth (pdc, UR) exprimant également la préoccupation que le cumul des intérêts ne rende impossible le remboursement des sommes empruntées pour la construction des NLFA. La motion demande en effet au CF de proposer un nouvel arrêté fédéral concernant le financement des NLFA de manière à permettre que les sommes provenant des droits sur les carburants soient octroyées comme contributions à fonds perdus, et non comme prêts remboursables. Le CN a adopté une motion Schmidhalter (pdc, VS) à contenu similaire:
BO CE, 1995, p. 707 s.;
BO CN, 1995, p. 1824 (Danioth);
BO CN, 1995, p. 1600 et 1824 (Schmidhalter).46
[47] Presse du 26.8.95. Sur la taxe poids lourd liée aux prestations, cf. supra, Trafic routier.47
[48]
NQ, 29.8.95;
Bund, 31.8.95; presse du 14.9.95.48
[49] Selon le lobby routier, une taxe sur la consommation, sous la forme d'une hausse de la TVA ou d'une taxe sur l'énergie fossile, ainsi qu'un recours plus important à l'emprunt seraient préférables:
TA, 15.11.95.49
[51]
FF, 1995, III, p. 229 ss.; presse des 6.4 et 12.4.95.5
[52]
BO CE, 1995, p. 683 ss.;
JdG, 21.6.95.52
[53]
BO CN, 1995, p. 1796 ss.;
FF, 1995, IV, p. 577 s.; presse du 21.9.95.53
[54]
BO CN, 1995, p. 2208.54
[55]
BO CN, 1995, p. 354 ss. Voir
APS 1994, p. 160 s.55
[56]
FF, 1996, I, p. 1139 ss.; presse du 8.3.95.56
[58]
FF, 1996, I, p. 1153 ss.; presse du 10.10.95. Il est à relever par ailleurs que le CE a approuvé le rapport:
BO CE, 1995, p. 1210 ss.58
[59]
BO CN, 1995, p. 384 ss. Voir aussi
APS 1993, p. 159.59
[60]
BO CN, 1995, p. 355 ss. (commission) et p. 1602 (Baumberger).60
[63]
JdG et
24 Heures, 13.2.95. Voir également
APS 1994, p. 162.63
[64] Presse du 4.5.95. Voir aussi
APS 1994, p. 162.64
[65]
BO CN, 1995, p. 957 s. (Bircher) et p. 942 (Meier).65
[66] CFF,
Rapport de gestion 1995, Berne 1996; presse du 1.3.96. Comptes 1994:
FF, 1995, III, p. 67 ss.;
BO CE, 1995, p. 450 ss.;
BO CN, 1995, p. 1554 ss.;
FF, 1995, III, p. 571; presse du 3.3.95. Voir aussi
APS 1994, p. 162. Au sujet des suppressions d'emplois, la direction a déclaré qu'elle entendait diminuer le nombre d'employés à 31 400 en 2001, et non à 32 700 comme annoncé en 1994:
JdG et
TA, 20.10.95.66
[67]
FF, 1995, IV, p. 1177 ss.;
BO CE, 1995, p. 1085 s.;
BO CN, 1995, p. 2436 ss.;
FF, 1996, I, p. 291.67
[69] Presse du 26.9.95. La direction des CFF a présenté en fin d'année des propositions concernant la réforme de la régie, dont la teneur est proche de celle du projet corrigé du CF:
JdG et
24 Heures, 20.10.95.69
[70]
TA, 6.3.95;
24 Heures, 3.8.95;
SGT, 10.8.95.70
[71]
BO CN, 1995, p. 480 s.;
FF, 1995, II, p. 448 s. Voir aussi
APS 1994, p. 164.71
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