Article constitutionnel prévoyant l'introduction d'un service civil pour les objecteurs de conscience (votation le 17 mai 1992)

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De fait, une sous-commission fut créée afin de rédiger le texte d'une initiative parlementaire de la commission. Sa majorité a proposé une modification de l'article 18 de la Constitution fédérale introduisant un service civil, tout en maintenant l'obligation de servir. Le service civil doit donc demeurer une exception, comprendre les mêmes exigences que le service armé, être d'intérêt public et fondé sur la preuve par l'acte; il en résulte le rejet du principe du libre choix entre les deux formes de service. Le texte constitutionnel proposé par la majorité de la commission évite cependant de régler certains points très délicats, comme la nature des motifs donnant accès au service civil (éthiques, religieux), l'autorité chargée d'entreprendre cet examen de conscience et la durée du service. Cette démarche repose sur une volonté de ne fixer ces différents points qu'au niveau de la loi d'application. La proposition de la minorité de la commission, émanant de groupes bourgeois, était moins contraignante, puisqu'elle énonçait de façon potestative la création d'un service civil.
Dans son avis de mai 1991 sur ce texte, le Conseil fédéral a reconnu la nécessité de régler le problème posé par l'objection de conscience. C'est pourquoi il s'est déclaré en faveur de l'idée générique exprimée par l'initiative de la commission, dont la formulation permettrait, selon lui, de tenir compte des nombreuses propositions faites pour réglementer concrètement le service civil.

Dossier: Einführung des Zivildienstes

Au Conseil national, le projet d'article constitutionnel de la majorité de la commission a été très largement accepté. En outre, tous les groupes parlementaires lui ont apporté leur soutien, soulignant qu'instaurer un tel service civil correspondait bien à l'évolution sociale et historique du pays vis-à-vis des objecteurs de conscience, sujet qui fut longtemps le lieu de très forts blocages. Le Conseil des Etats suivit la décision de la grande chambre. Cependant, certains observateurs n'ont pas manqué de noter que si le consensus avait été si facile à trouver au parlement, c'était parce que le vrai débat n'aurait lieu que lors de l'élaboration de la loi, où les adversaires du service civil pourront faire valoir leurs arguments d'autant mieux que la formule choisie laisse place à moult interprétations.

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La votation sur l'article constitutionnel prévoyant l'introduction d'un service civil est à replacer dans la longue marche vers la création d'une telle institution, émaillée de nombreux scrutins, dont le dernier en date, le projet Barras adopté en 1991 et prévoyant une décriminalisation partielle de l'objection de conscience, a permis d'entrouvrir la porte. Les conditions internationales (fin de la guerre froide, disparition de menaces directes en Europe) ont certainement permis de faire avancer de façon décisive ce dossier. Ainsi, après un siècle d'affrontements sur ce sujet, la création d'un service civil a reçu un soutien quasi général. Reflétant d'ailleurs ce récent et remarquable consensus, le souverain a adopté cette nouvelle norme à plus de 80%, aucun canton ne faisant défaut (Rappelons que ce projet avait pour origine une initiative parlementaire de Helmut Hubacher (ps, BS)).
Les partisans de l'article constitutionnel ont recouvert la quasi totalité de l'échiquier politique. D'ailleurs, cette unanimité s'est traduite par la mise sur pied d'un comité de soutien composé de 100 parlementaires représentant pratiquement tous les partis (à l'exception des libéraux et de l'extrême droite). Tous ont souligné l'importance d'ancrer dans la constitution la possibilité de créer un service civil. Selon eux, cette nécessité provenait de ce que la loi Barras, si elle constituait un premier pas, ne résolvait pas le problème. En outre, avec un véritable service civil, la Suisse pourra enfin se mettre au diapason des autres pays européens en réglant le problème des objecteurs de conscience. Des divergences sont cependant apparues quant à la suite à donner à cet article. Les bourgeois ont vu dans la nouvelle norme constitutionnelle une garantie ne remettant pas en cause l'armée de milice et l'obligation de servir, la loi devant se limiter à régler le cas des objecteurs. Pour sa part, la gauche a considéré qu'un service civil devait concerner une partie beaucoup plus importante de la population et que, en tous les cas, la question du libre choix entre service civil et service militaire devra être posée. Au vu de ce débat naissant, chacun s'est ainsi accordé à dire que la bataille législative sera rude, le véritable enjeu étant constitué par l'élaboration de la future loi.
Les opposants furent très minoritaires et provinrent de certains milieux de la droite conservatrice. Ceux-ci fustigèrent ce projet d'article; ils ont estimé qu'il mettait en danger un des fondements de l'armée, à savoir l'obligation de servir, qui, à leurs yeux, ne saurait souffrir de solution de rechange. Pour eux, en effet, le texte constitutionnel contenait en puissance le libre choix entre service militaire et service civil. En outre ils considérèrent un service civil comme superflu en temps de paix et inutile en temps de guerre.


Article constitutionnel sur le service civil. Votation du 17 mai 1992

Participation: 39,2%
Oui: 1 442 263 (82,5%) / tous les cantons
Non: 305 441 (17,5%)

Mots d'ordre:
- Oui: PRD (3*), PDC (4*), PSS, UDC (2*), PES, AdI, PEP, PdT; USS, CSCS, les églises suisses, Amnesty International
- Non: PLS (3*), PA, DS, UDF.
* Recommandations différentes des partis cantonaux


L'article constitutionnel ayant bénéficié d'un tel soutien, la campagne pour la votation ne suscita pratiquement aucun débat et fut quasiment inexistante. Les rares voix qui s'opposaient au projet ne se firent guère entendre. D'ailleurs, l'analyse VOX de ce scrutin montre que les mentalités ont beaucoup évolué ces dernières années au sujet de l'objection de conscience et du service civil; l'acceptation de l'article constitutionnel fut large dans toutes les catégories de la population et chez les personnes de toutes tendances politiques. Cependant, reflétant les prises de position de la droite conservatrice, le nombre d'opposants fut plus élevé chez les sympathisants des partis bourgeois. Les partisans de l'article ont été sensibles au fait que celui-ci décriminalise l'objection de conscience et qu'un service civil vaut mieux qu'une peine d'emprisonnement. Les opposants y voyaient par contre un affaiblissement de l'armée et une atteinte à l'obligation de servir. Par ailleurs, selon l'analyse, il a semblé se dégager une majorité de la population pour se prononcer en faveur d'un libre choix entre service civil et militaire.

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