Dès le printemps 2024, la crise traversée par l'industrie de l'acier et de l'aluminium en Suisse a fait couler beaucoup d'encre, tant dans les médias qu'au sein de la classe politique. En effet, l'annonce par l'aciérie Stahl Gerlafingen dans le canton de Soleure de la suppression de 95 emplois, suivie de près par les difficultés financières de la filiale lucernoise de Swiss Steel, ont provoqué de vives réactions et des alliances inhabituelles. Afin de survivre aux mesures protectionnistes mises en places par l'Union européenne (UE) pour contrer la concurrence américaine et chinoise, couplées à une hausse importante du prix de l'électricité en 2023, le secteur a demandé dès l'été 2023 de l'aide à l'Administration fédérale, sans succès, selon La Liberté du 6.4.24.
Tandis qu'une motion du député soleurois Roberto Zanetti (ps, SO) avait déjà été acceptée par le Parlement en septembre 2023, d'autres parlementaires issus des cantons particulièrement concernés (Lucerne et Soleure) ont fait pression sur les chambres au printemps. Malgré leur opposition sur l'échiquier politique, la députée Franziska Roth (ps, SO) et le député Christian Imark (udc, SO) se sont alliés et ont déposé deux motions parallèles (24.3159 et 24.3146) pour tenter de sauver l'entreprise Stahl Gerlafingen, implantée dans le canton de Soleure. Dans le même élan, le lucernois Damian Müller (plr, LU) a, lui aussi, demandé au Conseil fédéral d'agir en accordant un financement transitoire à l'industrie sidérurgique, permettant à l'industrie de verdir la production et de conserver les activités de production en Suisse.
Ces propositions se sont heurtées à un net refus du Gouvernement, par l'intermédiaire du ministre de l'économie Guy Parmelin, catégoriquement opposé au soutien étatique d'une branche économique, d'autant plus que le secteur de l'industrie sidérurgique n'est pas considéré comme d'importance systémique pour l'économie suisse. Les partis de l'UDC et du PLR se sont aussi positionnés contre des aides, attribuant les difficultés économiques de l'industrie à la politique climatique et énergétique «de la gauche rose-verte» pour l'UDC, tandis que le PLR a critiqué l'«hypocrisie d'Imark et de la gauche» et a appelé à rendre l'énergie «disponible et bon marché».
Toutefois, quelques semaines avant la session d'hiver 2024, tandis que les ouvriers de Stahl Gerlafingen manifestaient sur la place fédérale pour demander le maintien des emplois dans les aciéries, la Commission de l'environnement, de l'aménagement du territoire et de l'énergie du Conseil national (CEATE-CN), présidée par Christian Imark (udc, SO), a déclaré par communiqué de presse qu'elle étudiait les mesures à prendre. Le 19 novembre, la même commission annonçait finalement avoir décidé par 13 voix contre 11 et 1 abstention d’accorder aux grandes entreprises de l’industrie de l’acier et de l’aluminium un allègement des taxes d’utilisation du réseau, à la condition expresse que leurs sites de production soient maintenus en Suisse. Dans les médias, contre l'avis du parti, Nicolas Kolly (udc, FR) s'est rallié à la cause de son collègue de parti et a soutenu les mesures proposées par la CEATE-CN, estimant que les conditions fixées contenaient suffisamment de garde-fous (La Liberté du 11.12.24).
Finalement, la CEATE-CN a choisi d'intégrer ces aides dans le projet de révision de la Loi sur l'approvisionnement en électricité (LApEI), sous la forme d'une loi urgente. Les mesures adoptées par les deux chambres devraient permettre aux grandes entreprises du secteur de sortir la tête de l'eau durant 4 ans, en étant exonéré de 50 pour cent des taxes d'utilisation du réseau pour 2025, 37.5 pour cent la deuxième année, 25 pour cent la troisième année et finalement 12.5 pour cent la quatrième année. Au niveau du financement, le coût de la réduction est couvert par Swissgrid et ainsi, «de manière solidaire, par l’ensemble des consommatrices et des consommateurs d’électricité du pays» selon le communiqué de presse de la CEATE-CN du 19 novembre 2024. Malgré ce sauvetage par le Parlement, le dossier reste sensible en début d'année 2025, car les aciéries de Lucerne et de Soleure n'ont pas encore pu assurer le maintien des emplois.