Politique sociale
Population et travail
La population résidente permanente de la Suisse a franchi la barre des 8 millions de personnes en août de l'année sous revue. – Le Conseil fédéral a activé la clause de sauvegarde à l’égard des pays de l’Est de l’UE. – Le taux de chômage a légèrement augmenté. – Dans le cadre des mesures d’accompagnement à la libre circulation des personnes, le parlement a introduit la responsabilité solidaire dans le domaine de la construction. – Les salaires nominaux ont progressé de 0,8%, les salaires réels de 1,5%. – Le parlement fédéral s’est prononcé en faveur d’une libéralisation des heures d’ouverture des magasins de stations-services. – Le peuple a rejeté l’initiative « 6 semaines de vacances pour tous ».
Evolution de la population
La croissance démographique s’est poursuivie en Suisse. A la fin de l’année 2012, la population résidente permanente s’est élevée à
8 036 900 habitants, soit un accroissement de 82 300 personnes par rapport à 2011. Cette hausse de 1,0% se situe au même niveau que celui des deux années précédentes. C’est durant le mois d’août que la barre des 8 millions de personnes a été dépassée. L’augmentation est en premier lieu due à une croissance de 64 800 personnes provenant de différents mouvements migratoires. L’accroissement naturel, soit la différence entre les naissances et les décès, ne s’est monté qu’à 17 500 personnes. En 2012, le nombre de ressortissants étrangers séjournant de manière permanente en Suisse s’est monté à 1 869 000 personnes (53’000 de plus qu’à la fin de l’année 2011), soit un taux de 23,3% de la population résidente permanente totale, contre 22,8% en 2011. Cette augmentation de 0,5 points de pourcentage a été similaire à celles observées en 2010 et 2011. La population résidante permanente a augmenté dans la plupart des cantons. Les hausses les plus importantes ont été enregistrées dans les cantons de Fribourg (+2,3%), Thurgovie (+1,7%), Argovie (+1,5%), Valais et Tessin (+1,4% chacun). Une légère diminution a été observée uniquement dans le canton d’Appenzell Rhodes-Intérieures (-0,1%)
[1].
L’initiative populaire « Halte à la surpopulation, pour la préservation durable des ressources naturelles », lancée par l’Association Ecologie et Population (
Ecopop) en mai 2011 a finalement abouti. C’est notamment grâce au soutien inattendu de Franz Weber que le seuil des 100
000 signatures valables a été atteint. Le texte demande que la croissance de la population résidente, provoquée par l’immigration, se limite à 0,2% sur une moyenne de trois ans. En outre, l’initiative préconise l’attribution de 10% des fonds de l’aide suisse au développement à des projets d’information sur le planning familial
[2].
Marché du travail
Le
nombre d’actifs occupés sur le marché du travail a atteint 4,815 millions de personnes au quatrième trimestre 2012. Cela représente une progression de 1,1% par rapport à l’année précédente. Il est à noter que, sur la même période, ce chiffre a reculé de 0,4% dans l’Union européenne. En Suisse, le groupe de personnes actives se compose de 2,166 millions de femmes (en progression de 1,4%) et de 2,649 millions d’hommes (en augmentation de 0,9%). L’Office fédéral de la statistique (OFS) a relevé que le nombre d’actifs de nationalité étrangère avait de nouveau enregistré une hausse supérieure à celle de leurs homologues suisses (+3,2% contre +0,3%) pour s’établir à 1,386 millions de personnes. Le taux d’étrangers sur le marché du travail s’est élevé à 28,8%. L’augmentation de la main-d’œuvre étrangère est principalement attribuable à une hausse des frontaliers (permis G, +5,6%) et des titulaires d’une autorisation d’établissement (permis C, +4,6%)
[3].
En avril, le Conseil fédéral a activé la
clause de sauvegarde prévue dans le cadre de l’accord sur la libre circulation des personnes entre la Suisse et l’Union européenne. Par cette décision très attendue au sein de l’élite politique, le gouvernement a réintroduit, dès le 1er mai de l’année sous revue, des contingents pour les ressortissants des pays de l’UE-8 (Estonie, Hongrie, Lettonie, Lituanie, Pologne, Slovaquie, Slovénie et République tchèque) disposant d’une autorisation de séjour de catégorie B (indépendants ou personnes ayant un contrat de travail d’une durée indéterminée ou supérieure à un an). Ces contingents de 2 283 autorisations sont valables jusqu’en mai 2013 et pourront être reconduits pour une année supplémentaire. Pour pouvoir activer la clause de sauvegarde, le nombre d’autorisations de séjour délivrées à des personnes des Etats concernés devait dépasser d’au moins 10% la moyenne annuelle des permis émis au cours des trois années précédentes. Contrairement aux autorisations de séjour de catégorie B, cette condition n’a pas été remplie pour les autorisations de séjour de courte durée (permis L). Par conséquent, ces dernières n’ont pas fait l’objet de restrictions sur le marché du travail suisse
[4].
En publiant
le huitième rapport de la libre circulation des personnes entre la Suisse et l’Union européenne, le Secrétariat d’Etat à l’économie (SECO) a dressé en mai, dix ans après l’entrée en vigueur des accords bilatéraux, un bilan de ses répercussions sur le marché du travail suisse. Le rapport a établi que l’immigration en provenance de la zone UE/AELE avait fortement augmenté, notamment pour ce qui est de la main d’œuvre qualifiée. Dans l’ensemble, les indicateurs à disposition ont révélé un potentiel d'absorption très élevé du marché du travail suisse. La libre circulation des personnes a largement contribué à la croissance de l’emploi et de l’économie. En outre, le rapport a conclu que la structure salariale était restée stable. L’ouverture du marché du travail n’a pas engendré d’érosion sur les bas salaires. Les conventions collectives de travail et les mesures d'accompagnement ayant contribué à ce résultat
[5].
Toujours en matière de libre circulation des personnes, les Chambres fédérales ont adopté la
loi fédérale portant sur l’obligation des prestataires de services de déclarer leurs qualifications professionnelles dans le cadre des professions réglementées et sur la vérification de ces qualifications (LPPS). Désormais, les ressortissants de l’Union européenne et de l’Association européenne de libre échange désirant exercer une profession réglementée en Suisse (p. ex. guide de montagne, moniteur d’auto-école et diverses professions dans le domaine médical) sont contraints de déclarer leurs qualifications auprès du Secrétariat d’Etat à la formation, à la recherche et l’innovation. Cette nouvelle loi n’a guère soulevé de controverses. Le Conseil des Etats l’a acceptée à l’unanimité et le Conseil national par 189 voix contre 5
[6].
Pour ce qui est de
l’enregistrement du temps de travail, le Secrétariat d’Etat à l’économie (SECO) a ouvert en septembre une procédure d’audition relative à l’introduction d’une nouvelle disposition de la loi sur le travail. Le projet prévoit que les travailleurs dont le revenu annuel brut dépasse les 175 000 francs ainsi que les employés autorisés à signer selon le registre du commerce puissent renoncer à enregistrer leur temps de travail
[7].
En décembre de l’année sous revue, le Conseil fédéral a dressé le bilan de l’implémentation de la
loi sur le travail au noir (LTN), entrée en vigueur en 2008. Le gouvernement a conclu que la LTN avait globalement fait ses preuves. Néanmoins, il a estimé que la lutte contre le travail au noir pouvait être améliorée. Le Conseil fédéral a notamment constaté que les compétences dont disposaient les inspecteurs chargés des contrôles ainsi que les obligations de déclaration des employeurs ne permettaient que difficilement de prouver l’existence du travail au noir. Afin de pallier ces lacunes, le Conseil fédéral a chargé le Département fédéral de l’économie (DFE) d’examiner, d’ici fin 2014, la possibilité de réviser la loi ou l’ordonnance correspondante
[8].
Lors de la session d’automne, le Conseil national a transmis un postulat Meier-Schatz (pdc, SG) portant sur le
télétravail. Par ce biais, le Conseil fédéral a été chargé de présenter un rapport sur les incertitudes juridiques liées à cette forme de travail en plein essor
[9].
Malgré un climat économique tendu sur le plan international et un cours du franc élevé, le marché suisse du travail a bien résisté en 2012. Sur l’ensemble de l’année, le
taux de chômage moyen s’est établi à 2,9%, soit une légère hausse de 0,1 point de pourcentage par rapport à 2011. En début d’année, le nombre de demandeurs d’emploi a plus fortement baissé que lors des deux années précédentes. En effet, un recul net de près de 19 500 personnes a pu être observé entre janvier et juin. En revanche, le nombre de demandeurs d’emploi a augmenté d’environ 27 400 personnes au cours du deuxième semestre. Renforcée par l’influence de facteurs saisonniers, la progression du chômage a été particulièrement soutenue entre octobre et décembre. A la fin de l’année, les statistiques du Secrétariat d’Etat à l’économie (SECO) ont ainsi fait état de 142 309 personnes au chômage. Le niveau du chômage s’est à nouveau caractérisé par de grandes divergences régionales. La Suisse romande et le Tessin ont affiché un taux de chômage (4,2%) bien supérieur à celui de la Suisse alémanique (2,4%) où les cantons ruraux sont restés très nettement au-dessous de la moyenne nationale. Le chômage des jeunes (tranche d’âge de 15 à 24 ans) a affiché le même niveau qu’en 2001 (3,2%). A noter finalement que le taux de chômage des étrangers est passé de 5,2% à 5,5%, alors que celui des Suisses s’est maintenu à 2,1%
[10].
Selon la définition du Bureau international du Travail (BIT), 203 000 personnes ont été touchées en moyenne par le
chômage durant l’année 2012, ce qui correspond à un taux de 4,4%. Ces indicateurs se sont légèrement détériorés, puisqu’ils étaient respectivement de 184 000 personnes et de 4,0% en 2011. A titre de comparaison, le taux de chômage a grimpé de 9,9% à 10,7% dans l’Union européenne durant la même période
[11].
Salaires
D’après les calculs de l’Office fédéral de la statistique (OFS), les
salaires nominaux ont augmenté en moyenne de 0,8% en 2011. Cette hausse a été légèrement inférieure à celle observée en 2011 (+1,0%). Il est à relever que la quasi-totalité des branches économiques a bénéficié de cette augmentation. Avec un taux de 2,4%, c’est le domaine de l’hébergement et de la restauration qui a affiché la progression salariale la plus élevée durant l’année sous revue. Cette forte hausse est due à l’augmentation de 2,9% des salaires minimaux et à la généralisation du treizième salaire pour tous les salariés soumis à la convention collective de travail en 2012. Viennent ensuite la branche des arts, spectacles et activités de services (+1,7%), celle des activités de poste et courrier (+1,5%) et le domaine des assurances (+1,5%). A l’autre bout de l’échelle, les branches du commerce et réparation d’automobiles et de motocycles (0%), des activités informatiques et services d’information (+0,2%) et de santé, hébergement médico-social et action sociale (+0,3%) ont enregistré les taux de progression les plus bas. La hausse des salaires dans le domaine des activités des services financiers et des activités auxiliaires de services financiers ne s’est établie qu’à 0,7%, reflétant ainsi les insécurités qu’a connues le secteur bancaire depuis la crise de 2008. Quant au commerce de détail, il a affiché une hausse moyenne de 1,1% contre 1,7% en 2011. Pour ce qui est du secteur secondaire, le taux de croissance des salaires s’est globalement élevé à 0,7%, une progression inférieure à celle enregistrée l’année précédente (+1,0% en 2011). Toujours dans le domaine secondaire, les salaires nominaux ont le plus fortement progressé dans les branches de la chimie et de la pharmacie (progression nominale de 1,4% comme en 2011) ainsi que dans la fabrication des machines et équipements (+0,9%). Compte tenu d’un taux d’inflation annuel négatif (-0,7%), les
salaires réels ont enregistré une progression de 1,5%. Il s’agit de la plus forte hausse du pouvoir d’achat des salaires depuis 2010
[12].
Compte tenu des abus salariaux liés à la libre circulation des personnes et des interventions qui en ont découlé au parlement au fil de l’année 2011, le Conseil fédéral a décidé de prendre les devants en présentant en mars un message relatif à la loi fédérale portant sur la modification des mesures d’accompagnement à la libre circulation des personnes. Le gouvernement a proposé une série de durcissements. Afin de lutter contre l’indépendance fictive des prestataires étrangers, l’introduction d’une obligation de fournir des documents attestant le statut de l’entreprise et de nouveaux dispositifs de sanction ont été envisagés. En outre, le Conseil fédéral a proposé la possibilité de sanctionner les employeurs qui ne respectent pas les salaires minimaux prévus par les contrats-types de travail et d’interdire aux entreprises étrangères d’offrir leurs services en Suisse si elles ne respectent pas les lois. Ces mesures ont fait l’unanimité au sein des Chambres fédérales. Cependant, la question de l’introduction de la responsabilité solidaire a fait l’objet de vives controverses lors des délibérations au parlement. Selon ce principe, l’entreprise contractante et les sous-traitants sont solidairement responsables en cas de non-respect des conditions minimales. Au Conseil national, une courte majorité de 94 voix contre 86 a décidé de séparer cet objet des autres mesures d’accompagnement. Alors que la gauche, le PDC et une partie de PLR s’étaient prononcés en faveur de la responsabilité solidaire pour faire face au dumping salarial, l’UDC et une partie du camp bourgeois s’y sont farouchement opposés en mettant en avant les conséquences négatives pour les PME suisses. Lors de la session d’automne, le Conseil des Etats a décidé, par 22 voix contre 18, d’introduire le principe de la responsabilité solidaire dans le domaine de la construction, du génie civil et du second œuvre. Avalisée par une coalition de la gauche et du PDC, cette mesure a été principalement justifiée par l’objectif d’atténuer les inquiétudes suscitée par la libre circulation des personnes. A la grande satisfaction des syndicats et contre l’avis des associations patronales de l’économie en général et du bâtiment en particulier, le Conseil national s’est finalement rallié, par 115 voix contre 74, à la position du Conseil des Etats en décembre de l’année sous revue.
Etant donné que les Chambres fédérales se sont penchées sur la question de la lutte contre les abus dans le cadre de la modification des mesures d’accompagnement à la libre circulation des personnes, le Conseil des Etats a rejeté neuf motions ayant été adoptées par le Conseil national en 2011 et devenues obsolètes entre-temps
[13].
Dans le cadre des mesures d’accompagnement à la libre circulation des personnes, le Conseil national a transmis un postulat de sa commission de gestion invitant le Conseil fédéral à examiner une solution législative pour
combler les lacunes juridiques dans le domaine des contrats-types de travail. En outre, le texte demande au gouvernement d’apprécier la problématique des chaînes de sous-traitance
[14].
Lors de la session d’automne, le Conseil national a accepté une motion Barthassat (pdc, GE) chargeant le Conseil fédéral de préparer un plan coordonné de lutte contre la
sous-enchère salariale [15].
En mars, la Chancellerie fédérale a annoncé que
l’initiative populaire intitulée « pour la protection de salaires équitables » avait abouti. Cette initiative, lancée par l’Union syndicale suisse (USS) en 2011, a recueilli environ 112 000 signatures. Le texte vise notamment à introduire un salaire mensuel de 4 000 francs au minimum. Jusqu’à présent, un employé sur dix gagne moins de 4 000 francs bruts par mois pour un poste à plein-temps
[16].
En ce qui concerne la motion Simoneschi-Cortesi portant sur la « parité salariale », voir partie I, 7d (Femmes et politique de parité).
Pour ce qui est des rémunérations des dirigeants d’entreprise, voir partie I, 4a (Gesellschaftsrecht).
Temps de travail
Selon la statistique du volume du travail (SVOLTA), le
nombre d’heures travaillées par l’ensemble des actifs occupés en Suisse a atteint 7,738 milliards en 2012, soit 0,4% de plus que l’année précédente. Cette progression est essentiellement due à l’augmentation du nombre d’emplois (+1,5%), alors que la durée annuelle effective de travail par emploi a diminué de 1,0%
[17].
L’organisation syndicale Travail.Suisse avait déposé en 2009 l’initiative populaire
« 6 semaines de vacances pour tous » afin que l’ensemble des salariés puisse prendre part aux gains de productivité de l’économie suisse. La durée minimale légale de vacances s’élève à quatre semaines pour les employés de plus de 20 ans. Dans les faits, nombre d’entreprises accordent davantage de vacances à leurs employés. Le texte de l’initiative demandait une durée minimale de six semaines de vacances payées. Comme cela fut le cas lors des délibérations parlementaires, l’initiative n’a bénéficié que du soutien de la gauche. Alors que le parti socialiste, les Verts, ainsi que les syndicats ont fait bloc derrière l’initiative, le camp bourgeois (l’UDC, le PLR, le PDC, les Vert’libéraux et le PBD), soutenu par les associations d’employeurs (UPS et l’USAM), l’ont vivement rejetée. En mars, l’initiative a échoué devant les urnes, confirmant ainsi les résultats des sondages publiés durant la campagne. Près de deux tiers des votants se sont exprimés contre une augmentation du nombre de semaines de vacances (66,5%), reflétant ainsi le rapport des forces entre la gauche et la droite. Le soutien à l’initiative aura été plus marqué dans la Suisse francophone et italophone. En effet, le taux d’approbation a été supérieur aux 40% dans les cantons du Jura (49,3%), de Genève (47,4%), du Tessin (45,9%), de Vaud (41,1%) et de Neuchâtel (40,9%). S’agissant d’une matière peu complexe et proche des préoccupations des citoyens, il n’est par ailleurs guère surprenant de constater que l’initiative a enregistré le taux de participation le plus élevé (45,1%) parmi les cinq objets fédéraux soumis au vote le 11 mars. L’analyse du comportement de vote a confirmé l’importance du clivage gauche-droite. Selon l’analyse VOX, 71% des partisans de l’extrême gauche ont approuvé l’initiative. Dans le camp de la gauche, le taux d’acceptation s’est élevé à 54%. Au centre, l’initiative n’a été soutenue qu’à 22%, alors que l’approbation chutait sous les 20% au sein de l’électorat de droite. Par ailleurs, le statut sur le marché du travail des citoyens a joué un rôle non négligeable. En effet, les personnes en activité ont davantage soutenu l’initiative (37%) que les personnes sans emploi (26%), ces dernières ne pouvant bénéficier de vacances supplémentaires. Au niveau des arguments, les personnes en faveur de l’initiative ont justifié leurs décisions par la pression accrue sur le marché du travail et ses conséquences négatives sur la santé. Pour ce qui est des opposants, ce sont des considérations d’ordre économique qui ont primé. Nombre d’adversaires ont mis en avant que les revendications de l’initiative auraient été lourdes sur le plan financier pour les entreprises en général et pour les PME en particulier
[18].
Initiative populaire „6 semaines de vacances pour tous“
Votation du 11 mars 2012
Participation: 45,4%
Oui: 771 717 (33,5%) / 0 canton
Non: 1 531 986 (66,5%) / 20 6/2 cantons
Consignes de vote:
– Oui: PSS, Verts, PCS, USS, TravS.
– Non: UDC, PLR, PDC, PVL, PBD, PEV, UPS, eco, USAM, USP.
Le parlement s’est prononcé en faveur d’une
libéralisation des heures d’ouverture des magasins de stations-services. Jusque-là, les magasins de stations-services étaient tenus de respecter les horaires réguliers. Les établissements situés sur les aires des autoroutes ou le long d’axes de circulation importants à forte fréquentation touristique avaient la possibilité d’ouvrir jusqu’à 1 heure du matin ainsi que le dimanche. En 2010, les deux commissions de l’économie et des redevances avaient donné suite à une initiative parlementaire Lüscher (plr, GE) demandant que soit inscrit dans la loi sur le travail le principe selon lequel les magasins des stations-services situées sur les aires des autoroutes ou en bordure des grands axes routiers puissent occuper des travailleurs le dimanche et la nuit, à condition de proposer des marchandises et des prestations qui répondent principalement aux besoins des voyageurs. Lors de la session de printemps de l’année sous revue, le Conseil national a accepté, conformément au projet de sa commission, cette modification par 115 voix contre 61. C’est le soutien unanime de l’UDC, du PLR du PBD et des Vert’libéraux ainsi que d’une grande partie du PDC qui a débouché sur une majorité confortable au sein de la chambre du peuple. Le Conseil des Etats s’est également prononcé en faveur du projet en automne, mais a créé une divergence en optant pour une libéralisation moins ambitieuse. Alors que le Conseil national souhaitait appliquer la nouvelle réglementation à l’ensemble des magasins se trouvant le long d’axes de circulation importants, la chambre des cantons y a ajouté la formule « fortement fréquentés ». Suivant l’avis du Conseil fédéral, une majorité des sénateurs a estimé que la version du Conseil national allait accroître de manière excessive le nombre de magasins pouvant bénéficier des horaires d’ouverture 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7. En décembre, le Conseil national s’est rallié à la version proposée par le Conseil des Etats. Lors du vote final, le Conseil national a adopté la modification de loi par 128 voix contre 59 et le Conseil des Etats par 29 voix contre 11. Dans la foulée, les opposants ont lancé le
référendum contre la libéralisation des heures d’ouverture des magasins de stations-services. A cette fin, les principaux syndicats, le PS, les Verts, le PEV, et plusieurs organisations religieuses (dont la Fédération des Eglises protestantes et Justice et Paix, la Commission de la Conférence des évêques suisses) s’étaient regroupés en juin au sein de « L’Alliance pour le dimanche »
[19].
Le Conseil des Etats a adopté une motion Lombardi (pdc, TI) réclamant une
harmonisation partielle des horaires d’ouverture des magasins par la modification de la loi fédérale du marché intérieur. Le texte préconise que les magasins soient ouverts de 6 à 20 heures du lundi au vendredi et de 6 à 19 heures le samedi. Le Conseil national ne s’est pas encore prononcé sur cette motion en 2012
[20].
Le Conseil national a accepté en mai une motion Germanier (plr, VS) portant sur
le nombre de dimanches de congé dont bénéficie le personnel du sol dans le secteur de la navigation aérienne. Au nom de l’égalité de traitement avec les CFF et les entreprises de trolleybus concessionnaires, le texte demande que ce nombre de congés soit réduit de 26 à 12 jours. La décision du Conseil des Etats n’est pas intervenue au cours de l’année sous revue
[21].
Pour ce qui est des motions Hutter (plr, ZH) et Abate (plr, TI) relatives aux horaires d’ouverture des magasins, voir partie I, 4a (Strukturpolitik).
Relations collectives du travail
Après une année de dures négociations, une nouvelle
convention nationale du secteur principal de la construction a été conclue en mars de l’année sous revue. La « CN 12 » a ensuite été avalisée par les partenaires sociaux, à savoir la Société Suisse des Entrepreneurs (SSE) pour le patronat et Syna et Unia pour les syndicats. Le texte est entré en vigueur le 1er avril et sera valable jusqu’au 31 décembre 2015. Chaque partie prenante a néanmoins la possibilité de résilier la convention au 31 mars 2013 en respectant un préavis de deux mois. Au niveau des rémunérations, il a été convenu d’une hausse de 1% en 2012, composée d’une partie générale et individuelle de 0,5% chacune. Pour ce qui est des salaires minimaux, l’augmentation a été fixée à 1% en bloc. En 2013, tous les salaires seront majorés de 0,5%, indépendamment du taux d’inflation. Les syndicats ont obtenu, pour les travailleurs de plus de 55 ans, le versement de l’intégralité du salaire net en cas de maladie et une forme de protection contre les licenciements. En contrepartie, les salaires initiaux des travailleurs qui viennent de terminer leur apprentissage ont été réduits. En outre, certains métiers (extraction de sable et de gravier, transports) ont été exclus du champ d’application de la convention collective
[22].
En décembre, les éditeurs romands ont résilié la
CCT dans la presse écrite qui reste néanmoins en vigueur jusqu’à la fin 2013. Afin de justifier cette décision, le patronat a invoqué un recul important des recettes publicitaires de la presse écrite. L’association Médias Suisses a annoncé qu’elle entendait revoir le barème des rémunérations en place qui prévoit des salaires identiques sur l’ensemble des régions de la Suisse romande. Le syndicat « Impressum » a vivement regretté cette résiliation, car il craint une détérioration des conditions de travail des 1 800 employés concernés. Il est à noter que la Suisse alémanique et le Tessin n’ont plus de convention collective dans cette branche depuis 2004
[23].
La
mobilisation contre la fermeture du site de Prangins (VD), annoncée par le groupe pharmaceutique
Novartis en octobre 2011, a finalement été couronnée de succès. Au terme de négociations entre la direction de l’entreprise et les autorités cantonales, la multinationale s’est engagée non seulement à maintenir ses activités actuelles, mais à investir dans une nouvelle chaîne de production, avec des emplois supplémentaires à la clé. Pour arriver à cette volte-face, les représentants du personnel et les autorités politiques ont fait plusieurs concessions. Les employés ont partiellement renoncé aux augmentations de salaires prévues pour 2012. En outre, les quelque 160 collaborateurs soumis jusque-là à une durée de travail hebdomadaire de 37,5 heures ont accepté de passer à 40 heures. Quant au canton de Vaud, il a accordé, par le biais de sa politique de diversification économique, des avantages fiscaux sur l’investissement supplémentaire de 40 millions de francs
[24].
Le 24 avril, le groupe allemand Merck KGaA a décidé de fermer le siège de sa division
Merck Serono à Genève, entraînant ainsi la suppression de 1 250 emplois, notamment dans le domaine de la recherche des biotechnologies. Face à ce choc, l’assemblée générale du personnel a lancé un mouvement de grève qui a débuté le 12 juin. Cependant, la direction s’est montrée intransigeante. A part une légère amélioration du plan social (mesures pour les couples d’employés et un meilleur plan de préretraite), les propositions du personnel ont toutes été refusées. Le 19 juin, Merck Serono a confirmé la fermeture des sites de Genève et de Coinsins (VD)
[25].
Un conflit social a éclaté en automne à l’hôpital neuchâtelois de
La Providence. Une grande partie du personnel a fait grève le 18 septembre en raison du refus de la direction de l’hôpital de renouveler la convention collective du travail, la « CCT 21 ». La direction de l’hôpital a fait savoir que ce choix avait été occasionné par la décision du Conseil d’Etat neuchâtelois d’enlever à l’établissement, sur le point d’être repris par le groupe de cliniques privées Genolier, la reconnaissance d’utilité publique. Selon l’hôpital, le manque à gagner s’est élevé à 3,7 millions de francs par an, dont 1,7 million directement liés à l’application de la « CCT 21 ». Face à cet imbroglio financier, une trentaine d’employés, soutenus par les syndicats Syna et SSP, ont décidé de reconduire le mouvement de grève pour une durée d’au moins deux mois
[26].
Au
Tessin, le syndicat des services publics (SSP) a appelé les employés cantonaux à faire grève le 5 décembre contre l’intention du gouvernement de diminuer, dans le cadre du budget 2013, les salaires de 2%. Plus de 1 500 personnes se sont rassemblées devant le siège de l’exécutif à Bellinzone. Ce sont surtout les enseignants qui ont suivi le mouvement
[27].
Dans le canton de
Schaffhouse, près de 300 enseignants ont fait grève le 13 février. Les températures glaciales ne les ont pas empêchés de défiler devant le bâtiment du Département cantonal de l’instruction publique afin d’obtenir de meilleures conditions de travail
[28].
Protection des travailleurs
Afin de mieux protéger contre un licenciement les
lanceurs d’alerte (« Whistleblower »), c’est-à-dire les personnes qui signalent des faits répréhensibles sur leur lieu du travail, le Conseil fédéral a chargé en novembre le Département de justice et police de rédiger un message sur la révision partielle du code des obligations (CO). En 2009, la consultation avait témoigné de la nécessité d’un nouvel article en la matière
[29].
En raison de la controverse qu’avait soulevée la consultation du projet de
durcissement en matière de licenciements abusifs en 2011,
le Conseil fédéral a décidé de charger le Département de justice et police de rédiger, en collaboration avec le Département fédéral de l'économie, une étude approfondie sur les conditions et les aspects déterminants de la protection des représentants des travailleurs face aux licenciements. Le but étant d’obtenir des informations pertinentes qui recueillent l'aval des partenaires sociaux. Le Conseil fédéral a annoncé qu’il se baserait également sur les résultats de cette étude afin de juger de la nécessité d’une augmentation de la protection contre les licenciements abusifs
[30].
Sélection bibliographique
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Berenstein, Alexandre / Mahon, Pascal / Dunand, Jean-Philippe, Labour law in Switzerland, Berne 2012.
Gaillard, Serge / Weber, Bernhard, „Dix ans de libre circulation des personnes avec l’UE: le fort attrait du marché dur travail suisse“, in La Vie économique, 2012, numéro. 6, p. 46-50.
Greuter, Nicole / Milic, Thomas / Widmer, Thomas, Analyse Vox des votations fédérales du 11 mars 2012, Zurich 2012.
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Mülhauser, Philipp, Das Lohnbuch 2012: Mindestlöhne sowie orts- und berufsübliche Löhne, ermittelt durch den Leistungsbereich Arbeitsbedingungen des Amtes für Wirtschaft für Arbeit des Kantons Zürich in Zusammenarbeit mit Arbeitgeber- und Arbeitnehmerverbänden, Zurich 2012.
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Rennwald, Jean-Claude / Steinauer, Jean, Le modèle horloger, 1937-2012: les rouages d’une révolution, Lausanne 2012.
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Secrétariat d’Etat à l‘économie (SECO), Rapport FlaM du 27 avril 2012: Mise en œuvre des mesures d’accompagnement à la libre circulation des personnes Suisse-Union européenne (1er janvier – 31 décembre 2011), Berne 2012.
[1] Communiqué de l’OFS du 25.4.13; NZZ, 3.8.12.
[2] FF, 2012, p. 9038 s; NZZ, 9.8.12; cf. APS 2011, p. 289.
[3] Communiqué de l’OFS du 26.3.13.
[4] Communiqué du Conseil fédéral du 18.4.12; NZZ et Lib., 19.4.12.
[5] Communiqué du Seco du 25.5.12; NZZ, 26.5.12 ; Litt. Seco (huitième rapport) et Gaillard.
[6] MCF: 12.047: BO CE, 2012, p. 867 ss.; BO CN, 2012, p. 2034 ss.; NZZ, 5.4.12.
[7] Communiqué du Seco du 11.9.12; NZZ, 12.9.12.
[8] Communiqué du Seco du 19.12.12; NZZ, 20.12.12.
[9] Po. 12.3166, BO CN, 2012, p. 1790.
[10] Communiqué du SECO du 8.1.13.
[11] Communiqué de l’OFS du 26.3.13.
[12] Communiqué de l’OFS du 29.4.13.
[13] MCF: 12.039: BO CN, 2012, p. 678 ss.; BO CE, 2012, p. 331 ss; FF, 2012, p. 3161 ss.; NZZ, 3.3.12, 30.5.12, 26.9.12 et 6.12.12; cf. APS 2011, p. 291 s.; motions rejetées: Mo 11.3363 (Pedrina): BO CE, 2012, p. 340; Mo 11.3364 (Carobbio Guscetti): BO CE, 2012, p. 340; Mo 11.3525 (Groupe PBD): BO CE, 2012, p. 340; Mo 11.3533 (Pardini): BO CE, 2012, p. 340; Mo. 11.3604 (Estermann): BO CE, 2012, p. 340; Mo. 11.3629 (Pelli): BO CE, 2012, p. 3407; Mo. 11.3703 (Lustenberger): BO CE, 2012 p. 340; Mo. 11.3704 (Hiltpold): BO CE, 2012, p. 340; Mo. 11.3707 (Moret): BO CE, 2012, p. 340; APS 2011, p. 291 s.
[14] Po. 11.4055: BO CN, 2012, p. 647 ss.
[15] Mo. 11.3998: BO CN, 2012, p. 1779.
[16] FF, 2012, p. 2845 s.; cf. APS 2011, p. 292.
[17] Communiqué de l’OFS du 27.5.13; NZZ, 28.5.13.
[18] Lit. Greuter et al.; NZZ, 4.3.12.
[19] Iv.pa. 09.462: BO CN, 2012, p. 638 ss.; BO CE, 2012, p. 743 ss.; NZZ, 18.9. et 6.12.12.
[20] Mo. 12.3637: BO CE, 2012, p. 748 ss.; NZZ, 18.9.12.
[21] Mo 10.3508: BO CN, 2012, p. 654 ss.
[22] NZZ, 10.3.12, LT et NZZ, 29.3.12, Lib. 31.3.12 ; cf. APS 2011, p. 294.
[23] NZZ et Lib., 6.12.12.
[24] 24h, 18.1.12; cf. APS 2011, p. 294 s.
[25] TdG, 25.4.12 et 20.6.12; LT, 15.5.12.
[26] Exp, 19.9.12 et 27.11.12; LM 21.12.12.
[27] CdT et NZZ, 6.12.12.
[29] Communiqué de l’OFJ du 21.1.12; NZZ, 22.11.12; cf. APS 2009, p. 198.
[30] Communiqué de l’OFJ du 21.1.12; NZZ, 22.11.12; cf. APS 2011, p. 295.