Année politique Suisse 1995 : Infrastructure, aménagement, environnement / Transports et communications
 
PTT
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Activité commerciale
Les comptes 1995 des PTT ont fait apparaître un bénéfice de 219 millions de francs contre 303 millions en 1994 (produits: 14,745 milliards de francs; charges: 14,526 milliards de francs). Les PTT ont attribué ce bon résultat aux bénéfices en importante augmentation de la branche des télécommunications ainsi qu'aux mesures de rationalisation entreprises [72].
Avec des charges de 14,728 milliards de francs et des produits de 14,978 milliards, le budget 1996 des PTT fait apparaître un bénéfice de 250 millions de francs. Les investissements prévus se montent à 4,8 milliards de francs, dont 1,5 milliard serviront à des prises de participation dans des entreprises étrangères. Les prestations en faveur de l'économie générale se montent à 416 millions de francs, dont 232 millions seront, pour la première fois, indemnisés par la Confédération à la régie pour le transport de journaux que cette dernière effectue. Le parlement a facilement adopté ce budget [73].
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Réforme des PTT
Suivant le Conseil national, la Chambre haute a adopté la modification de la loi sur le service des postes, qui vise à soulager partiellement les PTT des prestations de service public qu'ils fournissent dans le domaine des transports de journaux. Ce faisant, il a approuvé que les coûts soient à l'avenir répartis en trois parts égales entre la Confédération, les PTT et les éditeurs. De nombreux orateurs ont néanmoins exprimé le souhait que le gouvernement se soucie, dans l'ordonnance d'application, des conséquences qu'une hausse des tarifs pourrait signifier pour la presse locale et régionale. A. Ogi a tenu à leur assurer que cette préoccupation serait prise en compte lors de la fixation des tarifs, soulignant toutefois que ce souci ne devait conduire à pénaliser outre mesure la presse à grand tirage, laquelle pâtissait d'ores et déjà le plus de cette modification.
Le Conseil fédéral a mis en consultation un projet de loi sur l'organisation des PTT. Conformément à ce que lui avait proposé le conseil d'administration de la régie en 1994, ce projet prévoit la séparation de la poste et des télécommunications en deux entités distinctes, la première devenant un établissement autonome de droit public doté de la personnalité juridique, les secondes devenant une société anonyme de droit public. En revanche, contrairement aux propositions du conseil d'administration, le projet du gouvernement n'envisage pas que les deux secteurs soient chapeautés par un holding. Le gouvernement a en effet estimé préférable de laisser une marge de manoeuvre aussi large que possible aux deux entités afin d'assurer leur compétitivité dans un environnement national et international libéralisé. Le capital de la future société anonyme de télécommunications serait par ailleurs ouvert à des investisseurs privés, même si la Confédération conserverait la majorité des actions (51%). En outre, le projet prévoit une réforme du statut de fonctionnaire, qui ne devrait néanmoins pas entrer en vigueur avant l'an 2000. Les employés des PTT jouiraient d'un statut spécial de droit public n'offrant plus les garanties du statut fonctionnarial. Cette réforme signifierait notamment que les directions de la poste et des télécommunications pourraient négocier des conventions collectives avec leurs employés.
Lors de la procédure de consultation, l'Union PTT, principal syndicat des employés de la régie, a vivement réagi à ce projet accusant le gouvernement de "vouloir démolir" les PTT. Ne s'opposant pas au principe d'une réforme de l'entreprise, il a néanmoins menacé de lancer un référendum si le projet n'était pas corrigé selon ses voeux. L'Union PTT a notamment critiqué la volonté de séparer totalement la poste du secteur des télécommunications, regrettant que le Conseil fédéral n'ait pas choisi de chapeauter les deux entreprises par un holding. Il a estimé que la première ne pourrait assurer ses prestations de service public sans une aide du secteur des télécommunications. De plus, selon le syndicat, cette séparation ouvrirait la porte à la privatisation complète des télécommunications, dont les bénéfices attisent de nombreuses convoitises. L'Union PTT a également craint que la réforme du statut des employés ne signifie des licenciements massifs et une dégradation des conditions de travail. Le Vorort a quant à lui approuvé ce projet, saluant notamment la séparation complète des deux secteurs. Il a regretté néanmoins qu'il ne soit pas prévu de privatiser complètement la branche des télécommunications. Les partis gouvernementaux ont également accueilli favorablement les propositions du Conseil fédéral. Le PS et le PDC ont cependant insisté sur le fait que les prestations de base devront être assurées sur l'ensemble du pays. Le PRD a pour sa part suspendu son opinion sur la question de la nécessité de chapeauter ou non les deux entreprises par un holding [75].
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XXIe Congrès postal universel
Le gouvernement a présenté son message demandant aux Chambres de l'autoriser à ratifier les nouveaux textes adoptés lors du XXIe Congrès de l'Union postale universelle qui s'est tenu à Séoul en 1994. Les principales dispositions prises visent à améliorer la gestion du travail de l'Union et à restructurer ses organes. Le parlement a adopté à l'unanimité l'arrêté y relatif [76].
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Poste
Parallèlement au projet de loi sur l'organisation des PTT, le gouvernement a mis en consultation un projet de loi sur la poste. S'inspirant de la politique européenne en la matière ainsi que du rapport d'une commission d'experts rendu en 1994, cette nouvelle loi signifierait une libéralisation du marché de certains services dont les PTT ont actuellement le monopole. Le transport de colis de plus de deux kilos, les services des paiements, les envois sans adresse, le courrier international seraient entre autres concernés. En revanche, pour le service de base - à savoir les lettres et les colis de moins de deux kilos - la poste conserverait son monopole. Selon le Conseil fédéral, ce monopole est en effet nécessaire afin que les PTT puissent assurer ce service de base sur l'ensemble du pays en compensant les prestations offertes dans les régions non rentables par les bénéfices dégagés dans celles qui le sont. Par ailleurs, la poste serait tenue de garantir - et ce malgré la concurrence - un service sur l'ensemble du pays pour les colis de 2 à 5 kilos, le transport des journaux et périodiques en abonnement ainsi que les services de paiements. En revanche, pour les colis de plus de 5 kilos, les express ou le courrier international, la poste aurait la liberté d'agir comme elle l'entend [77].
Lors de la procédure de consultation, l'écho rencontré par le projet du gouvernement a été globalement positif. Seuls les syndicats de la régie ont rejeté les propositions du Conseil fédéral, exprimant leurs craintes quant à l'avènement d'une poste à deux vitesses qui ne desservirait convenablement que les grands centres urbains. Ils ont également fait valoir que la libéralisation du marché ne saurait aller plus loin, à moins de renoncer à un service postal offrant des prestations de qualité sur l'ensemble du pays. Les partis et les cantons ont salué le projet même si certains cantons périphériques ont craint d'être délaissés par le géant jaune [78].
Les PTT ont annoncé une restructuration de l'ensemble de leurs services de courrier rapide, qui devraient être réunis sous un même toit. Cette réorganisation, envisagée pour 1996, devrait signifier la suppression de 150 à 200 emplois. Les syndicats ont dénoncé ce projet, estimant qu'il ouvrait - en créant une infrastructure distincte à côté de celle du service de courrier normal - la voie à une privatisation de ce secteur [79].
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Télécommunications
Conformément à une étude publiée en 1994 et demandant une modification de la loi sur les télécommunications, le gouvernement a mis en consultation un projet de révision de cette loi. En complémentarité avec le projet sur la réforme des PTT impliquant une privatisation partielle des télécommunications, cette révision devrait consacrer la fin du monopole de la régie fédérale dans ce domaine. En effet, selon les propositions du Conseil fédéral et conformément à ce qui se dessine partout en Europe, tout opérateur de télécommunications pourrait offrir ses services s'il est à même de présenter les garanties techniques nécessaires à l'obtention d'une concession. Un service de télécommunications de base devrait être fourni par les PTT sur l'ensemble du pays, ces prestations de base étant au besoin financées par les redevances sur les concessions. Les autres opérateurs pourraient être également obligés de fournir de tels services (cabines téléphoniques, appels d'urgence). Le projet prévoit en outre que le Conseil fédéral se soucie de garantir une concurrence efficace et veille à ce que les PTT n'abusent de leur position dominante sur le marché [80].
A l'instar de ce qui s'est passé au sujet des deux autres projets de loi de réforme des PTT, les réactions à ces propositions ont été dans l'ensemble positives. Les cantons et les partis gouvernementaux ont salué la volonté de libéraliser et de rendre eurocompatible le marché helvétique des télécommunications. Les associations économiques de la branche ont également exprimé leur soutien aux mesures envisagées, demandant néanmoins une libéralisation plus poussée. Seuls les syndicats ainsi que les associations de défense des consommateurs ont critiqué les propositions du gouvernement. Ils ont estimé notamment que ces dernières pourraient mener à des injustices, puisque les communications pour l'étranger deviendraient vraisemblablement meilleur marché au bénéfice des grandes entreprises alors que les communications internes renchériraient aux dépens des particuliers les moins fortunés. Les syndicats ont également estimé qu'il fallait à tout prix exiger des entreprises privées qu'elles assurent également un service de base sur l'ensemble du pays, afin de permettre aux télécommunications helvétiques - qui devront assurer ce service - de combattre à armes égales [81].
L'association Swisscable, qui regroupe plus de 80% des câble opérateurs helvétiques, a déposé plainte contre les PTT auprès du DFTCE. L'association a en effet dénoncé les multiples tentatives effectuées par la régie de prendre le maximum de participations possible dans les réseaux câblés afin de pouvoir bénéficier d'une position de force au moment de la libéralisation des marchés des télécommunications. A. Ogi a donné partiellement raison aux opérateurs privés. Il a enjoint le géant jaune de revendre les participations acquises de certaines sociétés et de se borner à n'acquérir dans le futur que des participations minoritaires en attendant l'entrée en vigueur de la nouvelle loi sur les télécommunications [82].
Sur recours du directeur général des PTT, F. Rosenberg, le Tribunal fédéral a admis que ce dernier ne pouvait être tenu coupable de délit de pornographie pour les communications en direct sur les lignes du 156. En effet, les juges fédéraux ont fait valoir que dans la mesure où, lors des communications en direct, l'hôtesse recevant les appels pouvait déceler si le correspondant était mineur, le service du 156 ne rendait pas accessible à des enfants des productions pornographiques. Seules les communications enregistrées, auxquelles n'importe quel mineur pouvait avoir accès, pouvaient être imputées au directeur général des PTT. Enjoint par le Tribunal fédéral de restatuer, le tribunal de cassation du canton de Vaud a ramené l'amende de 20 000 à 14 000 francs [83].
 
[72] PTT, Rapport de gestion 1995, Berne 1996; presse du 2.3.96. Comptes 1994: BO CE, 1995, p. 446 ss.; BO CN, 1995, p. 1498 ss.; FF, 1995, III, p. 570. Voir également APS 1994, p. 164 s.72
[73] BO CE, 1995, p. 1081 ss.; BO CN, 1995, p. 2425 ss.; FF, 1996, I, p. 289 s. Il est à noter que le parlement a également adopté un supplément au budget 1995 de 555 millions de francs.73
[75] Bund et 24 Heures, 31.1.95; Bund, 13.6.95; presse des 30.6, 25.8 et 15.9.95; BaZ, 16.12.95. Il est à noter que la Fédération suisse des syndicats chrétiens (FChPTT) a eu une réaction plus positive. Elle s'est dite favorable à la réforme du statut de fonctionnaire, si cela devait permettre d'accroître la compétitivité et la flexibilité des PTT: BaZ et TA, 8.6.95. Voir également APS 1994, p. 166.75
[76] FF, 1995, II, p. 633 ss.; BO CN, 1995, p. 1050 s.; BO CE, 1995, p. 682 s.76
[77] Presse du 25.8.95. Voir APS 1994, p. 166 s.77
[78] Presse du 16.12.95.78
[79] 24 Heures, 9.8.95.79
[80] Presse du 31.8.95. Cf. aussi APS 1994, p. 167.80
[81] Presse du 16.12.95.81
[82] 24 Heures, 21.10 et 7.11.95.82
[83] Presse des 2.6 et 12.9.95. Voir APS 1993, p. 164 s.83