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Infrastruktur und Lebensraum
Energie
Das Parlament verabschiedete das Energiegesetz. Das Projekt einer Energiesteuer wurde daraus ausgeklammert und Entwürfe der beiden Ratskammern dazu in die Vernehmlassung gegeben. – Der Bundesrat sprach sich gegen die Volksinitiative „Für eine gesicherte AHV – Energie statt Arbeit besteuern“ aus. – Der Vorentwurf für ein Elektrizitätsmarktgesetz war in der Vernehmlassung sehr umstritten. – Die NAGRA nahm im Kanton Zürich Versuchsbohrungen für eine Lagerstätte für hochradioaktive Abfälle auf. – Der Bundesrat bewilligte eine Kapazitätserhöhung des KKW Leibstadt (AG) und eine Konzessionsverlängerung für das KKW Mühleberg (BE).
Politique énergétique
Les différents projets pour taxer les énergies non renouvelables ont largement alimenté le débat énergétique durant l'année sous revue. Les projets ont pris corps au Conseil national (projet d'arrêté fédéral concernant une taxe incitative), au Conseil des Etats avec le contre-projet de la Commission de l'environnement, de l'aménagement du territoire et de l'énergie (Ceate) et encore dans le cadre de différentes initiatives populaires en suspends. Toutefois, si les débats en cours n'ont pas trouvé de réponse commune, une taxe sur l'énergie semble se profiler inexorablement dans le paysage politique suisse. Le débat s'y rapportant aux Chambres a sans nul doute constitué l'un des enjeux principaux de la politique énergétique suisse durant l'année 1998.
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Lors de la session d'été, le Conseil national a abordé les divergences avec le Conseil des Etats dans la loi sur l'énergie. Suivant la majorité de sa Ceate, le National a supprimé l'obligation d'installer un décompte individuel de chauffage dans les bâtiments anciens ainsi que la demande d'octroi de concession pour les chauffages électriques fixes, estimant que cette dernière mesure devait rester de la compétence des cantons. Une proposition de minorité, demandant la création d'un fonds pour promouvoir les petites centrales hydroélectriques, fut rejetée. Une faible majorité de la Ceate (13 voix contre 12) a proposé de retirer le projet de taxe écologique de la loi, mais de le traiter sous la forme d'un arrêté fédéral séparé.
Au Conseil des Etats, les députés ont procédé à l'élimination des dernières divergences concernant la loi sur l'énergie. La Ceate s'est ralliée au National pour trois divergences sur quatre. L'ultime désaccord concernait le décompte individuel des coûts de chauffage pour les bâtiments anciens. La majorité de la Ceate proposa d'installer le décompte individuel de chauffage également dans les bâtiments existants, mais d'en dispenser les bâtiments disposant de bonnes caractéristiques énergétiques. Les députés n'ont pas suivi cette proposition, ils se sont ralliés au National par 25 voix contre 12. Dans le vote final, la loi sur l'énergie a été approuvée à l’unanimité au Conseil des Etats et par 148 voix contre 7 au Conseil national. A la grande Chambre, les écologistes se sont abstenus, estimant que la loi ne satisfaisait pas à des besoins énergétiques durables [1].
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Au Conseil national, l'entrée en matière sur l'arrêté fédéral séparé relatif à une taxe écologique sur l'énergie fut l'objet de débats nourris. Les partisans de la taxe l'ont soutenu en tant que contre-projet indirect aux trois initiatives populaires énergétiques en cours («pour l'introduction d'un centime solaire», «encourager les économies d'énergie et freiner le gaspillage», «pour garantir l'AVS – taxer l'énergie et non le travail!»). La constitutionnalité de la taxe et la procédure adoptée (l'arrêté ne sera soumis à une procédure de consultation qu'après son acceptation par la grande Chambre) ont été vivement controversées. La taxe a été jugée constitutionnelle par l'expert juridique Tobias Jaag pour autant qu'elle remplisse des buts écologiques, qu'elle soit incitative et qu'elle ne soit pas utilisée pour indemniser des investissements non amortissables (INA) ou pour diminuer les charges salariales. Une proposition Leuba (pl, VD) réclama le renvoi de l'arrêté en commission avec mandat de procéder à une consultation des cantons et milieux intéressés avant de décider, ainsi que d'obtenir l'avis du Conseil fédéral sur le projet d'arrêté. Elle fut rejetée in extremis par 93 voix contre 87. La majorité de la Ceate a soutenu la taxe écologique, estimant que la libéralisation du marché de l'électricité dans l'Union européenne nécessitait des mesures d'accompagnement. L'entrée en matière sur l'arrêté a été finalement acceptée par 105 voix contre 72. La taxe a été soutenue par les socialistes et les Verts, une majorité démo-chrétienne, une minorité radicale et par les représentants des cantons de montagne. Le député Lötscher (pdc, LU) demanda l'entrée en vigueur simultanée de la taxe et de la loi sur l’énergie et de prolonger en attendant l'arrêté fédéral de 1990. Soutenue par les écologistes et les socialistes, la proposition a toutefois été rejetée par 83 voix contre 69. Les députés ont suivi les recommandations de Moritz Leuenberger qui demanda de séparer les deux objets afin d'éviter qu'un référendum contre l'arrêté sur la taxe ne retarde l'entrée en vigueur de la loi. Le risque serait de ne jamais voir la loi entrer en vigueur et de prolonger indéfiniment l'arrêté de 1990.
Dans l'examen de détails de l'arrêté, les députés ont maintenu à 0,6 centime par kilowattheure la taxe prélevée sur la consommation finale de toute énergie non renouvelable. La taxe sera restituée dans les cas où les agents fossiles seront exportés ou utilisés à des fins autres qu'énergétiques, lorsque l'électricité sera produite au moyen d'agents renouvelables, lorsqu'elle sera exportée, ainsi que lorsqu'elle servira à alimenter des équipements à pompage-turbinage. La taxe sera exonérée ou remboursée lorsque l'énergie sera destinée à des réseaux de chauffage à distance. Un quart au moins du produit, en moyenne quinquennale, sera utilisé à l'encouragement des énergies renouvelables, à l'assainissement énergétique et au maintien et renouvellement des centrales hydrauliques. Le Conseil fédéral devra instituer un fonds avec les recettes de la taxe incitative. La Confédération pourra mettre à disposition d'organisations privées, cautionnant des projets de financement de tiers, des contributions à fonds perdu comme capital social ou comme caution. La taxe sera introduite progressivement par l'exécutif, en l'espace de six ans, son effet incitatif sera vérifié régulièrement. L'arrêté a été limité à 25 ans au plus à compter de son entrée en vigueur, pour autant que l'approvisionnement du pays en énergie renouvelable locale soit assuré au moins à 50% et que le pourcentage d'énergie utilisable soit supérieur aux pertes d'énergie. Le vote sur l'ensemble de l'arrêté a retenu l'approbation de 98 députés contre 59. Ce projet d'arrêté fédéral sur la taxe a été ensuite mis en procédure de consultation avant d'être transmis au Conseil des Etats [2].
Le Conseil national a donc mis en consultation son projet d'arrêté fédéral relatif à la taxe écologique sur l'énergie dès la fin juillet. Dans un même temps, la Ceate du Conseil des Etats a proposé un nouveau projet de taxe énergétique incitative servant de contre-projet aux initiatives populaires «Encourager les économies d'énergie et freiner le gaspillage» (initiative énergie et environnement) et «Pour l'introduction d'un centime solaire» (initiative solaire), toutes deux rejetées par le Conseil fédéral sans contre-projet. La commission du Conseil des Etats, contrairement au Conseil national, a estimé qu'une modification de la Constitution était indispensable. Elle a mandaté l'Office fédéral de l'énergie pour ouvrir une double procédure de consultation. Le premier volet consiste en un nouvel article constitutionnel instaurant une taxe énergétique sur les agents non renouvelables. Les recettes ont été estimées à 2,5 milliards de francs par année, 2,2 milliards seraient utilisés pour réduire les cotisations sociales prélevées sur les salaires, notamment pour l'AVS et l'AI. Cette proposition fait office de contre-projet à l'initiative populaire énergie et environnement et pourrait servir de fondement pour la réforme fiscale écologique envisagée par Kaspar Villiger. Le second volet, contre-projet à l'initiative solaire, consiste en un second article constitutionnel transitoire. Il stipule que pendant dix ans, 300 millions du produit de la taxe seront destinés à la promotion de l'énergie solaire et de la biomasse, à l'entretien des centrales hydrauliques et aux économies d'énergie. Les représentants de la Ceate ont déclaré que leur projet était fiscalement neutre. Il n'augmentera pas la charge fiscale globale de l'Etat puisqu'il réduira les ponctions salariales et qu'il encouragera de manière acceptable les énergies renouvelables. Le taux de la taxe devrait faire augmenter les prix des agents énergétiques non renouvelables de 10 à 15% [3].
Lors des procédures de consultation, le PDC, le PS et les Verts se sont déclarés favorables aux deux projets qui permettront d'accompagner l'ouverture du marché de l'électricité. Le PS a souhaité que l'article constitutionnel, en tant que base pour une réforme fiscale écologique, soit traité de manière indépendante de l'arrêté du National. Les Libéraux ont refusé clairement le projet de la Chambre du peuple. Ils se sont par contre exprimés favorablement sur le premier volet du projet de la Ceate (taxe sur les énergies non renouvelables pour réduire les cotisations sociales), mais ont rejeté le second (article constitutionnel transitoire encourageant les énergies renouvelables). Le PRD a rejeté le projet du Conseil national, mais il a soutenu celui de la Ceate. L'UDC a refusé strictement toute taxe sur l'énergie, il a été très critique sur les deux projets. Le Vorort a renvoyé catégoriquement le projet du National à l'instar de celui de la Ceate avec toutefois un bémol, puisqu'il a accepté les discussions au sujet d'un projet de réforme fiscale écologique. L'Union des centrales suisses d'électricité (UCS) s'est opposée aux deux projets. Finalement, la Fondation Suisse de l'Energie a soutenu le projet du National et encouragé à long terme l'élaboration d'une réforme fiscale écologique [4].
Le Conseil fédéral, dans sa séance extraordinaire d'octobre, a pris diverses options relatives à la future politique énergétique fédérale. Le gouvernement s'est déclaré pour la première fois ouvertement favorable à l'introduction d'une taxe énergétique incitative et à l'élaboration d'une réforme fiscale écologique. Il s'est ainsi rapproché de la solution concoctée par la Ceate du Conseil des Etats, précisant sa stratégie à propos de la réforme fiscale écologique. Le gouvernement a estimé, à l'instar du Conseil des Etats, que l'introduction d'une taxe sur l'énergie nécessitait la mise en place d'une base constitutionnelle. La réforme fiscale écologique devrait se faire, selon l'exécutif, en deux étapes. La première étape consisterait à introduire une taxe d'incitation ancrée dans un article constitutionnel, dès 2001 ou 2002. L'idée est d'imposer davantage les énergies non renouvelables, de favoriser les énergies renouvelables et de soutenir les centrales hydroélectriques. La deuxième étape du processus devrait remplacer cette taxe d'incitation par un véritable impôt écologique et fiscalement neutre. Il serait introduit à la fin de l'échéance du régime financier actuel (fin 2006) et devrait poursuivre un double but: améliorer l'environnement et favoriser l'emploi. Il devrait frapper les mêmes agents énergétiques que la taxe d'incitation. Mais plus élevé, il permettrait d'abaisser les charges salariales et de renforcer ainsi la compétitivité économique de la Suisse. Une estimation provisoire permet de tabler sur des recettes se situant entre 2 et 3 milliards par an, de quoi alléger les cotisations sociales de 1% (à parts égales pour les employés et les employeurs). Le gouvernement a formé un groupe de travail qui devra plancher sur plusieurs questions: l'indemnisation des INA, l'exemption de la taxe pour l'énergie hydraulique qui pourrait représenter une distorsion de concurrence et donc une violation aux accords de l'OMC, et enfin l'éventuelle suppression de la redevance hydraulique payée par les producteurs aux communes qui possèdent des barrages. La stratégie ainsi présentée par le Conseil fédéral a fait office de réponse aux différentes propositions étudiées par le parlement. Les cantons de montagne ont d'ailleurs réagi vivement à l'idée de supprimer les redevances hydrauliques qui représentent pour eux des recettes très importantes [5].
En mai, le Conseil fédéral a transmis aux Chambres son message relatif à l'initiative populaire des Verts «Pour garantir l'AVS – taxer l'énergie et non le travail!», déposée en 1996. Il a approuvé l'idée d'imposer davantage l'énergie à moyen et à long terme, mais a estimé l'initiative inacceptable du point de vue de la politique budgétaire. Le gouvernement a jugé inopportun d'abaisser l'âge de la retraite en taxant l'énergie, car cela entraînerait une augmentation des coûts des assurances sociales, ce qui aggraverait leurs problèmes de financement. Néanmoins, il a estimé que les effets économiques d'une taxe sur l'énergie introduite progressivement seraient supportables pour l'économie. A long terme, il a même supposé que l'initiative populaire aurait une influence positive sur la croissance économique et sur l'emploi. Toutefois, le constat global restant négatif, le Conseil fédéral a proposé de rejeter l'initiative populaire sans contre-projet [6].
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Au cours de la session spéciale du mois d'avril, le Conseil des Etats a entamé les délibérations concernant le projet de loi sur une réduction des émissions de CO2. La petite Chambre est entrée en matière sans opposition. La principale pierre d'achoppement fut l'attribution de la compétence pour l'introduction de la taxe. Reconnaissant que le parlement ne pouvait pas garantir la rapidité nécessaire de la mise en application de la loi, ni un accord entre les deux chambres, le Conseil des Etats a suivi la majorité de sa commission en donnant sa préférence au Conseil fédéral. Il a aussi ajouté au projet de loi, un article demandant au gouvernement de s'engager à présenter aux Chambres fédérales en temps opportun des projets pour la période après 2010. Le Conseil fédéral ne fixera la hauteur et la date d’entrée en vigueur de la taxe que suite à une procédure de consultation. Il prendra en considération les prix des combustibles fossiles des Etats voisins, a assuré le conseiller fédéral Leuenberger. Finalement, la loi a été approuvée à l'unanimité [7].
Au Conseil national, une fraction de l'UDC a recommandé le renvoi du projet de loi au Conseil fédéral afin que ce dernier établisse toutes les répercussions d'une taxe énergétique sur l'économie suisse. Les députés ont toutefois suivi la majorité de la Ceate en acceptant l'entrée en matière par 113 voix contre 50. La majorité de la Ceate a souhaité étendre le champ d'application de la loi sur le C02 aux émissions de CH4 (méthane) et de N20 (protoxyde d'azote). Les parlementaires n'ont pas suivi cette proposition, ils ont préféré se rallier au Conseil des Etats. Moritz Leuenberger a précisé que la taxation des émissions de méthane et de protoxyde d'azote serait traitée dans le cadre de la loi sur l'agriculture. Une proposition, réclamant une diminution des émissions de C02 de 20% au minimum, fut rejetée. Enfin, la question de la compétence pour l'introduction de la taxe fut le point central des débats. La majorité de la commission était d'avis de la donner au parlement. Les socialistes et les écologistes ont combattu cette proposition, donnant leur préférence au Conseil fédéral. L'UDC souhaitait accorder la compétence au parlement et proposa d'y ajouter le référendum facultatif. Finalement, les députés ont décidé, par 95 voix contre 75, que la compétence irait à l'Assemblée fédérale, mais ils ont renoncé au référendum facultatif. Deux propositions furent rejetées par le plénum: l'une souhaitait ajouter à la taxe les énergies non renouvelables, l'autre demandait que la taxe soit utilisée pour diminuer les charges salariales. Dans la votation finale, le Conseil national a approuvé la nouvelle loi sur la réduction des émissions de C02 par 61 voix contre 29, avec 48 abstentions [8].
Saisi à nouveau du projet, le Conseil des Etats n'a pas voulu céder sur la compétence de l'introduction de la taxe. Considérée comme une tâche avant tout exécutive, la compétence de l'introduction d'une taxe sur le CO2 a été maintenue au Conseil fédéral, par 22 voix contre 14 [9].
Au Conseil National, les députés ont transformé en postulat une motion de leur Ceate invitant le gouvernement à stabiliser la consommation d'agents énergétiques fossiles d'ici à l'an 2000, puis de la réduire de quelque 20% au cours des dix années suivantes. Le Conseil fédéral a assuré que la politique énergétique actuelle sera poursuivie et consolidée à l'aide des lois sur l'énergie et sur le CO2 et du programme qui prolongera «Energie 2000» après le tournant du siècle. Néanmoins, l'exécutif estima que les réductions d'agents fossiles ne pourraient pas atteindre les 20% au cours des dix années suivantes [10]. Le Conseil national a également transmis un postulat Vallender (prd, AR) invitant le Conseil fédéral à faire en sorte que les violations des engagements pris dans le cadre du protocole de Kyoto du 10 décembre 1997, dans le domaine de la lutte contre les émissions de C02, fassent l'objet d'une procédure d'arbitrage internationale et que les pays en faute soient sanctionnés [11].
Le canton de Bâle-Ville a été le premier canton à introduire dans sa législation une taxe incitative sur le prix de l'électricité. En effet, le Grand Conseil a approuvé avec une forte majorité une nouvelle loi sur l'énergie contenant cette innovation. Concrètement, comme le prix de l'électricité est amené à baisser, les autorités ont décidé d'utiliser cette baisse pour mettre en place une taxe incitative. La facture des consommateurs restera la même et la différence entre le tarif et le prix payé constituera la taxe incitative. Cette dernière sera intégralement redistribuée l'année suivante aux consommateurs en tant que bonus. Pour les entreprises, ce bonus permettra d'abaisser les charges salariales. Cette nouvelle loi constitue un contre-projet à l'initiative populaire cantonale «Canton énergie 2000», déposée en 1992, réclamant une taxe incitative sur l'électricité. Le comité du nord-ouest de la Suisse contre l'énergie nucléaire a déclaré qu'il retirait son initiative suite à l'acceptation de cette nouvelle loi sur l'énergie [12].
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Sous la pression de l'ouverture du marché de l'électricité dans l'Union européenne prévue pour 1999, la Suisse s'apprête elle aussi à libéraliser ce secteur jusqu'ici en situation monopolistique. Le Conseil fédéral a mis en consultation en début d'année un avant-projet de loi sur le marché de l'électricité. Ce dernier consiste en une loi cadre qui s'appuie sur les principes de coopération et de subsidiarité. Il propose un accès réglementé au réseau sur la base d'un accord et formule les principes régissant la gestion du réseau, la compatibilité et la sécurité de l'approvisionnement. La libéralisation se fera par étapes sur neuf années. A l'entrée en vigueur de la loi, seuls les gros consommateurs auront accès au libre marché. Cette première étape concernera 114 entreprises suisses consommant plus de 20 gigawattheures annuellement. Elle permettra de libéraliser 21% de l'ensemble du marché. Après trois ans, la part s'élèvera à 33%, puis à 60% après six ans et enfin à la totalité au bout de neuf ans. Parallèlement, les petites usines de distribution devront vendre un courant issu du marché libre à hauteur de 10% pour les trois premières années, de 20% pour les trois suivantes, puis de 50% et atteindre les 100% après neuf ans. Selon l'Union des centrales suisses d'électricité (UCS), les investissements non amortissables (INA) s'élèveraient à 4,8 milliards de francs si l'ouverture se faisait totalement en 1999. Ce montant diminuerait avec une libéralisation progressive pour atteindre entre 700 millions et 1,8 milliard de francs. Les consommateurs devront payer cette somme; le projet de loi autorise en effet les fournisseurs à augmenter temporairement (10 ans au maximum) leurs tarifs afin de rembourser ces investissements. Cela consistera en une hausse du kwh de 0,18 à 0,45 centime, selon l'Office fédéral de l'énergie. Le produit de cette augmentation sera réuni dans un fonds privé qui servira à indemniser les INA ainsi qu'à maintenir ou rénover des centrales hydrauliques. Les centrales nucléaires n'ont pas été exclues de l'indemnisation des INA. Le projet demande d'encourager au moyen d'un fonds de soutien les énergies renouvelables. Les distributeurs d'électricité devront en acquérir une part minimale. Le projet recommande également la création d'une seule société suisse de réseau qui sera issue du rapprochement entre les six grandes compagnies nationales. Une commission d'arbitrage est aussi prévue. Quant aux 900 sociétés de distribution au détail, elles devront se concentrer [13].
L'avant-projet de loi s'est heurté en procédure de consultation à d'âpres résistances, même si la majorité des acteurs concernés ont reconnu la nécessité de la libéralisation. L'encouragement des énergies renouvelables et la compensation des INA – deux pièces majeures du dossier – ont fait l'objet de critiques acerbes. Il en a été de même pour la création d'une société suisse unique pour l'exploitation du réseau. Concernant la priorité donnée aux énergies renouvelables, le Vorort, l'USAM, l'UCS, Migros, l'Union des villes suisses, plusieurs partis (PRD, PL, UDC) et la commission de la concurrence s'y sont opposés. Parmi les partisans d'un encouragement aux énergies renouvelables, le PS et le PDC ont souhaité maintenir la compétitivité des centrales hydroélectriques avec l'aide d'une taxe sur les énergies non renouvelables. Les cantons de montagne ont réclamé haut et fort cette taxe pour accompagner l'ouverture du marché de l'électricité. Ils ont demandé que la moitié des recettes de la taxe soit affectée à l'encouragement des énergies renouvelables. Concernant l'indemnisation des INA, le Vorort a exprimé son désaccord, estimant que les consommateurs n'avaient pas à payer pour les mauvais investissements des centrales. L'USAM, l'Union suisse des paysans et la commission de la concurrence s'y sont opposés. Les milieux écologistes et le PS se sont opposés à toute indemnisation des INA pour les centrales nucléaires. Concernant la création d'une société suisse unique pour l'exploitation du réseau, la gauche est d'accord, le Vorort, l'UCS, l'UDC et le PRD sont contre. L'UCS a proposé un bureau de coordination pour les lignes du réseau et réclamé un rythme d'ouverture plus lent. La commission de la concurrence, qui a vivement critiqué tout le projet, a néanmoins soutenu ce dernier point [14].
Les producteurs d'électricité suisses ont entamé leur restructuration en vue de la prochaine libéralisation du secteur. Ainsi, les Entreprises électriques fribourgeoises (EEF) se sont alliées avec le quatrième producteur européen, le munichois Bayernwerk. Cette alliance permettra aux EEF de maîtriser les deux tiers du courant qu'elles vendront, contre un tiers auparavant. Cette démarche n'a pas plu au grossiste romand EOS (Energie Ouest Suisse) qui s'estimait le fournisseur exclusif des EEF jusqu'en 2008. De même, sept grandes centrales d'électricité de villes suisses ont décidé de s'unir afin d'offrir des prestations en énergie communes pour leurs clients transrégionaux. Elles ont ainsi formé une communauté d'intérêts de services énergétiques réunissant des centrales électriques des villes de Zurich, Berne, Winterthur, Lucerne, St.Gall, Schaffhouse et Bâle. Genève et Lausanne sont dans le groupe de travail, mais n'ont pas encore pris leur décision pour adhérer à la communauté [15].
Sept grosses sociétés de distribution ont annoncé qu'elles ne poursuivraient plus le projet de société unique, mais plutôt celui d'une entreprise de coordination technique du réseau de haute tension [16].
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Les milieux de l'électricité, les organisations de protection de l'environnement ainsi que les pouvoirs publics se sont mis d'accord sur la construction et l'extension de trois lignes à haute tension. Cet accord a été conclu dans le cadre d'un groupe de résolution des conflits des lignes de transports mis en place par la Confédération en 1993 dans le cadre du programme d'action d'Energie 2000. L'objectif était de désamorcer les conflits entre les représentants des milieux écologistes et ceux de la branche, et d'activer les procédures d'approbation des nouvelles constructions de lignes. La planification de ce groupe prévoit 68 projets d'extension dont 20 constructions de nouveaux tronçons. D'ores et déjà, trois projets ont été acceptés: l'extension des lignes de Mörel-Ulrichen-All'Aqua et de Massaboden-Ritom reliant Valais et Tessin et une troisième ligne Rapperswil-Gossau (SG). La planification sera évaluée dans le cadre d'une procédure de consultation, elle devra ensuite être approuvée par le Conseil fédéral [17]. La discussion relative à une motion Semadeni (ps, GR) a été renvoyée à une date ultérieure par le Conseil national. La motion chargeait le Conseil fédéral de réviser la législation sur les lignes à courant fort, de manière à ce que les personnes concernées puissent être indemnisées de façon appropriée selon le principe de causalité, grâce à l'internalisation des coûts. L'objet sera combattu ultérieurement par le député Steiner (prd, SO) [18].
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En 1998, la consommation globale d'énergie en Suisse a augmenté de 2,7% par rapport à l'année précédente. Les facteurs explicatifs de cette hausse sont essentiellement la reprise économique et les basses températures de l'année sous revue. Les énergies renouvelables, force hydraulique comprise, ont couvert 15,1% des besoins. La demande a crû le plus fortement dans le secteur des combustibles: la consommation de mazout a ainsi progressé de 3,6%, celle du bois de 2,5% et celle du gaz de 3,3%. Les énergies renouvelables spéciales, comme le biogaz ou les énergies solaire et éolienne, ont passé de 0,6 à 0,7% [19].
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Energie nucléaire
En début d'année, le DETEC a mis en place un groupe de travail chargé de dégager un consensus sur la gestion des déchets nucléaires en vue de la nouvelle loi sur l'énergie atomique. Le groupe de travail a réuni les exploitants des centrales, la CEDRA, les organisations écologistes et les différents offices fédéraux concernés. Sous la direction du Professeur d'éthique sociale Hans Ruh de l'Université de Zurich, le rapport final du groupe de travail a rendu ses conclusions au DETEC. Les parties en présence ont eu toutes les peines à trouver des propositions de compromis qui ont finalement été faites par le directeur du rapport lui-même. Le désaccord des participants a porté sur quatre éléments principaux. Premièrement, la question du maintien de la production nucléaire. Les exploitants souhaitaient que les centrales restent en service tant que la sécurité était assurée, les organisations écologistes réclamaient un référendum pour toute poursuite de l'activité au-delà de 30 ans. Hans Ruh a proposé une solution de compromis: le Conseil fédéral pourrait prolonger lui-même de 10 ans l'exploitation (en plus des 40 ans autorisés), au-delà, le référendum serait nécessaire. Deuxièmement, la question de l'entreposage des déchets faiblement et moyennement radioactifs. Les organisations écologistes exigeaient un dépôt de longue durée, contrôlé et récupérable, auquel on puisse avoir accès en tout temps. Les exploitants réclamaient un entreposage définitif et scellé. Concernant les déchets hautement radioactifs, les parties se sont mises d'accord pour l'élaboration d'un dépôt durable contrôlé et récupérable. Le troisième point sensible concerna le projet de dépôt de Wellenberg (NW) au sujet duquel le désaccord fut total. Hans Ruh a proposé que la CEDRA poursuive ses travaux et perce une galerie de sondage, et qu'en parallèle le Conseil fédéral étudie le concept d'un dépôt durable, contrôlé et récupérable. Par la suite, un bilan devra être établi sur la base d'une comparaison des deux projets. Dernier point de litige, le retraitement de combustibles nucléaires épuisés. Les milieux écologistes réclamaient son interdiction, les exploitants son encouragement. Le président Ruh a proposé de soumettre à autorisation l'exportation de ces déchets. Finalement, des accords de principe ont été trouvés: toute nouvelle construction de centrale sera soumise au référendum facultatif, un fonds pour l'élimination des déchets radioactifs provenant des installations nucléaires sera créé et la question de la responsabilité civile devra être réglée [20].
En mars, le Comité «L'énergie sans le nucléaire», regroupant environ 40 organisations écologistes, le Parti socialiste et les Verts, a entamé la récolte de signatures pour deux initiatives antinucléaires: «Moratoire-plus» et «Sortir du nucléaire». La première initiative demande que la décision de prolonger l'exploitation d'une centrale nucléaire après quarante ans fasse l'objet d'un arrêté fédéral soumis au référendum et que cette prolongation ne dépasse en aucun cas dix ans. Elle réclame en outre l'arrêt de toute nouvelle installation nucléaire, de toute augmentation de puissance thermique et de l'utilisation de réacteurs pour la recherche et le développement pour une période de dix ans. La seconde initiative demande l'arrêt progressif des cinq centrales en fonction et la fin du retraitement des combustibles radioactifs [21].
Les autorités suisses ont signé une charte dans le cadre d'un accord international sur la sécurité nucléaire auprès du Secrétariat de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) à Vienne. Selon les autorités suisses, le pays remplirait totalement les conditions contenues dans l'accord qui réclame des centrales nucléaires civiles. L'accord ne mentionne néanmoins pas la question de la recherche dans le domaine des réacteurs, ni celle de l'entreposage ou du retraitement des déchets nucléaires [22].
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La Chambre du peuple a décidé de transformer en postulat une motion Teuscher (pe, BE) invitant le Conseil fédéral à réviser la législation en vigueur sur l'énergie atomique de façon à empêcher l'exportation d'éléments combustibles nucléaires usés à l'étranger. La question sera développée dans le cadre de la révision totale de la loi sur l'énergie atomique, ainsi que dans le dialogue engagé au niveau national sur l'énergie, a assuré le conseiller fédéral Leuenberger [23].
Début mai, la Direction française de la sécurité des installations nucléaires (DSIN) admettait publiquement avoir mesuré un taux de radioactivité anormal sur des wagons suisses. Ceux-ci transportaient des déchets provenant de centrales nucléaires suisses, destinés au retraitement à l'usine de La Hague. Par la suite, la Société nationale de chemins de fer française a révélé des taux de contamination radioactive de 300 à 400 fois supérieurs aux normes de sécurité dans des wagons provenant de Suisse et d'Allemagne. Elle a décidé de stopper tout transport de déchets nucléaires. Suite à ces révélations, l'Office fédéral de l'énergie a décidé de suspendre toute autorisation pour le transport d'éléments combustibles irradiés tant que l'on ne connaîtrait pas les causes exactes de contamination. Bien que ces taux élevés n'aient à aucun moment mis en danger la santé physique de personnes, l'affaire a fortement secoué l'opinion publique et eu de nombreux échos auprès des médias. Le directeur de la DSN (Division de sécurité des installations nucléaires) suisse a assuré que les wagons étaient tous contrôlés avant leur départ et qu'ils n'étaient pas contaminés, il a supposé que la contamination s'était produite en cours de transport. Les centrales suisses ont supposé que l'eau qui recouvre les déchets lors de leur chargement avait pu contaminer les conteneurs. Le conseiller fédéral Moritz Leuenberger a ordonné une enquête interne à la DSN sur le fait, relaté par les médias, que des collaborateurs n'auraient pas informé le directeur des taux de contamination trop élevés. Il a également ordonné une enquête sur le rôle de la DSIN lors du transport de déchets nucléaires en France. Le chef du DETEC a annoncé un renforcement de l'indépendance de la DSN. L'organisme sera détaché du contrôle direct de l'administration et intégré dans une future «Agence nationale de sécurité». Les producteurs suisses d'énergie nucléaire ont reconnu les dysfonctionnements et ont assuré pour l'avenir leur coopération avec les autorités dans la refonte du système de surveillance des transports. Les organisations antinucléaires ont réaffirmé leurs positions qui ont trouvé dans cette affaire un appui certain. Les choses se sont encore envenimées suite au dépôt d'une plainte d'antinucléaires français et anglais auprès du Ministère public de la Confédération contre les autorités nucléaires suisses dans leur ensemble. La plainte visait les dirigeants des quatre centrales nucléaires en cause, la DSN et les fonctionnaires de l'Office fédéral de l'énergie. L'enquête menée par les centrales nucléaires a révélé que, ces dernières années, 26 cas de conteneurs destinés à l'étranger avaient atteint des taux de radiation trop élevés, cinq cas avaient dépassé les valeurs limites, selon l'Association suisse pour l'énergie atomique [24].
Le Conseil national a transformé en postulat une motion Stump (ps, AG) ayant trait au scandale des fuites radioactives. Le motionnaire a demandé une interdiction de tout transport de déchets nucléaires à retraiter, l'arrêt immédiat de tout retraitement, la suspension des contrats en cours, la réorganisation totale des autorités de surveillance et la création d'une autorité de contrôle et de vérification indépendante des autorités délivrant les autorisations. Le Conseil fédéral a répété qu'aucune autorisation ne serait délivrée avant une clarification des causes de la contamination et avant la mise en place de mesures adéquates afin de supprimer tout risque. L'exécutif a rappelé que la question du retraitement des déchets radioactifs sera abordée prioritairement lors de la révision de la loi sur l'énergie atomique, un abandon du retraitement est envisagé ainsi qu'un stockage définitif des déchets. Il a rappelé que le DETEC avait déjà entrepris la mise en place d'une agence nationale de sécurité avant les événements en question. Cette agence regroupera les organes fédéraux de surveillance et sera indépendante des autorités délivrant les autorisations. Une interpellation urgente Plattner (ps, BS) a également été formulée à ce sujet au Conseil des Etats [25].
L'affaire a continué à faire des vagues au Conseil National avec une initiative parlementaire des Verts réclamant la mise en place d'une commission d'enquête parlementaire indépendante chargée d'examiner les transports de déchets nucléaires en Suisse et les procédures de concession, ainsi que de surveiller les centrales nucléaires suisses. L'initiative a été rejetée par les parlementaires qui ont estimé que les éclaircissements de la commission de gestion, ainsi que les mesures du chef du DETEC, seraient aptes à éclaircir la situation [26].
En fin d'année, les autorités suisses ont rédigé, avec les autorités allemandes, françaises et britanniques, un rapport international afin d'éviter toute contamination lors de transports de déchets nucléaires. Dorénavant, les centrales devront contrôler plus sévèrement leurs transports. La communication réciproque entre les différents pays devra être améliorée et une banque de données internationale sur les transports de déchets nucléaires sera mise en place. Le représentant de la DSN a déclaré que les centrales nucléaires suisses n'étaient toujours pas en mesure d'assurer le respect des limites autorisées. Ainsi, les centrales ne pouvant pas déterminer précisément les causes de contamination, tout transport est resté interdit. Les CFF ont déclaré pour leur part qu'ils étaient prêts à reprendre les transports dès que la DSN le leur autoriserait. La DSN et les CFF ont décidé qu'un expert en protection des radiations accompagnerait désormais chaque transport et que des contrôles médicaux seraient effectués deux fois par année pour le personnel des CFF en contact avec les wagons [27].
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La Coopérative pour l'entreposage des déchets radioactifs (CEDRA), ayant terminé les mesures sismiques dans la région argovienne du Mettauertal, s'est concentrée sur la région du Weinland dans le canton de Zurich. Cette région est l'un des sites possibles en vue d'un dépôt final pour déchets hautement radioactifs prévu pour l'an 2045. Les forages d'essai ont suscité la colère des associations antinucléaires «Bedenken» et «Igel» qui ont manifesté sur les lieux et déposé une initiative cantonale dans le canton de Zurich intitulée «Pour la codécision en matière d'entrepôts nucléaires». Cette initiative réclame une modification de la Constitution cantonale et des lois s'y rapportant, afin de soumettre à l'approbation populaire la question de l'entreposage de déchets nucléaires. En outre, le recours, déposé en 1997 par «Bedenken» et 27 particuliers contre l'autorisation de construire une installation de forage octroyée par la commune de Benken (ZH), a été débouté en deuxième instance par le tribunal administratif cantonal [28].
Les expertises des deux groupes de travail mis sur pied par la Confédération à la demande du gouvernement nidwaldien ont conclu que le projet de dépôt final de déchets faiblement et moyennement radioactifs au Wellenberg (NW) méritait d'être poursuivi. Le groupe technique a estimé que le projet répondait à un niveau de sécurité élevé, malgré un risque de séisme supérieur à la moyenne dans la région. Il a conclu à la nécessité de creuser une galerie de sondage afin de mieux connaître les entrailles de la montagne. Cette étape est indispensable au DETEC pour décider de la poursuite ou de l'abandon du projet. S'il devait être poursuivi, les Nidwaldiens seraient appelés aux urnes une nouvelle fois. En cas de refus réitéré, le site du Wellenberg ne pourrait plus entrer en ligne de compte pour un dépôt final. La seconde étude a insisté sur les intérêts de la région à accepter le dépôt final. Sa construction engendrerait un chiffre d'affaires annuel de 23 millions de francs pendant quarante ans et entraînerait la création directe ou indirecte de 130 emplois. Néanmoins, le dépôt pourrait nuire au tourisme dans la région, mais les conséquences n'ont pas été quantifiées. En outre, le projet d'un dépôt final de déchets radioactifs international a été relancé par la participation de la CEDRA à des recherches préliminaires en vue de la création d'un dépôt multinational en Australie. Des spécialistes des Etats-Unis, du Canada, de la Grande-Bretagne et de la Suisse se sont associés à ce projet intitulé Pangea. La CEDRA a précisé que cette participation n'aura pas de conséquences sur la recherche d'un site de dépôt final en Suisse [29].
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En octobre, le Conseil fédéral a présenté, après une réunion à huit clos, les objectifs énergétiques fédéraux futurs. Dans ce contexte, le conseiller fédéral Moritz Leuenberger a soutenu une fermeture des centrales nucléaires suisses dans un délai encore inconnu. La déclaration du conseiller fédéral a eu un retentissement certain auprès des médias qui ont unanimement parlé d'un retrait planifié du nucléaire. Le chef du DETEC a tenu à rectifier la donne, précisant qu'il n'avait jamais parlé de retrait du nucléaire, mais de démantèlement progressif des centrales nucléaires. Au Conseil national cette affaire a fait l'objet de deux interpellations de représentants de l'UDC et du PRD qui n'ont pas hésité à parler de désinformation de la part du gouvernement. Le débat sur le nucléaire fut de la sorte relancé au sein du plénum. D'autre part, lors de cette réunion d'octobre, le gouvernement a décidé que les installations existantes pourraient continuer à fonctionner à pleine puissance. Il a en effet donné son autorisation au réacteur de Leibstadt (AG) d'augmenter sa capacité de production de 15%. Sur une même lancée, il a prolongé la concession de la centrale de Mühleberg (BE) jusqu'en 2012. Le Conseil fédéral a aussi déclaré qu'il souhaitait renoncer à l'indemnisation des INA dans le cas des centrales nucléaires. Moritz Leuenberger et Pascal Couchepin se sont engagés à discuter avec les différents acteurs concernés (centrales, cantons, communes et organisations écologistes) afin de rédiger au plus vite la nouvelle loi sur l'énergie atomique. Cette dernière devrait fixer la date de fermeture des réacteurs et soumettre toute nouvelle construction au référendum facultatif. Le représentant des centraliers suisses, Peter Hälen, ne s'est pas déclaré inquiet de l'annonce du gouvernement, car le Conseil fédéral a laissé ouvert le délai d'abandon du nucléaire. Le camp écologiste s'est déclaré insatisfait, déplorant les concessions accordées aux centrales de Leibstadt et de Mühleberg. Le WWF et Greenpeace ont d'ailleurs déclaré qu'ils poursuivraient leurs efforts de récolte de signatures pour les deux initiatives populaires en cours: «Sortir du nucléaire» et «Moratoire plus». Suite à la décision du Conseil fédéral de donner l'autorisation à la centrale de Leibstadt d'augmenter sa puissance, des activistes de Greenpeace ont bloqué, durant une nuit du mois de mars, 32 transports de déchets nucléaires destinés au retraitement [30].
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Le gouvernement français a confirmé en début d'année l'abandon du surgénérateur Superphénix de Creys-Malville. Son démantèlement sera long, en raison du retrait du combustible usé et de la vidange du sodium liquide servant au refroidissement [31].
L'expertise, demandée par Moritz Leuenberger en 1997 à un consultant allemand afin de s'assurer que les fissures révélées dans le manteau du réacteur de Mühleberg (BE) ne présentaient pas de danger pour la sécurité de l'installation, a donné ses résultats en début de l'année sous revue. Les experts allemands sont parvenus aux mêmes conclusions que la DSN. Les fissures apparues dans le manteau du réacteur ne mettraient pas en péril la sécurité de la centrale puisqu'elles n'empêcheraient en aucun cas l'arrêt du réacteur ni son refroidissement si une panne éventuelle se produisait. Concernant la demande des forces motrices bernoises (FMB) d'une exploitation illimitée de Mühleberg adressée au Conseil fédéral en 1996, le canton de Berne devait faire part au gouvernement de sa position. Le Conseil d'Etat bernois a donné un avis favorable aux autorités fédérales. Il a refusé l'arrêt de la centrale nucléaire pour 2002 et proposé une prolongation du délai d'autorisation d'exploitation. Le Conseil fédéral décida par la suite de prolonger la concession de la centrale jusqu'en 2012. Le combat des antinucléaires bernois ne s'est pas arrêté pour autant. Il fut relancé par la création d'une association «Berne sans atome» qui a entamé la récolte de signatures pour une initiative populaire cantonale réclamant la fermeture de Mühleberg (BE) dès 2002. Le texte, s'il était accepté, demanderait une modification de la Constitution bernoise. Il obligerait le canton, qui détient 69% des parts de la centrale, de décider l'arrêt rapide et définitif de l'installation et de renoncer à toute autre centrale sur le canton. Le comité est constitué d'organisations écologistes, du PS et des Verts [32].
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Energie hydro-électrique
Le Conseil des Etats a transmis sous la forme du postulat une motion Delalay (pdc, VS) réclamant des modifications de plusieurs articles de la loi fédérale de 1991 sur la protection des eaux (Leaux) qui règle la question de l'assainissement des cours d'eau. Le motionnaire estimait que la loi devait tenir compte des pertes de production issues d'une modification des débits résiduels et qu'elle devait être modifiée afin de maintenir au mieux la compétitivité de la force hydraulique en vue de la libéralisation du marché de l'électricité. Le Conseil fédéral a jugé que la loi en vigueur était efficace, car elle représentait un compromis entre les intérêts de la protection et ceux de l'utilisation des eaux. Il a estimé loi suffisamment claire en ce qui concerne le versement d'indemnités dû à l'assainissement dans les cas où le cours d'eau concerné est en contact étroit avec des biotopes inventoriés ou lorsque la protection du paysage est touchée. La procédure de constat et la détermination du montant de l'indemnité sont régies par la loi fédérale sur l'expropriation [33].
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Le projet d'une nouvelle construction en aval de la centrale actuelle de Rheinfelden (AG) a obtenu l'autorisation du DETEC. Cette future construction devrait se réaliser en six ans et totaliser un coût de 600 millions de francs. Néanmoins, la construction devrait revoir ses objectifs à la baisse et procéder aux travaux par étapes, afin de ne pas répercuter leurs coûts sur le prix de l'électricité [34].
La nouvelle usine électrique Cleuson-Dixence (VS) a été mise en service au mois d'octobre de l'année sous revue. Les propriétaires de l'installation, EOS et Grande Dixence SA, ont précisé que l'ouvrage produira de l'énergie de pointe permettant de faire face aux fluctuations de la demande d'énergie et de répondre aux pics de consommation, notamment en hiver [35].
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Produits pétroliers et gaz
Le processus d'ouverture du marché du gaz s'est accéléré avec la mise en place de deux groupes de travail constitués par l'Association suisse de l'industrie gazière (ASIG) et Swissgas. Les débats n'ont toutefois pas atteint l'intensité de ceux liés à l'ouverture du marché de l'électricité. Faisant suite à la publication en 1997 du rapport Jean Cattin, ces deux groupes de travail internes à la branche ont été chargés d'examiner les modalités d'une ouverture du marché du gaz. Ils devront proposer des modèles pour l'approvisionnement, le transport et la distribution du gaz. La Suisse devrait se rapprocher des directives européennes relatives à l'ouverture de ce marché, adoptées à la fin de l'année 1997. Les lignes directrices de l'Union européenne contenaient trois points principaux: le «Third Party Access» (TPA), c'est-à-dire l'accession du réseau à des tiers, la séparation des comptes selon les activités au sein de la branche et l'échelonnement de l'ouverture selon la taille des consommateurs. L'ASIG souhaiterait, concernant le TPA, éviter le choix d'une seule catégorie de clients soumis à l'ouverture qui serait trop lourd à supporter pour les collectivités publiques qui possèdent la plupart des entreprises d'approvisionnement en gaz. Le second principe de l'UE ne devrait pas poser de problème particulier pour la Suisse, car les fonctions de transport et de distribution sont déjà fournies par des sociétés séparées. Finalement, l'ASIG souhaiterait des conditions spéciales pour la Suisse, concernant le début et la durée de l'ouverture, en raison de l'étroitesse du marché du gaz suisse par rapport aux pays membres de l'UE et de l'existence de grandes différences régionales en terme de parts de marché des gros clients [36].
Le Conseil fédéral a octroyé une concession au projet d'agrandissement de la ligne de transit de gaz à travers la Suisse, car la capacité de la ligne de transit de gaz de 1974 entre la Hollande et l'Italie doit être doublée. Un tiers de la ligne se trouve sur le canton de Lucerne. Les travaux ne pourront toutefois pas commencer avant que le Conseil fédéral n'ait approuvé les plans définitifs [37].
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Energies alternatives
Le programme DIANE 10 (Diffusion d'applications innovatrices de nouvelles techniques énergétiques), lancé en 1992, est arrivé à terme en mai de l'année sous revue. Les responsables de cette étude issue du programme fédéral «Energie 2000» ont évalué la production d'électricité dans les réseaux d'eaux potables ou usées dans le parc des petites centrales. Ils ont estimé que parmi le millier de stations d'épurations suisses, 130 sites pourraient être équipés d'une minicentrale, ce qui permettrait de fournir de l'électricité pour une ville de 7'000 habitants. Le programme a surtout mis l'accent sur le potentiel d'énergie hydraulique non utilisé. D'une part les petites centrales ont été abandonnées ou négligées, d'autre part il faudrait relancer la construction de nouvelles minicentrales sur des ruisseaux. Cette réserve d'énergie électrique représenterait, dans le meilleur des cas, 2% de la production totale des grandes centrales hydrauliques suisses et satisferait la demande d'une ville de 140'000 habitants, selon les estimations de l'étude [38].
Des représentants des milieux économiques, politiques et de la recherche se sont réunis à Bâle pour une première semaine internationale du nom de «Sun 21». La manifestation, véritable forum pour les questions de gestion de l'énergie et des énergies renouvelables, s'est déroulée à la fin juillet. De nombreux politiciens et experts internationaux y ont participé. Ils ont réclamé la mise en place d'une organisation internationale concernant les énergies renouvelables analogue à l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), en raison du contexte actuel de globalisation et de dérégulation de l'économie. En outre, les plus grands espoirs ont été fondés sur l'énergie solaire qui, selon les experts, devrait prendre de l'ampleur dans les années à venir avec l'aide d'alliances internationales. Différents partenaires politiques et économiques suisses ont d'ailleurs signé un pacte solaire pour s'engager dans cette voie [39].
Une année après le lancement du deuxième programme de subvention d'avril 1997 pour les installations solaires, l'Office fédéral de l'énergie (OFE) a pu tirer un bilan intermédiaire positif. Le parlement avait en 1997 augmenté le budget pour l'encouragement financier aux énergies renouvelables de 4 millions de francs. Pendant cette année, l'OFE a approuvé 2'893 demandes de subventions pour des installations de collecteurs solaires. Les moyens à disposition de l'OFE ont été épuisés déjà en avril de l'année sous revue. Les nouvelles demandes ont été déposées sur une liste d'attente [40].
Sur le territoire de la commune de Mendrisio (TI), le projet VEL est arrivé en août à la moitié de sa période test, c'est-à-dire à trois ans. Le projet a pour but d'évaluer les mesures politiques pouvant être prises afin d'encourager les véhicules électriques. Le rapport intermédiaire publié sur cette expérience a donné des conclusions mitigées. Avec seulement 106 utilisateurs de VEL, il sera probablement difficile d'atteindre pour 2001 l'effectif escompté de quelque 350 véhicules, soit 8 pour mille du parc local. Trois facteurs explicatifs principaux ont été avancés pour justifier l'achat encore modeste des voitures électriques: le prix très élevé des véhicules (de 18'000 à 26'000 francs), la récession économique et l'autonomie trop courte des batteries. De plus, les particuliers ne seraient que rarement disposés à investir davantage pour un véhicule dont l'utilisation est avant tout favorable à la collectivité [41].
La ville de Martigny (VS) a participé, en collaboration avec Postauto et l'Office fédéral de l'énergie (OFE), à un essai pilote consistant en une mise en service de petites voitures électriques nommées «CityCar». Une trentaine de voitures électriques peuvent être utilisées gratuitement et sans réservation dans toute la ville. Elles doivent impérativement être ramenées à l'une des stations mises en place afin de recharger les batteries. Cet essai pilote a commencé en octobre de l'année sous revue avec 300 conducteurs et conductrices sélectionnés dans une première phase. Une seconde phase permettra, à la mi-année 1999, de développer un service de location accessible à toute la population possédant un permis de conduire ainsi qu'aux visiteurs étrangers. A la fin 1999, la flotte sera complétée par trois véhicules électriques navettes avec chauffeur d'une capacité de 5 à 40 passagers. Les navettes attendront la clientèle aux stations City-Car et seront gratuites. La flotte devrait fonctionner durant trois années et son coût a été évalué à six millions de francs [42].
Le canton de Zurich a conclu un accord des plus novateurs en matière d'économie d'énergie. En effet, douze grandes entreprises de l'industrie et des services se sont engagées auprès de l'Etat à diminuer leur consommation d'énergie dans un laps de temps défini. L'accord prévoit que les entreprises parviennent à augmenter de manière collective leur efficience énergétique de 15% pour l'année 2007. Ce système d'objectif collectif à long terme permettra aux entreprises de planifier leurs investissements, de se coordonner et d'échanger des informations sur les nouvelles technologies. Les initiants ont estimé que cet accord confirmait un changement de cap en matière de politique énergétique. Désormais, les avancées énergétiques devraient se faire par un travail de collaboration entre l'Etat et les milieux économiques. Le canton de Zurich a pour sa part assuré qu'il libérerait les firmes de certaines directives de détails de la loi sur l'énergie, si celles-ci parvenaient à atteindre leur but pour 2007 [43].
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Sélection bibliographique
DETEC, Programme Energie 2000, 8e rapport annuel 1998, Berne 1998.
Rieder, S., Regieren und Reagieren in der Energiepolitik: die Strategien Dänemarks, Schleswig-Holsteins und der Schweiz im Vergleich, Bern 1998.
Varone, F., Le choix des instruments des politiques publiques: une analyse comparée des politiques d'efficience énergétique du Canada, du Danemark, des Etats-Unis, de la Suède et de la Suisse, Berne 1998.
Weber, R., «Auf dem Weg zur Neustrukturierung der Elektrizitätsmärkte», in Der Verfassungsstaat vor neuen Herausforderungen: Festschrift für Yvo Hangartner, St.Gallen 1998.
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Schmid, H.-L., «Les énergies fossiles et l'énergie nucléaire en Suisse», in Face aux énergies fossiles, quelle place pour l'énergie nucléaire?, Genève 1998.
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[1] BO CN, 1998, p. 1119 ss. et 1640; BO CE, 1998, p. 686 ss. et 840; FF, 1998, p. 3165 ss. Cf. aussi APS 1997, p. 167 s.1
[2] BO CN, 1998, p. 1119 ss. et 1166 ss.2
[3] FF, 1998, p. 3320; presse du 8.7.98.3
[4] NZZ, 12.9 et 13.10.98.4
[5] Presse des 24.10 et 29.10.98; LT, 30.10.98. Le CN a supporté la démarche du CF en transmettant un postulat Rechsteiner (ps, BS) l'invitant à examiner comment la Suisse pourrait introduire une taxe énergétique et contribuer à l'encouragement des énergies renouvelables tout en respectant les dispositions de l'OMC. Il lui a demandé en outre d'examiner la prise en compte des effets externes de la production et de la consommation d'énergie, de déterminer comment les règles de certification pourraient contribuer en Suisse et ailleurs à promouvoir les énergies renouvelables et à encourager le commerce international (BO CN, 1998, p. 2201).5
[6] FF, 1998, p. 3637 ss. Voir également APS 1996, p. 256.6
[7] BO CE, 1998, p. 468 ss. Voir aussi APS 1997, p. 168.7
[8] BO CN, 1998, p. 1725 ss.8
[9] BO CE, 1998, p. 1380 ss.9
[10] BO CN, 1998, p. 740 s.10
[11] BO CN, 1998, p. 2203.11
[12] NZZ, 10.9.98; BaZ, 3.10.98.12
[13] Presse du 21.2.98.13
[14] Bund, 16.2.98; NZZ et LT, 25.4.98; NZZ, 29.4 et 14.7.98; TA, 12.5 et 18.5.98; Lib., 15.5.98; presse du 17.9.98. Cf. aussi APS 1997, p. 165.14
[15] Lib., 1.7.98; NZZ, 7.8.98.15
[16] NZZ, 3.12 et 5.12.98.16
[17] NZZ et TA, 11.8.98.17
[18] BO CN, 1998, p. 2840 s.18
[19] NZZ, 26.5.99.19
[20] Presse du 24.10.98.20
[21] FF, 1998, p. 1222 ss.; NZZ, 24.4.98. Cf. également APS 1997, p. 171.21
[22] NZZ, 25.9.98.22
[23] BO CN, 1998, p. 739 s.23
[24] Presse des 7.5, 8.5, 15.5, 19.5, 30.5 et 4.6.98; 24 Heures, 9.6.98; LT, 24.6.98; NZZ, 2.9.98.24
[25] BO CN, 1998, p. 2191 s.; BO CE, 1998, p. 713 ss.25
[26] BO CN, 1998, p. 2769 ss.26
[27] WoZ, 3.12.98; NZZ, 4.12.98.27
[28] TA, 21.1.98; SN, 20.6.98; NZZ, 27.8.98; NLZ, 9.9.98. Voir également APS 1997, p. 173 s.28
[29] Presse du 18.9.98; LT, 14.12.98. Cf. aussi APS 1997, p. 173 s.29
[30] AZ, 27.6 et 23.10.98; WoZ, 9.7.98; presse des 23.10 et 24.10.98. Pour les deux initiatives, voir supra. Voir également APS 1997, p. 170 s.30
[31] NQ, 3.2.98.31
[32] Expertise: presse du 20.2.98; NZZ, 21.2.98. Exploitation: NZZ, 19.3.98; presse du 24.10.98; Bund, 6.11.98.32
[33] BO CE, 1998, p. 1088 ss.33
[34] NZZ et BaZ, 30.9.98.34
[35] Lib., 7.10.98; NZZ, 9.10.98.35
[36] NZZ, 26.2.98. Voir également APS 1997, p. 176.36
[37] NLZ, 20.8.98.37
[38] Lib., 30.5.98.38
[39] BaZ, 28.7.98; TA, 3.8.98.39
[40] NZZ, 3.4.98. Voir aussi APS 1997, p. 17640
[41] SZ, 18.7.98; 24 Heures, 25.8.98.41
[42] Bund, 10.10.98.42
[43] TA, 29.12.98.43
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