La révision totale de la Constitution fédérale de 1874, qui a inauguré la démocratie directe en Suisse, a fêté ses 150 ans le 19 avril 2024. Avec l'introduction de l'idée révolutionnaire du référendum; le pays entrait dans l'histoire.
En 1848, la Suisse instaurait sa première Constitution fédérale avec un système à deux chambres et 22 cantons souverains dont 6 demi-cantons – changement de dénomination en 1999. Cependant, entre les élections, les simples citoyens n'avaient pas l'occasion de s'exprimer beaucoup. En 1872, une première proposition de révision totale de la Constitution était votée. Elle visait à réduire le pouvoir d'une élite qui régnait sur Zurich et sur la capitale fédérale en accordant plus de droits aux citoyens. La révision était un miroir assez clair d'un «Kulturkampf » entre les conservateurs catholiques, les fédéralistes, les démocrates, et les libéraux; chacun s'accrochant à sa propre idéologie. Alors que les libéraux étaient concentrés sur la centralisation des pouvoirs, les fédéralistes y étaient opposés. Les démocrates aspiraient à une plus grande part de démocratie et les conservateurs souhaitaient protéger les privilèges de l'institution religieuse catholique. Cette première tentative a été rejetée par 50.5 pour cent des voix et 13 cantons sur 22. En 1874, une nouvelle révision a été acceptée par 63.2 pour cent des votants. Un changement de position a principalement été noté chez les romands fédéralistes, que le nouveau projet favorisait davantage que l'ancien. Les conservateurs catholiques y étaient cependant toujours opposés, comme : «Mit ihren antikirchlichen Artikeln degradierte sie zwar die katholisch-konservativen Schweizern Bürgern zweiter Klasse» – Nidwaldner Zeitung. En effet, l'Eglise a perdu en importance avec l'instauration de la liberté de religion. Pour la NZZ, la révision s'est concentrée sur l'uniformisation juridique et une nationalisation de l'armée. La WOZ a critiqué cette vision de l'histoire. Pour elle: «Es ging stärker um Säkularisierung und Demokratisierung als um die Zentralisierung von Recht und Armee, wie es in Schulbüchern immer noch behauptet wird». Ainsi, la révision instaure par exemple, en plus du référendum et d'une gestion nationale de l'armée, le droit à l'école primaire en suffisance pour tous, la liberté de religion pour tous, le mariage civil, un tribunal fédéral à Lausanne et la liberté économique.
Dans les années 1880, une «tempête» de referenda a permis aux minorités catholique et romande d'accéder aux sièges des sept sages et de faire entendre leurs positions. La NZZ et la WOZ ont énoncé quelques reproches pouvant être faites à la nouvelle Constitution. Citant notamment un système d'élection majoritaire, l'absence de droit de vote pour les femmes – la norme à cette époque, instauré en 1971 en Suisse – et l'absence de droit d'initiative – initiative populaire instituée en 1891.