Au centre des débats sur la politique énergétique suisse depuis maintenant deux ans, la réflexion sur l'ouverture du marché helvétique de l'électricité s'est prolongée, principalement suite à la publication d'un nouveau rapport sur la question destiné à concrétiser les principes généraux contenus dans le rapport Cattin. Etabli par un groupe de travail placé sous la houlette d'Edouard Kiener, directeur de l'OFEN, ce document s'inscrit dans la droite ligne de la politique européenne de libéralisation décrétée en début d'année par le Conseil des ministres de l'UE. Constatant qu'il est impossible pour la Suisse de faire bande à part en la matière du fait que son alimentation en courant est entièrement intégrée aux réseaux européens, le rapport recommande dès lors la libéralisation progressive du marché pour les distributeurs et gros consommateurs d'électricité, et ce dans des proportions similaires à celles consacrées par la nouvelle directive de l'Union. En clair, l'application effective de la proposition du groupe de travail Kiener permettrait à terme aux grandes entreprises suisses de choisir librement leur fournisseur, ce qui obligerait les distributeurs helvétiques à rendre accessible leur réseau à des tiers, moyennant une rétribution (Third Party Access). Dictée par le souci de maintenir la compétitivité de l'industrie suisse grâce à une électricité meilleur marché, l'ouverture du marché de l'électricité n'ira pas sans provoquer une profonde restructuration de ce secteur de l'économie. A ce titre, le rapport préconise que la branche s'organise de manière plus rationnelle en procédant à des fusions, principalement à l'échelon de la distribution de courant pour laquelle la Suisse compte un peu moins de 1'200 entreprises. Si le passage du système cartellaire actuel à une situation de concurrence internationale doit nécessiter en outre l'adoption d'une législation-cadre fixant des garde-fous en matière d'accès au réseau, de transparence des prix, d'amortissement des investissements contractés et de garantie d'une desserte de base propre à la notion de service public, le groupe de travail a en revanche estimé que l'ouverture du marché de l'électricité ne pourra être effective que si un désengagement étatique intervient sur les plans fiscal et réglementaire. Ainsi, le prélèvement annuel de quelque CHF deux milliards de taxes et de redevances diverses dans ce secteur a été jugé en contradiction avec la libéralisation recherchée, de même que le régime de l'autorisation d'exporter du courant et la lourdeur des procédures d'autorisation imposée aux projets.
Dossier: Libéralisation du marché de l'électricité