Pour assurer la protection de l'espace aérien européen, plus d'une dizaine de pays, dont la Suisse, ont adhéré à l'European Sky Shield Initiative. Ce projet vise à établir un bouclier antimissile européen en combinant l'usage de plusieurs systèmes de défense sol-air. A la suite de la signature par le Conseil fédéral de la déclaration d'adhésion au protocole d'adhésion à ce projet en avril 2024, la Commission de la politique de sécurité du Conseil national (CPS-CN) a déposé une motion demandant au gouvernement de soumettre au Parlement l'adhésion à l'European Sky Shield Initiative.
Dans un avis publié le 26 juin 2024, le Conseil fédéral a affirmé que l'article 184, al. 1, de la Constitution fédérale lui donnait le droit de signer cette déclaration d'adhésion. Et d'ajouter que d'après les dispositions légales en place, le Parlement n'aurait pas besoin d'approuver ce texte. Le gouvernement rappelle également qu'il a répondu positivement à la demande de la Commission de politique extérieure du Conseil national (CPE-CN), formulée en octobre 2023, en acceptant que les commissions de politique extérieure et les commissions de la politique de sécurité des deux conseils – CPS-CN et CPS-CE – soient consultées relativement à l'adhésion au projet European Sky Shield. Or, à la suite de cette consultation, toutes les commissions avaient émis un avis favorable relativement à l'adhésion au programme European Sky Shield Initiative. L'objet doit être débattu par le Conseil national lors de la session d'hiver.

Lorsque les membres du Conseil national ont examiné la motion de la CPS-CN, ils et elles ont tenté de déterminer le bien-fondé de la décision des autorités de ne pas associer le Parlement à ce processus. S'exprimant au nom de la Commission, le conseiller national Jean-Luc Addor (udc, VS) a appelé ses collègues à soutenir la motion de la CPS-CN. Il a affirmé que le Conseil fédéral se «moquait» du Parlement dans ce dossier, puisque le chef de l'armement avait signé le protocole d'accord avant que le Parlement ne puisse en débattre. Il a également laissé entendre que puisque cet accord avait une valeur opérationnelle, il était possible d'estimer qu'il devait être soumis au vote des cantons et du peuple, comme l'exige l'adhésion à toute organisation de sécurité collective.
La conseillère nationale centriste Nicole Barandun (ZH) a quant à elle défendu la minorité de la commission en incitant ses collègues à rejeter la motion. Elle a notamment affirmé qu'une ratification par le Parlement de l'adhésion à ce programme n'était pas nécessaire puisque le projet European Sky Shield Initiative était complètement indépendant des activités de l'OTAN et ne risquerait donc pas de remettre en cause la neutralité de la Suisse. Elle a ajouté que les Etats qui étaient associés à ce programme partageaient les valeurs de la Suisse et n'étaient impliqués dans aucun conflit armé. Par la suite, elle a indiqué que selon la minorité de la commission, l'adhésion à l'European Sky Shield Initiative ne devait pas être comprise comme l'adhésion à un traité de droit international nécessitant l'approbation du Parlement, mais simplement comme une initiative de coopération et de partenariat entre Etats. Ainsi, pour cette élue, comme pour la minorité de la CPS-CN, le Conseil fédéral était en droit de signer le protocole d'adhésion à European Sky Shield Initiative, puisque selon l'article 184, al. 1 de la Constitution et l'article 109 de la loi sur l'armée, le gouvernement peut signer de tels documents sans demander l'aval du Parlement.
C'est également ce qu'a affirmé la ministre de la défense Viola Amherd lorsqu'elle a pris la parole pour défendre la position du Conseil fédéral. Elle a ainsi indiqué: «ich bin eine ganz starke Verfechterin davon, (...) dass man die Kompetenzen so ausübt, wie sie in Verfassung und Gesetz vorgesehen sind».
L'objet a été rejeté par 101 voix contre 84 et 6 abstentions. La minorité était composée de l'UDC et des Vert-e-s.