Après l'examen du message sur l'armée 2024 par la Commission de la politique de sécurité du Conseil national (CPS-CN), le Conseil national a pris position sur cet objet. S'exprimant au nom de la CPS-CN, le conseiller national Jean-Luc Addor (udc, VS) a d'abord rappelé à ses collègues que le Conseil des Etats, la Commission des finances du Conseil national (CdF-CN) et la CPS-CN n'étaient pas d'accord sur la manière de procéder au financement des futures dépenses de l'armée. Pour la CPS-CN, il s'agirait soit d'établir un mécanisme de compensations composé de cinq variantes, soit de créer un fonds d'une valeur de CHF 10 milliards afin que les dépenses de l'armée représentent 1 pour cent du PIB d'ici à 2035. L'élu valaisan a rappelé que seule cette deuxième option avait été acceptée par une très faible majorité des membres de la commission. C'est pourquoi la commission a non seulement proposé le rejet de l'arrêté fédéral relatif au plafond des dépenses, mais aussi «une variante subsidiaire d'adhésion à la version du Conseil des Etats» dans le cas où le Conseil national voterait tout de même en faveur de cet objet.
Par la suite, le conseiller national Jacques Nicolet (udc, VD), qui s'exprimait au nom de la CdF-CN, a indiqué aux parlementaires que sa commission proposait aux conseiller.ère.s nationaux.ales de soutenir l'arrêté fédéral sur l'acquisition de matériel de l'armée. La CdF-CN leur recommande de voter en faveur d'un crédit d'engagement d'une valeur de CHF 660 millions pour acquérir un système de défense sol-air de moyenne portée, soutient l'augmentation du plafond des dépenses de CHF 4 milliards proposée par la Commission de la politique de sécurité du Conseil des Etats (CPS-CE) et souhaite réduire de CH 500 millions les dépenses d'exploitation de l'armée afin d'acquérir plus d'armement. Le conseiller national Nicolet a appelé ses collègues à «entrer en matière sur ce projet» et à voter en faveur de toutes les modifications proposées par la CdF-CN.
De son côté, Fabien Fivaz (vert-e-s, NE), qui avait déposé en commission une proposition de minorité demandant de ne pas entrer en matière sur l'arrêté fédéral sur les valeurs-cibles de l'armée, a déclaré s'opposer à cet arrêté fédéral notamment parce que les scénarios de menace envisagés par le Conseil fédéral avaient été mal conçus et étaient trop flous pour permettre à l'armée de prendre des décisions stratégiques importantes. D'autres parlementaires, tels que Martin Candinas (centre, GR) ont également présenté les propositions de minorité qu'ils avaient déposées en commission. Celle de Martin Candinas et de ses collègues du Centre, visait à soutenir le plafond des dépenses prévu au départ par le Conseil fédéral, alors que la majorité de la commission a décidé de le relever de CHF 4 milliards. Il s'agissait de respecter les règles du frein à l'endettement en finançant les dépenses supplémentaires de l'armée grâce à la création d'un fonds de CHF 10 milliards. En effet, selon le conseiller national grison, «würde uns als Parlament auch den grösstmöglichen politischen Spielraum für die Budgets der nächsten Jahre geben». Il a toutefois avoué ne pas avoir compris pourquoi le PS et les Vert-e-s, qui avaient soutenu l'idée d'un fonds pour financer les dépenses supplémentaires de l'armée, s'étaient tout de même opposés au plafond des dépenses proposé par le Conseil fédéral. Par la suite, la conseillère nationale Priska Seiler Graf (ps, ZH) a tenté de clarifier la position de son parti. Elle a ainsi affirmé que les socialistes entreraient en matière sur l'ensemble des arrêtés fédéraux soumis au vote, donc aussi sur l'arrêté fédéral sur le plafond des dépenses. A cet égard, elle a tenu à indiquer que son parti serait prêt à soutenir une augmentation des dépenses de l'armée, mais seulement si celles-ci devaient s'inscrire dans le cadre du fonds proposé par le Centre. Elle n'a pas hésité à indiquer à ses collègues qu'il s'agissait là, pour le PS, d'un «sehr, sehr grosser Schritt».
Comme le groupe socialiste, le groupe libéral-radical et le groupe du Centre ont décidé d'entrer en matière sur tous les objets rattachés au message sur l'armée. S'exprimant au nom du PLR, la conseillère nationale Jacqueline de Quattro (plr, VD) a ainsi affirmé que le contexte géopolitique actuel était marqué par un retour de «la loi du plus fort». C'est ce qui l'a conduite à affirmer que le PLR validait toutes le les dépenses prévues par le Conseil fédéral dans le cadre de ce message sur l'armée. Pour le PLR, l'augmentation du budget de la défense est légitime si des économies sont faites dans d'autres domaines d'activité de la Confédération. La conseillère nationale Isabelle Chappuis (centre, VD), qui s'exprimait au nom du Centre, a tenu des propos en partie similaires à ceux de sa collègue du PLR, puisqu'elle a indiqué que l'augmentation des moyens de l'armée était justifiée en raison du fait qu'il y aurait aujourd'hui «114 guerres dans le monde, dont une en Europe».
S'exprimant au nom du groupe des Vert-e-s, le conseiller national Gerhard Andrey (vert-e-s, FR) a quant à lui indiqué que son parti était opposé à l'augmentation des sommes dont disposerait l'armée pour les prochaines années. Il a rappelé la posture pacifiste de son parti. En outre, il a dénoncé la course aux armements à laquelle la Suisse, comme d'autres pays européens, se livre depuis le début de la guerre en Ukraine. Pour le député, le réarmement ne serait pas le seul moyen d'assurer la sécurité de la Suisse. Les autorités devraient en effet se préparer à faire face à d'autres menaces, telles que les cyberattaques, la désinformation ou les pandémies. L'élu fribourgeois a par ailleurs indiqué ne pas comprendre pourquoi les moyens financiers de l'armée seraient augmentés à un moment où tous les autres domaines d'activité de la Confédération doivent faire des économies.
Prenant la parole pour défendre la position du groupe UDC, le conseiller national Thomas Hurter (udc, SH) a salué ce message sur l'armée, en affirmant notamment qu'il était heureux que le Parlement puisse débattre des valeurs-cibles de l'armée pour les années à venir. Il a jugé positif le fait que ce message sur l'armée soit plus ambitieux que les précédents, bien que cela soit en grande partie dû à des changements d'ordre géopolitique en Europe. L'UDC s'est donc prononcée en faveur des cinq arrêtés fédéraux présents dans le message. A cet égard, Thomas Hurter a indiqué que son parti soutenait l'augmentation de CHF 4 milliards du plafond des dépenses proposée en commission. Il a par ailleurs appelé ses collègues à voter pour une minorité déposée par le conseiller national Michael Götte (udc, SG) qui visait à permettre un meilleur suivi des valeurs-cibles élaborées par le Conseil fédéral. Il a par ailleurs affirmé que l'UDC ne soutiendrait pas la mise en place d'un fonds pour financer les dépenses supplémentaires de l'armée.
Finalement, la ministre de la défense Viola Amherd a appelé les membres du Conseil national à entrer en matière sur tous les arrêtés fédéraux contenus dans le message sur l'armée et à rejeter toutes les propositions de non entrée en matière. Elle a par ailleurs indiqué que l'importance particulière portée aux orientations stratégiques de l'armée pour les années à venir se basait sur la recommandation d'un groupe d'expert.e.s qu'elle avait mandaté.e.s en 2019. Ces expert.e.s ont proposé que le Parlement joue un plus grand rôle dans les débats relatifs aux grandes orientations de l'armée et à ses moyens. Elle a aussi justifié l'augmentation des moyens de l'armée proposée dans cet arrêté fédéral en se référant au contexte géopolitique actuel.
Lors du vote, les conseiller.ère.s nationaux.ales ont accepté d'entrer en matière sur tous les arrêtés fédéraux. La minorité Fivaz – défendue par les partis de gauche – , qui demandait de ne pas entrer en matière sur l'arrêté relatif aux valeurs-cibles de l'armée jusqu'en 2035 a donc été rejetée par 129 voix contre 59 et 1 abstention. Le Conseil national a par ailleurs suivi la recommandation de la CdF-CN – allant à l'opposé de ce que préconisait la majorité de la CPS-CN – et a décidé par 167 voix contre 23 et aucune abstention d'entrer en matière sur l'arrêté fédéral relatif au plafond des dépenses pour 2025-2028. Seuls les Vert-e-s se sont opposés à l'entrée en matière sur cet objet.
Lors du vote qui a suivi la discussion par article, les membres du Conseil national ont accepté presque toutes les propositions de majorité élaborées en commission relativement à l'arrêté fédéral sur les valeurs-cibles de l'armée. Les conseiller.ère.s nationaux.ales se sont par la suite alignés par 124 voix contre 59 et aucune abstention sur ce que proposait la CdF-CN en ce qui concerne l'arrêté fédéral sur l'acquisition de matériel de l'armée. La minorité était composée des partis de gauche. L'objet dans son ensemble a été accepté par 159 voix contre 21 et 4 abstentions. Seul.e.s les députés et députées écologistes se sont opposé.e.s. Par la suite, les conseiller.ère.s nationaux.ales ont suivi les recommandations de la CdF-CN et ont voté en faveur des dispositions élaborées par le Conseil des Etats relativement à l'arrêté fédéral sur le programme d'armement 2024. L'objet dans son ensemble a été adopté par 161 voix contre 22 et 1 abstention. La minorité était composée des Vert-e-s. Le vote en faveur de l'arrêté fédéral sur le programme d'armement 2024 a suscité peu de débats. Les parlementaires ont à nouveau suivi les recommandations de la CdF-CN et de la CPS-CN et ont adhéré aux décisions prises par le Conseil des Etats. L'objet dans son ensemble a donc été approuvé à l'unanimité (deux abstentions). Lorsqu'ils se sont prononcés sur l'arrêté fédéral sur le plafond des dépenses de l'armée, les conseiller.ère.s nationaux.ales ont commencé par soutenir la proposition de la majorité de la CdF-CN et de la CPS-CN en adhérant à la décision du Conseil des Etats de l'augmenter de CHF 4 milliards. Dans le cadre du vote sur cet arrêté fédéral, les parlementaires se sont par la suite déclarés favorables, malgré l'opposition des élus de gauche, à une proposition de minorité de la CPS-CN demandant de compenser les sommes dédiées aux investissements réalisés dans le cadre de ce message sur l'armée par la diminution de la part des cantons à l'impôt fédéral direct, par les mesures d'efficacité mentionnées plus haut, par une réduction des montants investis dans la coopération internationale et par une baisse des charges de personnel dans l'ensemble des domaines d'activité de la Confédération à part l'armée et armassuisse.
L'objet a été renvoyé au Conseil des Etats.
Dossier: Armeebotschaften