Protection des infrastructures critiques de la Suisse contre l'influence d'autres Etats (Mo. 22.3414)

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Une motion du groupe socialiste, visant la protection des infrastructures critiques suisses contre l'influence d'autres Etats, a été débattue au Conseil national. Dans le collimateur de ce texte se trouvent les revendeurs internationaux de matériel TIC qui seraient sous l'emprise d'un Etat – principalement autocratique.
«Wir leben in unübersichtlichen und auch in gefährlichen Zeiten, wir leben in einer unübersichtlichen und auch gefährlichen Welt.» Cette déclaration de Jon Pult (ps, GR), visant à contextualiser la motion, a résonné sous la Coupole fédérale. Le sénateur a mis l'accent sur l'incertitude des relations géopolitiques et les tensions qui augmentent dans le monde, avant d'ouvrir une perspective internationale à la motion en mentionnant d'autres pays européens – comme l'Allemagne – qui ont voté une loi similaire ou qui ont interdit l'achat de certains produits à leurs infrastructures critiques. Ainsi, les infrastructures garantissant la disponibilité de certains bien et service comme l'énergie ou les transports se sont vues limitées dans le choix de système TIC qu'elles utilisent. Pour illustrer ces décisions, l'entreprise Huawei a été prise comme exemple.
Le Conseil fédéral s'est opposé à la motion. Il reconnaît l'importance d'une telle mesure, mais estime que la motion aurait un effet minime, vu que les entreprises en question sont connectées au réseau mondial. De plus, le Conseil fédéral considère qu'avant d'interdire, une évaluation globale des risques et des mesures à prendre doit être entreprise. Finalement, la motion restreindrait la liberté des entreprises, conséquence que le Conseil fédéral ne considère pas comme nécessaire. En effet, d'autres moyens permettraient de réduire les risques – par exemple la collaboration avec le NTC.
Le Conseil national a accepté la motion par 145 voix contre 44 et 4 abstentions. La minorité venait des groupes vertl'libéral et libéral-radical ainsi que 2 voix du groupe du Centre.

Alors que la commission de la politique de sécurité du Conseil des Etats (CPS-CE) avait estimé en juillet 2023 qu’il était nécessaire de suspendre l’examen de la motion du groupe du Centre qui demandait une protection des infrastructures critiques du pays contre l’influence d’autres États dans l’attente du rapport rédigé en réponse au postulat Pult – «Infrastructure numérique. Réduire les risques géopolitiques» –, elle a décidé le 11 janvier 2024, par 6 voix contre 5 et 2 abstentions, de «suspendre les travaux relatifs à la motion» jusqu’à ce que le message concernant la révision de la loi sur les télécommunications (LTC) ait été transmis au Parlement.
Lors de sa séance du 4 mars 2024, le Conseil des Etats a décidé tacitement de suivre les recommandations de la conseillère aux Etats Andrea Gmür (centre, LU) qui a affirmé, au nom de la CPS-CE, qu’il était «prématuré de débattre définitivement de la motion à ce stade».

À la suite de la décision du Conseil des Etats de suspendre le traitement de la motion du groupe socialiste demandant d'améliorer la protection des infrastructures critiques du pays contre l’influence d’autres Etats jusqu'à ce que le Département de l'environnement, des transports, de l'énergie et de la communication (DETEC) ait élaboré un projet de révision de la loi sur les télécommunications (LTC), les membres de la chambre basse ont à leur tour voté en faveur de la suspension de cet objet. Lors des débats, la conseillère nationale Isabelle Chappuis (centre, VD), qui s'est exprimée au nom de la Commission de la politique de sécurité du Conseil national (CPS-CN), a notamment indiqué à ses collègues que si la commission avait voté par 16 voix contre 6 et 1 abstention pour la suspension de cette motion, une minorité souhaitait que le Conseil national vote directement pour ce texte afin que le Conseil fédéral soit contraint de tenir compte, dans son projet de révision de la LTC, des mesures qui figurent dans la motion. La conseillère nationale a également relevé que d'autres membres de la commission avaient fait part de leur préoccupation relative à la manière dont la motion conduirait les autorités à classer les pays selon la nature plus ou moins démocratique de leur régime, mettant en cause la neutralité de la Suisse.
Michael Götte (udc, SG), qui s'est également exprimé au nom de la commission, a quant à lui affirmé que le Conseil national avait intérêt à attendre jusqu'à la mise en consultation du projet de loi pour se prononcer, puisque «sollte sich nach dieser Konsultation zeigen, dass die Kernanliegen der Motion nicht oder nur ungenügend adressiert werden, gibt uns die Sistierung der Motion die Möglichkeit, nachzufassen».
Le Conseil national a accepté tacitement de suspendre l'examen de la motion jusqu'à ce que le projet de révision de la LTC soit transmis au Parlement.