Message sur l’armée 2023 (MCF 23.025)

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Le message sur l’armée 2023 se concentre sur deux points centraux.
Dans le premier point, il organise les dépenses de 2023 avec des crédits d'engagement de CHF 1.9 milliards. La Confédération souhaite répartir ces crédits d'engagement sur plusieurs achats et investissements. Ainsi, il est question d'acheter du matériel dans le cadre du programme d'armement afin de combler quelques lacunes (pour un total de CHF 725 millions). D'une part, l'achat de 24 chars de grenadiers à roues supplémentaires est prévu (CHF 217 millions). D'autre part, des munitions de lance-mines 12 ayant été mises hors-service seraient transformées en munitions pour les nouveaux mortiers 12 cm 16 acquis via les programmes d'armement 2016 et 2022 (CHF 49 millions). En addition, le DDPS souhaite renforcer la protection aérienne du territoire. En effet, après l'achat du système de défense sol-air Patriot et des F-35A, il a été estimé que des engins guidés supplémentaires seraient nécessaires pour une combinaison optimale avec le système Patriot (CHF 300 millions). Antérieurement, le remplacement du système de conduite Florako par le système Sky View avait été accepté par le Parlement. Ce changement engendre des frais supplémentaires dus à une sous-estimation des coûts. Leur prise en charge se monterait à CHF 61 millions. De plus, afin de garantir la compatibilité avec le système de conduite, du matériel informatique supplémentaire devrait être acquis pour le centre de calcul du DDPS (pour CHF 98 millions).
La cybersécurité, sujet actuellement important pour les parlementaires, est aussi renforcée grâce à l'acquisition de nouveau matériel (CHF 615 millions). La proposition comprend trois volets. Le premier traite de l'étude de projets ainsi que des essais et préparatifs relatifs aux achats (CHF 150 millions). Le deuxième s'occupe de l’équipement personnel et du matériel à renouveler (CHF 355 millions) et le troisième s'affaire avec les questions relatives aux munitions d’instruction et à la gestion des munitions (CHF 110 millions). De plus, le budget total prévu pour l'acquisition de matériel permettra aussi que les avions d'écolage et d'entraînement ainsi que les PC-7 soient gardés à niveau.
Enfin, l'armée prévoit aussi de rénover et développer ses infrastructures immobilières (CHF 555 millions). Ainsi, la rénovation d’une installation de conduite, la remise en état de deux installations de télécommunication, le développement des infrastructures logistiques dans le nord du Tessin et la rénovation de bâtiments d’instruction à Thoune sont planifiés par le Conseil fédéral. Les rénovations visent aussi à s'aligner sur les objectifs environnementaux de la Suisse, notamment en promouvant les énergies renouvelables, en remplaçant les chauffages à mazout et en isolant mieux les bâtiments. De plus, l'installation de panneaux photovoltaïques, permettant une production électrique annuelle équivalente à la consommation de 800 ménages, est prévue.
Dans le deuxième point, le message prévoit d'élever le plafond des dépenses de l'armée entre 2021 et 2024. Il passerait de CHF 21.1 à 21.7 milliards. Cette mesure devrait permettre au budget de l'armée d'atteindre 1 pour cent du PIB helvétique au plus tard en 2030, comme souhaité par le Parlement.

Dossier: Armeebotschaften

Le message sur l’armée 2023 a été présenté au Conseil national, ce qui a provoqué un grand nombre de réactions, soit 80 prises de parole, plus de dix propositions de minorité et 15 votations. De son côté, la CPS-CN a longuement débattu et dans l'ensemble, elle recommande d'entrer en matière sur les quatre aspects centraux du message. Les trois premiers (programme d'armement, acquisition de matériel – notamment cyber – et rénovation des infrastructures immobilières) n'ont pas été débattus. La CPS-CN a ajouté une clause qui prévoit la mise hors service de 25 chars 87 Léopard et le renvoi à leur fabricant, l'Allemagne. Les dirigeants allemands ont certifié à la Suisse que les chars resteraient sur leur territoire ou dans un pays membre de l'OTAN, mais ne seraient en aucun cas exportés vers l'Ukraine. Après avoir pris connaissance de la position des dirigeants de l'armée sur le sujet, le Conseil fédéral a soutenu cette proposition. Lors des votes finaux du Conseil national, le premier point a été accepté par 105 voix contre 47 (41 abstentions). Les oppositions provenaient des Vert-e-s et du groupe UDC. Les deuxième et troisième points ont, quant à eux, été acceptés à l'unanimité. La mise hors service des 25 chars 87 Léopard a aussi été acceptée par 100 voix contre 84 et 9 abstentions. Les critiques provenaient à nouveau du groupe UDC et des Vert-e-s. Les premiers ont estimé que tous les chars étaient encore nécessaires pour le bon fonctionnement de l'armée et les seconds n'ont pas critiqué la mise hors service des chars, mais plutôt leur renvoi en Allemagne, qui pourrait mettre en danger la neutralité suisse.
Le débat le plus important s'est tenu autour du quatrième point du message, à savoir le rehaussement du plafond des dépenses de l'armée de CHF 600 millions pour la période 2021-2024. En effet, une minorité rose-verte s'est très clairement opposée à cette augmentation. Fabien Fivaz (vert-e-s, NE), après avoir qualifié le DDPS « d'acheteur compulsif », a argumenté que les menaces contre le pays ne se limitaient pas à une guerre totale sur le sol suisse. En effet, il a évoqué les cyberattaques, la désinformation et les changements climatiques avant d'affirmer que les investissements prévus par l'armée ne permettront pas d'y remédier. De plus, le député Fivaz a dénoncé les coupes de budgets dans des domaines essentiels: « la Confédération va devoir se serrer la ceinture dès 2024 dans des domaines clés pour l'avenir du pays. Nous allons ainsi économiser dans la formation, la recherche et l'innovation; nous allons économiser dans des domaines qui sont essentiels à notre subsistance, en premier lieu l'agriculture, et dans des domaines dans lesquels nous pouvons jouer un rôle à l'international, comme la coopération au développement. L'armée sera le seul secteur qui ne sera pas touché par les coupes; pire, son budget va augmenter. »
En réponse, la majorité a estimé, au vu de la situation en Ukraine, qu'il est important que l'armée dispose de ressources suffisantes pour assurer sa mission de protection. De plus, en raison des dépenses dans d'autres départements, il a été avancé que l'armée était en droit de recevoir plus. Aussi, Thomas Hurter (udc, SH) a montré un peu de frustration en accusant les minorités de refuser, une fois de plus, de donner à l'armée les moyens dont elle aurait besoin.
Sarah Wyss (ps, BS), membre de la CdF-CN qui a aussi débattu du message, a appelé à ne pas entrer en matière sur l'augmentation de CHF 600 millions, notamment car l'armée aurait encore de la marge dans ses dépenses et qu'elle devrait d'abord l'utiliser avant de demander davantage. De plus, elle a critiqué cette manière inhabituelle d'augmenter le plafond des dépenses sur une enveloppe budgétaire en cours. Au terme des débats, le rehaussement du plafond des dépenses de l'armée de CHF 600 millions sur la période 2021-2024 a finalement été accepté par 156 voix contre 13 (24 abstentions).
En résumé, le Conseil national est entré en matière sur l'ensemble du message par 108 voix contre 85 (aucune abstention). Les oppositions venaient du camp rose-vert. Parmi les autres aspects intéressants, il est aussi possible de noter les 12 propositions de minorités et le fait que le Conseil fédéral ait repoussé le délai fixé concernant l'augmentation progressive du budget de l'armée. Ainsi, il atteindrait 1 pour cent du PIB en 2035 et non en 2030, comme premièrement décidé. Pierre-Alain Fridez (ps, JU) a évoqué le « début de la guerre en Ukraine et des discours catastrophistes du printemps 2022 » pour expliquer la première décision et le fait que « le Conseil fédéral semble implicitement admettre que les menaces avancées au printemps 2022 ont été largement surestimées » pour justifier ce changement.

Dossier: Armeebotschaften

Alors que la CPS-CE avait déjà annoncé, en juillet 2023, de proposer l'entrer en matière sur les 4 arrêtés fédéraux et avait approuvé par 11 voix contre 0 (une abstention) le relèvement du plafond des dépenses entre 2021 et 2024 de CHF 21.1 à 21.7 milliards, elle a terminé son examen du message à la fin août. La commission a décidé par 12 voix et une abstention d'approuver le message. La majorité de la commission (9 voix contre 3 et une abstention) a rejoint la position du Conseil national, qui souhaite la mise hors service de 25 des 96 chars Leopard 87 en possession de l’armée suisse. En effet, la majorité a estimé que la vente de ces 25 chars ne pénaliserait pas l'armée suisse mais fortifierait l'image de la Suisse en Europe. La commission considère que la question autour du renforcement du programme d'armement devrait être posée en 2024, quand le dialogue sur les capacités militaires nécessaires débutera. La minorité a invoqué la guerre en Ukraine pour justifier le besoin de conserver ces 25 chars actuellement au parking.
En outre, la commission s'oppose au remplacement des 71 chars d'assaut Leopard 87 restants par un système de défense plus moderne. La majorité a justifié cette décision par la marge de manœuvre supplémentaire que permettent les chars Leopard s'ils restent dans l'arsenal militaire, tandis que la minorité a imploré une promesse d'achat de systèmes blindés sur le moyen terme.
Concernant les autres arrêtés, une majorité y a adhéré. De plus, la commission s'est montrée concernée par le financement de l'armée et est restée sur sa position quant à l'augmentation des dépenses de cette dernière, souhaitant (toujours) qu'elles atteignent au moins 1 pour cent du PIB d'ici 2030.

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