En 2023, à l'occasion des élections fédérales, 7 candidat.e.s ont convoités les deux sièges fribourgeois au Conseil des Etats. Les deux sénatrices en poste, Isabelle Chassot (centre) et Johanna Gapany (plr), étaient cependant favorites. À gauche, Alizée Rey, (ps) et Gerhard Andrey (vert-e-s) étaient candidat.e.s. Pierre-André Page de l'UDC, Leonardo Gomez Mariaca (pvl) et Flavio Guido (pacte citoyen) ont complété le tableau.
Dans les médias, les candidat.e.s ont évoqué les raisons pour lesquelles ils se sont présenté.e.s. Pour l'UDC suisse, une meilleure représentation du parti au Conseil des Etats était nécessaire. De plus, la section fribourgeoise a souhaité «offrir une alternative à la gauche pastèque et au centre mollasson», d'après le président du parti fribourgeois Christophe Blaumann, en présentant, avec Pierre-André Page, le deuxième parlementaire le plus conservateur du pays pour briguer le Conseil des Etats. La socialiste Alizée Rey, conseillère communale à Villars-sur-Glâne, a souhaité porter la voix de la gauche fribourgeoise, sous-représentée au Conseil des Etats, en récupérant le siège que les socialistes avaient perdu en 2021, lors du départ de Christian Levrat (ps, FR) pour la Poste. Le vert Singinois Gerhard Andrey a espéré être le porte-parole de la minorité alémanique du canton à Berne, affirmant que «Fribourg est multicolore». Pour le vert-libéral de 25 ans, Leonardo Gomez Mariaca, il a été question de défendre les points sur lesquels les Vert'libéraux sont en désaccord avec le PLR et le Centre à l'échelle nationale. Quant à Flavio Guido, le marlinois du pacte citoyen, il estime que remédier aux lobbys est important. La sortante centriste Isabelle Chassot, a avancé que «la polarisation est un risque majeur pour notre société. [...] Nous avons besoin de gens qui disent davantage nous que je». Finalement, Johanna Gapany a souhaité rempiler car: «Pendant quatre ans, j'ai tout donné et fait en sorte d'avoir un bilan solide. Le matin, je sais pour qui je me lève, à savoir pour défendre les intérêts des Fribourgeois.»
La gauche – le PS, les Vert-e-s et le Centre-gauche-PCS – a établi un pacte, stipulant que seul le ou la candidat.e qui récolte le plus de suffrages se présenterait au deuxième tour. La droite a quant à elle refusé d'inclure l'UDC dans une alliance au niveau fédéral, contrairement à la stratégie des dernières élections cantonales qui avait permis à la droite de récupérer 5 sièges sur 7 au gouvernement fribourgeois. Les enjeux nationaux ont été évoqués pour justifier cette décision. Ainsi, seuls le Centre, le PVL et le PEV se sont alliés.
A l’issue du premier tour, «la reine Isabelle», comme désignée par Le Temps, s'est retrouvée loin devant avec 34'838 voix, suivie par Johanna Gapany (27'989), Pierre-André Page (27'280) et Alizée Rey (22'634). Personne n'a cependant récolté la majorité absolue, peu surprenant au vu du nombre de candidat.e.s. Alors que Le Temps avait envisagé une course entre la PLR Bulloise et le vert Singinois, les suffrages et l'alliance de la gauche en ont décidé autrement. Gerhard Andrey (21'150) n'aurait pas récolté autant de voix qu'espérées en Singine. Par conséquent, comme stipulé par l'alliance de gauche, seule Alizée Rey a représenté les couleurs rose-vertes au deuxième tour. Leonardo Gomez Mariaca et Flavio Guido ont quant à eux récolté moins de 5 pour cent des voix. Comme seuls quatre candidat.e.s peuvent prétendre au deuxième tour, ils ont été éliminés. Le deuxième tour s'annonçait délicat pour la droite si Pierre-André Page décidait de rester dans la course, ce que son parti et l'électorat auraient souhaité. En effet, faute d'alliance générale à droite, l'agrarien aurait pu diviser les voix de la droite et ouvrir une brèche à Alizée Rey. C'est pourquoi le Glânois a finalement décidé de se retirer et de renforcer les chances d'une alliance bourgeoise pour les élections cantonales de 2026, conduisant à un deuxième tour entièrement féminin.
Le 12 novembre, à l'occasion de ce deuxième tour, la réélection d'Isabelle Chassot et de Johanna Gapany a marqué le statu quo. Elles ont respectivement récolté 38'161 et 30'538 suffrages. Jusque dans l'après-midi, la Gruérienne a gardé une avance d'environ 3'000 suffrages sur Alizée Rey. Cependant, après l'annonce des scores dans les régions urbaines, la socialiste a frôlé l'exploit. Finalement, elle s'est placée juste derrière la bourgeoise avec 914 voix de moins. «Mon résultat prouve bien que la députation fribourgeoise à Berne ne convient pas à la population. Il manquera, quatre ans de plus, la voix sociale» a affirmé Alizée Rey. Les analyses ont montré que cette dernière n'avait pas réussi à convaincre au-delà des villes, contrairement à la centriste Isabelle Chassot qui a su persuader à gauche et à droite tout comme dans les milieux ruraux et urbains. De plus, le dire populaire affirmant que la Gruyère soutient les siens a été rectifié suite au résultat de vote en ville de Bulle, où Johanna Gapany a siégé au conseil communal. Le chef-lieu gruérien a comptabilisé plus de suffrages pour la socialiste que pour la libérale radicale. Stéphane Baechler, président de la section PLR gruérienne, et La Liberté ont mis ceci sur le compte du développement de la ville fribourgeoise.
En tout et pour tout, un duo aux couleurs orange et rouge occupant les sièges fribourgeois au Conseil des Etats semble être inscrit dans le passé, avec moins de 12 pour cent des suffrages soutenant cette combinaison. Aussi, Christophe Blaumann a concédé que la décision de Pierre-André Page était la bonne pour l'avenir de la droite à la chambre haute.
Du point de vue des campagnes de communication, Johanna Gapany a annoncé le plus gros budget de campagne avec CHF 118'580 à disposition. Les dépenses liées aux campagnes fribourgeoises pour le Conseil national et le Conseil des Etats confondues se sont élevées à quelques CHF 2 millions. Ces chiffres sont fournis par les partis depuis que l'initiative cantonale sur la transparence a été acceptée et que la loi est entrée en vigueur en janvier 2021.