La politique économique, sous la menace des droits de douane américains, poursuit ses projets de réformes

Dans le chapitre «Politique économique», l’année 2025 a été marquée par l'incertitude liée aux droits de douane américains. Cette thématique a bénéficié d'une forte couverture médiatique, démontre l'analyse APS des journaux, qui a enregistré une augmentation des articles consacrés à ce sujet, d'abord au mois d'avril, puis en particulier pendant l'été. Au Parlement, de longs débats ont été menés pour poursuivre et conclure plusieurs réformes significatives de la politique économique. Les discussions les plus intenses ont concerné les objets suivants: l'allègement des conditions d'exportation de matériel de guerre, le contrôle des investissements étrangers en Suisse et la modernisation du droit de la concurrence (voir l'analyse APS des interventions).

En raison du retour de Donald Trump à la Maison Blanche, la politique tarifaire a donc été au cœur de l'attention durant l'année 2025. La Suisse a d'abord été touchée en mars par la surtaxe douanière de 25 pour cent instaurée par le gouvernement américain sur les importations d'acier et d'aluminium, passée à 50 pour cent en juin. Ensuite, les autorités étasuniennes ont annoncé fin juillet des droits de douane de 39 pour cent s'appliquant à (presque) toutes les exportations helvétiques, ce qui a poussé le Conseil fédéral à poursuivre les négociations. Face à la pression commerciale, la situation conjoncturelle helvétique s'est dégradée: les prévisions de croissance ont été revues à la baisse et les exportations ont chuté au troisième trimestre. Plusieurs objets ont été déposés par la droite comme par la gauche pour limiter les répercussions des taxes douanières sur l'économie suisse. En fin d'année, une déclaration d'intention a été conclue entre les gouvernements suisses et américains pour ramener les droits de douane à hauteur de 15 pour cent, au même niveau que l'UE. Cette décision a été annoncée peu après une rencontre entre plusieurs entrepreneurs suisses et le président américain, et est entrée en vigueur avec effet rétroactif au 14 novembre. Lors de la session d'hiver, le Parlement a tenu une session extraordinaire dédiée au maintien de l'attractivité économique de la Suisse. En 2026, les négociations se poursuivront afin de transformer la déclaration d'intention en accord commercial bilatéral, ce qui promet d'ores et déjà des débats enflammés.

Egalement dans le domaine de la politique industrielle, le Parlement a âprement débattu de la modification de la Loi sur le matériel de guerre (LFMG) – l'objet le plus discuté dans le chapitre «Politique économique» en 2025 (voir l'analyse APS des interventions). Relancée dans le contexte de la guerre en Ukraine, elle reprend la proposition initiale du contre-projet à l'initiative correctrice d'accorder une compétence dérogatoire au Conseil fédéral pour l'exportation de matériel de guerre, afin notamment d'apporter un soutien stratégique à l'industrie de l'armement, qui traverse une passe difficile. Malgré l'opposition de la gauche qui, dénonçant le non-respect de la neutralité et des droits humains, a déjà annoncé un référendum, les deux chambres se sont prononcées en faveur de la facilitation des exportations et réexportations d'armement.

Les chambres fédérales ont également poursuivi le débat sur la question de l'introduction d'un mécanisme de contrôle des investissements étrangers dans les entreprises helvétiques. Après les importants amendements du Conseil national, élargissant le projet aux entreprises privées, le Conseil des Etats est revenu à une version plus modérée de la Loi sur l'examen des investissements étrangers (LEIE) – où seules les firmes étatiques seront concernées – qui a été validée par les chambres, au regret de la gauche. Enfin, dans la volonté de réduire la dépendance économique de la Suisse, l'Assemblée fédérale a approuvé la première partie de la révision partielle de la Loi sur l'approvisionnement du pays (LAP), visant à réorganiser l'Approvisionnement économique (AEP) en engageant une déléguée ou un délégué à plein temps. En novembre, le Conseil fédéral a présenté son message sur la deuxième partie de la révision, avec l'objectif d'augmenter la réactivité et la résilience de l'organisation en cas de crise.

Un jalon important de la politique structurelle a été franchi en 2025. En effet, le Parlement a achevé le mégaprojet de révision totale de la Loi sur les douanes (LD): ce dernier a été adopté au vote final lors de la session d'été. Concernant la politique structurelle également, un autre projet a été mené à son terme: celui de la Loi sur les biens utilisés pour la torture (LBT). Les deux chambres se sont finalement mises d'accord pour exclure les médicaments de la LBT et le texte a été accepté lors de la session de printemps.

Concernant le droit de la concurrence, le Parlement a réitéré la nécessité de réformer les autorités en matière de concurrence en acceptant la motion Français (plr, VD), malgré les travaux déjà engagés par le Conseil fédéral et l'ouverture de la procédure de consultation sur le projet de réforme de la Commission de la concurrence (COMCO). En parallèle, le Parlement a poursuivi ses travaux sur la révision de la Loi sur les cartels (LCart). Les deux chambres se sont finalement accordées en fin d'année en faveur de l’instauration de critères d’évaluation qualitatifs et quantitatifs – malgré une forte opposition de la gauche pour qui cela affaiblit les pouvoirs de la COMCO. Du côté du Surveillant des prix – qui doit veiller à une concurrence efficace – une décision a été prise pour que l’entreprise Booking.com réduise ses commissions, jugées abusivement élevées.

En contraste avec les prévisions maussades de croissance, l'hôtellerie suisse a affiché un bilan record en termes de nuitées en 2024. A ce sujet, le Conseil fédéral a présenté un projet de révision totale de la Loi sur l’encouragement du secteur de l’hébergement (LESH), afin de promouvoir les investissements dans le secteur touristique.

Finalement, en termes de droit des sociétés, une nouvelle initiative populaire sur les multinationales responsables avait été lancée à la fin de l'année 2024. La récolte de signatures s’est faite en un temps record et l’initiative a pu être déposée quelques mois après son lancement. Au Parlement, plusieurs objets ont été discutés dans le cadre du rapport de la CEP sur la gestion par les autorités fédérales de la crise de Credit Suisse, notamment un postulat visant à étudier comment renforcer le pouvoir de l’actionnariat, adopté dans chaque chambre. Une autre problématique soulevée concernait les difficultés rencontrées par les start-up lors de leur phase de croissance. Un postulat déposé par la CSEC-CE pour soutenir leur développement, a ainsi été adopté par le Conseil des Etats. Plusieurs parlementaires ont également souhaité apporter des précisions juridiques en matière de poursuite et faillite, avec la motion Nantermod (plr, VS), ainsi qu'en matière de droit des obligations, avec l'initiative parlementaire Schwander (udc, SZ).

Dossier: Rétrospective annuelle 2025