Le Canton de Fribourg a élu ses députés au Conseil national pour les quatre prochaines années lors des élections fédérales de 2023. Un total de 141 candidat.e.s, dont 51 femmes, se sont répartis sur 22 listes et ont visé les 7 sièges fribourgeois à la chambre basse. 6 sortant.e.s étaient sur la ligne de départ; seul Jacques Bourgeois (plr, FR), qui représentait la population fribourgeoise à Berne depuis 2007, n'a pas cherché à obtenir un nouveau mandat.
Les partis se sont fixés différents objectifs pour ces nouvelles élections. L'UDC a souhaité récupérer son deuxième siège perdu en 2019 au profit des Vert-e-s, les autres partis ont espéré maintenir l'équilibre actuel (2 centristes, 2 socialistes, 1 PLR, 1 Vert-e-s, 1 UDC). Alors que le Centre a affirmé qu'aucun siège en particulier n'était visé, la place de Gerhard Andrey au Conseil national a semblé être en difficulté. En effet, avec une liste verte affichant des personnalités peu connues, il était possible que le Singinois ne récolte pas assez de voix pour conserver son siège. De plus, avec l'augmentation des coûts de la santé, les débats autour des retraites ou encore les discussions visant l’approvisionnement énergétique, il était prédit que les priorités écologiques de la population suisse – vu comme principale raison pour la «vague verte» et le succès de Gerhard Andrey en 2019 – passeraient au deuxième plan des préoccupations. Le PLR, était quant à lui, le seul parti sans sortant.e.s en lice, comme Jacques Bourgeois ne se représentait pas. Les prédictions pour sa remplaçante pointaient vers la Bulloise d'adoption Nadine Gobet, première des viennent ensuite en 2015 et 2019.
L'UDC et Le Centre ont marqué les esprits avec de nombreuses sous-listes. Pour ce premier, ce sont les jeunes répartis par régions qui les constituaient. Un total de 4 listes avec 28 candidat.e.s étaient dans la course. Le Centre a lui créé des listes mélangeant les catégories d'âge, d'où leurs noms: «générations». Les centristes Fribourgeois ont, au total, présenté 5 listes complètes.
Deux alliances ont été formées. La première entre Le Centre, le parti évangélique (PEV) et le PVL. La seconde entre Les Vert-e-s, le PS et le Centre-gauche-PCS. Une alliance globale à droite, comme établie pour les élections cantonales de 2021, a été abandonnée suite à l'annonce des différentes stratégies nationales. Ceci a été d'importance pour les débats qui ont entouré le second tour au Conseil des Etats.
Les élections ont vu des débats se profiler au sein des partis. Pour l'UDC, savoir qui prendrait la place de Pierre-André Page au Conseil national en cas d'élection de ce dernier au Conseil des Etats était central. De plus il était possible que les agrariens se voient accorder un second siège au conseil national. Deux candidats sont sortis du lot: Nicolas Kolly, sarinois de famille paysanne et siégeant au Grand Conseil fribourgeois, et Flavio Bortoluzzi, lacois qui avait pris la troisième place sur la liste de son parti lors des élections de 2019. Chez les PLR, Claude Brodard, président de la commission des finances et de gestion du Grand Conseil fribourgeois était susceptible de faire de l'ombre à la Gruérienne Nadine Gobet. Pour la gauche et Le Centre, le risque consistait plus à perdre des sièges, plutôt que la concurrence au sein du parti, relativement aux discussions dans les médias. Ainsi, si tout se passait comme prévu, les centristes Marie-France Roth Pasquier et Christine Bulliard-Marbach, les socialistes Valérie Piller Carrard et Ursula Schneider Schüttel ainsi que le vert Gerhard Andrey se fraieraient un chemin vers la coupole fédérale.
Certain.e.s candidat.e.s avaient un porte-monnaie plus rempli que d'autres. Ainsi, les centristes Marie-France Roth Pasquier et Christine Bulliard-Marbach ont pris la tête du classement des dépenses pour la campagne au Conseil national avec respectivement CHF 97'100 et CHF 90'000 de budget. Elles étaient suivies par les libéraux-radicaux Nadine Gobet (CHF 85'000) et Claude Brodard (CHF 70'000) ainsi que l'UDC Pierre-André Page (CHF 46'699). Le Centre a été le parti affichant le plus gros budget avec CHF 250'000 en mains. Le PS n'a déclaré qu'un seul candidat – Grégoire Kubski – qui a dépassé la barre des CHF 10'000 de budget personnel, dû à une récolte de dons organisée par le candidat. En tout et pour tout, les budgets fribourgeois pour les élections fédérales s'élevaient à quelques CHF 2 millions pour les deux Conseils.
Quelques scandales ont éclaté dans le cadre des élections. D'une part, Claude Brodard a été accusé d'avoir utilisé des carnets d'adresse de l'UPF pour persuader des familles paysannes de voter en sa faveur, ce que le libéral-radical a démenti. D'autre part, un jeune vert-libéral s'est vu contraint de retirer son nom de la liste, après avoir retourné un journal UDC traitant de l'initiative «NON à une Suisse à 10 millions d’habitants ! » à l'adresse du parti cantonal fribourgeois dans une enveloppe contenant de la farine.
Le jour des élections, l'UDC est sortie victorieuse en récupérant son siège perdu en 2019. Avec 25.9 pour cent des suffrages, il a gagné +5.8 points de pourcentage. Ainsi, Pierre-André Page (31'145 voix) et Nicolas Kolly (23'307 voix) siégeront sous la Coupole fédérale durant les quatre prochaines législatures. Deuxième mieux élue, Valérie Piller Carrard (24'923 voix) représentera le parti socialiste toute seule, comme Ursula Schneider Schüttel (21'197 voix) s'est faite devancer par l'UDC. Le PS, malgré une chute de point de pourcentage relative de -0.6 (2019: la liste récoltait 21.2 % des suffrages; 2023: 20.6% des suffrages) a payé le recul général de la gauche: les Vert-e-s (11.9% des suffrages) et le PCG (2.5%) ont respectivement perdu -0.6 et -0.8 points de pourcentage. Christine Bulliard-Marbach (4e avec 21'186 voix) ainsi que Marie-France Roth Pasquier (5e avec 19'118 voix) ont gagné leur présence sous la Coupole fédérale. Ainsi, les listes du Centre ont récolté 19.8 pour cent des suffrages, soit +1.3 points de pourcentage de plus qu'en 2019 – listes du PDC et du PBD réunies. Gerhard Andrey et Nadine Gobet ont clos le tableau avec respectivement 18'756 et 17'208 voix. La gauche expliquait sa défaite par son électorat jeune et volatile, qui est difficile à mobiliser. Du côté du PLR, qui a récolté 13.3 pour cent des voix, on note une baisse de soutien d'environ -2 points de pourcentage, malgré une campagne importante. Les analyses ont d'ailleurs montré que seuls 45.4 pour cent de la population a voté, ce qui a provoqué le désespoir de Sophie Tritten (Centre gauche-PCS): «C'est désespérant d'avoir de tels résultats, et je ne comprends pas ce qu'il faut faire pour arranger la situation, surtout compte tenu de l'enjeu de ces élections.»