Initiative populaire visant à abaisser l'âge de la retraite des hommes (à 62 ans) et pour les femmes (à 60 ans; BRG 85.045)

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Aux yeux de l'Union syndicale suisse (USS), la question d'un abaissement généralisé de l'âge de la rente AVS reste toutefois une alternative à l'introduction d'un âge flexible de la retraite. Aussi a-t-elle organisé un vaste sondage auprès de ses membres afin de déterminer la voie à suivre. Les résultats ont montré que dans leur grande majorité les syndiqués restaient favorables à l'abaissement de l'âge de la retraite]. Les Organisations progressistes de Suisse (POCH) n'ont pas attendu le résultat de la consultation pour lancer une initiative «visant à abaisser à 62 ans pour les hommes et à 60 ans pour les femmes l'âge donnant droit à la rente AVS». Le texte tient toutefois compte de la possible introduction de la retraite flexible. A l'appui de leur initiative, les POCH ont invoqué l'idée que le progrès technique et l'accélération des cadences épuisaient prématurément les travailleurs. Selon les initiants, l'augmentation subséquente des primes ne devrait pas dépasser 0.6 à 0.7% des salaires, les employeurs contribuant pour une part identique. Le lancement de cette initiative a soulevé un tollé de récriminations tant du côté du patronat que de la part des alliés traditionnels ou occasionnels des POCH. Le rapprochement avec une initiative similaire lancée par les mêmes organisations progressistes en 1974, et rejetée en votation populaire quatre ans plus tard, n'a pas manqué d'être fait. L'ensemble du monde politique a fustigé l'attitude des protagonistes, qualifiant leur action d'électoraliste.

Dossier: Debatten um das Frauenrentenalter

Parallèlement à ces travaux, les Organisations progressistes (POCH) ont fait campagne pour leur initiative en vue de l'abaissement, cette fois «à 62 ans pour les hommes et à 60 ans pour les femmes», de l'âge donnant droit à la rente AVS. Après que les Parti du Travail (PdT), Parti socialiste autonome (PSA) et Parti socialiste ouvrier (PSO) eurent apporté leur soutien, le succès de la récolte de signatures semblait acquis en fin d'année. Par ailleurs, une étude prospective a avancé l'hypothèse que si les conditions de croissance actuelles se maintenaient, une augmentation du taux de cotisation de l'AVS ne serait pas nécessaire pendant les soixante prochaines années. Tandis que le PdT se félicitait à ce propos de l'«extrême solidité du premier pilier», l'USS faisait observer que le chiffre de 2% de croissance annuelle des salaires réels lui semblait trop optimiste.

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Dans son message relatif à l'initiative populaire des POCH, laquelle vise à abaisser à 62 ans pour les hommes et à 60 ans pour les femmes l'âge donnant droit à la retraite, l'exécutif invoque avant tout des motivations de nature financière pour recommander le rejet de celle-ci sans lui opposer de contre-projet. En effet, la concrétisation de cette proposition entraînerait des charges supplémentaires, jugées inacceptables, pour les pouvoirs publics, les salariés et l'économie nationale, ainsi que des modifications dans d'autres branches de notre sécurité sociale, à la défaveur de certaines catégories d'assurés. De même, la prétendue rigidité de la formule des initiants accentuerait les effets négatifs de la structure des âges sur les comptes de l'AVS et les difficultés sur le front de l'emploi, principalement pour les jeunes. Quant à ses aspects humains, un système de retraite anticipée schématique et unilatéral ne correspondrait pas à un besoin général. Les associations patronales se sont estimées satisfaites de cet argumentaire. Elles ont toutefois regretté que le Conseil fédéral ait manqué l'occasion de tirer la 10e révision de son néant, en se soustrayant à la formulation d'une alternative. De leur côté, les syndicats ont condamné le caractère par trop partisan de ce message et le refus catégorique du gouvernement d'entrer en matière sur le terrain des auteurs de l'initiative. L'USS a notamment relevé que la position gouvernementale signifiait le rejet de toute forme d'abaissement de l'âge de la retraite et même de la retraite à la carte, si celles-ci entraînaient de nouvelles dépenses pour l'assurance.

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Les Chambres fédérales ont clairement dit non à l'initiative populaire déposée par les Organisations progressistes (POCH) et appuyée par le Parti du travail et le Parti socialiste ouvrier demandant un abaissement à 62 ans pour les hommes et à 60 ans pour les femmes de l'âge donnant droit à la rente AVS. Au cours des délibérations, tant au Conseil national qu'au Conseil des Etats, les intervenants n'ont cessé de rappeler que l'augmentation du nombre des rentiers et la baisse correspondante du nombre des cotisants voulues par l'initiative entraîneraient pour l'AVS un surcroît de charges de plusieurs milliards par année, dont le financement exigerait des majorations de primes et des contributions supplémentaires de la part des pouvoirs publics. Mais les opposants n'ont pas non plus manqué de faire ressortir la contradiction entre l'initiative et l'espérance de vie plus élevée, montrant ainsi que l'adoption d'une limite d'âge plus basse, mais figée, empêcherait l'instauration d'une limite d'âge flexible. Quant aux partisans de ladite initiative, ils ont rappelé que l'abaissement de l'âge de la retraite demeurait un souhait pour ceux qui, parmi la population active, sont soumis à des conditions de travail pénibles et à un perpétuel processus d'adaptation aux nouvelles technologies. Et la conseillère nationale A. Fetz (poch, BS) de terminer le plaidoyer en faveur de l'initiative en indiquant que si cette dernière ne pouvait à elle seule être un remède au chômage, elle n'en demeurerait pas moins une contribution efficace. Mais, en complète opposition avec la volonté des initiants, l'avis a prévalu que, pour résoudre les futurs problèmes de l'AVS, liés à l'évolution démographique, il fallait plutôt relever l'âge de la retraite des femmes au même niveau que celui des hommes.

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Suivant les recommandations du Conseil fédéral et des Chambres, le peuple a rejeté l'initiative lancée par les Organisations progressistes (POCH) demandant qu'en l'espace de trois ans l'âge ouvrant le droit à la rente AVS soit abaissé à 62 ans pour les hommes et à 60 ans pour les femmes. Soutenue par le Parti du travail et le Parti socialiste ouvrier, l'initiative précisait en outre que cet âge pouvait être ultérieurement abaissé par voie législative, mais qu'il ne pouvait être relevé. En effet, les initiants proposaient que l'âge donnant droit aux rentes soit atteint en deux étapes. La première fixant la limite à 62 ans pour les hommes et 60 pour les femmes, la seconde devant établir l'égalité entre homme et femme. Au cours du débat qui a précédé le scrutin populaire, partisans et adversaires de l'abaissement de l'âge de la retraite ont tour à tour invoqué des motifs d'ordre démographique, financier, économique et social pour étayer leur argumentation.

Les opposants ont estimé que les conséquences financières de cette requête populaire n'étaient supportables ni pour les salariés ni pour l'économie et pas davantage pour les pouvoirs publics. L'acceptation de cette initiative aurait entraîné, selon le Conseil fédéral, des dépenses supplémentaires de l'ordre de 2,1 milliards de francs par an. Comme les initiants excluaient toute possibilité d'abaisser le montant des rentes, il en aurait résulté, toujours selon les estimations du gouvernement, une augmentation des prélèvements sur les salaires de 1,55% ainsi qu'un accroissement de la charge de la Confédération et des cantons de 295 millions de francs. L'initiative aurait également eu des répercussions d'ordre financier sur d'autres branches de la sécurité sociale, notamment sur le régime des prestations complémentaires à l'AVS et sur la prévoyance professionnelle. A propos du financement, les initiants ont tenu à rappeler que les contributions de la Confédération avaient été réduites de 25 à 20% lors de la 9e révision de l'AVS et ont suggéré que l'accroissement de la charge des pouvoirs publics soit compensé par une diminution des dépenses militaires afin de n'entraîner aucune augmentation des cotisations salariales.
L'inexorable vieillissement de la population, conjugué à une espérance de vie en constante augmentation, a permis aux opposants de présenter l'initiative comme dangereuse pour le financement futur de l'AVS. En effet, l'évolution démographique de la Suisse entraîne une détérioration du rapport entre cotisants et rentiers. Une baisse de l'âge donnant droit à la rente constituerait à leurs yeux une mise en danger de la sécurité sociale. Autre argument brandi par les opposants, la menace que fait peser l'initiative sur la 10e révision de l'AVS.

L'aspect social et humain de l'âge de la retraite a également servi d'argument pour les partisans comme pour les adversaires de l'initiative. Pour les premiers cités, un abaissement de l'âge de la retraite permet une réelle amélioration de la qualité de la vie, répond à une nécessité sociale et s'appuie sur un réel désir de nombreux salariés. Quant aux seconds, ils ont souligné que, face à une espérance de vie toujours plus longue, de nombreux travailleurs redoutent un retrait prématuré de la vie professionnelle, signe pour eux d'une mise au ban de la société.


Initiative visant à abaisser l'âge donnant droit à la rente AVS. Votation du 12 juin 1988
Participation: 42,0%
Non: 1 153 540 (64,9%) / 21 cantons
Oui: 624 390 (35,1%) / 2 cantons (TI, JU)

Mots d'ordre:
Non: PRD, PDC, UDC, PLS, AdI, PEP, PES, AN, PA; Vorort, UCAP, USAM, USP, Assoc. suisse des employés.
Oui: PSS, POCH, PST, Alliance verte; USS, CSCS, Confédération romande du travail.


L'analyse Vox réalisée à l'issue du scrutin a démontré que le souverain avait rejeté l'initiative en raison des risques financiers qu'elle aurait pu entraîner. Pour les opposants, la Suisse n'est pas assez riche pour supporter un accroissement du nombre des personnes jouissant des rentes AVS. Toujours selon cette analyse, le déséquilibre croissant entre le nombre de cotisants et celui des bénéficiaires des rentes a également constitué un motif de rejet. La minorité qui s'est dégagée des urnes et les motifs qui ont incité les votants à rejeter l'initiative, permettent cependant d'avancer l'hypothèse suivant laquelle un relèvement de l'âge de la retraite serait mal perçue par une large part de la population. Ce résultat peut conforter la position du Conseil fédéral qui, malgré les pressions des milieux économiques, a refusé de procéder à un relèvement de l'âge de la retraite pour les femmes dans son programme pour la 10' révision de l'AVS.

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