Conserver le contrôle de Beyond Gravity est d'intérêt stratégique (Mo. 24. 3477)

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Les membres du Conseil national ont examiné une motion, déposée par la Commission de la politique de sécurité du Conseil national (CPS-CN), qui demande au Conseil fédéral de revenir sur sa décision de vendre Beyond Gravity à des privés, la branche de RUAG International active dans le domaine spatial. En effet, selon les membres de cette commission, Beyond Gravity revêt une dimension particulièrement stratégique pour la politique de défense menée par la Suisse. Par ailleurs, la CPS-CN a estimé que la vente de Beyond Gravity n'était pas opportune dans le contexte actuel, puisque la Suisse et l'Europe entendent renforcer leur souveraineté pour faire face aux ambitions hégémoniques de certains grands Etats, tels que la Chine ou la Russie. Par ailleurs, les membres de la commission ont déposé cette motion après avoir constaté que Beyond Gravity était le quatrième acteur le plus important de l'industrie spatiale européenne.
Dans un avis publié le 21 août 2024, le gouvernement s'est attaché à mettre en évidence le fait que «la Confédération et les cantons respectent le principe de la liberté économique». Le gouvernement a également justifié la vente de Beyond Gravity en affirmant qu'il était nécessaire que cette entreprise soit privatisée pour qu'elle puisse concurrencer les acteurs les plus importants du secteur.
C'est aussi ce qu'a affirmé la ministre des finances Karin Keller-Sutter lors des débats au Conseil national. Elle a également tenu à relativiser le caractère stratégique de Beyond Gravity, en affirmant notamment que «Beyond Gravity stellt selbst keine kompletten Systeme wie beispielsweise Satelliten her. Beyond Gravity ist weit davon entfernt, Satelliten herstellen zu können oder, wie das teilweise herumgeistert, Raketen». Le conseiller national Fabien Fivaz (vert-e-s. NE), qui a défendu une position similaire, avait quant a lui déposé une proposition de minorité demandant de rejeter la motion. C'est ce qui l'a conduit à interpeller sa collègue Isabelle Chappuis (centre, VD) qui s'est exprimée au nom de la CPS-CN. Il lui a rappelé, comme la conseillère fédérale Keller Sutter, que Beyond Gravity ne fabriquait pas de satellites. Mais cet argument n'a pas convaincu Isabelle Chappuis, qui a affirmé que vendre Beyond Gravity était une erreur, puisque le contexte géostratégique avait considérablement évolué depuis 2019, moment où le Conseil fédéral a pris cette décision. Selon elle, une nouvelle donne se serait imposée et aujourd'hui, «la souveraineté et la sécurité d'un pays se mesur(erai)ent également à sa maîtrise des technologies spatiales».
Dans le cadre de la présentation de cette motion par Isabelle Chappuis, certain.e.s élu.e.s de gauche ont fait part de leurs doutes. La députée Sophie Michaud Gigon (vert-e-s, VD) a notamment dit craindre que si l'entreprise devait rester aux mains de la Confédération, certaines opérations pourraient se faire dans l'opacité et porter préjudice à la concurrence. Finalement, Michaël Götte (udc, SG), le rapporteur germanophone de la CPS-CN pour cet objet, a quant lui indiqué que le remplacement prochain de Polycom, le réseau radio national utilisé par l'ensemble des acteurs oeuvrant dans le domaine de la sécurité et de la protection de la population, conduirait nécessairement à une révolution technologique dans le cadre de laquelle Beyond Gravity pourrait jouer un rôle décisif.
Le Conseil national a accepté la motion de la CPS-CN par 121 voix contre 53 et 6 abstentions. Alors que la plupart des partis bourgeois et les socialistes ont voté en faveur de la motion, le PLR et les Vert-e-s l'ont rejetée.

Après que le Conseil national a voté en faveur de la motion de la Commission de la politique de sécurité du Conseil national (CPS-CN) s'opposant à la vente de la branche de Ruag International active dans le domaine spatial, la Commission de la politique de sécurité du Conseil des États (CPS-CE) a elle aussi procédé à l'examen de cet objet. Les membres de la CPS-CE ont décidé par 8 voix contre 5 et aucune abstention de soutenir la motion de la CPS-CN. La majorité des membres de la commission estiment en effet que Beyond Gravity est d'une importance stratégique pour la Suisse et sa politique de défense. La vente de Beyond Gravity pourrait aussi affaiblir certains pans de l'économie suisse, notamment ceux qui sont liés aux nouvelles technologies. En outre, la majorité de la CPS-CE estime qu'une telle vente ne serait pas judicieuse à un moment où le «domaine spatial va au-devant d’un développement spectaculaire».
La minorité de la commission estime quant à elle que la seule manière d'assurer à long terme le maintien en activité de Beyond Gravity serait de vendre l'entreprise, puisqu'il sera nécessaire d'investir des montants considérables pour garantir sa pérennité. La minorité de la CPS-CE a par ailleurs indiqué qu'il était parfaitement envisageable d'accompagner la vente de Beyond Gravity de conditions garantissant la préservation de certains intérêts d'importance stratégique pour la Suisse. Dans le cadre de l'examen de l'objet par la CPS-CE, des propositions allant dans ce sens ont été formulées, mais aucune n'a finalement été retenue.
La CPS-CE a recommandé le soutien de la motion par 8 voix contre 5 et aucune abstention. L'opposition à cet objet a dépassé les clivages partisans puisque la minorité était composée d'un élu du centre, d'une élue socialiste, d'un élu écologiste et de deux élus PLR.