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Chronique générale
Défense nationale
Le Conseil fédéral a décidé d’intensifier sa coopération internationale et a renforcé notamment sa participation au Partenariat pour la paix. – Le rapport Brunner a donné les lignes directrices de la nouvelle réforme de l’armée qui s’appellera «armée XXI». – Le DDPS a été particulièrement touché par les mesures d’assainissement des finances fédérales. – Face à l’afflux du nombre de requérants d’asile, la milice a été mobilisée dans des tâches d’encadrement et des gardes-forts ont apporté un soutien aux douaniers.
Défense nationale et société
Les journées de l’armée 1998 se sont déroulées dans la région de Frauenfeld au mois de juin. Quelques 130 000 personnes sont venues assister à cette manifestation. Depuis 1991, les forces militaires suisses ne s’étaient plus présentées officiellement à la population. Plusieurs associations de gauche (GSsA, Femmes pour la paix) se sont opposées à cet important étalage de moyens. Au Conseil national, le groupe écologiste s’en est fait le porte-parole et a déposé une interpellation dont l’interrogation principale était de savoir s’il ne serait pas plus opportun d’affecter les quelques trois millions prévus pour les Journées de l’armée 1998 à des mesures en faveur de la promotion de la paix, de la résolution non-violente des conflits et de la promotion de la démocratie [1].
Le Conseil national a transmis un postulat Günter (ps, BE) qui invite le Conseil fédéral à étudier comment le DDPS pourrait participer au programme de soins thérapeutiques pour les victimes de la torture mis sur pieds par la Croix-Rouge suisse et à rendre un rapport à ce sujet. L’auteur argue que par rapport aux nouvelles missions de l’armée, les autorités ont intérêt à acquérir des connaissances concrètes dans le domaine du comportement des civils et des militaires confrontés à des expériences traumatisantes [2].
Le Conseil des Etats a transmis une recommandation Loretan (prd, AG) qui invite le Conseil fédéral à modifier l’ordonnance sur la protection contre le bruit. Ainsi, les installations de tir devant être assainies contre les nuisances sonores bénéficieront du même régime que les routes et les installations ferroviaires, soit d’une prolongation de cinq ans (jusqu’en 2007) du délai de réalisation des aménagements. Par ailleurs, la Confédération devra assainir contre le bruit des centaines de logement voisins des aérodromes militaires, ceci afin de répondre aux prescriptions en vigueur [3].
Une motion Jaquet (pdt, VD) a invité le Conseil fédéral à entreprendre une révision de la loi fédérale sur l’approvisionnement économique du pays, afin notamment de diminuer les coûts de stockage qui se répercutent sur les consommateurs. Dans sa réponse, le gouvernement a déclaré que les risques de conflit armé menaçaient effectivement de moins en moins la sécurité d’approvisionnement du pays, mais que ce dernier reste malgré tout assez vulnérable. S’il n’est actuellement plus envisagé une interruption durable et étendue de l’approvisionnement, des manques sectoriels et plus fréquents sont plausibles. En 1999, le gouvernement présentera un rapport en cours d’élaboration qui déterminera la politique pour les années 2000 à 2004 en la matière. Les résultats provisoires montrent que les réserves obligatoires occasionnent des coûts de moins en moins élevés (203 millions en 1997) qui devraient s’abaisser jusqu’à 150 millions de francs. Le Conseil fédéral a encore communiqué qu’il avait de toute façon l’intention de réviser la loi sur l’approvisionnement. Suite à l’abrogation de l’article céréalier inclus dans la «politique agricole 2002», il doit en effet régler le problème du stockage obligatoire de blé panifiable. Transformée en postulat, la motion a été transmise au Conseil fédéral [4].
Répondant à une interpellation de la Commission de la politique de sécurité (CPS) du Conseil des Etats, le conseiller fédéral Pascal Couchepin a apporté plusieurs éclaircissements sur la participation de l’armée à l’Expo 01. Ainsi, l’armée sera engagée pour des tâches de maintien de l’ordre et de la sécurité, mais à titre subsidiaire, soit en complément des moyens fournis par les polices cantonales. Elle aura notamment à fournir des prestations d’aide à la police de circulation, d’exploitation de postes sanitaires, de mise à disposition d’une compagnie de sauvetage et éventuellement du montage et démontage d’un camping de jeunes. Le coût net des ces prestations spécifiquement dues à l’exposition nationale est estimé à quelques 15 ou 20 millions de francs. Quant à la présence de l’armée au sein de l’exposition, elle se fera à travers le thème de la sécurité dans l’ouverture, thème déterminé par les organisateurs de l’exposition. Comme les autres institutions (notamment l’église), l’armée n’aura pas de liberté totale de présentation. La discussion sur une interpellation traitant du même sujet déposée par la CPS du Conseil national et à laquelle le Conseil fédéral a répondu par écrit a été renvoyée [5].
Selon le rapport annuel du chef du recrutement, 28 845 conscrits ont été déclarés aptes au service militaire en 1998 sur les 33 013 examinés, soit un taux d’inaptitude de 13.7%. Par ailleurs, 130 jeunes femmes ont rejoint volontairement les rangs de l’armée. Le nombre de nouveaux conscrits intéressés au service civil de remplacement à diminué (369 au lieu de 454 en 1997) et 287 soldats ont demandé d’accomplir leur service militaire sans arme. Avec 232 000 militaires qui ont effectué 6,7 millions de jours de service en 1997, cela représente 4% (287 000 jours) de moins qu’en 1996 [6].
Le premier centre de sports de l’armée a été inauguré à Andermatt par Adolf Ogi. Orienté d’abord vers les sports d’hiver, ce centre sera destiné aux sportifs militaires, mais également aux sociétés sportives civiles [7].
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L’un des objectifs 1998 du Conseil fédéral en matière de politique de sécurité a été la consolidation de la participation de la Suisse au Partenariat pour la paix (PPP) de l’OTAN. Le gouvernement a d’ailleurs donné son feu vert pour une participation au PPP jusqu’en l’an 2000 au moins. Limitée de par la neutralité, la coopération y est toutefois effective en matière de formation sur le plan international, de droit international humanitaire, de contrôle des armements, de contrôle démocratique des forces armées, d’aide en cas de catastrophe et d’amélioration des données relatives à la politique de sécurité dans le cadre du PPP. La Suisse a ainsi accueilli à Interlaken un séminaire sur l’aide humanitaire auquel ont participé le PPP et le bureau pour la coordination des affaires humanitaires de l’ONU. Dans l’optique de contribuer activement au maintien de la paix, de la sécurité et de la stabilité en Europe, le Conseil fédéral a également défini comme objectif d’utiliser le forum de consultation du Conseil de Partenariat Euro-Atlantique (CPEA) ou la Suisse jouit d’un statut équivalent aux 16 membres de l’OTAN. Au début de l’année, la Confédération a notamment ouvert une mission diplomatique auprès de l’alliance Atlantique, ceci par l’intermédiaire de son ambassade en Belgique. Toutefois, Adolf Ogi a précisé que l’adhésion à l’OTAN n’était pour lui pas d’actualité, ceci tant que l’Autriche resterait en dehors de l’Alliance atlantique [8].
Au début de l’année, le Conseil fédéral a soumis un message aux chambres concernant la ratification de la Convention du 18 septembre 1997 sur l’interdiction de l’emploi, du stockage, de la production et du transfert des mines antipersonnel et sur leur destruction, signée par la Suisse à Ottawa le 3 décembre 1997. On peut signaler qu’à l’instar d’autres moyens et petits Etats, la Suisse a eu un rôle particulièrement actif dans ce dossier. Quant aux dernières mines antipersonnel que possédaient l’armée suisse, elles ont été détruites un jour avant la signature de la Convention. Dans le même message, le Conseil fédéral a proposé une modification de la loi révisée sur le matériel de guerre et une autre de la loi sur l’armée, rendues nécessaires par la signature. La première visait à adapter la définition des mines antipersonnel à celle du texte de la convention et la seconde à fournir une base légale au Conseil fédéral pour pouvoir mettre sur pieds le Centre international de Genève pour le déminage humanitaire. Le parlement a accepté la ratification sans opposition ainsi que les deux modifications législatives y relatives. C’est l’ancien conseiller fédéral René Felber qui a été nommé à la présidence du conseil de fondation du centre de déminage. Cinq millions et demi de francs fournis d’ici à 2001 par le DDPS financeront cet organisme qui a été inauguré en janvier 1999 [9].
Le Conseil des Etats a transmis un postulat Rochat (pl, VD) qui prie le Conseil fédéral d’étudier la possibilité d’une collaboration avec la Russie concernant la destruction de ses importants stocks d’armes chimiques. Le conseiller fédéral Adolf Ogi a néanmoins rappelé que si la Suisse avait des compétences certaines en matière de destruction des armes chimiques, cette technologie était connue et que la Fédération de Russie était avant tout intéressée à un soutien financier [10].
Concernant l’armement des troupes suisses engagées à l’étranger, le Conseil des Etats a transmis un postulat Seiler (udc, SH) qui prie le Conseil fédéral d’examiner la possibilité de confier des armes aux personnes participant à des opérations de maintien de la paix, ceci afin d’assurer leur propre protection. Au Conseil national, une motion allant dans le même sens a été déposée par la démocrate-chrétienne Ruth Grossenbacher (SO), mais la discussion y a été renvoyée. A plusieurs reprises, le chef du DDPS Adolf Ogi s’est prononcé publiquement pour une telles mesure, estimant qu’il en allait de la dignité de la Confédération de ne pas faire protéger les soldats suisses engagés en dehors du territoire par des troupes étrangères [11].
Soixante-cinq cadets de l’armée russe ont participé en compagnie de recrues suisses à la marche commémorative du 200e anniversaire de la traversée des Alpes par le Maréchal russe Alexandre Souvorov. Cette visite des cadets de l’Académie Souvorov a été organisée lors d’une visite officielle d’Adolf Ogi en Russie au printemps. En 1799, 21 000 soldats russes avaient tenté de chasser les troupes françaises du territoire helvétique. Six mille d’entre eux avaient perdu la vie et l’armée russe s’était finalement retirée à travers les Alpes affamée et épuisée [12].
Sept officiers de l’armée suisse ont été envoyés au Kosovo pour le compte de l’OSCE. Ils officieront comme experts au sein de la Kosovo Verification Mission (KVM). Par ailleurs, quelques 190 Suisses ont été engagés en 1998 à l’étranger pour le maintien de la paix. Nonante d’entre eux effectuent un service non armé en tant que bérets bleus ou jaunes sous la bannière de l’OSCE ou de l’ONU [13].
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Deux initiatives populaires ont été lancées simultanément par le GSsA le 17 mars. La première intitulée «Pour une politique de sécurité crédible et une Suisse sans armée» demande l’abolition de toute force armée après un délai transitoire de dix ans. La seconde, «La solidarité crée la sécurité: pour un service civil volontaire pour la paix», vise à instaurer un service basé sur le volontariat qui aurait pour mission de contribuer à la réduction et à la prévention des situations de violence, à l’intérieur et à l’extérieur du pays [14].
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L’affaire Nyffenegger a connu un premier épilogue. L’ensemble de la procédure pénale, militaire et administrative qui avait commencé en janvier 1996 s’est achevée en juillet 1998. Le colonel à la retraite Friedrich Nyffenegger a été convoqué devant la justice dans le cadre de trois affaires différentes: l’exposition de matériel didactique Didacta en 1988, la commémoration de la mobilisation générale de 1939 (opération Diamant) en 1989 et la transposition d’un aide-mémoire pour officiers sur CD-Rom. Le procès militaire s’est déroulé en décembre à Aarau devant le tribunal de division 10B. Le colonel y était accusé de violation du secret militaire et des prescriptions sur la protection d’informations confidentielles. Il lui était reproché notamment de ne pas avoir effectué les contrôles nécessaires, ni pris les mesures de sécurité requises lors du développement, de la distribution et de la destruction de cédéroms secrets et confidentiels destinés aux officiers supérieurs. L’auditeur de l’armée a requis deux ans et demi de réclusion contre le colonel pour violation intentionnelle de secrets militaires et non-respect de prescriptions militaires. La défense, considérant l’engagement de l’accusé, a plaidé deux mois de prison avec sursis. Le tribunal a finalement condamné Friedrich Nyffenegger à 15 mois de prison avec sursis. Il a estimé que sa faute n’était pas particulièrement grave, mais que le colonel avait accepté le risque que des tiers puissent avoir accès aux données sensibles contenues dans le cédérom, en particulier les plans de la mobilisation et des fortifications. Deux des quatre autres coaccusés ont été acquittés et deux ont été condamnés à des peines de un et deux mois de prison avec sursis. La Cour pénale fédérale jugera à son tour le colonel et d’autres coaccusés en 1999 pour corruption et divers délits contre le patrimoine [15].
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Organisation militaire
Depuis le premier janvier, le DMF a cédé sa place à une nouvelle structure, le DDPS (Département de la défense, de la protection de la population et des sports) et possède un nouveau chef de l’Etat-Major général, le commandant de corps Hans-Ulrich Scherrer. Devant un millier de collaborateurs à Zurich, ce dernier a exprimé son attachement à l’armée de milice et s’est opposé à toute solution luxueuse en matière d’armement. Il s’est également prononcé pour une application souple du principe de neutralité. Par ailleurs, le chef du DDPS Adolf Ogi a dévoilé les grandes lignes du rapport sur la politique de sécurité qui ont été arrêtées par le Conseil fédéral. Ce rapport, qui s’inspire principalement du travail de la Commission Brunner et des réactions qu’il a suscité, devrait être rendu public en 1999. Les points forts seront un renforcement de la coopération internationale, l’armement des soldats suisses à l’étranger et une politique de neutralité souple et pragmatique. Le concept d’une armée de milice serait maintenu [16].
Le Conseil fédéral a décidé de dissoudre l’Office central de la défense (OCD). Cet organisme avait été créé dans les années 60 comme instrument de coordination de la politique de sécurité de la Suisse. Il servait notamment à fournir des études et des analyses de risques. Avec la fin de la guerre froide, l’importance du rôle de l’OCD a fortement diminué. Les ressources restantes ont été réparties au sein du DDPS [17].
Au mois d’avril, la table ronde organisée par le conseiller fédéral Kaspar Villiger dans le but d’assainir les finances de la Confédération a imposé au DDPS des économies de 1,1 milliard de francs à réaliser en trois ans. Cette diminution du budget militaire représente environ un quart des économies qui seront effectuées au total et équivaut à une coupe de 4% par année sur la base du budget 1997. En contrepartie, l’armée a obtenu de disposer d’un plafond de dépenses de 12,9 milliards de francs, pour ces trois années de vaches maigres, qui ne soit pas totalement soumis au parlement. Dans les limites de cette somme maximale, le DDPS peut ainsi librement transférer des crédits ou des soldes de crédit d’un secteur à l’autre et d’une année à l’autre, les dépenses militaires restant toutefois soumis à l’approbation du législatif. Afin toutefois de ne pas pénaliser démesurément les entreprises helvétiques, le DDPS et l’administration des finances ont tenté d’éviter de procéder à des coupes trop importantes dans les commandes de matériels ou de systèmes conçus par des sociétés suisses. Autres mesures compensatoires: les mises à la retraite anticipée et les frais sociaux engendrés seront pris en charge par la caisse générale et pas par le budget de l’armée. Ces réductions ne doivent pas avoir d’incidence sur la réalisation de la nouvelle défense nationale. La diminution du budget pour la défense a suscité des réactions très vives de la part du groupe de travail pour une armée de milice efficace et assurant la paix (AWM). Composé de politiciens conservateurs et de représentants de l’industrie concernée, ce groupe a notamment regretté que Adolf Ogi n’ait pas insisté pour participer à la table ronde, même s’il ne faisait pas partie de la délégation des finances du Conseil fédéral. Le chef du DDPS a ainsi essuyé plusieurs critiques quant à son manque d’engagement apparent pour l’armée, comparé à l’activité déployée dans sa fonction de ministre des sports. La Société Suisse des Officiers (SSO) a également pris position contre le paquet financier proposé par la table ronde. Quant à la Société d’études militaires, qui regroupe une cinquantaine d’officiers de milice de l’état-major général, elle a estimé que c’était une erreur de déterminer la politique de sécurité sur la seule base de l’état des finances fédérales [18].
Face à une nouvelle donne démographique, le DDPS a pris la décision de diminuer de 10% supplémentaires l’effectif réglementaire de l’armée d’ici au premier janvier 2000. Celui-ci va donc passer de 400 000 à 360 000 militaires. Par la même occasion, il sera mis hors service du matériel devenu obsolète comme par exemple les chars 68 non modernisés et les avions de combat Mirage IIIS. Plusieurs formations seront partiellement ou totalement dissoutes (notamment artillerie de forteresse, poste de campagne, obusiers blindés). Ces mesures dénommées «Progress» devraient permettre d’économiser quelques 20 millions de francs par année. Des officiers du grade de capitaine à colonel pourront par contre effectuer jusqu’à 60 jours de service supplémentaires. Le Conseil fédéral a pris cette mesure afin d’assurer l’encadrement de la troupe, malgré le manque d’effectif chez les officiers [19].
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Sous la présidence de l’ancien ambassadeur Edouard Brunner, la Commission d’étude pour les questions stratégiques a remis un rapport qui analyse la nouvelle donne mondiale en matière de menaces pour la sécurité de la Suisse et propose des solutions pour adapter sa politique en la matière. Ce rapport est le prélude à la nouvelle réforme de l’armée qui prendra le nom d’armée «XXI» et devrait débuter au plus tôt en 2003 [20].
Pour ce qui est de la situation géostratégique, le Commission Brunner pose que la Suisse se trouve dorénavant dans un espace élargi de sécurité, contrairement à une dizaine d’années plus tôt et qu’elle n’en a pas encore pris pleinement conscience. Même si des foyers d’instabilité subsistent non loin du territoire helvétique comme dans les Balkans, le rapport considère comme peu prévisible une situation militaire classique ayant des conséquences directes pour la Suisse, si ce n’est sous la forme de dysfonctionnements économiques, sociaux ou démographiques.
A propos des menaces, des dangers nouveaux et des moyens d’y faire face, la Commission dresse d’abord le constat que selon toute vraisemblance, les Etats entourant la Suisse n’entreront plus en conflit armé entre eux et n’attaqueront pas la Suisse. L’hypothèse d’un échec total de l’intégration européenne ne pourrait en aucun cas survenir de manière imprévisible et soudaine. Aussi, c’est en contribuant à renforcer cette dynamique que la Confédération peut le mieux protéger ses intérêts. La Commission Brunner prend également acte du fait que cette fin de siècle est marquée par une forte tendance des pays démocratiques à collaborer afin d’assurer la paix à long terme. Elle recommande ainsi que la Suisse dépasse ses vieilles réticences face à tout engagement international, et qu’elle s’engage plus intensément dans la coopération, surtout dans les domaines de l’instruction, de la technologie et de la politique de sécurité. Elle suggère de mettre un accent particulier sur les secteurs de l’exploration par satellites, de la surveillance de l’espace aérien et du renseignement. Concernant la sécurité intérieure, la Commission met en évidence également des insuffisances dans la coopération internationale et par conséquent recommande de trouver des modalités permettant de se rapprocher de l’espace de sécurité européen.
Selon le rapport, la Suisse est donc puissamment armée face à des périls devenus improbables et démunie face aux dangers véritables. C’est pourquoi il lui est préconisé d’adapter les effectifs et l’équipement aux nouvelles priorités du moment, tout en conservant cependant un savoir-faire militaire et industriel pouvant être réactivé en cas de besoin. Il s’agirait par exemple d’étudier la possibilité d’attaques ciblées de missiles provenant de pays lointains. Par ailleurs, la Commission montre que les formes que peuvent prendre les menaces n’ont pas toutes des réponses militaires. Ainsi en va-t-il des catastrophes naturelles et technologiques pouvant avoir un impact transfrontalier, du crime organisé, du terrorisme, de la prolifération des armes atomiques, biologiques et chimiques, des pressions internationales, des perturbations dans le domaine de l’informatique, de l’information et de la désinformation ainsi que des désordres, des conflits intérieurs et de la criminalité. Selon l’avis exprimé dans le rapport, il devrait être constitué au sein de l’armée un corps d’intervention capable de gérer le danger d’interventions terroristes lourdes.
Concernant les migrations, même si elle reconnaît qu’elles ne constituent pas une menace stratégique à proprement parler, la Commission Brunner recommande d’en atténuer les causes par le biais de l’aide, de la coopération et de l’assistance, mais pose la tradition humanitaire comme devant être maintenue. Toutefois, en cas de situation extraordinaire, les services de la police frontière devraient être renforcés par l’armée.
Dans le domaine de la solidarité internationale, la Commission s’est prononcée pour que la Suisse participe dorénavant plus activement et non plus seulement de façon financière et verbale. A cet effet, elle recommande que soit mis sur pieds un corps suisse de solidarité, capable d’intervenir dans des missions de secours, de paix et d’appui aux civils. Cette unité serait armée pour sa propre défense et disposerait de moyens de transport autonomes. Elle serait incorporée à l’armée. En outre, la commission recommande la création d’un centre de formation opérationnelle pour les activités de déminage.
Quant à la neutralité armée, elle doit être adaptée à la lumière des nouvelles réalités, suggère le rapport. Il s’agit de continuer dans la voie suivie jusqu’alors, soit une interprétation souple et pragmatique de ce concept. Ainsi, en aucun cas, la neutralité ne doit devenir un obstacle à des engagements nécessaires pour la sécurité et la dignité de l’Etat. Pour le moins, la collaboration avec l’OTAN dans le cadre du PPP et d’autres formes de coopération doivent être favorisées.
Pour ce qui est des conséquences pour les instruments de la politique de sécurité, la Commission Brunner s’est prononcée pour le maintien de l’armée de milice, dont elle reconnaît également la valeur pour la cohésion de l’Etat. Toutefois, elle propose des aménagements de ce système, comme par exemple l’accomplissement de l’obligation de servir en une seule période et la formation d’unités professionnelles pour des tâches spécifiques (corps de solidarité, missions à risques, technologies sophistiquées). Elle recommande également de donner la compétence aux cantons d’organiser la protection civile et d’en réduire fortement les effectifs. L’obligation de servir pourrait être effectuée au sein de cette dernière. Autre innovation proposée: la création d’un Conseil de sécurité dépendant directement du président de la Confédération. Cet organe serait à même de prévenir et de gérer les crises et constituerait un instrument réformé du service des renseignements. Enfin, le rapport Brunner conclut en signifiant qu’une défense efficace passe par la conviction des citoyens et que par conséquent, il faut définir une ligne qui soit claire, susceptible de recueillir une plaine adhésion [21].
Dans l’ensemble, les conclusions du rapport Brunner ont suscité des réactions favorables dans la presse et lors de sa mise en consultation. Les partis gouvernementaux ont salué l’ouverture du débat sur la politique de sécurité et le renforcement de la collaboration internationale. Seule l’UDC a émis des réserves face à un engagement plus grand à l’étranger. La CPS du Conseil national s’est prononcée de façon positive et celle du Conseil des Etats a annoncé que la réforme de l’armée devrait avoir lieu avant 2005. La SSO a rappelé que le cœur de compétences de l’armée doit rester la défense. Parmi les détracteurs, l’USS et le GSsA ont critiqué la possibilité de confier à l’armée certaines tâches de police. Le conseiller national Blocher (udc, ZH), seul membre de la Commission Brunner a avoir refusé l’adoption du rapport, a lui présenté ses propres conclusions dans un document intitulé «Mutations stratégiques». Il s’y oppose à «un activisme international déguisé en entreprise morale» et combat une politique de sécurité qu’il estime naïve, hâbleuse et pastichée [22].
Un groupe de travail sur la politique de sécurité présidé par le radical appenzellois Otto Schoch, un ancien conseiller aux Etats, a également rendu un rapport sur le futur de la défense nationale. Ce groupe a été constitué en 1990 à la demande du Département de la défense. Plusieurs personnalités politiques et scientifiques de milieux divers y ont participé. Contrairement au rapport Brunner qui estimait une adhésion à l’OTAN prématurée, ce groupe s’est montré favorable à une telle mesure. Il s’est aussi prononcé pour une refonte du système de milice basée sur le volontariat plutôt que la conscription obligatoire [23].
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En relation avec le problème de l’afflux des requérants d’asile en Suisse, il a été à plusieurs reprises question de l’emploi de l’armée en vue de renforcer le corps des gardes-frontières et d’encadrer les réfugiés. Au parlement, une motion Freund (udc, AR) a notamment été déposée devant le Conseil national, demandant au gouvernement de soumettre aux chambres, dans les plus brefs délais, un arrêté fédéral urgent qui permette de renforcer le Corps des gardes-frontière en engageant la troupe dans le cadre du service d’instruction normal. Une autre motion du groupe parlementaire démocrate-chrétien du Conseil national proposait de confier à des militaires en service d’appui la gestion des structures d’hébergement destinées à l’accueil d’urgence des requérants d’asile. Le groupe libéral des chambres fédérales a quant à lui déposé deux motions devant le Conseil national afin que la Suisse crée et gère des camps de réfugiés à proximité des zones de crise à l’étranger. Selon ce dernier, l’armée pourrait s’acquitter de cette mission. Le but recherché est d’éviter des déplacements de population et de soulager les centres d’accueil en Suisse [24].
Le Conseil fédéral a pris la décision en mars d’envoyer quelques 80 gardes-forts renforcer les gardes-frontière. Des sous-officiers instructeurs de carrière les ont partiellement relayé dès le mois de juillet, mais la milice n’a pas été concernée par cette tâche. En octobre, c’est la troupe qui a été mobilisée pour s’occuper de requérants d’asile provisoirement logés dans des infrastructures militaires, les centres habituels d’enregistrement étant surchargés. Conformément à la législation militaire, un tel engagement doit être approuvé par le parlement s’il dépasse trois semaines. Le gouvernement a donc proposé aux chambres lors de la session d’hiver d’accepter un arrêté fédéral qui autorise rétroactivement la mobilisation de 2000 hommes jusqu’à la fin 1999. Combattu au Conseil national par la gauche et les Verts, l’arrêté a été approuvé par 101 voix contre 53. Le plafond des appelés simultanés a néanmoins été fixé à 1000 hommes. La chambre haute a par contre refusé de valider l’arrêté pour plus d’une année par 33 voix contre 5, se référant à la proposition initiale du Conseil fédéral qui était de six mois. Cette divergence des sénateurs a été ratifiée par le Conseil national qui a accepté l’arrêté sous cette forme modifiée. A la fin de l’année, cinq centres d’hébergement étaient gérés par l’armée [25].
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Un avion de combat F/A-18 s’est écrasé en Valais lors d’un exercice causant la mort de ses deux occupants. L’enquête s’est prononcée pour une erreur du pilote qui aurait perdu le sens de l’orientation [26].
La Commission de gestion du Conseil national a publié un rapport intitulé «erreurs survenues au sein des Forces aériennes». Elle s’est notamment penchée sur deux erreurs de pilotage commises par le commandant des Forces aériennes Fernand Carrel en 1996. La suite donnée à ces deux erreurs avait été ressentie commue une inégalité de traitement par plusieurs pilotes et avait débouché sur des critiques envers la manière de commander de ce dernier. Dans ses conclusions, la Commission de gestion a entre autres mis en évidence une insuffisance de communication entre le commandant et le chef du DDPS. Elle a ensuite recommandé au Conseil fédéral de réintroduire la limite d’âge de 55 ans pour le pilotage des avions de combat, d’examiner si les commandants des Forces aériennes ne devraient pas renoncer définitivement à piloter des aéronefs militaires et enfin de procéder à un examen de la culture de conduite au sein des Forces aériennes. Le Conseil fédéral, dans un rapport publié en septembre, a rejeté toute critique quant au style de commandement de Fernand Carrel et s’est opposé à une interdiction de vol pour les commandants des Forces aériennes. Il a toutefois suivi l’avis de la Commission quant à la limite d’âge de 55 ans pour le pilotage en solo des jets de combat [27].
Les Forces aériennes ont dû renoncer au grand meeting aérien qui était prévu en 1999 à Payerne (VD). Outre les raisons économiques consécutives aux coupes budgétaires, il a aussi été mentionné des insuffisances d’effectifs et une surcharge de travail qui ne permettrait plus d’assurer la logistique. La dernière manifestation de ce genre s’était déroulée à Emmen (LU) en 1994 et avait rassemblé quelques 100 000 spectateurs. Toujours dans une perspective de diminution des dépenses, les Tiger de la patrouille suisse ne sortiront plus que sept fois en Suisse et cinq fois à l’étranger par année. L’exposition à terre de F/A-18 helvétiques à l’étranger est également supprimée [28].
Toujours à Payerne, l’aéroport militaire a accueilli dès le mois d’août des jets privés sur son terrain. C’est le résultat d’une convention valable pour deux ans et renouvelable qui a été passée entre la COREB (Communauté régionale de la Broye) et l’Office fédéral des exploitations des forces aériennes. Cette convention ne s’applique pas aux vols touristiques ou sportifs, mais uniquement aux vols commerciaux. Un autre aérodrome militaire à Buochs (NW) a également reçu des autorités fédérales une autorisation d’exploitation pour l’aviation civile, mais plusieurs associations ont fait recours contre ces nouvelles nuisances reportant ainsi l’ouverture [29].
Un projet de coopération entre les forces aériennes suisses et françaises a été rendu public. Un espace d’entraînement commun au-dessus de l’Arc jurassien verra probablement le jour en l’an 2000, afin notamment de libérer de l’espace sur le Plateau pour le trafic civil. Des avions français pourront ainsi survoler le territoire helvétique et vice-versa [30].
Pour des raisons d’économie et de vieillissement de la flotte, les Forces aériennes songent à remplacer leurs 17 Mirage III de reconnaissance achetés en 1965 par un nombre inférieur de F/A-18 de reconnaissance. Toutefois, l’achat de ces appareils est subordonné à la nouvelle politique de sécurité et à l’évaluation de la menace future [31].
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Le corps des instructeurs a également fait l’objet d’un rapport de la Commission de gestion du Conseil national en 1998. Suite à l’affaire Nyffenegger, plusieurs critiques ont été énoncées quant à la nomination, au statut, ou encore aux privilèges des instructeurs de l’armée suisse. Devant l’ampleur de la tâche, la commission s’est limitée à une analyse structurelle du système global entourant le corps des instructeurs et a renoncé à mettre en évidence des cas particuliers. Elle s’est penché notamment sur le processus de sélection, de promotion et de nomination, sur le problème du statut des instructeurs lorsqu’ils sont détachés auprès de l’administration, sur ceux de la rémunération, des indemnités et des départs en retraite. A l’issue de son travail, la commission a émis plusieurs recommandations à l’intention du Conseil fédéral. Premièrement, celui-ci a principalement été prié de redéfinir l’activité des instructeurs dans les écoles militaires et lors des cours. La commission a suggéré qu’une solution pourrait être d’intégrer le corps des instructeurs au sein de l’administration fédérale et de ne les détacher qu’à terme pour dispenser la formation militaire. Cela éviterait ainsi l’existence d’une entité autonome vis-à-vis de l’administration. Deuxièmement, la commission s’est prononcée pour la suppression de l’automatisme des promotions. Dorénavant, les intérêts de la formation devraient primer sur des velléités carriéristes personnelles. Troisièmement, l’accès à des postes supérieurs dans l’armée et dans l’administration de l’armée ne serait plus réservé quasi exclusivement aux seuls instructeurs mais à tous les candidats susceptibles d’occuper cette fonction. Quatrièmement, le Conseil fédéral devrait élaborer un système de rémunération qui soit transparent avec la suppression des allocations fixes. Cinquièmement, la réglementation concernant les indemnités devrait être soumise à un examen approfondi afin d’abolir certains privilèges injustifiés. Sixièmement, le statut d’instructeur serait abrogé pour des fonctionnaires exerçant une activité administrative et septièmement, le système des départs en retraite anticipée devrait subir un examen approfondi de la part du Conseil fédéral, ceci afin de limiter les dépenses imputées à la Caisse fédérale de pensions [32].
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Le divisionnaire Alfred Roulier a été nommé chef de la doctrine. Ce nouveau poste dans l’armée suisse servira notamment à concrétiser les options du rapport Brunner. Il s’agira pour lui de travailler dans la ligne des nouveaux rapport sur la politique de sécurité et plan directeur de l’armée. Un autre divisionnaire, Josef Schärli, commandera lui le Groupe de la promotion de la paix et de la coopération en matière de sécurité (Grppc). Ce nouvel organisme, intégré au sein de l’état-major général, est appelé à coordonner les actions du DDPS en relation avec l’étranger. Le brigadier Doris Portmann-Gilomen a remplacé Eugénie Pollak à la fonction de chef de service des Femmes dans l’armée (FDA) au sein de l’état-major général. Par ailleurs, le Conseil national a transmis un postulat de sa commission de gestion priant le Conseil fédéral d’examiner si en cas de promotions dans l’armée, les candidats doivent fournir un extrait de casier judiciaire [33].
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La Commission de gestion du Conseil national a demandé au chef du DDPS Adolf Ogi de l’informer au sujet de la présence d’extrémistes de droite au sein de l’armée. Le point de départ de cette interrogation a été la publication dans la presse de l’affaire d’un premier lieutenant qui entretenait par Internet des contacts avec des groupes néonazis. Pour ce faire, une enquête a notamment été menée auprès de 58 écoles militaires (école de recrues, de sous-officiers et d’officiers) en 1998 et il a été procédé à une analyse de l’examen pédagogique des recrues de 1997. Il apparaît que l’extrémisme de droite comme de gauche n’a pas de réelle importance quantitative dans les écoles militaires, si ce n’est dans des proportions similaires à ce que l’on trouve dans la population. Environ 3% des recrues de 1997 peuvent être considérés comme extrémistes. Dans les écoles, les cas de manifestations extrémistes survenant sporadiquement sont pour l’essentiel de droite, marquées par une xénophobie latente. Le rapport remis au chef du DDPS considère que le risque de voir accéder des extrémistes de droite à des positions de cadres dans l’armée est faible et qu’il n’y a pas d’augmentation de ce phénomène parmi les jeunes militaires. Par ailleurs, le système de milice et les brèves périodes de service n’offriraient pas des conditions idéales à l’éclosion de telles idées. Un autre incident de type raciste a encore défrayé la chronique à la fin de l’année. Un commandant de compagnie par intérim a dirigé un exercice où il s’agissait d’empêcher des Albanais du Kosovo d’entrer sur territoire suisse, lui même se faisant appeler Milosevic [34].
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Armement
Cent-quarante-huit chars Léopard et 108 obusiers blindés M-109 ont été retirés du service actif et seront immobilisés pendant huit ans dans des entrepôts spécialement aménagés pour éviter toute corrosion. Ils seront ensuite réutilisés et d’autres chars prendront leur place. Cette mesure a été prise afin d’économiser quelques quatre millions de francs par année qui devraient être réaffectés dans l’instruction. Par ailleurs, l’armée a testé trois nouveaux types de chars suédois, anglais et allemand. Il s’agit de pourvoir au remplacement des M-113, achetés en 1961. A la place des 400 M-113, quelques 300 autres chars devraient être acquis [35].
La Suisse continue à liquider la munition inutilisée qu’elle a accumulé pendant la guerre froide. Au total, ce sont quelques cent milles tonnes d’obus, de grenades et de bombes qui doivent être détruits entre 1998 et 2005. Le coût de l’opération est évalué à 235 millions de francs [36].
Le système «Bloodhound» de missiles sol-air a été désactivé avant la date prévue de 2005. Les compressions budgétaires et l’introduction des F/A-18 a précipité la mise à la casse de ces fusées anglaises introduites dans les années soixante [37].
Le Conseil fédéral a mis en vigueur les textes de la reconversion des entreprises fédérales d’armement. Les quatre entreprises suisses d’électronique, d’aéronautique et de systèmes, de munitions et d’armement sont ainsi transformées en sociétés anonymes de droit public le 1er janvier 1999. Désormais, elles peuvent coopérer et conclure des alliances au niveau national et international. Le statut de fonctionnaire est maintenu jusqu’à l’an 2000 [38].
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Le Conseil fédéral a présenté un programme d’armement 1998 d’un montant total de 1,315 milliard de francs (soit 58 millions de moins que l’année précédente). Les postes les plus importants sont l’acquisition d’un nouveau système de surveillance de l’espace aérien et de conduite des avions Florako (489 millions de francs) et l’achat de 12 nouveaux hélicoptères de transport Super-Puma ( 320 millions) ainsi que de 9 systèmes d’exploration électroniques tactiques (166 millions). Soixante-deux millions seront consacrés à l’équipement des postes sanitaires. Initialement estimé à 1,6 milliard, le programme a dû être revu à la baisse suite aux arrêtés imposant des mesures d’économie. La conséquence directe de cette diminution a été le report à une date ultérieure de plusieurs projets figurant dans un premier temps à ce programme. L’artillerie est particulièrement touchée puisqu’elle ne disposera pas des nouvelles munitions cargo de 12 cm pour les lance-mines ainsi que d’une deuxième série de canons de forteresse de 15,5 cm Bison. L’acquisition de petits appareils radios SE-135 et SE-138 a également été différée [39].
Contrairement à ce qui s’était produit l’année précédente, le parlement n’a pas réduit le programme d’armement. Le fait que celui-ci soit déjà le plus bas depuis 1987 a été abondamment mis en avant par ses partisans. Néanmoins, des voix se sont fait entendre au Conseil national pour que le nombre de nouveaux hélicoptères Super Puma soit diminué de quelques unités. Le problème de la comptabilité de Florako avec l’aviation civile suisse et les systèmes étrangers a également été évoqué, mais sans conséquences sur le vote final. Quant au Conseil des Etats, il a accepté le programme sans aucune opposition [40].
Le Conseil national, à une confortable majorité, n’a pas donné suite à une initiative parlementaire du socialiste vaudois Pierre Chiffelle qui préconisait d’inscrire dans la Constitution un droit de référendum en matières de dépenses d’armement. Le projet prévoyait que tout crédit de plus de 200 millions de francs destiné à l’armement pourrait être soumis à la sanction du peuple suisse. La CPS a refusé de se rallier aux arguments de l’initiant par 14 voix contre 9. Elle a notamment souligné qu’il ne serait pas très souhaitable de créer un référendum financier dans un seul domaine des dépenses de la Confédération, ni d’affaiblir le parlement en lui ôtant une de ses prérogatives. De plus, elle a considéré que le législatif était tout à fait à même de s’opposer à certaines dépenses d’armement, comme il l’avait fait en 1997 en refusant un crédit pour des obusiers blindés [41].
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Le ministre des Transports du gouvernement français, Jean-Claude Gayssot, a décidé de renoncer à la réalisation d’un centre franco-suisse de contrôle aérien à Genève sous la pression des milieux syndicaux français. Or cette collaboration avait été promise par la France en échange de la participation de la société française Thomson au nouveau projet de système de surveillance militaire de l’espace aérien Florako. Initialement, seule l’entreprise américaine Hughes s’était adjugé le contrat. Devant ce dédit, la Confédération n’a pas désiré remettre en cause la participation de Thomson, mais s’est réservé le droit d’en tenir compte dans des achats d’armements ultérieurs au moment du choix des fournisseurs [42].
Au début de juillet 1998, les chefs du DETEC et du DDPS ont signé une déclaration concernant l’intégration des services de la navigation aérienne civile et militaire de la Suisse. Il s’agissait face à l’accroissement du trafic dans le ciel helvétique de mieux collaborer pour assurer une sécurité optimale. A terme, cette collaboration a pour but de développer des synergies dans le domaine, par exemple, de l’exploitation et de la maintenance et d’éviter des investissements parallèles. Du côté de l’armée, la mise sur pieds du système Florako est décrite comme une des conditions-cadres pour la gestion uniforme de l’espace aérien global. Or l’adoption de ce système de surveillance Florako a déclenché toute une série de réactions qui ont été relayées dans la presse et au parlement. Il a été reproché à l’armée de faire main basse sur la sécurité de l’espace aérien suisse. Car de son côté, Swisscontrol, l’organe civil de la surveillance de l’espace aérien, se trouvait également dans un processus de modernisation dénommé «Adapt» et avait déjà acquis la première phase de renouvellement de son matériel. L’étape suivante intitulée ATMAS (Air Trafic Management System) constituant un doublon avec Florako, elle a été diminuée de plus de moitié, sous la pression de la Confédération qui possède quelques 90% du capital de Swisscontrol. «ATMAS» devrait être opérationnel en 2003 et coûter environ 80 millions de francs.
Au Conseil national, la CPS qui devait rendre un avis sur ce projet de réunion des deux entités de surveillance civile et militaire a été fortement divisée. La majorité de celle-ci a proposé un postulat qui a été transmis et qui invite le Conseil fédéral à assurer la coordination de l’opération et à présenter un rapport annuel sur l’état de l’avancement du projet. La minorité de la Commission, réunie autour du socialiste soleurois Banga, a présenté une motion qui se voulait plus contraignante en demandant notamment que le Conseil fédéral édicte une base légale en modifiant l’ordonnance sur le service de la navigation aérienne et en s’assurant que des investissements parallèles ne soient pas entrepris. La chambre basse a toutefois refusé cette motion par 91 voix contre 52 [43].
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Constructions militaires
Devant la Commission de sécurité du Conseil national, Adolf Ogi a mentionné comme domaine d’économies prioritaire les bâtiments militaires. L’armée suisse possède un peu moins de 30 000 objets immobiliers. Le Conseil national a transmis un postulat de la Commission de la politique de sécurité qui invite le Conseil fédéral à présenter à la fin de chaque année un rapport concernant le taux d’occupation des cantonnements, des installations d’instruction et autres installations militaires. Le gouvernement devra y décrire les implications qu’à la planification continue en prévision de l’«armée XXI» [44].
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Le Conseil fédéral a présenté son message relatif au programme des constructions 1998. Suivant la tendance à une diminution des coûts, celui se monte à 50,7 millions de francs. En fait, il aurait même pu être encore moins élevé si le Conseil fédéral n’avait pas jugé bon de soumettre aux chambres l’assainissement et la modernisation de la place de tir de Vugelles-La-Mothe (VD), dont le coût est légèrement inférieur (9,5 millions) à la limite des dix millions pour laquelle l’exécutif est compétent. Le second projet de ce programme est l’assainissement et la rénovation de la caserne de Berne ainsi que la transformation du manège et des écuries (41,2 millions). La participation de la Confédération devrait s’élever à 55% du montant total. Le parlement a facilement adopté cet objet [45].
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Objection de conscience
Deux ans après l’entrée en vigueur de la loi dépénalisant l’objection de conscience, 2925 personnes ont accompli jusqu’ en septembre leur service civil auprès de 627 différents établissements d’affectation reconnus. Quelques 56% des 120 000 jours de service ont été effectués au cours de ces deux premières années dans le secteur social. Mille trois cents civilistes ont notamment été sollicités pour accueillir les réfugiés dans les cantons. C’est un peu plus de 100 demandes d’admission au service civil qui parviennent mensuellement à l’Office fédéral du développement économique et de l’emploi (OFDE) et 77,7% qui sont acceptées. Par contre, les taux varient de plus de 20 points d’un canton à l’autre et les délais de traitement des dossiers oscillent entre quatre et neuf mois [46].
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Protection civile
Le Conseil fédéral a pris la décision d’abaisser la limite d’âge pour l’obligation de servir de 52 à 50 ans, ramenant ainsi l’effectif de la protection civile (PC) de 355 000 à 300 000 personnes au 1er janvier 1999. Parallèlement, la fusion des services d’assistance et de protection de la population a été arrêtée. Le gouvernement veut désormais mettre l’accent sur l’aide en cas de catastrophe en temps de paix. Cette réforme est destinée d’une part à diminuer le coût de la PC et d’autre part à la préparer au projet «Protection de la population» qui pourrait être mis en oeuvre en 2003 [47].
Le DDPS a communiqué les chiffres concernant la PC en 1997. Quelques 35 300 personnes astreintes ont accompli 107 000 jours de service lors de 1467 engagements. Plus de 60% de ceux-ci ont été consacrés à des travaux de reconstruction, d’assainissement de ruisseaux et constructions de chemin et un quart des jours de service furent consacrés à des activités de soins en faveur de la population (personnes âgées par exemple) [48].
Le socialiste Andreas Gross (ZH) a défendu au Conseil national une initiative parlementaire visant à la suppression de l’obligation de servir dans la protection civile. Dressant le constat que la protection civile n’avait pas assez de tâches à accomplir par rapport au nombre important de citoyens qui y étaient astreints, l’auteur de l’initiative a proposé de substituer à ce service obligatoire une organisation basée sur le volontariat. Cette nouvelle organisation se verrait également attribuer de nouvelles missions, plus en rapport avec la situation actuelle. Chargée d’étudier cette question, la CPS a convenu que les objectifs et les structures actuelles de la protection civile étaient dépassées, du fait de l’héritage de la guerre froide et de la menace nucléaire, bien qu’une première restructuration intitulée PC 95 était encore en cours. Toutefois, la majorité de la commission (14 voix contre 8 et 3 abstentions) n’a pas voulu se prononcer en faveur de l’initiative. Elle a en effet estimé que le concept de la protection civile devait être étudié dans le cadre du projet «Armée XXI». De plus, elle a argué que le maintien de l’obligation de servir à la PC ne signifiait pas que des cours devaient être organisés chaque année, par contre cela avait l’avantage de garder à disposition un certain nombre de personnes en cas de besoin, ceci sans devoir recourir à la persuasion. Finalement, le Conseil national a suivi la proposition de la CPS par une majorité de 94 voix contre 70 [49].
Partant du même constat que Andreas Gross, à savoir que la PC n’a que peu de tâches à accomplir, mais n’arrivant pas aux mêmes conclusions, Peter Föhn (udc, SZ) a proposé dans un postulat que l’on attribue à la PC des tâches de surveillance, à l’instar de ce que font les sociétés privées de gardiennage. Arguant du devoir de l’Etat de s’occuper de la sécurité intérieure du pays, il a également proposé de faire appel à l’armée, là où les capacités de la PC seraient insuffisantes. La discussion a été renvoyée [50].
L’argovienne Agnes Weber (ps, AG) a déposé une motion chargeant le Conseil fédéral de lever l’obligation de construire des abris PC dans les bâtiments privés ou publics. Transmis comme postulat sur proposition du gouvernement, ce point sera examiné dans le cadre du projet «Protection de la population». Le Conseil fédéral a toutefois rappelé dans son rapport écrit que les abris de protection civile n’augmentaient que peu les coûts de construction (2% en moyenne) et qu’ils pouvaient avoir une utilité par exemple lors de catastrophes naturelles [51].
Le canton de Genève a décrété un moratoire d’une année dans l’organisation des cours de protection civile et a déposé un recours auprès de la Commission fédérale ad hoc. Il a pris cette décision suite à la suppression de subventions de la part de l’Office fédéral de la protection civile (OFPC). Ce dernier avait en vain demandé au gouvernement genevois de renoncer à une diminution de la durée du cours d’introduction pour les nouveaux astreints du canton [52].
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Sélection bibliographique
Blocher, Christoph, Mutations stratégiques: rapport d’étude stratégique sur le développement ultérieur de la politique suisse de sécurité, Berne 1998.
Haltiner, Karl W., Sicherheit 98: Aussen-und sicherheitspolitische Meinungsbildung im Trend, Zürich 1998.
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[1] BO CN, 1998, p. 425 et 785 ss.; LT, 15.6.98; TG, 11.6.98.1
[2] BO CN, 1998, p. 747 s.2
[3] BO CE, 1998, p. 479 ss; 24 Heures, 23.2.98.3
[4] BO CN, 1998, p. 2837 s.4
[5] BO CE, 1998, p. 899 ss.; BO CN, 1998, p. 2280 s. Cf. supra, part. I, 1a (Grundsatzfragen).5
[6] Recrutement 1998, information aux médias, Berne 1998; NZZ, 23.2.98.6
[7] 24 Heures, 1.7.98.7
[8] FF, 1998, p. 171; 24 Heures, 3.2.98; NZZ, 6.4.98 (séminaire); AZ, 6.7.98 (an 2000); NLZ, 15.9.98 (Ogi).8
[9] FF, 1998, p. 537 ss.; BO CN, 1998, p. 370 ss. et 808; BO CE, 1998, p. 194 ss. et 462; FF, 1998, p. 1158 s.; NZZ, 27.1.98 (Felber). Cf. également APS 1997, p. 80. s.9
[10] BO CE, 1998, p. 361 s.10
[11] BO CN, 1998, p. 2181 s.; BO CE, 1998, p. 1057 ss.; BaZ, 15.9.98.11
[12] 24 Heures, 15.9.98.12
[13] 24 Heures, 2.12.98; Lib., 28.12.98.13
[14] FF, 1998, p. 1007 ss.; APS 1997, p. 98.14
[15] LT, 30.7.98; presse du 7.12 au 18.12.98. Voir également APS 1997, p. 99 s. et 1996, p. 95 s.15
[16] Presse du 16.1 et du 15.9.98. Voir également APS 1997, p. 102. Pour le rapport Brunner, cf. infra.16
[17] TA, 28.10.98; presse du 29.19.98.17
[18] LT, 24.4, 25.4 et 27.7.98; 24 Heures, 28.4.98; AZ, 22.6.98; Lib., 18.8.98. Cf. aussi infra, part. I, 5 (Sanierungsmassnahmen).18
[19] Presse du 3.2.98; NZZ, 9.6.98.19
[20] LT, 1.12.98. Cf. APS 1996, p. 93. A noter qu’au début de l’année, le projet de reforme de l’armée s’appelait encore «Armée 200X». Le DDPS a finalement décidément de le baptiser «Armée XXI».20
[21] Rapport de la Commission d’étude pour les questions stratégiques, Berne, 26 février 1998.21
[22] JdG et NZZ, 27.2.98; NZZ, 22.4.98; TG, 10.7.98; Lit. Blocher.22
[23] 24 Heures, 29.8.98. Cf. aussi APS 1996, p. 92 s.23
[24] BO CN, 1998, p. 1513 ss.; LT, 16.12.98. Cf. infra, part I, 7d (Flüchtlinge). Combattue par la gauche, la décision sur la motion Freund a été renvoyée.24
[25] FF, 1998, p. 4908 ss.; BO CN, 1998, p. 2445 ss. et 2662 s.; BO CE, 1998, p. 1245 ss.; 24 Heures, 4.12 et 23.6.98; Lib., 9.12.98; LT, 5.11 et 9.12.98.25
[26] 24 Heures, 15.4.98.26
[27] FF, 1998, p. 3772 ss.; 24 Heures, 23.9.98 (CF).27
[28] 24 Heures, 14.7.98. Pour Emmen, cf. APS 1994, p. 85.28
[29] LT, 24.6.98; NLZ, 4.7 et 11.7.98.29
[30] LT, 9.10 et 14.10.98.30
[31] LT, 3.9.98; AZ, 9.12.98.31
[32] FF, 1998, p. 3784 ss.; LT, 12.6.98.32
[33] BO CN, 1998, p. 2852 (casier judiciaire); TG, 26.6.98 (Portmann); 24 Heures, 18.11.98 (Roulier); LT, 11.12.98 (Schärli).33
[34] LT, 1.5.98; TG, 5.12.98. Rapport du chef de l’Etat-major général au Conseiller fédéral Adolf Ogi, L’extrémisme politique dans l’armée, Berne, janvier 1999.34
[35] Presse du 8.9 (entrepôts) et du 17.8 au 20.8.98 (M-113).35
[36] LT, 27.3.98.36
[37] 24 Heures, 15.12.98.37
[38] LT, 26.3.98. Voir également APS 1997, p. 100 ss.38
[39] FF, 1998, p. 2443 ss.; APS 1997, p. 104.39
[40] BO CN, 1998, p. 2043 ss. et 2054 ss.; BO CE, 1998, p. 808 ss. et 818 ss.40
[41] BO CN, 1998, p. 1483 ss.41
[42] LT, 7.10, 9.10 et 29.10.98.42
[43] BO CN, 1998, p. 2069 ss.; LT, 26.6.98; Lib., 21.11.98. Cf. aussi infra, I, 6b (Trafic aérien) et supra (programme d’armement).43
[44] BO CN, 1998, p. 1539.44
[45] FF, 1998, p. 2413 ss.; BO CN, 1998, p. 1203 ss.; BO CE, 1998, p. 1055 ss.45
[46] 24 Heures, 30.4.98; Lib., 19.11.98; NZZ et TG, 28.11.98.46
[47] 24 Heures, 22.10.98; SoZ, 20.9.98.47
[48] NZZ, 18.2.98.48
[49] BO CN, 1998, p. 2155 ss.49
[50] BO CN, 1998, p. 2853.50
[51] BO CN, 1998, p. 2828 s.51
[52] LT, 24.7.98.52
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