MCF 99.055: la loi sur le marché de l'électricité (LME)

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Ayant pris connaissance du rapport Kiener à la fin du mois de juin, le Conseil fédéral a chargé le DFTCE d'élaborer d'ici à l'automne un avant-projet de loi sur le marché de l'électricité qui puisse être rapidement mis en consultation. Ce faisant, le gouvernement a satisfait la motion (Mo. 97.3005) de la Commission de l'environnement, de l'aménagement du territoire et de l'énergie (Ceate) que le Conseil national lui avait transmise en mars et qui invitait l'exécutif fédéral à préparer dans les plus brefs délais une modification de la législation en vue de soumettre le marché électrique suisse à la concurrence dès le 1er janvier 1999 au plus tard, ceci afin d'être en harmonie avec le calendrier de l'UE en la matière. Parallèlement à cette motion qui fut aussi transmise par le Conseil des Etats, la Chambre du peuple a converti en postulat une motion Semadeni (ps, GR) (Mo. 96.3643) demandant également au Conseil fédéral d'adapter les conditions-cadre régissant les installations électriques afin que l'ouverture du marché helvétique de l'électricité puisse se dérouler au même rythme que celui retenu par l'Union, sans pour autant que les objectifs suisses en matière d'énergie, d'environnement et de politique régionale soient remis en question. Ce souci de ne pas sacrifier les standards helvétiques à la seule logique économique de la libéralisation a également été partagé par les associations de protection de l'environnement, par la Conférence des directeurs cantonaux de l'énergie ainsi que par la Conférence gouvernementale des cantons alpins. Bien que ces deux derniers organes aient déclaré soutenir l'ouverture du marché en cours, ils ont néanmoins souhaité que ce processus soit conduit de façon progressive et qu'il soit assorti de mesures d'accompagnement. Ainsi, les cantons alpins ont notamment requis l'introduction d'une taxe d'incitation destinée à renchérir les énergies fossiles, ceci afin d'assurer la capacité concurrentielle des agents énergétiques renouvelables et indigènes, au premier rang desquels figure l'hydroélectricité.

Dossier: Strommarktöffnung/Strommarktliberalisierung

Dans le cadre de l'élaboration de l'avant-projet de loi sur l'ouverture du marché de l'électricité, le groupe écologiste de l'Assemblée fédérale a fait connaître – à l'instar de diverses associations et des cantons – ses positions à l'égard de cette base légale qui sera mise en consultation dans le courant du mois de janvier 1998. Ainsi, les Verts ont formulé une proposition visant à créer un pool national étatique du courant. Fonctionnant en qualité de bourse de l'électricité, cette institution aurait pour principales tâches de fixer le prix du courant électrique ainsi que de réglementer l'équilibre entre l'offre et la demande. De l'avis des écologistes, cet organe créerait les conditions d'un accès non discriminatoire au marché pour tous les producteurs et consommateurs tout en permettant de contrôler l'application de dispositions écologiques dans un régime libéralisé.

Dossier: Strommarktöffnung/Strommarktliberalisierung

Sous la pression de l'ouverture du marché de l'électricité dans l'Union européenne prévue pour 1999, la Suisse s'apprête elle aussi à libéraliser ce secteur jusqu'ici en situation monopolistique. Le Conseil fédéral a mis en consultation en début d'année un avant-projet de loi sur le marché de l'électricité. Ce dernier consiste en une loi cadre qui s'appuie sur les principes de coopération et de subsidiarité. Il propose un accès réglementé au réseau sur la base d'un accord et formule les principes régissant la gestion du réseau, la compatibilité et la sécurité de l'approvisionnement. La libéralisation se fera par étapes sur neuf années. A l'entrée en vigueur de la loi, seuls les gros consommateurs auront accès au libre marché. Cette première étape concernera 114 entreprises suisses consommant plus de 20 gigawattheures annuellement. Elle permettra de libéraliser 21% de l'ensemble du marché. Après trois ans, la part s'élèvera à 33%, puis à 60% après six ans et enfin à la totalité au bout de neuf ans. Parallèlement, les petites usines de distribution devront vendre un courant issu du marché libre à hauteur de 10% pour les trois premières années, de 20% pour les trois suivantes, puis de 50% et atteindre les 100% après neuf ans. Selon l'Union des centrales suisses d'électricité (UCS), les investissements non amortissables (INA) s'élèveraient à CHF 4.8 milliards si l'ouverture se faisait totalement en 1999. Ce montant diminuerait avec une libéralisation progressive pour atteindre entre CHF 700 millions et 1.8 milliard. Les consommateurs devront payer cette somme; le projet de loi autorise en effet les fournisseurs à augmenter temporairement (10 ans au maximum) leurs tarifs afin de rembourser ces investissements. Cela consistera en une hausse du kwh de 0.18 à 0.45 centime, selon l'Office fédéral de l'énergie. Le produit de cette augmentation sera réuni dans un fonds privé qui servira à indemniser les INA ainsi qu'à maintenir ou rénover des centrales hydrauliques. Les centrales nucléaires n'ont pas été exclues de l'indemnisation des INA. Le projet demande d'encourager au moyen d'un fonds de soutien les énergies renouvelables. Les distributeurs d'électricité devront en acquérir une part minimale. Le projet recommande également la création d'une seule société suisse de réseau qui sera issue du rapprochement entre les six grandes compagnies nationales. Une commission d'arbitrage est aussi prévue. Quant aux 900 sociétés de distribution au détail, elles devront se concentrer.
L'avant-projet de loi s'est heurté en procédure de consultation à d'âpres résistances, même si la majorité des acteurs concernés ont reconnu la nécessité de la libéralisation. L'encouragement des énergies renouvelables et la compensation des INA – deux pièces majeures du dossier – ont fait l'objet de critiques acerbes. Il en a été de même pour la création d'une société suisse unique pour l'exploitation du réseau. Concernant la priorité donnée aux énergies renouvelables, le Vorort, l'USAM, l'UCS, Migros, l'Union des villes suisses, plusieurs partis (PRD, PL, UDC) et la commission de la concurrence s'y sont opposés. Parmi les partisans d'un encouragement aux énergies renouvelables, le PS et le PDC ont souhaité maintenir la compétitivité des centrales hydroélectriques avec l'aide d'une taxe sur les énergies non renouvelables. Les cantons de montagne ont réclamé haut et fort cette taxe pour accompagner l'ouverture du marché de l'électricité. Ils ont demandé que la moitié des recettes de la taxe soit affectée à l'encouragement des énergies renouvelables. Concernant l'indemnisation des INA, le Vorort a exprimé son désaccord, estimant que les consommateurs n'avaient pas à payer pour les mauvais investissements des centrales. L'USAM, l'Union suisse des paysans et la commission de la concurrence s'y sont opposés. Les milieux écologistes et le PS se sont opposés à toute indemnisation des INA pour les centrales nucléaires. Concernant la création d'une société suisse unique pour l'exploitation du réseau, la gauche est d'accord, le Vorort, l'UCS, l'UDC et le PRD sont contre. L'UCS a proposé un bureau de coordination pour les lignes du réseau et réclamé un rythme d'ouverture plus lent. La commission de la concurrence, qui a vivement critiqué tout le projet, a néanmoins soutenu ce dernier point.

Dossier: Strommarktöffnung/Strommarktliberalisierung

Le Conseil fédéral a transmis au parlement son message concernant la loi sur le marché de l’électricité (LME). Il rappelle qu’il a décidé, début 1999, de soutenir l’introduction d’une taxe temporaire sur l’énergie et de compenser, de manière limitée, certains cas spécifiques d’INA de centrales hydrauliques. Cette question n’est pas traitée dans la LME. L’exécutif a décidé d’une ouverture sur six ans, alors que l’avant-projet en envisageait neuf. De plus, il a refusé de prévoir une pause de réflexion après six ans, ce qui aurait permis d’estimer la situation au niveau européen. Les exploitants des réseaux devront acheminer sans discrimination le courant des clients autorisés qui le souhaiteront. Pourront avoir accès au réseau, dès l’entrée en vigueur de la loi, les consommateurs dont la demande annuelle dépasse 20 gigawattheures (GWh), soit quelque 110 entreprises. En même temps, les entreprises de distribution auront également accès au marché, cela pour les quantités d’énergie fournies à des clients autorisés, ainsi qu’à hauteur de 10 % de leurs fournitures à des clients captifs. Cette première étape correspondra à une ouverture de 21 % du marché. Après trois ans, le seuil devrait s’abaisser à 10 GWh pour les clients, et la limite imposée aux entreprises distributrices sera relevée à 20 %. Après six ans, les entreprises de distribution et les consommateurs auront accès au libre marché sans restriction. Finalement, l’industrie de l’électricité devra instituer une société suisse pour l’exploitation du réseau de transport. Les exploitants auront trois ans pour convenir d’une solution.

Dossier: Strommarktöffnung/Strommarktliberalisierung

Le président de l’Union des centrales suisses d’électricité (UCS) a réagi vivement au message de l’exécutif, jugeant trop rapide le projet de libéralisation en six ans. Toutefois, le conseiller fédéral Leuenberger a relativisé la situation, estimant que le parlement aura besoin au minimum de deux ans pour traiter le projet, si bien que la loi n’entrerait en vigueur qu’en 2002. L’ouverture totale du marché ne devrait donc pas être effective avant 2008. Par la suite, le président de l’UCS a rencontré, avec d’autres acteurs du marché de l’électricité, la Ceate du Conseil national en vue de l’examen du projet de l’exécutif. Le président de l’UCS a réclamé une adaptation au marché européen qui aura en 2007 des degrés d’ouverture divers: 33 % en France, 40 % en Italie, 50 % en Autriche et 100 % en Allemagne. Il souhaiterait que la Suisse ait la possibilité de réorienter sa politique en 2007, en fonction de la situation européenne. Il a également réclamé de régler au niveau de la LME la question des INA des centrales hydrauliques, pour éviter un vide juridique si les taxes énergétiques étaient rejetées en référendum.

Dossier: Strommarktöffnung/Strommarktliberalisierung

En juillet, la Ceate du National s’est penchée sur le projet de loi de l’exécutif. Dans un premier temps, elle a souhaité attendre l’adoption de la taxe sur l’énergie par les deux Chambres, le projet devant régler la question de l’indemnisation des INA. La Ceate envisageait de laisser cet examen au nouveau parlement, élu en novembre. En septembre, elle est toutefois revenue sur sa décision, car sa remplaçante (nouvelle Ceate) n’aurait pas pu traiter l’objet avant décembre. En novembre, elle a proposé (12 voix contre 11) de lier l’entrée en vigueur de la LME avec l’acceptation populaire de la taxe d’incitation de 0.3 ct/kWh sur les énergies non renouvelables. De plus, elle a accepté l’idée d’une société nationale unique pour l’exploitation du réseau et refusé de traiter la question de l’indemnisation des INA dans la LME. Elle s’est prononcée pour une ouverture progressive sur six ans et pour l’accès immédiat au marché libéralisé des producteurs d’énergies renouvelables et des petites centrales hydrauliques.

Dossier: Strommarktöffnung/Strommarktliberalisierung