Infrastructure, aménagement, environnement
Energie
Le Conseil national a accepté l’ouverture du marché de l’électricité en deux étapes et la création d’une société nationale responsable de la gestion du réseau de transport. – Un rapport de la Nagra a conclu que la région du Weinland zurichois remplit toutes les conditions nécessaires au stockage des déchets hautement radioactifs. – Les deux premières stations-service de Suisse proposant du carburant au bioéthanol ont été inaugurées dans le canton du Jura.
Politique énergétique
Une
nouvelle ligne à haute tension à 380 kilovolts a été inaugurée entre Robbia (GR) et San Firano en Italie. Longue de 44 kilomètres, elle augmente de près de 1300 mégawatts les capacités d’échange et améliore la sécurité d’approvisionnement entre les deux pays. Le coût de la ligne en Suisse s’est élevé à 160 millions de francs
[1].
La Commission de la concurrence (Comco) a accepté la
création de la société pour l’exploitation du réseau électrique
Swissgrid. Son examen a montré que ce projet créé une position dominante sur le marché du transport d’électricité dans les régions du nord-est suisse, de Zurich-Walensee-Coire/Ems et du Gothard. La Comco a néanmoins autorisé cette concentration de distributeurs, car la nouvelle entreprise facilite le transit d’électricité sur le niveau haute tension. Afin de garantir l’amélioration des conditions de concurrence, la Comco a imposé cinq charges: 1) Swissgrid a l’obligation de garantir un accès libre et non discriminatoire des tiers à son réseau. 2) Swissgrid a l’obligation de publier ses tarifs et ses conditions d’utilisation de son réseau. 3) Swissgrid et les sociétés y participant doivent établir une comptabilité analytique pour leurs réseaux à haute tension. 4) Swissgrid n’est autorisée ni à produire commercialement, vendre ou négocier de l’électricité, ni à détenir des participations dans de telles entreprises. 5) Les membres du conseil d’administration et de la direction de Swissgrid ne doivent pas être membres d’un organe d’une autre entreprise électrique
[2]. Les sept grossistes en électricité, organisés sous le nom de Swisselectric et à la base de Swissgrid, ont pris connaissance des remarques de la Comco. Un point de litige demeurait et il portait sur l’impossibilité pour les dirigeants des entreprises grossistes en électricité de siéger au conseil d’administration de Swissgrid. Swisslectric a également demandé un délai de 18 à 24 mois pour assurer l’obligation d’accès libre et non discriminatoire au réseau d’une longueur de 6500 kilomètres. Le dossier a été transmis à une commission de recours
[3].
Le Conseil national a approuvé un postulat Wäfler (udf, ZH) demandant au Conseil fédéral d’
augmenter la production nationale d’énergie électrique pour améliorer la sécurité de l’approvisionnement à long terme. Le texte charge le gouvernement de créer des conditions-cadre pour permettre la réalisation d’investissements à long terme dans l’énergie hydraulique du pays et dans les installations de production d’énergie utilisant la biomasse, les déchets et d’autres sources comme le vent ou le soleil
[4].
Afin de réconcilier les partisans de la libéralisation du marché de l’électricité et les milieux favorables aux énergies renouvelables, la
Commission de l’énergie du Conseil national (CN-N) a modifié deux points du projet du Conseil fédéral concernant la loi sur l’approvisionnement en électricité. La CN-N s’est écartée de la position du gouvernement en se prononçant pour une
libéralisation immédiate
et totale du marché de l’électricité. Des garanties seraient aménagées pour la protection des petits consommateurs. Alors que le message du Conseil fédéral ne prévoyait pas de
mesures d’incitation pour les énergies renouvelables, la commission a voulu les promouvoir et a proposé que les énergies renouvelables injectées dans le réseau soient achetées au prix coûtant. Pour cela, le prix de l’électricité serait majoré d’un montant pouvant aller jusqu’à 0,3 centime par kilowattheure. La somme récoltée (165 millions de francs) permettrait de payer le courant injecté dans le réseau au prix coûtant. L’objectif de cette mesure est d’augmenter de 5400 gigawattheures la production d’électricité « verte » d’ici à 2030. La solution adoptée par la CN-N a scindé le projet gouvernemental en trois arrêtés distincts: la loi sur les installations électriques, la loi sur l’approvisionnement en électricité et la loi sur l’énergie. Une minorité de la commission s’est toutefois exprimée en faveur d’une libéralisation du marché électrique en deux étapes
[5].
Le
Conseil national a refusé, par 127 voix à 33, le renvoi du projet de la loi sur l’approvisionnement en électricité au Conseil fédéral demandé par Menétrey (pe, VD). Il a accepté par 107 voix contre 73 la création d’une
société nationale responsable de la gestion du réseau de transport d’électricité. Celle-ci sera une société anonyme de droit privé indépendante. Les conseillers nationaux ont tenu à préciser que la majorité des membres du conseil d’administration et de la direction ne pourront être simultanément liés financièrement à une entreprise active dans les secteurs de la production ou du commerce d’électricité. La surveillance sera exercée par l’Elcom, une commission de l’électricité fonctionnant selon des règles fixées par le Conseil fédéral. En ce qui concerne le rythme de la libéralisation, le Conseil national a décidé par 94 voix contre 92 de suivre la proposition de la minorité de la commission emmenée par Chevrier (pdc, VS) d’
ouvrir le marché en deux étapes. Cette décision est le fruit de l’alliance de la gauche avec des représentants bourgeois des régions périphériques et des cantons romands. Le modèle retenu correspond au compromis qui avait été élaboré par la commission d’experts chargée de remettre l’ouvrage sur le métier après l’échec en votation populaire de la première tentative de libéralisation. Il prévoit une ouverture immédiate du marché dès 2007, au profit des grandes entreprises consommant plus de 100 MWh par année. Cette quantité consommée correspond à une facture annuelle de 20 000 francs et plus. L’ouverture interviendra cinq ans plus tard pour les PME et les ménages privés. Le Conseil national n’a en revanche pas suivi la minorité de sa commission sur la clause de sauvegarde. Par 122 voix contre 61, il a refusé d’introduire dans les dispositions finales de la loi un référendum facultatif entre la première et la deuxième étape, après cinq ans d’expérience. Les conseillers nationaux se sont ralliés à la proposition de leur commission et ont adopté, par 124 voix contre 24 et 25 abstentions, un compromis énergétique qui permet d’accroître la production d’électricité « verte » en
rétribuant à prix coûtant les énergies renouvelables qui ne sont pas encore rentables (cf. supra). Lors du vote sur l’ensemble, la loi fédérale sur les installations électriques à faible et fort courant a été approuvée par 136 voix contre 35; la loi sur l’énergie a été approuvée par 124 voix contre 24 et la loi sur l’approvisionnement par 83 voix contre 55 et 27 abstentions
[6].
Se saisissant du dossier, la commission de l’énergie du Conseil des Etats (CE-E) a émis le souhait que la société gérant le réseau de transport d’électricité en Suisse reste en mains suisses. Pour ce faire, elle a proposé de reformuler les dispositions adoptées par le Conseil national, qui prévoient qu’une entité nationale gérera à l’avenir le transport de courant sur de grandes distances en Suisse ainsi que le commerce transfrontalier. Pour la CE-E, les cantons et les communes doivent être actionnaires des entreprises dirigeant la société et doivent y détenir globalement la majorité en termes de capital et de voix
[7].
La consommation finale d’électricité en 2005 s’élevée à
57,3 milliards de kWh, en hausse de 2,1% par rapport à l’année précédente. Ce chiffre représente un nouveau record. Pendant le premier trimestre 2005, la consommation a été supérieure de 1,8% par rapport à la même période en 2004. Elle a enregistré une progression de 2,1 à 2,3% durant les autres trimestres. Selon l’OFEN, la forte consommation d’électricité est due à l’évolution conjoncturelle et à la croissance démographique. De plus, le nombre des degrés-jours de chauffage a connu une progression de 5,4% par rapport à 2004, les mois de février, d’avril et de décembre ayant été nettement plus froids. La production d’électricité des centrales suisses a reculé de 8,8%, passant à 57,9 milliards de kWh. Au premier trimestre 2005, la production indigène était supérieure de 3,2% à 2004, avant de chuter de 9,9 à 15,8% entre le deuxième et le quatrième trimestre 2005. Ayant connu des conditions d’exploitation inférieures à la moyenne, les centrales hydrauliques ont produit 6,7% d’électricité de moins qu’en 2004: -6,5% pour les centrales au fil de l’eau et -6,9% pour les centrales d’accumulation par pompage. En raison de l’arrêt de la centrale de Leibstadt entre avril et août (cf. infra), la production des centrales nucléaires a diminué de 13,4%, passant à 22 milliards de kWh. La disponibilité des cinq centrales a ainsi baissé pour s’établir à 78,3%. Globalement, les centrales hydroélectriques ont contribué à hauteur de 56,6% à la production d’électricité, les centrales nucléaires à raison de 38% tandis que l’apport des centrales thermiques conventionnelles et des autres installations a été de 5,4%. En 2005, la production nationale a excédé les besoins (consommation nationale) pendant seulement quatre mois. Avec des importations de 47,1 milliards de kWh et des exportations de 40,7 milliards de kWh,
l’excédent des importations a été de 6,4 milliards de kWh [8].
Energie nucléaire
La Suisse a adhéré au début du mois de janvier à l’
Association européenne des autorités de surveillance pour la protection des installations nucléaires (ENSRA) contre le sabotage. Fondé par huit pays, cet organisme vise à renforcer l’échange d’informations. Les pays signataires ont aussi comme objectif de développer une pratique européenne pour l’application de mesures de protection. Ils s’étaient réunis peu après les attentats du 11 septembre 2001 pour échanger des informations de manière informelle
[9].
La Suisse a adhéré à un
accord sur la recherche
visant à
développer des réacteurs nucléaires de quatrième génération. Dans le cadre de cet accord, la Suisse étudiera le comportement des matériaux à haute température. Les chercheurs se pencheront en particulier sur deux des modèles sélectionnés par le Generation IV international Forum (GIF). Il s’agit du réacteur rapide refroidi au gaz et du réacteur à très haute température. Ces deux modèles ont été choisis parce qu’ils permettent une synergie des recherches et qu’ils maximisent le recyclage des combustibles. Aux yeux du GIF, ils font partie des six technologies de fission nucléaire les plus prometteuses pour prendre la relève dans les centrales nucléaires à partir de 2030
[10].
La Suisse a débloqué 30 millions de francs pour soutenir le
projet de réacteur de fusion nucléaire ITER qui sera construit en France
[11].
La Confédération et le canton du Jura ont signé une
convention sur la gestion et la surveillance du laboratoire de recherche en stockage de déchets nucléaires du
Mont-Terri (JU). Cette dernière répartit plus clairement les tâches entre le canton et la Confédération, met en évidence les recherches d’envergure internationales menées au Laboratoire du Mont-Terri (LMT) et amène davantage de transparence
[12]. La Confédération coordonne les intérêts suisses, les activités sur le site et la sécurité des lieux. En service depuis 1996, le LMT accueille des équipes de recherches françaises, allemandes, belges, espagnoles, japonaises et suisses. Un accord séparé de la convention régit les relations entre la Confédération et les douze partenaires du projet Mont-Terri. Il comprend une série de vingt expériences financées par les partenaires. Les scientifiques concentrent leur recherche sur les propriétés des argiles à Opalinus. D’après eux, elle est la roche idéale pour entreposer des déchets nucléaires. La convention interdit également l’entreposage temporaire ou définitif de déchets sous le Mont-Terri
[13].
La Suisse et la France ont renforcé leur collaboration en matière de sécurité des installations nucléaires. Un membre suisse a fait son entrée au conseil d’administration de l’
Institut français de radioprotection et de sécurité nucléaire (IRSN)
[14].
Le Conseil fédéral a mis le projet de la loi sur la responsabilité civile en matière nucléaire en consultation: il doit faire passer la
couverture d’assurance pour les installations atomiques de 1 à 2,25 milliards de francs. Elle est répartie en trois tranches: 1,1 milliard pour les exploitants, 700 millions pour l’Etat siège de la centrale et le reste pour les Etats signataires des conventions. Le projet concerne également l’adoption des conventions nucléaires sur l’énergie. Ces textes instaurent les mêmes conditions d’indemnisation et les mêmes procédures juridiques dans les pays signataires en cas d’accident. Le projet n’a ravi personne en consultation. L’association des exploitants des centrales nucléaires Swissnuclear et le Forum nucléaire suisse saluent la volonté d’adopter les conventions internationales sur l’énergie nucléaire dans la loi, mais ils refusent la traduction faite de ces textes dans la loi. Ils ne veulent pas assumer seuls la hausse de leur couverture d’assurance à 2,25 milliards de francs. Le PRD est favorable à la ratification des conventions, tout en estimant que la hausse de la couverture est arbitraire. Le PDC, l’UDC et economiesuisse jugent la participation suisse aux conventions internationales importantes, mais la couverture d’assurance des exploitants de centrales doit être portée à 1,8 milliard de francs, soit la somme moyenne pratiquée dans les autres pays signataires. A l’opposé, pour le PS, les dédommagements prévus en cas d’accident nucléaire ne couvriraient pas les dommages réels. De ce fait, les socialistes ne voient aucune raison de ratifier les conventions. Ils exigent qu’une couverture d’assurance correspondant aux risques réels soit calculée par une instance neutre. Les Verts partagent la position du PS
[15].
L’entreprise BKW Energie AG a demandé au Conseil fédéral de lever la limitation d’exploitation de la
centrale nucléaire de Mühleberg pour la transformer en une autorisation d’utilisation illimitée. Le gouvernement a répondu que, selon la loi, l’OFEN est désormais responsable pour ce genre de requête
[16].
L’exploitation de la
centrale nucléaire de Leibstadt a été stoppée le 28 mars en raison d’une avarie. Sous l’effet de la chaleur, un élément servant à renforcer le champ magnétique dans le générateur s’est dilaté. Cette perturbation a provoqué l’arrêt automatique de la turbine. Le réacteur n’a pas été touché. Après l’installation de nouveaux éléments, la centrale a reçu fin août l’autorisation de remise en service par la Division principale de la sécurité des installations nucléaires (HSK). L’autorité de surveillance a toutefois exigé un meilleur respect des règles d’exploitation
[17].
Le chef du DETEC, Moritz Leuenberger, a créé un
comité consultatif chargé de suivre le choix des sites pour le dépôt des déchets nucléaires hautement radioactifs. Il doit aider à repérer les objections, à voir comment intégrer la population et renforcer son acceptation. Le comité est composé de cinq personnes regroupant des pro- et des antinucléaires
[18].
Commandée en 2004 par Moritz Leuenberger, l’OFEN a validé les
résultats de l’étude menée par la Société coopérative nationale pour l’entreposage des déchets hautement radioactifs (Nagra). La Nagra s’est penchée sur les roches cristallines et argileuses, ainsi que sur l’opaline argileuse. D’après les experts, ce troisième type de roche présente les meilleures caractéristiques de « barrière » pour accueillir les déchets hautement radioactifs. Elle est présente au pied du Jura argovien et soleurois, ainsi que dans le Weinland zurichois. Selon la Nagra, c’est dans cette dernière zone que l’opaline argileuse est située à la bonne profondeur, entourée de couches géologiques qui lui assurent une sécurité accrue. Par ailleurs, la roche est restée épargnée par les pressions tectoniques. Pour la Nagra, la région du
Weinland zurichois, à proximité du village de Benken, remplit mieux que tout autre endroit les
critères décisifs pour le stockage des déchets radioactifs. La Commission fédérale de la sécurité des installations nucléaires (CSA) a aussi donné un préavis favorable à l’étude de la Nagra, mais elle a relevé quelques inconnues. Les matériaux proposés pour les fûts de stockage ne seraient pas optimaux: ils pourraient dégager des gaz susceptibles d’attaquer la barrière d’opaline. L’OFEN a mis le dossier à l’enquête publique
[19].
Le Conseil des Etats a approuvé tacitement une
motion de Hans Hofmann (udc, ZH) demandant qu’une décision soit prise le plus rapidement possible dans le dossier de l’
élimination des déchets hautement radioactifs. Moritz Leuenberger a répété le calendrier prévu. Le gouvernement devrait se prononcer sur la faisabilité du stockage des déchets hautement radioactifs dans la deuxième moitié de l’année 2006. Le site serait ensuite sélectionné vers 2010, mais le conseiller fédéral n’exclut pas qu’il faudrait plus de temps afin d’effectuer notamment des explorations supplémentaires. Dans un tel cas, la décision serait repoussée à 2014
[20]. Lors d’une rencontre entre la Suisse et ses trois voisins germanophones, l’Autriche a exprimé le souhait d’être régulièrement informée sur le projet de dépôt de déchets nucléaires du Weinland zurichois
[21].
Les résultats de la
consultation sur le dépôt de déchets nucléaires dans le Weinland zurichois ont révélé des
avis controversés. Le PS, les Verts et les associations environnementales se sont déclarés opposés au projet. Le rapport de la Nagra ne les a pas convaincu, car ils estimaient que la sécurité d’un tel dépôt ne pourrait pas être assurée à long terme. L’association environnementale allemande du Baden-Württemberg a rejoint cette position et a demandé à ce que d’autres lieux, plus éloignés de la frontière, soient évalués. Les communes zurichoises ont également exigé que le Weinland ne soit pas d’office le premier choix. Les partis de droite, la branche nucléaire et les cantons situés autour de Zurich se sont déclarés satisfaits du projet. Swissnuclear a même enjoint les autorités à passer à une procédure de décision politique. Au total, l’OFEN a reçu 3800 prises de position durant la consultation. 825 d’entre elles provenaient de Suisse, 2770 d’Allemagne, 200 d’Autriche et 5 de France. L’OFEN a indiqué que 97,5% des prises de position émanaient de personnes privées. Prenant officiellement position, le canton de Zurich a refusé d’accepter « tel quel » un dépôt de déchets hautement radioactifs dans le Weinland zurichois: il a prié la Nagra d’évaluer le stockage dans d’autres sites argoviens et soleurois. Selon le Conseil d’Etat zurichois, la sélection ne doit pas uniquement reposer sur des critères techniques. Elle doit également s’opérer en fonction des infrastructures nationales qui pèsent sur une région. Le gouvernement zurichois faisait allusion à la densité de trafic et aux nuisances liées à l’aéroport que supportent déjà le canton
[22].
Energie hydro-électrique
Le Conseil des Etats et le Conseil national ont adhéré à l’arrêté fédéral portant approbation de la Convention avec l’Autriche au sujet de l'
utilisation de la force hydraulique de l'Inn et de ses affluents dans la région frontalière
[23].
Les Forces motrices de l’Oberhasli (FMO) ont déposé une demande de permis de construire pour
rehausser le niveau du barrage du lac du Grimsel (BE). La société électrique veut surélever les deux murs du barrage de 23 mètres. La capacité de retenue serait portée de 95 millions à 170 millions de mètres cube, soit 250 gigawattheures d’énergie accumulée. La production annuelle de courant électrique se trouverait majorée de 20 gWh. Ces travaux entraîneraient une modification du tracé de la route du col du Grimsel, à l’est du lac. Les coûts d’investissement du projet sont évalués à 210 millions de francs. Une dizaine d’organisations de défense de l’environnement, emmenées par Pro Natura et le WWF Suisse, ont déposé un recours contre ce projet de rehaussement de barrage. Elles ne sont pas d’accord de sacrifier une importante surface dans un paysage d’importance nationale pour « un gain de production discutable ». De plus, elles dénoncent également le « pompage-turbinage » à grande échelle qui produit un courant « sale »
[24].
Produits pétroliers et gaz
À Delémont et à Alle (JU) ont été inaugurées les deux premières stations-service de Suisse proposant du
carburant au bioéthanol [25]. La promotrice du projet est la Régie fédérale des alcools Alcosuisse. Grâce à la détaxe accordée par le Département des finances, le prix à la colonne du carburant au bioéthanol est identique à celui de l’essence 95 ordinaire. Le mélange vendu à la pompe dans le Jura est composé à 95% d’essence sans plomb et à 5% de bioéthanol. Les quatre millions de litres annuels de bioéthanol produits en Suisse sont obtenus à partir de cellulose de bois (sciure, copeaux, écorces). Dans le futur, il est prévu d’incorporer dans sa composition d’autres matières issues des surplus et déchets agricoles (déchets de céréales, mélasse de betterave, pommes de terre, petit lait, etc.). Pour assurer une distribution de bioéthanol à large échelle, Alcosuisse veut construire une usine de distillation et de production
[26].
Le Conseil fédéral a mis en consultation un
projet de promotion fiscale des biocarburants visant à réduire les émissions de CO2. Il s’agit de détaxer de 40 centimes par litre d’équivalent essence les carburant issus de matières premières renouvelables (colza, tournesol, betterave), et de réduire l’impôt sur le gaz naturel et le gaz liquide, utilisés comme carburants. La perte fiscale serait intégralement compensée par une hausse de la taxation de l’essence, de 1 à 2 centimes en 2007 et de 6 centimes en 2010. La majorité des milieux interrogés s’est prononcée en faveur de la promotion fiscale des biocarburants. La consultation a toutefois révélé de nombreuses divergences. Pour certains, les gaz naturel et liquide, produits fossiles et non renouvelables, ne doivent pas être favorisés comme autres carburants. D’autres se sont opposés à des mesures fiscales en faveur de produits qui entrent dans la composition du diesel. Le bilan écologique global a également posé problème, car l’énergie nécessaire à la production de biocarburants menace d’anéantir l’objectif final de réduction de CO2. D’autre part, la production à grande échelle d’éthanol (à partir de betterave ou de canne à sucre) risque monopoliser les sols et détruire les forêts. Le Département fédéral des finances a été chargé de prendre en compte ces points de vue et de préparer les modifications nécessaires de la loi sur l’imposition des huiles minérales
[27].
Afin d’alléger la facture pétrolière des Suisses, qui a fortement augmenté depuis le début de l’année 2005, l’
UDC a réclamé en septembre une baisse de 30 centimes de l’impôt sur les carburants, fixé à 73,12 centimes par litre d’essence. Le DFF a répondu qu’il n’existait aucun projet visant à le diminuer et qu’aucun n’était prévu. Les autres partis gouvernementaux s’opposaient également à une baisse des taxes sur l’essence
[28].
Energies alternatives
La Suisse et l’Italie ont trouvé une solution transitoire pour l’exportation d’électricité helvétique provenant d’énergies renouvelables. L’Italie a reconnu, de manière rétrospective jusqu’à la fin 2004, la
certification faite par Swissgrid (cf. supra) des quantités d’électricité issues d’énergies renouvelables produites et exportées
[29].
Les Forces motrices bernoises ont inauguré une installation photovoltaïque sur le toit du
stade de Suisse au Wankdorf à Berne avec une surface de 8000 m2. La production couvrira la consommation énergétique annuelle de 200 ménages
[30]. En juin, la plus grande centrale photovoltaïque de Suisse,
SIG Solar III, a été mise en service à
Genève. Située sur le site de l’usine hydroélectrique de Verbois, elle permettra d’approvisionner annuellement en électricité solaire l’équivalent de 250 à 300 ménages
[31].
La
plus grande éolienne de Suisse a été installée à la fin de novembre à la limite des communes valaisannes de
Collonges et Dorénaz. Elle mesure cent mètres de haut, dont 35 mètres de palmes, et est capable de produire 3,5 millions de kWh par an
[32].
Le Tribunal administratif neuchâtelois a donné raison aux opposants aux sept
éoliennes prévues au Crêt-Meuron (Tête de Ran) en jugeant l’impact sur le paysage trop important par rapport à l’intérêt énergétique. Il a estimé que l’offre en Suisse était suffisante et qu’il n’était dès lors pas de nécessaire de développer ces nouvelles installations de production. Le Canton de Neuchâtel, l’Office fédéral de l’énergie et le promoteur du projet ont chacun saisi le Tribunal fédéral contre cette décision. Pour eux, l’énergie produite à Tête de Ran, évaluée à 14,3 GWh par an (soit les besoins de 4000 à 5000 ménages) est loin d’être « négligeable ». De plus, la Constitution fédérale et la Constitution du Canton de Neuchâtel plaident en faveur des énergies renouvelables. Le Tribunal fédéral a jugé le recours de l’OFEN irrecevable. Ce dernier aurait eu ce droit si la décision du Tribunal administratif neuchâtelois avait été rendue en application de la loi sur l’énergie
[33].
Sélection bibliographique
Hirschberg, Stefan, Erneuerbare Energien und Nuklearanlagen, Bern 2005.
Jagmetti, Riccardo, Energierecht. Schweizerisches Bundesverwaltungsrecht Band VII, Basel 2005.
La vie économique, 2005, no 1/2, pp. 3-45 (thème du mois: « Le marché de l’électricité »).
Straub, Philip, Der Zugang zu den Elektrizitätsnetzen in Europa und der Schweiz, Basel 2005.
[2] Comco,
communiqué de presse, 17.3.05.
Cf.
APS 2004, p. 119 s.
[4]
BO CN, 2005, p. 1511.
[5] Presse du 6.9.05;
LT, 21.9.05. Au sujet du rythme et du type d’ouverture, cf.
APS 2004, p. 120 s.
[6]
BO CN, 2005, p. 1013 ss., 1041 ss. et 1076 ss.; presse du 21.9 et 22.9.05.
[8] OFEN,
communiqué de presse, 8.6.06.
[10]
Lib., 19.4.05. Pour plus d’informations sur le GIF cf.
APS 2002, p. 135.
[12] Les bâtiments du LMT appartiennent au canton du Jura, qui les mets à disposition de la Confédération. En retour, elle lui verse annuellement 60 000 francs à titre d’indemnité et participe à hauteur de 20 000 pour l’information au public. Le canton a aussi son mot à dire dans les travaux de recherche. Chaque année, une commission cantonale examine le programme scientifique et le soumet à l’approbation du Département de l’environnement et de l’équipement jurassien.
[15] Presse du 30.6.05;
LT, 24.9 et 2.11.05. Cf.
APS 2001, p. 119.
[16]
NZZ, 28.1.05;
BZ, 11.6.05.
[17] Presse du 7.4, 23.4 et 17.9.05;
24h, 27.4 et 2.9.05;
QJ, 22.6.05;
LT, 30.8.05;
NZZ, 3.9.05.
[19] Presse du 13.9.05. Cf.
APS 2004, p. 124 s.
[20]
BO CE, 2005, p. 822 s.; presse du 5.10.05.
[22]
TA, 8.12.05;
NZZ, 13.12.05;
LT, 14.12.05; presse du 23.12.05.
[23]
FF, 2005, p. 2203 s.;
BO CE, 2005, p. 393;
BO CN, 2005, p. 472. Cf.
APS 2004, p. 125.
[24] Les défenseurs de l’environnement reprochent aux FMO de pratiquer à grande échelle le pompage-turbinage avec le lac artificiel de l’Oberaar: environ huit fois par an le lac entier du Grimsel est pompé vers le lac de l’Oberaar et returbiné ensuite vers le bas. Ce système permet de produire plus d’électricité aux heures de pointe et de la vendre à un prix plus élevé. Or, pour les associations environnementales, le courant utilisé pour le pompage n’est pas propre car il provient essentiellement de centrales nucléaires et à charbon (
LT, 18.10.05;
QJ, 1.12.05). Concernant le déclassement de la zone protégée du Grimsel cf.
APS 2004, p. 161.
[25] Le bioéthanol est un alcool produit à base de végétaux. Mélangé à l’essence, il permet de diminuer les émissions de CO2 en même temps que la dépendance au pétrole.
[28]
Lib., 14.9.05 (UDC);
LT, 16.9.05 (DFF).
[31]
TG, 11.2.05; presse 21.6.05.
[32]
NF, 4.6 et 29.11.05.
[33]
NZZ, 5.4.05; presse du 10.5.05;
24h, 6.7.05. Cf.
APS 2003, p. 155.