De cette attitude négative, prétendent certains, ce n'est pas le peuple le responsable, mais le gouvernement qui a longtemps considéré la politique étrangère comme son affaire exclusive, en évitant de se référer au Parlement et aux citoyens. Si les autorités ont maintenant changé de point de vue, il faudra davantage de temps pour modifier les habitudes de la masse. Le Conseil fédéral s'en est rendu compte à propos de l'adhésion de la Suisse à l'Organisation des Nations Unies. Dans son rapport (MCF 10277), publié le 30 juin, il propose à l'Assemblée fédérale de ne pas solliciter actuellement l'entrée de la Suisse au palais de Manhattan, car, dit-il, «le peuple suisse est resté, dans sa majorité, plutôt sceptique ou indifférent envers les Nations Unies». Une enquête d'opinion publique, menée par un organisme privé, a effectivement montré que 33 pourcent seulement de la population était favorable à l'adhésion de la Suisse, que 47 pourcent s'y opposait et que 20 pourcent s'en désintéressait. D'autre part, une pétition de l'Union européenne de Suisse, lancée en 1968 et close en 1969, en faveur de cette adhésion, n'a obtenu que 15'000 signatures, alors que les initiateurs prétendaient en récolter au moins 100'000. Elle jouissait de l'appui de l'Alliance des Indépendants, tandis que le Parti des paysans, artisans et bourgeois la désapprouvait. De leur côté, l'Association suisse pour les Nations Unies, la Société suisse de politique étrangère et l'Union européenne prièrent le Conseil national d'accepter le rapport gouvernemental. Ce qu'il fit à l'unanimité à la session d'automne, tout comme le Conseil des Etats à celle d'hiver. C'est que le document, tout en rejetant une adhésion immédiate à l'ONU et en proposant un rapprochement progressif comme prélude à une entrée prochaine au Palais de verre, a frappé par la qualité des nuances et le sens du compromis. «Chant du cygne», «Testament politique», il a marqué le dernier acte important de notre ministre des Affaires étrangères, W. Spühler, démissionnaire. Le socialiste zurichois avait habilement préparé sa sortie par une «valse hésitation» fort bien orchestrée. Les voeux du chef du Département politique se concrétisèrent du reste tout au long de l'année. Genève vit s'accroître son rôle de centre international par un prêt de CHF 61 millions en vue de l'agrandissement du Palais des Nations, et par deux crédits, l'un de 30 millions (MCF 10272) et l'autre de CHF 1'250'000, ce dernier destiné au soutien financier de divers instituts, fonds et programmes spéciaux des Nations Unies dans le domaine économique et social (MCF 10266). Par ailleurs, la Suisse a poursuivi son soutien à l'action de l'ONU à Chypre par une contribution de CHF 900'000.

KONSO, Institut des consommateurs et d'analyses sociales SA, Bâle. Enquête patronnée par la Banque Populaire Suisse à l'occasion de son centenaire et exécutée par Erich Gysling. Echantillon: 2'500 personnes. Les résultats ont indiqué que la jeunesse, la Suisse romande et les grandes et moyennes agglomérations (plus de 10'000 habitants) étaient respectivement plus favorables que les générations plus âgées, la Suisse alémanique et les petites agglomérations.

Une illustration de la volonté du Conseil fédéral de se rapprocher davantage de la communauté internationale nous est donnée par la nouvelle procédure de ratification qu'il a proposée dans le domaine des conventions internationales du travail. Dans un rapport (MCF 10256) du 16 avril à l'Assemblée fédérale, il a déclaré en effet qu'il avait adopté júsqu'à présent une attitude plus réservée que ne l'exigeait la situation juridique et que, désormais, il pensait «aller un peu plus loin» en soumettant à la ratification tout accord coincidant, dans les grandes lignes, avec la législation en vigueur en Suisse, dans l'idée que les lacunes de celle-ci seraient comblées «au plus vite» dans le sens des dispositions contenues dans le dit accord.
La démarche du gouvernement, malgré les critiques des milieux d'employeurs et les objections présentées par quelques radicaux, a été approuvée sans opposition par les Chambres.