contrôle des biens utilisables à des fins civile et militaire

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L'exécutif fédéral a soumis aux Chambres son projet de loi sur le contrôle des biens utilisables à des fins civiles et militaires. Celui-ci constitue avant tout la base légale de mesures jusqu'ici prévues par l'ordonnance sur l'exportation et le transit de marchandises et de technologies ayant trait aux armes ABC et aux missiles ("ordonnance ABC"). Du fait que cette ordonnance expire fin 1995, la nouvelle loi a dès lors pour objectif de continuer à appliquer les mesures de contrôle actuelles et d'en introduire de nouvelles, soit en exécution d'accords internationaux, soit en application d'arrangements internationaux non contraignants du point de vue du droit des gens. Dans un cas comme dans l'autre, la principale mesure de contrôle à laquelle le Conseil fédéral sera habilité à recourir en vertu de la loi sera sans doute le régime du permis appliqué aux exportations. La plupart des biens à double usage faisant l'objet de restrictions seront énumérés et spécifiés dans les listes de l'ordonnance d'application de la loi. Cette dernière contiendra également une clause précisant que l'exportation de biens n'y figurant pas expressément sera soumise au régime du permis, s'il est présumé que les biens en question serviront au développement, à la production ou à l'usage d'armes de destruction massive. Relevons finalement que si le projet prévoit le contrôle de tous les biens utilisables à des fins civiles et militaires, celui des biens d'armement et des biens nucléaires au sens propre reste en revanche du domaine des législations fédérales sur le matériel de guerre, respectivement sur l'énergie atomique.

L'affaiblissement du projet du Conseil fédéral décrété par la Chambre du peuple fut quelque peu compensé par la décision des députés du National de soumettre l'ensemble des biens soustraits à la liste du matériel de guerre - à savoir les Pilatus PC-7 et PC-9, les machines-outils et les simulateurs pour l'instruction au combat - à la loi révisée sur le contrôle des biens utilisables à des fins civile et militaire qui récolta les suffrages de 128 parlementaires contre 4 lors du vote sur l'ensemble. Cette législation demeure néanmoins nettement moins incisive que celle sur le matériel de guerre proprement dit puisqu'elle ne permettra des contrôles que si ceux-ci sont prévus par des accords ou arrangements internationaux.

Quelques jours après que le Conseil national eut exclu les Pilatus PC-7 de la loi sur le matériel de guerre, de nombreux quotidiens suisses devaient faire état de l'engagement armé de plusieurs de ces appareils contre les rebelles karénis en Birmanie. S'appuyant sur ces révélations, la Communauté de travail des oeuvres d'entraide suisses fit alors pression sur la Commission de la politique de sécurité du Conseil des Etats pour que les Pilatus PC-7 et PC-9 munis de plus de deux points d'ancrage tombent sous le coup de la définition du matériel de guerre. Cette revendication ne trouva toutefois pas grâce auprès du plénum qui, conformément au Conseil national, choisit de soumettre ces avions au régime moins contraignant de la loi sur le contrôle des biens à double usage, adoptée à l'unanimité. Les sénateurs optèrent néanmoins à une voix près pour l'instauration d'un garde-fou aux termes duquel les livraisons de ces avions (mais également des autres biens à usages civil et militaire) seront interdites en direction des pays frappés par un embargo de l'ONU ou par des mesures internationales de contrôle des exportations auxquelles participent les principaux partenaires commerciaux de la Suisse. Par cette décision, le Conseil des Etats a élargi de quatre à une quinzaine la liste des pays vers lesquels les Pilatus ne pourront être acheminés. Dans le même esprit de renforcer quelque peu les dispositions légales adoptées par le National, la Chambre des Etats devait décider dans un premier temps par 20 voix contre 19 de faire entrer les machines-outils dans le champ d'application de la loi sur le matériel de guerre. Sur les autres points principaux de la révision de la LMG, et notamment sur celui concernant l'interdiction de fabriquer et d'exporter des mines, les sénateurs se rallièrent à leurs collègues du Conseil national avec lesquels ils s'étaient au préalable largement entendus sur le rejet de l'initiative populaire "Pour l'interdiction d'exporter du matériel de guerre".

A l'issue de la procédure d'élimination des divergences, le Conseil national a fait sienne par 85 voix contre 76 la disposition plus restrictive introduite par la Chambre des Etats concernant l'exportation des Pilatus. De son côté, cette dernière revint in extremis sur sa décision relative aux machines et outils conçus exclusivement pour la fabrication d'armes qui tomberont finalement sous le coup de la loi sur le contrôle des biens à double usage.