Rétrospective annuelle 2023: Agriculture

2023 a marqué la fin d'un long processus parlementaire central pour l'agriculture: la Politique agricole 22+ (PA22+) a été approuvée par les député.e.s lors de la session d'été. Pour rappel, la première mouture avait été mise en consultation en 2018, avant qu'elle ne soit revue et précisée par le Conseil fédéral en 2022 à la demande du Parlement. Finalement, c'est une version édulcorée sur les questions écologiques qui en est ressortie et qui a été approuvée par les deux conseils. Deux nouveautés sont à noter: la mise en place d'une aide financière pour les assurances contre les pertes de récoltes et l'amélioration du statut de la conjointe travaillant sur l'exploitation. Le Conseil fédéral est, de plus, chargé de présenter un projet d'ici à 2027 développant la stratégie agricole à l'horizon 2050. Ce projet devra inclure l'entier de la chaîne alimentaire. Dans le cadre de ces débats, la modification de la loi sur les épizooties (LFE) a été acceptée, tandis qu'il a été décidé de traiter la réforme du droit foncier rural dans un deuxième temps.

Alors qu'aucun objectif climatique chiffré n'a été inscrit dans la PA 22+, le Conseil fédéral a présenté sa stratégie climatique pour l'agriculture en septembre. Tous les acteurs de l'alimentation sont ainsi appelés à agir pour réduire les gaz à effet de serre. La stratégie prévue par le Conseil fédéral doit permettre à la fois de réduire les émissions et d'aider le secteur à s'adapter aux changements climatiques. L'empreinte des gaz à effet de serre par personne liée à l'alimentation devra être réduite de deux tiers d'ici à 2050 par rapport à 2020, tandis que les émissions de l'agriculture devront diminuer de 40 pour cent par rapport à 1990. Le Conseil fédéral a notamment fait part de sa volonté de voir la consommation de produits carnés réduite afin d'atteindre un système alimentaire plus durable, ce qui n'a pas manqué de faire réagir certains milieux agricoles.

S'agissant de la protection de la nature, le Parlement a décidé de repousser d'une année l'entrée en vigueur de l'obligation de consacrer 3.5 pour cent des grandes cultures à des surfaces de promotion de la biodiversité. Cette mesure, qui s'inscrit dans le cadre de la mise en œuvre de l'Iv. pa 19.475, a été critiquée à de nombreuses reprises, notamment par l'USP qui a réclamé ce délai d'une année supplémentaire.

Comme en 2022, la question de la présence du loup et de sa gestion sur le territoire suisse a enflammé les médias, en particulier suite à la mise en consultation de la nouvelle ordonnance du Conseil fédéral qui autorise le tir préventif de meutes entières. Les associations de protection de la nature redoutent que ces nouvelles dispositions ne réduisent de 60 à 70 pour cent la population du grand prédateur et ne mette en danger sa survie sur le territoire. Quelques mois auparavant, le Conseil fédéral assouplissait déjà une première fois les critères permettant le tir du loup, alors qu'on apprenait que le nombre d'attaques avait baissé, malgré l'augmentation exponentielle d'Ysengrin sur le territoire. La plupart des cantons concernés ont d'ores et déjà annoncé leur volonté de tir, alors que les associations environnementales s'opposent juridiquement à l'abattage de certaines meutes notamment en Valais et dans les Grisons. Pour rappel, une révision de la loi sur la chasse (LChP) avait été avalisée par le Parlement en décembre 2022. Nul doute que les débats se poursuivront en 2024, alors que la nouvelle ordonnance connaîtra une phase-test d'une durée limitée et qu'une initiative populaire sur la question de la place du loup en est au stade de la récolte de signatures.

D'autres animaux et leur bien-être ont également été sujet à débat cette année, notamment dans le cadre des discussions sur le foie gras qui, à une voix près, a évité une interdiction d'importation. Une obligation d'étiquetage des méthodes de production sera toutefois introduite pour ce met de la gastronomie française. En parallèle aux débats parlementaires, une initiative populaire demandant d'inscrire dans la Constitution fédérale une interdiction d'importation est en cours de récolte de signatures. Une autre initiative, lancée en parallèle, souhaite en finir avec l'importation des produits à base de fourrures; un sujet traité à de nombreuses reprises par le Parlement. Ces dernières années, s'agissant des produits à base d'animaux, le Parlement a préféré recourir à la transparence plutôt que d'interdire les produits ou certaines pratiques de production. Ces deux initiatives populaires seront, peut-être, l'occasion pour le Parlement nouvellement élu de se positionner à ce sujet. S'agissant du bien-être animal, une nouvelle initiative populaire s'attaquant à l'expérimentation animale a été lancée, alors que la dernière initiative en date a connu un échec cuisant dans les urnes l'année passée. Le lancement de cette initiative a été très peu médiatisé, contrairement au procès du scandale de l'élevage équin à Hefenhofen qui a été suivi avec une grande attention, comme le révèlent les chiffres de l'analyse APS des journaux pour le mois de mars. La grippe aviaire a aussi bénéficié d'un écho médiatique important, alors que les élevages avicoles devaient se soumettre durant de long mois à des quarantaines.

Tandis que la transparence s'impose, pour le Parlement, comme la voie royale s'agissant des méthodes de production, elle commence aussi à bousculer les grands commerces quant à la formation des prix des denrées alimentaires et particulièrement des marges des détaillants. En 2023, le Conseil national s'est positionné par deux fois, sur l'Iv. pa. 22.477 et la Mo. 21.3730, en faveur d'une plus grande transparence sur la formation des prix. La balle est désormais dans le camp de la chambre des cantons que se prononcera en 2024. Ce débat se déroule dans un contexte de médiatisation répétée d'affaires sur les marges des commerces de détail.

Dossier: Jahresrückblick 2023