«Lorsque l'on voit qu'une décision politique était mauvaise, il faut pouvoir la corriger»: ce sont les mots du rapporteur Damien Cottier (plr, NE) à la tribune du Conseil national, lors de la présentation à ses collègues de la motion de la CTT-CN demandant au Conseil fédéral de renoncer à la désactivation de la FM fin 2026. Mi-2023, le Conseil fédéral avait décidé de prolonger une dernière fois de deux ans les concessions de radios FM, alors que la désactivation avait été décidée en concertation avec la branche – le conseiller fédéral Rösti l'a rappelé lors des débats – il y a plus de 10 ans. Cependant, la perte d'audience de 25 pour cent subie par la SSR lorsqu'elle a débranché la FM fin 2024 a révélé que l'on avait sous-estimé la part d'auditeurs et d'auditrices qui utilisaient encore ce canal. Alors que la plupart des postes radios à domicile auraient été changés pour passer au DAB+, c'est principalement en voiture que la FM serait encore écoutée. En désactivant les ondes ultra-courtes (OUC) pour les radios suisses, le risque est fort que les auditeurs et auditrices se tournent vers des radios étrangères; un «Swiss Finish» serait donc autodestructeur, a justifié Damien Cottier. Selon lui, il ne s'agit pas de renoncer à sortir de la FM à moyen terme, mais seulement de ralentir le rythme en prolongeant les concessions actuelles ou en lançant un nouvel appel d'offres.
Au nom d'une forte minorité – la décision de déposer la motion a été prise par 10 voix contre 10, 4 abstentions et la voix prépondérante du président au sein de la commission –, la députée vert'libérale Barbara Schaffner (pvl, ZH) a rappelé que la durée de vie de la FM avait déjà été prolongée «à de nombreuses reprises». De nombreuses radios ont entre-temps investi dans le DAB+, se fiant à la convention au sein de la branche, et attendent donc avec impatience la désactivation de la FM, a-t-elle avancé, alors que la perte d'audience était à prévoir. L'exemple de la Norvège montre que cette diminution est en général suivie d'une stabilisation. Le maintien de la FM coûterait entre CHF 15 et 20 millions par an, a ensuite mis en avant Albert Rösti au nom du Conseil fédéral: en fin de compte, ce sont les privés qui mettent la main à la poche via la redevance. L'exécutif prônait ainsi le rejet de la motion. Mais si celle-ci était acceptée, Albert Rösti a précisé qu'une simple prolongation des concessions existantes ne serait pas idéale pour des raisons d'égalité de traitement entre les émetteurs. La solution privilégiée serait une nouvelle attribution de concessions pour une période de dix ans
Au vote, l'hémicycle a accepté la motion par 124 voix contre 62 et huit abstentions. Les groupes UDC et PLR ont dit oui, avec quelques abstentions, comme la majorité du groupe du Centre, alors que la majorité des groupes socialistes, verts, et vert'libéraux étaient contre.
La présence de Roger Schawinski au Palais fédéral ce jour-là a-t-elle joué un rôle dans ce résultat ? Une chose est sûre, comme l'ont rappelé le Tages Anzeiger et l'Aargauer Zeitung: le pionnier de la radio en Suisse s'est toujours opposé à la désactivation de la diffusion FM, et son lobbying véhément n'est pas passé sous le radar. Il a été rejoint dans ce combat par l'Association des radios privées suisses (ASRP) et les Radios régionales romandes (RRR), qui ont pris position contre la désactivation, arguant que «la survie de plusieurs radios régionales dépend directement de la poursuite de la diffusion FM durant quelques années». D'après les partisans de la FM, son maintien ne coûte rien aux contribuables ni à la Confédération. En revanche, Unikom, une petite association de radios indépendantes, de start-ups et de diffuseurs de podcast, n'a pas goûté cette «peur du changement». Selon elle, les petites radios ont depuis longtemps dirigé leur modèle d'affaires vers la diffusion digitale, et craignent que les grandes radios qui peuvent se permettre une double diffusion via la FM et le DAB+ aient un avantage sur le marché de la publicité en cas de maintien de la technologie des ondes ultra-courtes.