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Rétrospective annuelle 2024: Agriculture

L'année 2024 a débuté avec fracas s'agissant de l'agriculture en Suisse, et plus globalement en Europe. Des mouvements de révolte agricole ont émergé d'abord en Allemagne pour essaimer comme une traînée de poudre dans les campagnes de l'Europe de l'Ouest. Les principales revendications sont similaires et reflètent une colère longuement macérée: une charge administrative trop élevée, trop peu de reconnaissance, trop de contrôles, des prix de vente trop bas et une opposition ferme à tout accord de libre-échange impliquant l'agriculture. Plusieurs manifestations ont été organisées, principalement à la campagne, des pétitions ont été adressées aux autorités et aux grands détaillants, la paysannerie s'est fait portraiturer sous toutes ses facettes dans les médias. Bien entendu, cette colère a laissé une trace sur le calendrier politique et forcément résonné entre les arcades du Palais fédéral.

La coupole fédérale a donc repris, une après l'autre, les différentes revendications entendues dans les cortèges de tracteurs et dans les étables des paysannes et paysans. Premièrement, l'épineuse question de la charge administrative a été thématisée par de nombreux parlementaires. Ainsi, l'avenir du système Digiflux a été l'un des objets les plus débattus s'agissant de l'agriculture en cette année 2024 (voir l'analyse APS des interventions). Une courte majorité du Conseil national souhaite son abandon – avant même son lancement –, décriant une surcharge administrative qui pèse sur les épaules des agricultrices et agriculteurs.
Deuxièmement, les questions touchant à une meilleure rémunération et de meilleurs prix à la vente se sont matérialisés par le dépôt d'initiatives parlementaires demandant un observatoire des prix et des prix planchers pour les produits agricoles. A ce sujet, un postulat a été accepté, qui charge le Conseil fédéral de publier un rapport présentant les différences entre prix indicatifs et prix de vente de la production. De plus, une motion demandant un renforcement de la création de valeur tout au long de la filière agroalimentaire pour améliorer les revenus a obtenu le blanc-seing des deux conseils, tandis qu'un autre texte qui autoriserait les productrices et producteurs à se mettre ensemble pour négocier les prix de vente face à la grande distribution a reçu le soutien du Conseil national. Au sujet des prix rémunérateurs, l'IP-Lait a décidé d'augmenter de 3 centimes le kilo de lait, tandis qu'au niveau des charges, le Conseil fédéral a décidé de maintenir le privilège des agricultrices et agriculteurs s'agissant du prix de l'essence. Agroscope dévoilait, dans le même temps, une baisse des revenus agricoles pour l'année 2022 de l'ordre de 6.3 pour cent par unité de main-d'œuvre familiale. De plus, le Conseil fédéral a présenté, dans son message, un budget agricole en baisse de l'ordre de CHF 230 millions pour les années 2026-2029 par rapport à la période actuelle, sans pour autant trouver de majorité au sein de la chambre basse. Cette dernière souhaite, au contraire, augmenter les moyens alloués à l'agriculture. Les coupes proposées par l'exécutif dans le budget agricole pour 2025 dans le cadre des débats sur le budget fédéral 2025 n'ont, sans surprise, non plus pas trouvé de majorité au Parlement.
Troisièmement, les mesures écologiques ont également été décriées par une partie du mouvement. Face à cela, le Parlement a décidé d'abroger une mesure souhaitée depuis quelques années par le Conseil fédéral, qui prévoyait de consacrer 3.5 pour cent des terres arables à des surfaces de promotion de la biodiversité. L'USP s'est aussi fortement opposée à l'initiative biodiversité qui a fini par être coulée par le corps électoral en septembre.
Quatrièmement, l'augmentation de la charge administrative et des contrôles s'expliquerait principalement par le système des paiements directs, instauré il y a de cela 30 ans. Pour marquer cet anniversaire, l'OFAG a dédié une partie du rapport agricole 2023 à l'évolution d'un système qui atteint ses limites, selon les termes des autorités. Des réformes sont prévues à cet égard et à d'autres niveaux. Un groupe de travail a été formé pour se pencher sur l'élaboration d'une nouvelle politique agricole (PA 30+).

Au-delà de ces colères paysannes, plusieurs initiatives populaires émanant de la société civile ont été déposées ou ont abouti cette année. S'agissant de la première catégorie, nous retrouvons l'initiative pour la protection des aliments, qui souhaite garantir une production alimentaire sans OGM – y compris les nouvelles techniques génomiques, alors que le Parlement et le Conseil fédéral veulent, à terme, les extraire du moratoire que le Parlement va renouveler pour deux ans afin d'éviter un vide juridique – ainsi que l'initiative pour des mesures de régulation efficaces contre une propagation incontrôlée du loup, du lynx, de l’ours et des rapaces. Dans la deuxième catégorie, l'initiative pour une interdiction de l'importation du foie gras, l'initiative contre l'importation de fourrure provenant d'animaux maltraités, l'initiative pour une alimentation sûre, ainsi que l'initiative pour un avenir sans expérimentation animale ont toutes récolté suffisamment de signatures pour être soumises à votation populaire.
A noter que l'initiative pour la protection de l’homme, des animaux domestiques et des animaux de rente contre le loup lancée en 2023 n'a pas abouti, échouant à trouver les 100'000 paraphes nécessaires, bien que la question du loup soit omniprésente dans le débat politique. Nombre d'interventions ont, en effet, été déposées et débattues au sein des chambres, principalement pour simplifier sa régulation, tandis que le Conseil fédéral a ouvert une deuxième période de tirs préventifs en septembre et souhaite réviser l'ordonnance sur la chasse (OChP) pour 2025.

En cette fin d'année 2024, alors que les travaux agricoles rentrent dans leur phase plus tranquille et que la France voit ses campagnes s'embraser à nouveau, il sera important de guetter la survenue de nouvelles manifestations contre la précarité des vies paysannes. Les promesses faites et les mesures prises par les autorités suffiront-elles à réduire cette amertume ? La signature probable d'un accord de libre-échange entre les pays de l'AELE et les pays du Mercosur – à l'image de celui qui arrive à bout touchant entre ces pays d'Amérique latine et l'UEréveillera-t-il les velléités? Les nombreuses initiatives touchant à l'agriculture et aux animaux mèneront-elles à une polarisation accrue des fronts entre ville et campagne? Une chose est sûre: le thème de l'agriculture devrait continuer d'agiter la sphère politique en 2025.

Rétrospective annuelle 2024: Agriculture
Dossier: Rétrospective annuelle 2024

Sans discussion, le Conseil national a accepté le postulat Haab (udc, ZH), ce dernier demandant au Conseil fédéral de rédiger un rapport sur la différence entre les prix de référence de la production agricole et les prix effectivement payés par les acheteurs (transformateurs, distributeurs, etc.). Selon l'élu zurichois, de grands écarts peuvent être constatés selon les branches, comme l'a dénoncé l'organisation Marchés Equitables Suisses (MES) pour le lait. Le député Martin Haab estime donc important d'améliorer la transparence sur la formation des prix. A cet égard, une initiative parlementaire a également été déposée.
Le postulat profitait du soutien du Conseil fédéral, qui a dit vouloir y répondre en même temps que les postulats 22.4252 et 21.3831.

Achats à la ferme. Les prix indicatifs ne représentent pas les prix effectifs (Po. 24.3673)
Dossier: Transparence des prix des produits alimentaires et prix équitables

En écho aux révoltes agricoles de l'hiver 2023-2024, Hans Jörg Rüegsegger (udc, BE) a déposé une motion afin de permettre aux productrices et producteurs de renforcer leur position face aux acheteurs de produits agricoles (détaillants, transformateurs, etc.) lors de la fixation des prix de vente. Le député bernois dénonce une position de pouvoir déséquilibrée de la part des acheteurs et demande que soit rendu possible aux productrices et producteurs de coopérer afin de former un contre-pouvoir pour négocier de meilleurs prix. Aujourd'hui, la Loi sur les cartels (LCart) ne permet pas une telle pratique, alors que l'Union européenne (UE) connait un tel mécanisme. L'élu UDC critique l'actuel article 8a de la Loi sur l'agriculture (LAgr) qui autorise simplement la fixation de prix indicatifs non contraignants. Représentant le Conseil fédéral, Guy Parmelin a expliqué que les possibilités offertes aujourd'hui par la LAgr sont suffisantes. Il a notamment cité les mesures d'entraide collective qui peuvent être prises par les interprofessions, ou l'élaboration de contrats-types. Cela n'aura pas suffi à convaincre les membres du Conseil national qui ont décidé de soutenir par 161 voix contre 22 et 5 abstentions la proposition formulée par Hans Jörg Rüegsegger. Seuls des membres du PLR s'y sont opposés ou se sont abstenus.

Possibilités de coopération entre producteurs agricoles. Créer plus de transparence et des prix équitables (Mo. 24.3206)
Dossier: Transparence des prix des produits alimentaires et prix équitables

«Visiblement, la colère paysanne n'a pas encore été entendue à Berne.» C'est par ces mots que Nicolas Kolly (udc, FR) a justifié sa volonté de supprimer l'obligation d'utilisation du système informatisé Digiflux, l'élu fribourgeois redoutant une augmentation de la charge administrative pour les agriculteurs et agricultrices. Comme l'a expliqué le ministre chargé des questions agricoles, Guy Parmelin, ce nouveau système informatique est une pièce du puzzle qui permettra d'atteindre les objectifs fixés par l'initiative parlementaire 19.475 sur la réduction des dangers liés aux produits phytosanitaires et la réduction des intrants fertilisants. Les mesures prises par le Parlement en la matière ont notamment servi d'argument pour s'opposer aux initiatives contre les pesticides de synthèse et pour une eau potable propre, toutes deux refusées par le corps électoral. Renoncer à Digiflux et revenir sur la décision du Parlement «contreviendrait au principe de la bonne foi» selon Guy Parmelin. De plus, le conseiller fédéral a assuré que l'Administration fédérale s'attelait à faire de Digiflux un système qui permettra de réduire au maximum la charge administrative, tout en rappelant que les agricultrices et agriculteurs doivent d'ores et déjà effectuer des enregistrements de ces produits et des fumures dans le cadre des paiements directs et d'autres programmes. De plus, les autorités ont décidé de réduire le nombre d'informations demandées dans un premier temps aux agricultrices et agriculteurs, tandis que cette obligation d'enregistrement s'appliquera à tous les utilisateurs de produits phytosanitaires, tels que les CFF, les communes, les cantons, etc. Une exception pour l'agriculture ne se justifierait pas. Le conseiller fédéral a, de plus, expliqué que l'instauration du système Digiflux a été repoussée d'une année afin de pouvoir faire toute une série de tests pilotes, avec la participation des futurs utilisateurs, pour arriver à une solution satisfaisante. A la suite de la prise de parole de Guy Parmelin, un ping-pong s'est engagé avec les parlementaires de gauche comme de droite. Ce vif échange a abouti à un soutien serré à cette motion. C'est, en effet, par 95 voix contre 90 et 5 abstentions que le Conseil national s'est prononcé en faveur de la motion. Les soutiens sont à trouver dans les rangs de l'UDC, du Centre et, dans une moindre mesure, du PLR.

Suppression de l'obligation du système Digiflux pour les exploitations agricoles (Mo. 24.3078)
Dossier: Réduire la charge administrative pour les agricultrices et agriculteurs

Le Conseil fédéral a annoncé vouloir une loi spécifique pour les nouvelles techniques génomiques (NTG). En effet, les autorités gouvernementales ont reçu pour mandat du Parlement de présenter un message qui encadre l'utilisation des NTG. Le choix de créer une loi spécifique est motivé par une évolution similaire au sein de l'Union européenne (UE) et la volonté d'avoir une législation compatible avec l'UE afin d'éviter tout obstacle technique au commerce. Dans son communiqué de presse, le Conseil fédéral dit prendre en compte les inquiétudes de la population et vouloir introduire «des mécanismes de contrôle plus stricts» que ceux prévus chez nos voisins européens.
Les opposantes et opposants à ces techniques se sont montrés inquiets d'une telle ouverture, tandis que l'Office fédéral de la justice (OFJ) estime que l'élaboration d'une loi réglant spécifiquement la question de ces organismes pourrait faire croire, à tort, qu'il ne s'agit pas d'OGM, comme on pouvait le lire dans Le Temps et le Tages Anzeiger. En réaction à cette volonté d'ouvrir la voie à ces nouveaux organismes génétiquement modifiés, une initiative populaire a été lancée par les milieux anti-OGM, afin d'en régler strictement l'utilisation. Reste à voir dans quelle mesure cette initiative permettra ou non de mettre la pression sur les autorités, qui doivent délivrer un message sur cette nouvelle loi spécifique aux NTG au Parlement en 2026.

Le Conseil fédéral veut une loi spécifique aux nouvelles techniques génomiques
Dossier: Nouvelles techniques génomiques
Dossier: Les organismes génétiquement modifiés (OGM) en Suisse

Pour répondre à l'une des doléances des colères paysannes qui grondent dans les campagnes suisses, Raphaël Mahaim (vert.e.s, VD) a déposé une initiative parlementaire afin de rendre les prix indicatifs fixés pour les produits agricoles plus contraignants. Il propose ainsi d'instaurer des prix de références, négociés entre fournisseurs et acquéreurs, constatant que les prix payés à la production ne permettent souvent pas de couvrir les coûts de production. En cas d'impasse dans les négociations, il reviendrait au Conseil fédéral de fixer les prix. Il s'agirait ainsi de rééquilibrer les rapports de force entre productrices et producteurs d'un côté, et grande distribution de l'autre afin d'augmenter les prix de vente de la production agricole. Le conseiller national vert critique, en effet, les marges exercées actuellement par la grande distribution sur le dos de paysannes et paysans. Il voit ce texte comme complémentaire à la proposition de sa collègue de parti Isabelle Pasquier-Eichenberger (GE) sur l'instauration d'un observatoire des prix qui permettrait d'analyser les marges tout au long de la chaine alimentaire.
Cet appel a été entendu par la Commission de l'économie et des redevances du Conseil national (CER-CN) qui a décidé de donner suite, par 19 voix contre 3 et 2 abstentions, à cette initiative parlementaire afin de rééquilibrer ces rapports de force, tout en considérant que cette proposition n'est pas forcément idéale. L'initiative parlementaire Mahaim doit maintenant être analysée par la Commission de l'économie et des redevances du Conseil des Etats (CER-CE).

Des prix de références pour protéger la production agricole (Iv. pa. 24.414)

Le vin a été au cœur de plusieurs débats au Conseil des Etats, notamment s'agissant de sa promotion, de l'allégement de certaines règles, de la constitution de réserves climatiques. S'agissant de sa promotion, la chambre haute avait renvoyé la motion de la CER-CN en commission pour analyser l'opportunité d'y apporter une modification proposée par Johanna Gapany (plr, FR). La majorité de la Commission de l'économie et des redevances du Conseil des Etats (CER-CE) a recommandé à sa chambre, pour la deuxième fois, de rejeter ce texte, alors que la proposition de la libérale-radicale fribourgeoise n'était plus sur la table. Pirmin Bischof (centre, SO), pour la commission, a expliqué que fixer un budget figé de promotion des vins de CHF 9 millions par année mettrait en cause la marge de manœuvre dont dispose le Parlement pour décider d'année en année des sommes à allouer. De plus, cela créerait une inégalité de traitement entre produits agricoles, alors que les autres denrées ne profitent pas d'une garantie de soutien.
Peter Hegglin (centre, ZG), a appuyé les propos de son collègue de parti en faisant remarquer que le Parlement et le Conseil fédéral ont su réagir, dans le cadre des budgets 2023 et 2024, en augmentant les sommes allouées à la promotion des vins suisses. Ces montants sont également assurés pour les années 2025, 2026 et 2027. La motion n'est donc plus d'actualité pour l'élu zougois. Pour la minorité, Fabio Regazzi (centre, TI) a rappelé la situation actuelle en ce qui concerne la promotion du vin et la concurrence accrue avec d'autres pays producteurs. Ainsi, l'Italie dépenserait quelques CHF 18 millions en Suisse pour la promotion de ses vins, alors que des négociations ont été amorcées avec le Chili pour une modernisation de l'accord de libre-échange qui pourrait voir à l'avenir ce pays exporter jusqu'à 15'000 hectolitres de cet alcool à tarif nul en dehors des contingents de l'OMC. Carlo Sommaruga (ps, GE), également en faveur du texte, a rajouté que l'accord prévu avec les pays du Mercosur pourrait également permettre à l'Argentine de bénéficier d'un quota de ce type, mais largement supérieur à celui qui a été accordé au Chili. La nécessité de promouvoir le vin suisse face à la concurrence étrangère serait donc grande.
Pour le conseiller fédéral et ancien vigneron Guy Parmelin, les finances fédérales devraient, au contraire, inciter à la retenue. Il a donc demandé aux parlementaires de conserver la marge de manœuvre qui existe aujourd'hui afin de pouvoir à l'avenir agir sur les montants attribués à la promotion des ventes. C'est finalement à une large majorité de 30 voix contre 12 et 1 abstention que la motion a été soutenue par la chambre haute, contre l'avis du gouvernement et de la majorité de sa commission. L'entier de la délégation latine a soutenu cette mesure.

Augmenter les moyens pour la promotion des vins suisses (Mo. 22.3022)
Dossier: Marché du vin suisse: Comment faire face à la concurrence internationale?

Le Conseil des Etats était amené à se prononcer sur la possibilité donnée au monde vitivinicole de constituer des réserves climatiques viticoles. La Commission de l'économie et des redevances de la chambre haute (CER-CE) s'était prononcée une première fois contre ce texte; une position que la majorité des membre de la commission ont conservée malgré un large soutien au Conseil national. Selon le rapporteur de majorité, Martin Schmid (plr, GR), il n'y a aucune nécessité de changer le système actuel, la branche vitivinicole pouvant d'ores et déjà négocier avec les cantons la quantité maximale de raisin par mètre carré que les vigneronnes et vignerons ont le droit de récolter tout en respectant le label AOC. Une acceptation de l'initiative parlementaire amènerait de nouvelles questions, dont la problématique de la surproduction en cas d'années successives de bonnes récoltes. Dans ce cas, est-ce qu'il faudra que l'Etat intervienne à nouveau pour écouler les quantités produites en trop, se demande ainsi le rapporteur de commission? C'est par 6 voix contre 1 et 5 abstentions que la CER-CE s'est prononcée contre cette initiative parlementaire. Egalement membre de la commission, la libérale-radicale fribourgeoise Johanna Gapany a déposé une proposition individuelle, à la suite de la séance de commission, d'accepter ce texte. D'après elle, le nombre d'abstentions en commission était le signe d'une certaine confusion, qu'elle a dit vouloir clarifier en chambre. Par le biais de cette modification de loi, les cantons pourraient permettre à leurs vigneronnes et vignerons de constituer des réserves lors des années fastes, qui resteraient en cave afin d'utiliser ce vin lors des années de disette. La loi fédérale ne l'autorise aujourd'hui pas. Cet outil permettrait au corps de métier, d'une part, d'être plus résilient économiquement face aux aléas climatiques et, d'autre part, de ne pas céder de part de marché aux vins étrangers en cas d'année plus difficile. Les quotas fédéraux ne seraient pas remis en question et resteraient en vigueur. Tant Carlo Sommaruga (ps, GE) que Beat Rieder (centre, VS) sont intervenus pour soutenir la position de la sénatrice fribourgeoise. Le sénateur thurgovien Jakob Stark (udc, TG) s'est également prononcé en faveur de l'initiative parlementaire, tout en rappelant à la branche que si supplément il y a sur plusieurs années, le Conseil des Etats ne versera pas d'argent pour aider à la valorisation de ces quantités excédentaires. La branche aurait pour responsabilité de s'organiser en conséquence.
Finalement, c'est par 24 voix contre 15 et 2 abstentions que la chambre haute a décidé, contre l'avis de sa commission, de donner suite à l'initiative parlementaire. Une fois encore, l'entier de la délégation latine s'est exprimé en faveur de ce texte, alors que Carlo Sommaruga rappelait lors des débats que 85 pour cent du vin helvétique est produit en Suisse romande. La Commission de l'économie et des redevances de la chambre du peuple (CER-CN) est ainsi chargée de rédiger un projet d'acte.

Réserve climatique pour le secteur vitivinicole (Iv.pa. 22.405)
Dossier: Marché du vin suisse: Comment faire face à la concurrence internationale?
Dossier: L'agriculture face aux changements climatiques

La CER-CN s'aligne sur sa commission sœur sur la question du soutien à la production sucrière, en se prononçant tant pour l'initiative du Parlement bernois (par 14 voix contre 6 et 5 abstentions) que celle du législatif thurgovien. La Commission de l'économie et des redevances du Conseil des Etats (CER-CE) est maintenant chargée d'élaborer un projet de loi qui permettra de soutenir durablement la production de betterave sucrière, alors que les mesures temporaires expireront fin 2026.

Préserver l'autosuffisance alimentaire de la Suisse en sucre (Iv. ct. 23.302)
Dossier: Développement du marché de la betterave sucrière

La CER-CN s'aligne sur sa commission sœur du Conseil des Etats en ce qui concerne le soutien à la production sucrière, soutenant tant l'initiative du canton de Thurgovie (par 15 voix contre 7 et 3 abstentions) que l'initiative du canton de Berne. La CER-CE est maintenant chargée d'élaborer un projet de loi pour soutenir durablement la production de betterave sucrière, alors que les mesures temporaires expireront fin 2026.

Préserver le taux d'autosuffisance en sucre indigène de la Suisse (Iv. ct. 22.322)
Dossier: Développement du marché de la betterave sucrière

La production de sucre suisse doit être garantie, et les producteurs et productrices de betteraves soutenues, selon le Parlement bernois, qui a déposé une initiative cantonale au Parlement fédéral. La Commission de l'économie et des redevances du Conseil des Etats (CER-CE) est du même avis. Par 8 voix contre 3 et 2 abstentions, la commission ne veut pas seulement reconduire les mesures d'ores et déjà en place mais veut offrir une sécurité au secteur sucrier. Elle s'est également exprimée en faveur de l'initiative déposée par le canton de Thurgovie aux demandes similaires.

Préserver l'autosuffisance alimentaire de la Suisse en sucre (Iv. ct. 23.302)
Dossier: Développement du marché de la betterave sucrière

La Commission de l'économie et des redevances du Conseil des Etats (CER-CE) a décidé de soutenir deux initiatives déposées par des cantons qui s'inquiètent de la situation de la production de la betterave sucrière en Suisse. Tant le texte déposé par le canton de Berne que le présent texte du canton de Thurgovie demandent que cette culture soit soutenue de manière pérenne afin d'assurer un certain taux d'autosuffisance, tout en promouvant la recherche de méthodes de culture plus écologiques. Un certain nombre de mesures d'ores et déjà en place courent jusqu'en 2026. La commission ne veut ainsi pas seulement les prolonger mais veut assurer une véritable sécurité pour le secteur sucrier en cas de baisse soudaine du taux d'autosuffisance.

Préserver le taux d'autosuffisance en sucre indigène de la Suisse (Iv. ct. 22.322)
Dossier: Développement du marché de la betterave sucrière

Alors que plusieurs textes sur le gaspillage alimentaire ont été acceptés, Meret Schneider (vert-e-s, ZH) continue l'offensive et souhaite que la restauration publique s'implique davantage sur cette question en récupérant les légumes qui ne correspondent pas au calibrage imposé par la grande distribution. Elle demande également aux autorités d'analyser dans quelle mesure la restauration collective publique pourrait utiliser plus de fruits et légumes régionaux. Soutenant cette dernière revendication, Alain Berset a toutefois expliqué que l'Administration fédérale est déjà allée de l'avant sur cette question en élaborant des standards de qualité pour la restauration collective et que deux guides pratiques sont en cours d'élaboration pour simplifier la mise en place d'une restauration plus durable. Le postulat a été rejeté par 111 voix contre 72 et 2 abstentions, les partis du centre rejoignant la droite sur cet objet.

Plus de régionalisme dans la restauration publique (Po. 21.4297)
Dossier: Gaspillage alimentaire

Le Conseil national a décidé, à une large majorité de 112 voix contre 47 et 24 abstentions, de suivre sa commission et de soutenir l'instauration de réserves climatiques pour les vigneron.ne.s. Représentant la CER-CN, Olivier Feller (plr, VD) a expliqué que si la commission tenait tant à ce texte, c'est parce que l'Administration fédérale a confirmé qu'un changement de loi au niveau fédéral était nécessaire pour permettre aux cantons d'autoriser l'instauration de réserves climatiques. Les membres de la commission sœur auraient ainsi été mal informés, d'où leur refus d'entrer en matière. En modifiant la loi, les viticultrices et viticulteurs pourraient récolter plus de raisins les bonnes années pour pouvoir ensuite égaliser avec les mauvaises années de récolte. Aujourd'hui, une limite du nombre de kilos de raisin récolté par mètre carré est fixée dans l'ordonnance fédérale ; limite que les cantons n'ont pas le droit de dépasser. Sans succès, la minorité défendue par Prisca Birrer-Heimo (ps, LU) a dénoncé une mesure qui mènera à une surproduction de vin et à une demande future des milieux concernés d'aides fédérales pour écouler la production. Elle dénonce ainsi une manœuvre bien connue sous la coupole, qu'elle dit avoir eu l'occasion d'observer à de nombreuses reprises depuis son arrivée au Parlement il y a de cela 13 ans. De plus, les cantons ont aujourd'hui déjà le pouvoir d'augmenter la limite de kg/m2 de raisin.
Les soutiens au texte se comptent parmi tous les groupes, mais seule l'UDC a voté en bloc en faveur de l'initiative parlementaire. Les abstentions sont venues majoritairement des élu.e.s vert.e.s qui constituent 18 des 24 abstentionnistes.

Réserve climatique pour le secteur vitivinicole (Iv.pa. 22.405)
Dossier: Marché du vin suisse: Comment faire face à la concurrence internationale?
Dossier: L'agriculture face aux changements climatiques

La verte'libérale zurichoise Barbara Schaffner souhaite que le Conseil fédéral analyse l'opportunité de labelliser les aliments selon leur impact climatique. Elle estime en effet qu'avec cette information et cette transparence, consommatrices et consommateurs pourraient avoir une plus grande conscience de leurs achats, selon le principe de la responsabilité individuelle. Par la voix d'Albert Rösti, le Conseil fédéral s'est dit opposé à ce postulat, faisant remarquer que le Parlement a d'ores et déjà adopté un texte similaire (Po. 22.4275) et que l'OFAG se penche actuellement sur l'opportunité de créer des conditions cadres pour un label climatique facultatif. Le Conseil national a suivi l'avis du Conseil fédéral et a rejeté, par 102 voix contre 81, le postulat Schaffner. Sans surprise, les partis du Centre, du l'UDC et du PLR s'y sont opposés.

Une étiquetage carbone pour les aliments (Po. 21.4222)
Dossier: Etiquetage des produits alimentaires
Dossier: L'agriculture face aux changements climatiques

Par 14 voix contre 10, la Commission de la science, de l'éducation et de la culture du Conseil national (CSEC-CN) a décidé de soutenir l'initiative parlementaire Badertscher (vert-e-s, BE) qui prévoit de donner la possibilité au Conseil fédéral d'instaurer une obligation d'indication du mode de transport pour les produits frais notamment s'agissant du transport aérien. Ce texte, co-signé par des membres des Vert-e-s, de l'UDC, du Centre – dont Markus Ritter (SG), président de l'USP – et du PLR, vise une meilleure transparence pour les consommatrices et consommateurs qui auront ainsi plus d'informations pour faire leur choix. La CSEC-CN propose, à cet effet, de modifier la loi sur les denrées alimentaires (LDAI). La commission sœur du Conseil des Etats a accepté le texte par 7 voix contre 3 et 2 abstentions, donnant ainsi pour mandat à la CSEC-CN d'élaborer un projet de modification de la LDAI.

Ajouter une indication pour les aliments ayant été transportés en avion (Iv. pa. 22.424)

La CEATE-CN a déposé un projet de modification de la LDAI afin d'instaurer une obligation d'indication du mode de transport, notamment aérien, pour les produits frais non transformés. C'est par 13 voix contre 11 que ce projet a été soutenu. Les parlementaires opposés estiment que la charge administrative augmentera et que cette modification pourrait poser problème au vu des accords avec l'OMC. Ce projet de modification sera soumis à consultation en septembre 2023.

Ajouter une indication pour les aliments ayant été transportés en avion (Iv. pa. 22.424)

Le Conseil des Etats devait régler une dernière divergence s'agissant de la Politique agricole 22+ (PA 22+). Le rapporteur de commission, Peter Hegglin (centre, ZG), a longuement expliqué les enjeux entourant le changement législatif souhaité par le Conseil national. L'objet de cette dernière divergence était la simplification de l'usage d'insectes auxiliaires pour la lutte biologique contre les nuisibles. Aujourd'hui, une demande d'autorisation doit être déposée auprès de l'OFEV car ce sont des insectes allochtones qui sont utilisés; les équilibres de la biodiversité locale peuvent donc être chamboulés en cas de propagation problématique. Ces demandes ont un certain coût et, lorsque les insectes ont la capacité de se reproduire après dissémination, les entreprises spécialisées dans ce domaine ne voient pas d'intérêt financier à déposer une telle demande (si les insectes sont bien établis, alors le nombre de ventes faiblit avec le temps). C'est ce qui s'est passé avec ladite guêpe solitaire, qui pourrait s'avérer très précieuse dans la lutte contre le moucheron asiatique s'attaquant aux cerises. Afin d'accélérer ces procédures, le changement législatif demandé par le Conseil national – et soutenu tant par la CER-CE que par le Conseil fédéral – permettrait aux autorités d'autoriser l'utilisation de certains auxiliaires, sans que les entreprises n'aient à déposer de demandes au préalable. L'élu centriste – également président d'un groupe d'intérêts pour la promotion des cerises zougoises – a terminé ce long exposé en rappelant l'urgence d'agir, alors que ces cultures sont menacées. Cette modification a été soutenue à l'unanimité sans autre discussion.
Au vote final, le Conseil des Etats a approuvé tant la loi sur les épizooties que la loi sur l'agriculture par 44 voix, sans opposition. Au Conseil national, la loi sur les épizooties a été approuvée à l'unanimité (194 voix), tandis qu'il s'est trouvé 15 abstentionnistes, provenant majoritairement du camp vert'libéral, pour protester contre la nouvelle politique agricole.

Gesamtschau zur mittelfristigen Weiterentwicklung der Agrarpolitik (BRG 18.044; 20.022)
Dossier: Vue d'ensemble du développement à moyen terme de la politique agricole

Pour la majorité de la CSEC-CE (8 voix contre 4), il est impossible de fournir une déclaration de transparence sur le mode de récolte des noix de coco, et ceci pour plusieurs raisons : le manque de consensus sur une définition internationale de la maltraitance animale, la difficulté de garantir la traçabilité de la provenance des aliments et les lourds moyens que nécessiterait la mise en place d'un système de contrôle à l'étranger. C'est pourquoi, les membres de la majorité ont proposé le refus du texte. De l'autre côté, la minorité, représentée par Maya Graf (vert-e-s, BL), a rappelé l’importance de déclarer les noix de coco issues d'une production animale cruelle – afin de pouvoir par la suite retirer ces produits de la vente – et a ainsi appelé à l'acceptation de la motion. Au nom du Conseil fédéral, Alain Berset a indiqué qu'il serait plus judicieux de privilégier la déclaration volontaire.
La chambre haute a rejeté la motion déposée par l'ancienne députée, Meret Schneider (vert-e-s, ZH) par 19 voix contre 13 et 1 abstention.

Déclaration obligatoire en cas de noix de coco récoltées par des singes (Mo. 20.4232)

La commission de l'économie et des redevances du Conseil national (CER-CN) tient à son initiative parlementaire visant à instaurer des réserves climatiques pour le secteur vitivinicole. Par 14 voix contre 7 et 4 abstentions, elle a décidé de soumettre ce projet à sa chambre, contre l'avis de sa commission sœur.

Réserve climatique pour le secteur vitivinicole (Iv.pa. 22.405)
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Selon les chiffres 2022 pour l'agriculture fournis par l'Office fédéral de la statistique (OFS), le nombre total d'exploitations agricoles a continué de baisser ; une baisse qui reste constante depuis de nombreuses années. Il y a, en effet, 1.1 pour cent d'exploitations en moins qu'une année auparavant, avec un total de 48'344 domaines, alors que l'intérêt pour les métiers de la terre s'accroit. Mais cette baisse est compensée par l'agrandissement moyen de chaque exploitation de l'ordre de 0.3 hectare. De plus, le nombre d'exploitations biologiques a augmenté de près de 2 pour cent pour s'établir à une part de 16 pour cent de l'ensemble des domaines, tandis que la surface dédiée à la culture biologique représente près d'un cinquième de la surface utile totale (18%). Lorsqu'on se penche sur la production pour l'année 2022, on aperçoit une baisse de la surface dédiée à la betterave sucrière, une augmentation de celle dédiée au soja (avec un triplement depuis 10 ans) et une stabilisation des surfaces dédiées à la pomme de terre et au colza. S'agissant des animaux de rente, on peut observer une hausse du nombre de poulets, reflétant l'attrait toujours plus prononcé des consommatrices et consommateurs pour cette viande produite en Suisse, selon la RTS.
Dans le rapport agricole 2022, il est précisé que cette année a été source de bonnes récoltes, malgré la sécheresse qui a mis à mal les cultures fourragères.

Chiffres agriculture pour 2022
Dossier: Chiffres annuels pour l'agriculture suisse

Les députées Meret Schneider (vert-e-s, ZH; Po. 22.4556) et Anna Giacometti (plr, GR; Po. 22.4440) se soucient toutes deux du manque de transparence dans la formation des prix des denrées alimentaires ainsi que de leur coût réel en tenant compte des externalités, notamment les dommages causés aux animaux et à l'environnement.Le Conseil fédéral avait, dans le cadre du rapport «Orientation future de la politique agricole», traité de ces questions en insistant sur la nécessité d'agir sur la vérité des coûts (c'est-à-dire, sur le prix véritable des aliments en y incluant les externalités négatives), comme un levier possible pour influer sur la consommation de la population. Les deux députées demandent ainsi au Conseil fédéral de développer des instruments pour s'attaquer à cette problématique. L'exécutif a dit soutenir les deux postulats, finalement combattus par Mike Egger (udc, SG). Le député saint-gallois critique cette volonté de classer les bons aliments et les mauvais aliments. Il s'oppose ainsi à un Etat qui déciderait, selon son interprétation, de ce que l'on a dans notre assiette. Il a également insisté sur la qualité des produits suisses par rapport aux produits importés. Et c'est bien l'une des raisons pour lesquelles Meret Schneider se bat pour l'instauration de tels outils, car il sera ainsi possible de faire une distinction dans les prix entre produits suisses et importés, ces derniers n'ayant pas à respecter les normes soumises aux paysannes et paysans du pays. Le postulat Schneider a été accepté par 96 voix contre 91 et 3 abstentions, soit avec quelques voix de moins que le postulat Giacometti, soutenu par une partie plus importante des libéraux-radicaux. Meret Schneider a toutefois pu profiter du plein soutien des parlementaires socialistes, vert-e-s et vert'libéraux, ainsi que de quelques voix éparses provenant des rangs des centristes et du PLR. Le Conseil fédéral proposera des solutions dans le cadre de la Politique agricole 2030+.

Améliorer la transparence et la vérité des prix (Po. 22.4556)
Dossier: Politique agricole 2030+ (PA 30+)
Dossier: Transparence des prix des produits alimentaires et prix équitables

Bien que la motion Schneider (vert-e-s, ZH) 21.3401 ait été classée car non traitée dans un délai de deux ans par les chambres, son contenu a été mis en œuvre par les autorités dans le cadre du train d'ordonnances agricoles 2022. Il s'agissait d'inclure les cultures de protéines végétales destinées aux humains dans le système des contributions à des cultures particulières, alors que seules les protéines destinées au fourrage pour les animaux étaient jusqu'alors soutenues. Ainsi, les agricultrices et agriculteurs recevront à l'avenir CHF 1000 par hectare de cultures de protéagineux destinés à l'alimentation humaine (pois chiches, lentilles, lupin, etc.).

Pour inclure les cultures de protéines végétales destinées aux humains dans le système des contributions à des cultures particulières (Mo. 21.3401)
Dossier: Antispécisme, alimentation végétale et bien-être animal

Les débats sur la PA 22+ (Politique agricole 22+) se sont étalés sur deux jours à la chambre basse, sans pour autant que les lignes ne bougent fondamentalement par rapport au projet du Conseil des Etats et aux propositions de la majorité de la Commission de l'économie et des redevances du Conseil national (CER-CN).
Lors du débat d'entrée en matière, les fronts se sont figés pour rester pratiquement inchangés sur les différentes propositions entre, d'un côté, les Vert-e-s, le Parti socialiste et les Vert'libéraux et, de l'autre côté, le Centre, l'UDC et le PLR. Prenant la parole pour les Vert-e-s, Sophie Michaud Gigon (VD) a dénoncé l'immobilisme de la politique alors que des solutions pour un système alimentaire durable ont été présentées dans un rapport du Conseil fédéral et qu'elles pourraient être, pour certaines, directement implémentées dans la réforme actuelle. Pour le Parti socialiste, Martina Munz (SH) a dit sa déception face à une non-réforme, décriant le coup de balai de l'USP et de ses alliés de l'économie sur le projet initial du Conseil fédéral. Allant dans le même sens, Kathrin Bertschy (pvl, BE) a qualifié le projet de coquille vide, déplorant que les réformes nécessaires ne débutent qu'à l'horizon 2030. De l'autre côté, le PLR estime, par la voix de Beat Walti (ZH), que la présente mouture permet «einen vernünftigen Entwicklungsschritt in der Landwirtschaftspolitik», qui peut rassembler une majorité en sa faveur. Jacques Nicolet (udc, VD), pour l'UDC, a soutenu un projet vu comme plus abouti que la version initiale, décrivant, au passage, de manière sévère les mesures écologiques prises par le Parlement. Représentant le groupe du Centre, Markus Ritter (SG) – également président de l'USP – a attaqué les propositions faites par la gauche, déroulant un plaidoyer pour la responsabilité individuelle des consommatrices et consommateurs : «Die Zukunft des Biolandbaus entscheidet sich an der Ladentheke und nicht hier im Parlament». Le monde paysan produira ce que les gens veulent, selon l'élu saint-gallois, et c'est de cette manière que l'agriculture atteindra le plus rapidement les objectifs environnementaux tant souhaités par la gauche. Suite à sa prise de parole, il a, sans surprise, été assailli de questions de membres du Parti vert'libéral et des Vert-e-s, qui ont peu goûté aux arguments touchant à la responsabilité individuelle, alors que l'agriculture est fortement régulée et que certains secteurs profitent d'aides étatiques pour la promotion auprès des consommatrices et consommateurs.
Guy Parmelin, ministre en charge de l'agriculture, a défendu une stratégie pensée en quatre axes stratégiques pour atteindre à terme – en 2050 – une sécurité alimentaire basée sur le développement durable : garantir la stabilité de l'approvisionnement alimentaire, encourager une production respectueuse de l'environnement et des animaux, renforcer la création de valeurs de manière durable et améliorer la compétitivité des secteurs agricoles et agroalimentaire et finalement pousser à une consommation durable – les consommatrices et consommateurs jouant-là un rôle central. Guy Parmelin est également revenu sur les diverses prises de position des partis, s'inquiétant d'une amnésie quant aux événements de ces dernières années. Il a rappelé l'échec dans les urnes des deux initiatives sur les pesticides (initiative pour une interdiction des pesticides de synthèse et initiative pour une eau potable propre) et de celle sur le bien-être animal; le corps électoral ne souhaite pas de changements écologiques trop radicaux selon le conseiller fédéral. Il a également estimé que la réduction de l'utilisation des produits phytosanitaires, comme voulu par l'Iv. pa. 19.475, était un défi aujourd'hui déjà pour le monde agricole. Il a donc demandé aux parlementaires d'accepter le projet tel que modifié par le Conseil des Etats et la CER-CN.
Le ministre de l'agriculture s'est fait entendre. Suite à cette entrée en matière, la majorité bourgeoise s'est imposée partout – rejetant toute proposition supplémentaire en faveur du climat ou de la biodiversité – à l'exception d'une disposition : la majorité de la commission aurait souhaité limiter le droit de regard des ONG environnementales dans le processus d'homologation des pesticides, mais la chambre du peuple en a décidé autrement et s'est contentée de suivre, par 100 voix contre 92 et 4 abstentions, la version du Conseil des Etats. Emanant d'une proposition majoritaire de la commission, la chambre a tacitement accepté de soutenir la lutte contre les ravageurs à l'aide «d'auxiliaires», tels que la guêpe solitaire. Quant aux autres dispositions environnementales et de bien-être animal provenant soit d'une minorité de la commission, soit du projet initial du Conseil fédéral – soutien des circuits-courts, réduction des gaz à effet de serre, compatibilité avec les objectifs climatiques de la Confédération, extension des mesures pour le bien-être animal, suppression des aides pour le marché de la viande, renforcement des critères d'obtention des paiements directs, mesures en faveur de la biodiversité, soutien des vaches à cornes, etc. – elles n'ont été principalement soutenues que par les groupes du Parti socialiste, du Parti vert'libéral et des Vert-e-s.
Au vote sur l'ensemble, la PA 22+ a récolté le soutien de 129 parlementaires, tandis que seule Melanie Mettler (pvl, BE) s'y est opposée et que 65 député.e.s socialistes, vert-e-s et vert'libéral.e.s se sont abstenu.e.s.
De plus, la chambre basse a décidé, à l'unanimité que la réforme du droit foncier rural serait traitée séparément, s'alignant sur le Conseil des Etats. La loi sur les épizooties (LFE) a, quant à elle, été acceptée par 152 voix. 43 parlementaires du Parti vert'libéral, des Vert-e-s et du Parti socialiste n'ont pas voulu prendre position pour ou contre.
Dans les médias, on a surtout noté l'abandon des ambitions d'écologisation de l'agriculture qui caractérisaient pourtant la mouture présentée par le Conseil fédéral en 2020, les journaux Blick et Aargauer Zeitung revenant par exemple sur le long processus parlementaire ayant abouti à cela. Le journal La Liberté a titré «Très insuffisant», reprenant le sentiment régnant au Parti vert'libéral et à gauche, tandis que le 24 Heures a parlé d'une «miniréforme» et que le Corriere Del Ticino ainsi que le Tages Anzeiger ont mis en avant l'écartement de tout objectif climatique. L'Aargauer Zeitung précise toutefois que ce «mini-paquet» devrait voir émerger à l'horizon 2030 une vision de la politique alimentaire plus holistique et tournée vers l'avenir. Aux critiques émises par la gauche – notamment de la part de Kilian Baumann (vert-e-s, BE) – face à la lenteur de la Bundesbern et à l'urgence d'agir pour une transformation des systèmes alimentaires, Markus Ritter a répondu que ce temps est nécessaire pour pouvoir entamer cette nouvelle réforme d'ampleur.
2030, c'est également la date citée par deux rapports indépendants – l'un de l'Assemblée citoyenne pour une politique alimentaire et l'autre de 42 scientifiques spécialisés sur ces questions – mais pour atteindre un système alimentaire durable et non commencer à le mettre en place, comme prévu par la Confédération. Représentant le comité scientifique en question, le professeur de l'EPFL Christian Nils Schwab a mis en garde contre cette lenteur : «plus on attend que les crises alimentaires annoncées se manifestent, plus on sera dans le désarroi et la souffrance», insistant également sur les coûts d'une telle entreprise, qui seront de toute manière moins importants que les coûts de l'inaction. L'une des mesures phares du rapport de ce groupement scientifique consiste à réduire de moitié la consommation de viande et de produits laitiers, une grande partie des émissions de gaz à effet de serre de l'alimentation provenant de ce poste-là. Pour intégrer ces changements au sein de la société, trois ingrédients sont nécessaires selon Christian Nils Schwab : «la conscience du problème, des alternatives attractives et des compétences nouvelles».
Seul le temps nous dira si la politique saura trouver la bonne recette en combinant, par exemple, ces trois ingrédients.

Gesamtschau zur mittelfristigen Weiterentwicklung der Agrarpolitik (BRG 18.044; 20.022)
Dossier: Vue d'ensemble du développement à moyen terme de la politique agricole