Les membres du Conseil des Etats ont débattu des deux projets de modification de la loi fédérale sur la protection civile (LPPCi) proposés par le Conseil fédéral. Ces deux projets visent à accroître les effectifs de la protection civile.
Le premier projet (projet A) a été rédigé dans le but de pouvoir demander à des personnes astreintes au service civil de s'engager dans la protection civile en cas de nécessité. Les civilistes qui s'engagent dans une organisation de protection civile continuent à être soumis à la législation relative à la protection civile. Il est laissé à chaque canton la liberté de déterminer l'effectif qu'il estime nécessaire. Cela signifie que les nouvelles dispositions proposées par le Conseil fédéral donnent la possibilité à l'Office fédéral de la protection de la population (OFFP) d'affecter des personnes astreintes à la protection civile dans des cantons en sous-effectif. Le second projet (projet B) traite de questions moins polémiques, telles que la manière dont la Confédération doit coordonner l'action des organes civils qui œuvrent dans le domaine de la protection de la population face à une éventuelle crise sanitaire (Service sanitaire coordonné). Ce projet exige également des personnes déclarées inaptes au service militaire, mais qui ont déjà effectué 166 jours de service, qu'elles s'engagent dans la protection civile. Par ailleurs, les personnes astreintes au service militaire, mais qui ne l'ont pas effectué avant leur 25e année, pourront être amenées à servir dans la protection civile.
S'exprimant au nom de la Commission de la politique de sécurité du Conseil des Etats (CPS-CE), Josef Dittli (plr, UR) a tenté de convaincre ses collègues de soutenir ces deux projets. Il s'est notamment attaché à rappeler qu'il était nécessaire de répondre rapidement à la situation de sous-effectif dont pâtissent les organisations de protection civile, puisqu'en 2030, la protection civile sera composée de 50'000 personnes, alors qu'il faudrait en avoir 72'000.
Des parlementaires issus des rangs de la gauche ont émis des réserves par rapport à la proposition d'exiger de certains civilistes qu'ils passent une partie de leur service civil dans une organisation de protection civile. Par exemple, Franziska Roth (ps, SO) s'était déjà opposée à ce projet en commission et avait déposé une proposition de minorité demandant de rejeter le projet A. Comme cette élue l'a indiqué à ses collègues, elle estime nécessaire de continuer à dissocier les activités de la protection civile et celles des civilistes, afin de ne pas diminuer l'importance du service civil au profit de la protection civile. Par ailleurs, il lui paraît important de continuer à valoriser le travail des civilistes qui œuvrent dans des homes, des hôpitaux ou des écoles. Mathias Zopfi (vert-e-s, GL), qui s' est exprimé au nom du groupe des Vert-e-s, a lui aussi affirmé que le projet du Conseil fédéral risquait d'affaiblir le service civil, affirmant que d'autres mesures pourraient être mises en place pour répondre au sous-effectif de la protection civile.
Pour répondre aux critiques de certains élus, tels que Werner Salzmann (udc, BE), qui mettaient en cause la pertinence du service civil dans certains domaines («Bei Einsätzen in Südafrika, beim Vögelzählen für die Vogelwarte Sempach oder dem Kartieren von Alphütten sehe ich keinen grossen Wert für die Allgemeinheit»), Charles Juillard (centre, JU), qui défendait la modification de la LPPCi proposée par le Conseil fédéral a indiqué que la priorité n'était pas de débattre des vertus du service civil, mais de déterminer comment la protection civile pouvait aider la population à faire face à des situations d'urgence et dans quelle mesure des contingents de l'armée pourraient lui permettre de parvenir à cette fin.
A la fin du débat sur le bien-fondé du projet A, la ministre de la défense Viola Amherd a pris la parole au nom du Conseil fédéral pour appeler les parlementaires à voter en faveur de cette modification de la LPPCi. Elle a notamment indiqué que pour répondre au sous-effectif de la protection civile, on ferait d'abord appel à des personnes engagées dans la protection civile dans un canton en sureffectif. Faire appel à des civilistes pour œuvrer dans une organisation de protection civile ne serait vraiment qu'une solution de dernier recours, selon la conseillière fédérale.
La proposition de non-entrée en matière de la conseillère nationale Franziska Roth a été rejetée par 34 voix contre 10 et aucune abstention avant que les sénateurs ne délibèrent et votent sur chacun des articles. Franziska Roth (soutenue par les partis de gauche) a également déposé des propositions de minorité visant à modifier certains articles du projet A. Elle souhaitait par exemple que le nombre de civilistes pouvant être affectés dans une organisation de protection civile ne soit pas supérieur à 200. Cette proposition a été rejetée par 34 voix contre 9 et aucune abstention. Une autre proposition de minorité déposée par Franziska Roth aurait pu changer profondément le caractère du projet A. Cette proposition de minorité s'opposait au projet du Conseil fédéral de ne pas faire payer de taxe aux organisations de protection civile en sous-effectif. Elle a justifié sa démarche en affirmant que dans ce cas, tous les établissements du service civil devraient être exonérés de la taxe qu'ils doivent verser aujourd'hui, puisqu'ils fournissent tous un service d'intérêt public. Cette proposition a été rejetée par 32 voix contre 9 et aucune abstention. Lors du vote sur l'ensemble, le projet A a été soutenu par 33 sénateurs contre 9 et aucune abstention.
Le projet B a suscité beaucoup moins de débats que le projet A. Mais Franziska Roth, toujours soutenue par les partis de gauche, a déposé une proposition de minorité visant à modifier ce texte de manière à ce que les personnes œuvrant dans une organisation de protection civile puissent effectuer leur service obligatoire l'année qui suit leur instruction de base, et non au cours de la même année, comme le proposait le texte du Conseil fédéral. Cette proposition a été rejetée par 33 voix contre 10 et aucune abstention. Lors du vote sur l'ensemble, le projet B a été accepté à l'unanimité (38 voix). Le texte doit maintenant être examiné par le Conseil national.