Initiative populaire «Energie et environnement»

Dossier: Energie 2000

Un comité d'initiative réunissant près de 180 personnalités de divers horizons politiques, dont 32 parlementaires nationaux de tous les principaux partis, a lancé deux initiatives populaires visant à compléter le programme Energie 2000; la première de celles-ci, intitulée «Energie et environnement», a pour but de stabiliser, puis réduire la consommation d'énergie non-renouvelable. Pour y parvenir, le texte prévoit d'introduire une taxe d'incitation sur la consommation de tous les agents énergétiques non-renouvelables et sur les installations hydro-électriques d'une puissance supérieure à un mégawatt. L'initiative prévoit de redistribuer intégralement les recettes de la taxe aux personnes physiques et aux entreprises. Il est également prévu d'édicter des réglementations spéciales en faveur des entreprises fortement consommatrices d'énergie.

Lancées en 1993 par un comité d'initiative réunissant près de 180 personnalités de divers horizons politiques (parmi lesquelles figurent une trentaine de parlementaires nationaux), les initiatives populaires intitulées «Energie et environnement» et «Pour l'introduction d'un centime solaire», qui visent à compléter le programme Energie 2000, ont toutes deux abouti avec respectivement 109'829 et 114'824 signatures valables. La première prévoit l'introduction d'une taxe incitative sur la consommation de tous les agents énergétiques non-renouvelables ainsi que sur les installations hydro-électriques d'une puissance supérieure à un mégawatt. Conformément au principe de neutralité budgétaire, l'ensemble des recettes ainsi dégagées serait redistribué aux particuliers et aux entreprises peu consommateurs d'énergie. Prévoyant de prélever une redevance d'un dixième, puis progressivement d'un demi centime en l'espace de cinq ans sur chaque kilowattheure d'énergie non-renouvelable consommé, la seconde initiative vise, pour sa part, à promouvoir la construction d'installations solaires en y affectant la moitié au moins des recettes ainsi dégagées. Aux dires des initiants, entre CHF 100 et 500 millions par année pourraient être obtenus par ce biais.

En mars 1995, les Verts avaient déposé deux initiatives populaires; la première ‘’Pour l’introduction d’un centime solaire’’ (initiative solaire) et la seconde ‘’Energie et environnement’’. Le parlement avait décidé en 1999 de leur répondre avec deux contre-projets. Alors que l’initiative solaire avait été maintenue, les protagonistes de la seconde initiative s'étaient donnés le premier trimestre 2000 comme délai de réflexion. La décision de retirer leur initiative populaire « Energie et environnement » a été annoncée en mars. Les raisons étaient qu'ils se satisfaisaient du contre-projet direct proposé par les Chambres et qu’ils espéraient favoriser l’autre initiative qu’ils avaient également lancé.

Initiative populaire «pour l'introduction d'un centime solaire»

Dossier: Energie 2000

En septembre, un comité d'initiative, composé de 180 personnalités d'horizons très divers et émanant de l'ensemble des partis gouvernementaux, a annoncé le lancement de deux initiatives populaires visant à compléter le programme Energie 2000, qui, selon les initiants, est condamné à l'échec sans l'adoption de mesures plus drastiques. L'initiative intitulée «pour l'introduction d'un centime solaire» prévoit de prélever une redevance d'un dixième de centime sur chaque kilowattheure d'énergie non-renouvelable consommé; en cinq ans, cette taxe serait progressivement augmentée jusqu'à 0,5 centime. Au moins la moitié des recettes escomptées devra être consacrée à la promotion de la construction d'installations solaires. Des dispositions spéciales ainsi que des délais d'adaptation pourront être accordés aux entreprises fortes consommatrices d'énergie.

En mars, le Conseil fédéral a transmis aux Chambres son message relatif aux initiatives populaires «Energie et environnement» et «Pour l'introduction d'un centime solaire». Dans son appréciation de ces deux textes, le gouvernement a reconnu que ceux-ci contribueraient très largement à une utilisation rationnelle de l'énergie et à un emploi accru d'agents renouvelables, atténuant par là-même les problèmes d'atteinte à l'environnement ainsi que les risques de pénurie d'énergie. Le gouvernement a néanmoins émis de sérieuses réserves concernant la rigidité des objectifs et des délais impartis ainsi que l'affectation contraignante des subventions. Mais c'est surtout l'examen de l'impact potentiel des deux initiatives sur le système économique helvétique qui a conduit le gouvernement à en préconiser le rejet, sans contre-projet: De l'avis du Conseil fédéral, les mesures avancées par les initiants provoqueraient en effet des coûts d'adaptation non négligeables pour certaines branches économiques et risqueraient – en l'absence d'une harmonisation internationale en la matière – de diminuer un peu plus l'attrait de la Suisse en tant que lieu d'implantation d'industries. Par ailleurs, le gouvernement a estimé que les redevances et subventions d'incitation proposées par les deux initiatives contreviendraient à l'objectif de politique financière adopté en 1996 aux termes duquel il convient de s'abstenir de prélever de nouveaux impôts, à l'exception de ceux destinés au financement des grands projets ferroviaires et de l'AVS/AI.
Malgré le rejet de ces initiatives, le Conseil fédéral a cependant déclaré vouloir améliorer les rendements de toutes les énergies et promouvoir l'utilisation rationnelle des énergies renouvelables. A cette fin, il a recommandé aux Chambres d'adopter les lois sur l'énergie et sur la réduction des émissions de CO2 – véritable contre-projet indirect à l'initiative «Energie et environnement» – ainsi que d'approuver l'extension du programme Energie 2000 qui surviendra au tournant du siècle.

L’Institut pour le climat, l’environnement, l’énergie à Wuppertal a étudié les conséquences concrètes que l’initiative populaire dite solaire aurait sur l’emploi et sur les technologies énergétiques. L’étude a été mandatée par le groupe de travail «Solar 91» et cofinancée par l’Office fédéral de l’énergie. L’initiative solaire réclame une taxe incitative sur les énergies non renouvelables de 0.5 ct/kWh jusqu’en 2020, qui rapporterait CHF 880 millions annuellement. Le produit serait utilisé pour encourager l’énergie solaire et une utilisation rationnelle de l’énergie. L’étude a envisagé deux scénarios. Premièrement, si le produit de la taxe était entièrement utilisé pour encourager des économies d’énergie, on pourrait envisager jusqu’en 2020 la création de 207'000 postes de travail supplémentaires. Second scénario: si au contraire la totalité de la somme était destinée aux technologies pour les énergies renouvelables, environ 85'000 nouveaux postes de travail seraient créés. L’initiative étant un compromis des deux scénarios, l’étude a estimé à 145'000 le nombre d’emplois créés d’ici à 2020. Rappelons que les deux Chambres fédérales ont rejeté l’initiative et décidé un contre-projet avec une taxe énergétique de 0.3 ct/kWh.

Le comité de l’initiative «solaire» a décidé de maintenir son initiative, jugeant le contre-projet du parlement insuffisant. Le comité de l’initiative «énergie et environnement» a demandé au Conseil fédéral de lui accorder un délai de réflexion supplémentaire pour décider de l’éventualité d’un retrait. Les initiants ont souhaité réétudier la situation au début 2000, aux vues des nouvelles connaissances dans le domaine.

Ici vous trouverez l'article sur la votation.

Contre-projets du parlament aux initiatives populaires sur des taxes énergétiques («paquet énergétique»)

Au Conseil national, l'entrée en matière sur l'arrêté fédéral séparé relatif à une taxe écologique sur l'énergie fut l'objet de débats nourris. Les partisans de la taxe l'ont soutenu en tant que contre-projet indirect aux trois initiatives populaires énergétiques en cours («pour l'introduction d'un centime solaire», «encourager les économies d'énergie et freiner le gaspillage», «pour garantir l'AVS – taxer l'énergie et non le travail!»). La constitutionnalité de la taxe et la procédure adoptée (l'arrêté ne sera soumis à une procédure de consultation qu'après son acceptation par la grande Chambre) ont été vivement controversées. La taxe a été jugée constitutionnelle par l'expert juridique Tobias Jaag pour autant qu'elle remplisse des buts écologiques, qu'elle soit incitative et qu'elle ne soit pas utilisée pour indemniser des investissements non amortissables (INA) ou pour diminuer les charges salariales. Une proposition Leuba (pl, VD) réclama le renvoi de l'arrêté en commission avec mandat de procéder à une consultation des cantons et milieux intéressés avant de décider, ainsi que d'obtenir l'avis du Conseil fédéral sur le projet d'arrêté. Elle fut rejetée in extremis par 93 voix contre 87. La majorité de la Ceate a soutenu la taxe écologique, estimant que la libéralisation du marché de l'électricité dans l'Union européenne nécessitait des mesures d'accompagnement. L'entrée en matière sur l'arrêté a été finalement acceptée par 105 voix contre 72. La taxe a été soutenue par les socialistes et les Verts, une majorité démo-chrétienne, une minorité radicale et par les représentants des cantons de montagne. Le député Lötscher (pdc, LU) demanda l'entrée en vigueur simultanée de la taxe et de la loi sur l’énergie et de prolonger en attendant l'arrêté fédéral de 1990. Soutenue par les écologistes et les socialistes, la proposition a toutefois été rejetée par 83 voix contre 69. Les députés ont suivi les recommandations de Moritz Leuenberger qui demanda de séparer les deux objets afin d'éviter qu'un référendum contre l'arrêté sur la taxe ne retarde l'entrée en vigueur de la loi. Le risque serait de ne jamais voir la loi entrer en vigueur et de prolonger indéfiniment l'arrêté de 1990.
Dans l'examen de détails de l'arrêté, les députés ont maintenu à 0.6 centime par kilowattheure la taxe prélevée sur la consommation finale de toute énergie non renouvelable. La taxe sera restituée dans les cas où les agents fossiles seront exportés ou utilisés à des fins autres qu'énergétiques, lorsque l'électricité sera produite au moyen d'agents renouvelables, lorsqu'elle sera exportée, ainsi que lorsqu'elle servira à alimenter des équipements à pompage-turbinage. La taxe sera exonérée ou remboursée lorsque l'énergie sera destinée à des réseaux de chauffage à distance. Un quart au moins du produit, en moyenne quinquennale, sera utilisé à l'encouragement des énergies renouvelables, à l'assainissement énergétique et au maintien et renouvellement des centrales hydrauliques. Le Conseil fédéral devra instituer un fonds avec les recettes de la taxe incitative. La Confédération pourra mettre à disposition d'organisations privées, cautionnant des projets de financement de tiers, des contributions à fonds perdu comme capital social ou comme caution. La taxe sera introduite progressivement par l'exécutif, en l'espace de six ans, son effet incitatif sera vérifié régulièrement. L'arrêté a été limité à 25 ans au plus à compter de son entrée en vigueur, pour autant que l'approvisionnement du pays en énergie renouvelable locale soit assuré au moins à 50% et que le pourcentage d'énergie utilisable soit supérieur aux pertes d'énergie. Le vote sur l'ensemble de l'arrêté a retenu l'approbation de 98 députés contre 59. Ce projet d'arrêté fédéral sur la taxe a été ensuite mis en procédure de consultation avant d'être transmis au Conseil des Etats.

Le Conseil national a donc mis en consultation son projet d'arrêté fédéral relatif à la taxe écologique sur l'énergie dès la fin juillet. Dans un même temps, la Ceate du Conseil des Etats a proposé un nouveau projet de taxe énergétique incitative servant de contre-projet aux initiatives populaires «Encourager les économies d'énergie et freiner le gaspillage» (initiative énergie et environnement) et «Pour l'introduction d'un centime solaire» (initiative solaire), toutes deux rejetées par le Conseil fédéral sans contre-projet. La commission du Conseil des Etats, contrairement au Conseil national, a estimé qu'une modification de la Constitution était indispensable. Elle a mandaté l'Office fédéral de l'énergie pour ouvrir une double procédure de consultation. Le premier volet consiste en un nouvel article constitutionnel instaurant une taxe énergétique sur les agents non renouvelables. Les recettes ont été estimées à CHF 2.5 milliards de francs par année, 2.2 milliards seraient utilisés pour réduire les cotisations sociales prélevées sur les salaires, notamment pour l'AVS et l'AI. Cette proposition fait office de contre-projet à l'initiative populaire énergie et environnement et pourrait servir de fondement pour la réforme fiscale écologique envisagée par Kaspar Villiger. Le second volet, contre-projet à l'initiative solaire, consiste en un second article constitutionnel transitoire. Il stipule que pendant dix ans, 300 millions du produit de la taxe seront destinés à la promotion de l'énergie solaire et de la biomasse, à l'entretien des centrales hydrauliques et aux économies d'énergie. Les représentants de la Ceate ont déclaré que leur projet était fiscalement neutre. Il n'augmentera pas la charge fiscale globale de l'Etat puisqu'il réduira les ponctions salariales et qu'il encouragera de manière acceptable les énergies renouvelables. Le taux de la taxe devrait faire augmenter les prix des agents énergétiques non renouvelables de 10 à 15%.

Lors des procédures de consultation, le PDC, le PS et les Verts se sont déclarés favorables aux deux projets qui permettront d'accompagner l'ouverture du marché de l'électricité. Le PS a souhaité que l'article constitutionnel, en tant que base pour une réforme fiscale écologique, soit traité de manière indépendante de l'arrêté du National. Les Libéraux ont refusé clairement le projet de la Chambre du peuple. Ils se sont par contre exprimés favorablement sur le premier volet du projet de la Ceate (taxe sur les énergies non renouvelables pour réduire les cotisations sociales), mais ont rejeté le second (article constitutionnel transitoire encourageant les énergies renouvelables). Le PRD a rejeté le projet du Conseil national, mais il a soutenu celui de la Ceate. L'UDC a refusé strictement toute taxe sur l'énergie, il a été très critique sur les deux projets. Le Vorort a renvoyé catégoriquement le projet du National à l'instar de celui de la Ceate avec toutefois un bémol, puisqu'il a accepté les discussions au sujet d'un projet de réforme fiscale écologique. L'Union des centrales suisses d'électricité (UCS) s'est opposée aux deux projets. Finalement, la Fondation Suisse de l'Energie a soutenu le projet du National et encouragé à long terme l'élaboration d'une réforme fiscale écologique.

Le Conseil fédéral, dans sa séance extraordinaire d'octobre, a pris diverses options relatives à la future politique énergétique fédérale. Le gouvernement s'est déclaré pour la première fois ouvertement favorable à l'introduction d'une taxe énergétique incitative et à l'élaboration d'une réforme fiscale écologique. Il s'est ainsi rapproché de la solution concoctée par la Ceate du Conseil des Etats, précisant sa stratégie à propos de la réforme fiscale écologique. Le gouvernement a estimé, à l'instar du Conseil des Etats, que l'introduction d'une taxe sur l'énergie nécessitait la mise en place d'une base constitutionnelle. La réforme fiscale écologique devrait se faire, selon l'exécutif, en deux étapes. La première étape consisterait à introduire une taxe d'incitation ancrée dans un article constitutionnel, dès 2001 ou 2002. L'idée est d'imposer davantage les énergies non renouvelables, de favoriser les énergies renouvelables et de soutenir les centrales hydroélectriques. La deuxième étape du processus devrait remplacer cette taxe d'incitation par un véritable impôt écologique et fiscalement neutre. Il serait introduit à la fin de l'échéance du régime financier actuel (fin 2006) et devrait poursuivre un double but: améliorer l'environnement et favoriser l'emploi. Il devrait frapper les mêmes agents énergétiques que la taxe d'incitation. Mais plus élevé, il permettrait d'abaisser les charges salariales et de renforcer ainsi la compétitivité économique de la Suisse. Une estimation provisoire permet de tabler sur des recettes se situant entre CHF 2 et 3 milliards par an, de quoi alléger les cotisations sociales de 1% (à parts égales pour les employés et les employeurs). Le gouvernement a formé un groupe de travail qui devra plancher sur plusieurs questions: l'indemnisation des INA, l'exemption de la taxe pour l'énergie hydraulique qui pourrait représenter une distorsion de concurrence et donc une violation aux accords de l'OMC, et enfin l'éventuelle suppression de la redevance hydraulique payée par les producteurs aux communes qui possèdent des barrages. La stratégie ainsi présentée par le Conseil fédéral a fait office de réponse aux différentes propositions étudiées par le parlement. Les cantons de montagne ont d'ailleurs réagi vivement à l'idée de supprimer les redevances hydrauliques qui représentent pour eux des recettes très importantes.
Le CN a supporté la démarche du CF en transmettant un postulat Rechsteiner (ps, BS) l'invitant à examiner comment la Suisse pourrait introduire une taxe énergétique et contribuer à l'encouragement des énergies renouvelables tout en respectant les dispositions de l'OMC. Il lui a demandé en outre d'examiner la prise en compte des effets externes de la production et de la consommation d'énergie, de déterminer comment les règles de certification pourraient contribuer en Suisse et ailleurs à promouvoir les énergies renouvelables et à encourager le commerce international.

En janvier, le Conseil fédéral, dans une lettre adressée à la Ceate du Conseil des Etats, s’est prononcé sur le projet de taxation énergétique de cette dernière. La Ceate avait proposé en 1998 d’agir en deux étapes: premièrement, une taxe incitative de 0.2 centime par kilowattheure (disposition constitutionnelle transitoire) sur les énergies non renouvelables serait introduite; dans un second temps ce prélèvement se transformerait en taxe financière (norme constitutionnelle fondamentale) dont les recettes serviraient prioritairement à réduire les charges salariales. L’exécutif s’est engagé pour l’introduction rapide d’une telle taxe incitative sur l’énergie comme solution transitoire vers le nouveau régime des finances fédérales et pour faire pièce aux deux initiatives populaires pendantes («énergie-environnement» et «solaire»). Il a soutenu une taxe incitative limitée dans le temps, d’un montant se situant entre 0.2 et 0.3 ct/kWh. Il a toutefois laissé ouverte la question de l’affectation du produit de la taxe, mais n’a pas exclu une indemnisation des investissements non-amortissables (INA) des centrales hydrauliques.

En février, la Ceate du Conseil des Etats a publié son projet d’arrêté fédéral relatif à une taxe d’encouragement en matière énergétique (ATE) sous la forme d’une initiative parlementaire, ainsi qu’un rapport. Il s’agit du texte d’application d’une nouvelle disposition transitoire de la Constitution fédérale, contre-projet à l’initiative «solaire». L’ATE remplace l’arrêté sur une taxe énergétique voté par le Conseil national en 1998. La Ceate a publié ainsi son projet avant l’entrée en vigueur de la disposition constitutionnelle transitoire sur laquelle l’ATE se fonde et également avant son adoption au parlement. Cette procédure spéciale a été décidée pour des motifs de rapidité, le Conseil national ayant déjà adopté son arrêté en 1998. La Ceate a souhaité que l’ATE et le projet de disposition constitutionnelle fassent l’objet d’un traitement conjoint par les Chambres. L’ATE propose de prélever une taxe incitative d’un montant de 0.2 ct/kWh sur les agents énergétiques non renouvelables. L’importation et la production sur territoire suisse de carburants et de combustibles fossiles et d’électricité seront soumis à la taxe qui pourra être restituée dans certaines cas, notamment lorsque le courant aura été produit par des énergies renouvelables ou pour des entreprises tributaires de grandes quantités d’énergie. Le produit de la taxe permettra des investissements initiaux pour encourager les énergies renouvelables, des travaux d’assainissement énergétique ou d’amélioration de rendement énergétique, ainsi que le maintien et la rénovation des centrales hydrauliques suisses. L’arrêté sera valable jusqu’à l’entrée en vigueur de la disposition constitutionnelle relative à la taxe, mais au plus tard pendant 15 ans.

Le Conseil fédéral a ensuite donné son avis officiel sur l’ensemble du projet énergétique de la Ceate. Concernant la disposition constitutionnelle, le gouvernement souhaiterait pouvoir allouer une partie des recettes au financement des assurances sociales, au lieu de réduire uniquement les charges salariales. L’exécutif s’est déclaré favorable à l’initiative parlementaire de la Ceate (ATE) (Iv.pa. 99.401), mais il s’est montré réticent à une indemnisation générale des INA. Une indemnisation dans des cas spécifiques aurait sa préférence, permettant une aide transitoire ponctuelle à l’énergie hydraulique, condition politique à l’ouverture du marché de l’électricité.

A la session de printemps, le Conseil des Etats a traité le projet de taxe sur l’énergie (ATE) et développé les deux articles constitutionnels faisant office respectivement de contre-projets directs aux initiatives «énergie et environnement» et «solaire». Le premier consiste en un article constitutionnel fondamental en vue d’une réforme fiscale écologique, le second en une disposition constitutionnelle transitoire pour une taxe d’incitation de 0.2 ct/kWh.

Premier volet du débat, le contre-projet direct à l’initiative «énergie et environnement» prévoit l’introduction d’une norme fondamentale dans la Constitution permettant de prélever une taxe particulière sur les agents énergétiques non renouvelables. Le produit de la taxe devra décharger les milieux économiques d’une partie des charges salariales annexes obligatoires. La taxe sera fixée en tenant compte de l’effet des différents agents énergétiques sur l’environnement et le climat, ainsi que d’autres taxes déjà imposées à ces agents. Des exceptions sont prévues pour des modes de production nécessitant une grande consommation d’énergie non renouvelable. La taxe devra tenir compte de la capacité concurrentielle de l’économie et sera introduite par étapes. Dans le vote sur l’ensemble, cette nouvelle disposition a été approuvée à l’unanimité. Le Conseil des Etats a recommandé de rejeter l’initiative populaire et d’approuver le contre-projet qui permettrait, dès 2004, de prélever entre CHF 2.5 et 3 milliards par année afin de diminuer les coûts du travail.

Second volet du débat, le contre-projet direct à l’initiative «solaire» se présente sous la forme d’une disposition constitutionnelle transitoire prévoyant l’introduction d’une taxe d’encouragement aux énergies renouvelables. Deux propositions UDC et radicale, demandant de supprimer la nouvelle disposition, ont été rejetées par 24 voix contre 11. La question du montant de la taxe fut au centre des débats. Au sein même des partis, les représentants ne sont pas parvenus à parler d’une voix unique. A l‘UDC, on oscillait entre un rejet et 0.2 ct/kWh; au PRD, entre le rejet, 0.2 et 0.6 ct/kWh; au PDC, entre 0.4 et 0.6 ct/kWh; et au PS entre 0.4 et 0.6 ct/kWh. La majorité de la commission proposa une taxe de 0.2 ct/kWh sur les énergies non renouvelables. Une minorité, essentiellement PDC, souhaita la porter à 0.4 ct/kWh. Les députés Maissen (pdc, GR), puis Bloetzer (pdc, VS) demandèrent 0.6 ct/kWh, craignant qu’avec un niveau trop bas, l’effet d’encouragement soit nul. Les partisans d’une taxe élevée, dont les représentants des cantons de montagne, ont insisté sur la nécessité de soutenir les centrales hydrauliques en vue de l’ouverture prochaine du marché de l’électricité. Ils ont également réclamé une prise en charge des INA. Toutefois, les sénateurs ont préféré une taxe de 0.2 ct/kWh (contre 0.4 ct/kWh), par 25 voix contre 14.
Avec une telle taxe, les revenus ont été estimés à CHF 300 millions en moyenne par année. Elle sera affectée à l’encouragement des énergies renouvelables (solaire, bois, biomasse), au soutien d’une utilisation rationnelle de l’énergie, ainsi qu’au maintien et au renouvellement des centrales hydrauliques indigènes. Au moins un quart du produit ira à chacune des affectations. La taxe d’encouragement sera remplacée par la redevance particulière (norme constitutionnelle), pour autant que le peuple et les cantons l’acceptent. La validité de la taxe a été limitée à fin 2010, avec une prolongation possible de cinq ans minimum, au moyen d’un arrêté fédéral soumis au référendum. Finalement, le délai fixé pour l’examen des initiatives «énergie et environnement» et «solaire» a été prorogé d’une année, soit jusqu’au 20 mars 2000. Au vote sur l’ensemble, les sénateurs ont accepté le contre-projet à l’unanimité.

Après avoir approuvé les dispositions constitutionnelles transitoires, la petite Chambre s’est prononcée sur la législation d’exécution s’y rapportant, soit sur l’ATE. L’entrée en matière a été décidée sans opposition. La question de l’amortissement des INA a été renvoyée dans le cadre de la loi sur l’ouverture du marché de l’électricité. Les sénateurs se sont conformés en tous points au projet de leur commission. Au vote sur l’ensemble, le projet a été approuvé par 31 voix contre 1. La Chambre haute n’a pas traité l’ancien arrêté concernant une taxe écologique sur l’énergie (loi sur l’énergie) du Conseil national, ayant proposé et voté son propre projet. Au cours de la même session, le Conseil national a à son tour accepté de proroger d’une année le délai fixé pour l’examen des initiatives populaires «énergie et environnement» et «solaire».

Lors de la session d’été, le Conseil national s’est penché sur le paquet énergétique conçu par le Conseil des Etats. Un débat fleuve a précédé l’entrée en matière sur les deux contre-projets directs aux initiatives populaires. Le National s’est finalement rallié à la stratégie en deux étapes mise au point par le Conseil des Etats (taxe d’incitation d’abord, impôt écologique ensuite).
Dans l’examen de détail concernant la norme fondamentale constitutionnelle, les députés ont accepté que le produit de la taxe soit utilisé pour alléger les primes d’assurances sociales obligatoires, par 83 voix contre 64. L’objectif était de réduire les primes de l’assurance-maladie et ainsi de procéder à une redistribution à chaque citoyen, ce que ne permettait pas la version des Etats. Le taux de la taxe sera fixé en fonction de l’efficience énergétique et des autres taxes qui grèvent déjà ces agents énergétiques (les Etats souhaitaient que le taux dépende des effets des agents énergétiques sur l’environnement et le climat). Les représentants du peuple ont fixé, par 95 voix contre 75, un taux maximal de perception de la taxe à 2.0 ct/kWh, malgré une levée de boucliers des socialistes et des Verts qui estimaient qu’une telle limitation allait à l’encontre d’une réelle réforme fiscale écologique. Le PRD et le PDC ont soutenu ce nouvel amendement. Moritz Leuenberger jugea que la limitation contredisait l’effet incitatif de la taxe. Une minorité (UDC et radicale) souhaitait le rejet de l’initiative sans proposer de contre-projet; une autre minorité (PS et Verts) demanda l’approbation de l’initiative populaire. Au vote sur l’ensemble, le contre-projet a finalement été approuvé par 108 voix contre 61.
Concernant les dispositions constitutionnelles transitoires, le cœur du débat fut à nouveau constitué par la hauteur de la taxe. Les conseillers nationaux ont suivi la majorité de la commission en fixant la taxe à 0.6 ct/kWh contre l’avis de minorités préconisant un niveau moins élevé. Les députés ont préféré 0.6 ct/kWh à 0.4 ct/kWh, par 80 voix (majorité socialiste, verte, quelques radicaux et démocrates-chrétiens) contre 44 (majorité démocrate-chrétienne, puis UDC) et 43 abstentions (majorité radicale, puis UDC). Avec 0.6 ct/kWh, la taxe rapportera en moyenne annuelle CHF 900 millions. Des aides financières pour encourager l’utilisation des agents renouvelables et l’utilisation rationnelle de l’énergie pourront être versées à l’étranger. En outre, la durée de validité de la taxe sera limitée à 20 ans. Les députés ont également biffé un article stipulant que l’exécutif pouvait abroger la taxe de soutien avant terme ou la réduire si la situation sur le marché de l’énergie rendait les mesures prévues superflues. Le rejet de l’initiative populaire et l’approbation du contre-projet ont été recommandés par 91 voix contre 64.
Les députés se sont ensuite penchés sur le texte d’application des dispositions constitutionnelles transitoires (ATE). Ils ont accepté, par 94 voix contre 61, l’entrée en matière contre l’avis d’une minorité de la commission (UDC-PRD). Concernant l’affectation du produit de la taxe, l’énergie éolienne a été introduite dans les énergies renouvelables à encourager, alors que l’énergie à la chaleur ambiante a été supprimée. La Ceate a souhaité, dans certains cas exceptionnels désignés par l’exécutif, que des prêts puissent être accordés à des centrales hydrauliques suisses ne pouvant pas temporairement amortir leurs INA, en raison de l’ouverture du marché de l’électricité. La Confédération n’accordera une aide financière qu’à partir d’un montant des coûts imputables de 5000 francs (1000 francs pour la version des Etats). Les bénéficiaires de prêts devront fournir des garanties. La Confédération et les cantons adopteront conjointement un programme d’encouragement. En cas de résultat excédentaire, les bénéficiaires d’aides financières ou de prêts pourront être sollicités pour une contribution non remboursable au fonds. Aussi, les prêts et emprunts pour des centrales hydrauliques devront être remboursés au fonds dès que leur situation financière le permettra. La Confédération pourra financer des organisations privées garantes de projets de financement de tiers sous forme de capital initial ou de cautionnements. En outre, elle pourra verser aux cantons des contributions globales annuelles pour soutenir des mesures directes ou indirectes prévues par le programme d’encouragement. Le présent arrêté sera valable au plus tard pendant 20 ans. Le National a ensuite renoncé à son ancien arrêté concernant une taxe écologique sur l’énergie en raison du nouveau projet proposé par la petite Chambre.

Le projet est retourné au Conseil des Etats lors de la session d’automne. Au sujet de la norme fondamentale, les sénateurs ont maintenu une ultime divergence: le produit de la taxe sera destiné uniquement à décharger l’économie d’une partie des charges salariales annexes obligatoires.
Concernant les dispositions constitutionnelles transitoires, les sénateurs ont suivi la minorité de la Ceate en maintenant la taxe à 0.2 centime par kWh, par 22 voix contre 16. La majorité de la commission proposait 0.4 ct/kWh. Ils ont en outre maintenu la durée de validité de la taxe à fin 2010, retardable de cinq ans. Une troisième divergence a été introduite: l’exécutif pourra prévoir, pour les entreprises grandes consommatrices d’énergie, d’abroger la taxe avant terme ou de la réduire si la situation sur le marché de l’énergie rend superflues les mesures prévues pour encourager l’utilisation des agents renouvelables et l’utilisation rationnelle de l’énergie. Cette proposition Hess (prd, OW) a été acceptée par 20 voix contre 17.
Dans l’ATE, la Chambre des cantons a procédé à quelques modifications de détail. Puis, les sénateurs ont supprimé l’énergie éolienne des énergies renouvelables à encourager, et ils ont réintroduit l’énergie à chaleur ambiante. Par 19 voix contre 18, la petite Chambre s’est ralliée au National concernant la possibilité d’accorder des prêts aux propriétaires de centrales hydrauliques temporairement incapables de procéder aux amortissements requis. Ils ont également ramené à CHF 3000 le montant minimum des coûts imputables d’un projet pour que la Confédération puisse accorder une aide financière. Ils ont supprimé la disposition stipulant qu’en cas de résultat positif, les bénéficiaires d’aides financières pourront être sollicités pour une contribution non remboursable au fonds. En outre, les contributions globales que la Confédération peut verser aux cantons seront calculées selon l’efficacité des mesures. Les aides financières versées à l’étranger ne seront pas limitées à 60 % des coûts imputables. L’arrêté sera limité au plus tard à 15 ans.

A la session d’automne, le Conseil national s’est à nouveau prononcé sur le paquet énergétique. Dans la norme constitutionnelle fondamentale, il a accepté d’affecter la taxe aux charges salariales annexes obligatoires. Mais il a souhaité une autre forme de restitution pour les personnes ne disposant d’aucun salaire. Concernant les dispositions constitutionnelles transitoires, le National a maintenu la taxe à 0.6 ct/kWh, contre la majorité de la Ceate qui proposait 0.4 ct/kWh, par 85 voix contre 45 et 51 abstentions. La durée de validité de l’arrêté a été maintenue à 20 ans. En outre, les députés se sont ralliés à une proposition initiale des Etats: l’exécutif pourra abroger la taxe de soutien avant terme ou la réduire si la situation sur le marché de l’énergie rendait les mesures prévues superflues. Concernant l’ATE, l’exécutif pourra prévoir des exceptions en faveur des entreprises grosses consommatrices d’énergie qui n’auraient pas droit à la restitution de la taxe pour des motifs de production de biens utilisant des méthodes tributaires de grandes quantités d’énergie. La possibilité de solliciter les entreprises bénéficiaires pour verser une contribution non remboursable au fonds spécial a été maintenue. Enfin, la validité maximum de l’arrêté est restée à 20 ans.

Par la suite, le Conseil des Etats n’a cédé ni sur l’utilisation du produit de la taxe, ni sur sa hauteur, soit 0,2 ct/kWh. Il n’a pas bougé non plus sur la limitation du prélèvement de la taxe incitative. L’ATE prévoit donc une taxe de 0.2 ct/kWh avec un délai maximum de 15 ans.

Lors du dernier round de la navette, le Conseil national a maintenu sa version concernant l’utilisation du produit de la taxe, par 98 voix contre 62 et selon la proposition de la majorité de la Ceate. Pour le second arrêté, les députés ont accepté de descendre à 0,4 ct/kWh, par 100 voix contre 66. La Chambre basse a proposé une durée de perception de 12 ans avec une possibilité de prolongement de 8 ans (20 ans au total). Dans l’ATE, on en reste donc à 0.4 ct/kWh avec une validité de 20 ans.

Les deux Chambres, ne trouvant pas de compromis, ont nécessité une conférence de conciliation. Celle-ci leur a proposé une taxe énergétique de 0.3 ct/kWh rapportant CHF 450 millions annuellement. Pour la durée de validité de la taxe, la conférence a proposé de se rallier à la version de la petite Chambre (15 ans maximum). Concernant la norme constitutionnelle, le produit de la taxe sera exclusivement utilisé pour alléger les charges salariales annexes. Le Conseil des Etats a accepté une taxe à 0.3 ct/kWh, par 23 voix contre 18; la grande Chambre par 110 voix contre 52. Les conseillers nationaux ont approuvé l’affectation du produit de la taxe, par 122 voix contre 34.

Dans les votes finaux, les Chambres ont adopté l’ensemble du projet. Au Conseil national, les groupes PS et PDC ont soutenu le projet d’ensemble à l’opposé des groupes UDC, PdL, d’une majorité du PRD et des Verts. Ces derniers ont estimé que leur projet de réforme écologique avait été tué dans l’œuf. Le contre-projet à l’initiative «énergie et environnement» a été approuvé par 124 voix contre 59 au National, et par 41 voix contre 3 au Conseil des Etats. Le contre-projet à l’initiative «solaire» a été accepté par 125 voix contre 63 au National, et par 30 voix contre 10 au Conseil des Etats. Finalement, l’ATE a recueilli 123 voix contre 67 à la Chambre basse, et 26 voix contre 19 à la Chambre haute.

Ici vous trouverez l'article sur la votation.

Votation du 24 septembre 2004: Initiative populaire «Pour l’introduction d’un centime solaire»; «Redevance pour l’encouragement des énergies renouvelables»; «Redevance incitative sur l’énergie en faveur de l’environnement»

Dossier: géothermie profonde

Devant la pléthore de combinaison de votes possibles pour les trois objets (8), chacune des parties a dû faire un effort dans son argumentaire afin de donner un mot d'ordre clair. Le PS, les Verts, le Parti chrétien-social ont prôné le triple oui. A ces derniers se sont associés l'Union syndicale suisse, l'UPS, la Fondation suisse de l'énergie (FSE), la Fondation suisse pour l'énergie solaire et Electricité sans atome. Dans le camp des oui se trouvaient aussi les adversaires habituels des écologistes, à savoir les cantons de montagne et les paysans. Les buts de cette alliance inhabituelle n'était pas les mêmes pour les écologistes ou les cantons de montagne. Ces derniers étaient surtout intéressés au contre-projet, car il leur permettait d’obtenir un soutien pour leur usines hydroélectriques, toutefois, pour des raisons tactiques, ils soutenaient aussi l’initiative solaire. La position officielle du Conseil fédéral et des Chambres face aux trois objets était de rejeter l'initiative solaire et d'accepter en corrélation son contre-projet, ainsi que le deuxième contre-projet. L'objectif était, d'une part de provoquer un changement de comportement dans la consommation d'énergie et donc de respecter les promesses de la Conférence de Kyoto pour la réduction des gaz polluants et, d'autre part, d'intégrer une composante écologique dans le système fiscal dont la réforme serait menée dans les années à venir. Le seul parti gouvernemental à suivre les recommandations du Conseil fédéral et du parlement a été le PDC. Le camp du triple non était composé du PRD, de l'UDC et du PL. A ces derniers s'ajoutaient les associations faîtières de l'économie (Economiessuisse et USAM), les organisations proches de l'automobile (ACS et TCS), l'industrie des machines, l'association des entreprises électriques de Suisse, le Forum suisse de l'énergie et la branche de l'énergie atomique. Les arguments des opposants aux taxes énergétiques étaient que celles-ci seraient un frein au développement économique et que la législation sur le CO2 était suffisante pour assurer le développement des énergies renouvelables et la protection de l'environnement.

Compte tenu de ce retrait, le peuple était appelé à voter le 24 septembre sur trois taxes énergétiques. La première, l’initiative solaire, proposait dans un premier temps une taxe d'un centime, qui serait progressivement hissé à un maxima de 0,5ct par kWh sur les énergies non renouvelables. Sa durée de vie serait de 25 ans, mais elle ne serait pleinement prélevée qu’à partir de la cinquième année. Le produit récolté – estimé à 750 millions – serait destiné pour moitié à la promotion de l’énergie solaire et, pour l’autre moitié, à l’utilisation rationnelle et durable de l’énergie (isolation des bâtiments, pompes à chaleur...). La seconde taxe, le contre projet du parlement à l’initiative solaire (Article constitutionnel sur une redevance pour l’encouragement des énergies renouvelables / redevance promotionnelle), visait à taxer de 0,3ct par kWh les énergies non renouvelables. La perception durerait de 10 à 15 ans au maximum. Le produit – estimé à 450 millions – irait pour un premier quart à la promotion du solaire et autres énergies propres (géothermie, bois, biomasse), pour un second quart à l’encouragement des économies d’énergies, pour un troisième quart affecté à l’entretien et au renouvellement des centrales hydrauliques et pour un dernier quart en fonction des besoins respectifs. La troisième taxe, l’article constitutionnel sur une redevance incitative sur l’énergie en faveur de l’environnement (contre-projet à l’initiative ‘énergie et environnement’) voulait intervenir au plus tôt en 2004 avec le nouveau régime financier de la Confédération et augmenter progressivement jusqu’au taux maximum de 2ct par kWh. Pour le Conseil fédéral, cette ‘’taxe particulière’’ viendrait ultérieurement en remplacement d’une des deux taxes précédemment citées et ouvrirait la voie à une ‘’fiscalité écologique’’. Elle serait prélevée sur les énergies non renouvelables comme le charbon, le pétrole, le gaz naturel ou l’uranium. Le produit – pouvant avoisiner 3 milliards – servirait à réduire les charges salariales annexes obligatoires (AVS, etc.). En plus d’approuver ou de rejeter ces taxes, une question subsidiaire demandait au souverain de choisir entre l’initiative solaire et le contre-projet. Il est à constater que la possibilité de donner un double oui constituait une première dans les votations populaires suisses.

La portée de la votation sur les taxes énergétiques a pris une dimension plus large lorsque le Conseil national a concrètement décidé de lier la loi sur la libéralisation du marché de l’électricité à la taxe sur l’énergie dans le but de régler notamment la question des investissements non amortissables. En désaccord sur ce lien, le Conseil des Etats a décidé d’attendre le résultat de la votation populaire de septembre.


Votation du 24 septembre 2004:

Initiative populaire ‘Pour l’introduction d’un centime solaire’ (initiative solaire)

Participation : 44,7%
Oui: 636 848 (31,9%)
Non: 1 364 751 (68,1%) / 20 6/2 cantons

Mots d’ordre :
– Oui: PS, Verts, PEP, PdT, DS, CS; USS, CSCS, USP, WWF, Pro Natura
– Non: PDC (2*), PRD, UDC, PL, PdL, Lega; Economiesuisse, USAM, TCS, Association pour l'énergie nucléaire
* Recommandations différentes des partis cantonaux


Redevance pour l’encouragement des énergies renouvelables (Contre-projet à l’initiative solaire)

Participation : 44,7%
Oui: 922 481 (46,6%) / 4 ½ cantons
Non: 1 055 977 (53,4%) / 16 5/2 cantons

Mots d’ordre :
– Oui: PS, PDC (9*),Verts, PEP, PdT, DS, CS; USS, CSCS, USP, WWF, Pro Natura
– Non: PRD (1*), UDC (3*), PL, PdL, Lega; Economiesuisse, USAM, TCS, Association pour l'énergie nucléaire
* Recommandations différentes des partis cantonaux


Redevance incitative sur l’énergie en faveur de l’environnement (contre-projet à l’initiative retirée ‘Energie et environnement’)

Participation : 44,7%
Oui: 898 050 (44,5%) / 2 ½ cantons
Non: 1 119 697 (55,5%) / 18 5/2 cantons

Mots d’ordre :
– Oui: PS, PDC (10*), Verts, PEP, PdT (1*), CS; USS, CSCS, USP, WWF, Pro Natura.
– Non: PRD, UDC (2*), PL, PdL, Lega, DS; Economiesuisse, USAM, TCS, Association pour l'énergie nucléaire
* Recommandations différentes des partis cantonaux


Le résultat de cette importante votation pour la politique énergétique et environnementale de la Suisse fut que le peuple a, non seulement, refusé de taxer les énergies polluantes en faveur de l'énergie renouvelable, mais a aussi opposé un refus clair à toute réforme écologique de la fiscalité. Les trois objets ont été rejetés par le peuple: 68.1% de non pour l'initiative solaire, 53.4% de non pour la redevance pour l'encouragement des énergies renouvelables, 55.5% de non pour la redevance incitative sur l'énergie en faveur de l'environnement. Toutefois si l'initiative solaire n'a recueillie aucune majorité cantonale, les deux contre-projets fédéraux l'ont obtenue dans certains cantons. La redevance promotionnelle a gagné dans les cantons de Zurich, Berne, Genève, Grisons et de Bâle Ville. Quant à la redevance incitative, les cantons de Zurich, Grisons et Bâle Ville ont donné leur soutien à cette réforme écologique de la fiscalité.

L'Analyse Vox de la votation menée sur une base d'enquêtes représentatives a montré que, bien que le paquet énergétique recelait une certaine complexité pouvant favoriser un vote en bloc, les votants ont su panacher leurs choix. Ceux qui ont voté en bloc l'ont fait en connaissance de cause. L'ampleur du refus des trois objets énergétiques augmente en fonction de l'âge des votant(e)s (soutien des jeunes), du lieu de résidence ('non' plus répandu en campagne qu'en ville) et surtout en fonction du niveau de formation (les bas niveaux de formation sont fortement opposés). Toutefois, selon l'analyse, l'explication du vote doit être recherchée principalement dans les indicateurs classiques de la position idéologique (sympathie partisane et position sur l'axe gauche-droite) ou en d'autres termes dans l'impact des valeurs, qui révèle un clivage entre défenseurs de l'écologie et défenseurs de l'économie, et entre partisans d'un interventionnisme et partisans du libéralisme économique.