Au Parlement, la Commission de l'économie et des redevances du Conseil national (CER-CN) s'est emparée du paquet (initiative et contre-projet) en premier lieu. Elle a ainsi proposé à son conseil le rejet de l'initiative et le soutien au contre-projet par 22 voix contre 3. Par rapport à la proposition du Conseil fédéral, la commission a souhaité, par 18 voix contre 6 et une abstention, utiliser le terme «franc suisse» dans l'intitulé «la monnaie suisse est le franc», qui constituerait le nouvel alinéa 1bis de l'article 99 de la Constitution fédérale si le contre-projet est accepté dans les urnes. En outre, deux propositions de minorités ont émergé des discussions en commission. Sept parlementaires ont souhaité compléter le texte du contre-projet avec une garantie d'accès à l'argent liquide pour les personnes percevant des prestations sociales et de l'aide d'urgence (minorité Ryser). En outre, huit membres de la commission ont demandé l'introduction d'un alinéa 1ter précisant que l'argent liquide doit «en règle générale» être accepté en tant que moyen de paiement (minorité Hübscher).
Lors des débats au Conseil national, le représentant de la commission, Sydney Kamerzin (centre, VS), a rappelé que la majorité de la commission partageait l'avis des initiant.e.s selon lequel l'argent liquide doit être maintenu en Suisse. Il a avancé plusieurs raisons à cela, notamment la garantie de pouvoir payer en tout lieu et en tout temps, l'indépendance vis-à-vis des supports digitaux qui occasionnent par ailleurs des frais de transaction parfois élevés, la capacité à ne pas être tracé, et enfin, l'apprentissage du rapport à l'argent pour les plus jeunes et le maintien des habitudes pour les aînés. Cependant, le centriste valaisan a mis en évidence les lacunes du texte de l'initiative: ce dernier définit la Confédération comme l'autorité compétente pour garantir l'approvisionnement en monnaie, alors que c'est la BNS qui dispose en réalité de cette compétence. En outre, le texte de l'initiative demande que «pièces de monnaie et billets de banque» soient toujours disponibles en quantité suffisante. Selon la commission, cette terminologie n'est pas assez précise. Le contre-projet contient la formule «approvisionnement en numéraire», plus adéquate.
Concernant la proposition de la minorité éponyme, Martin Hübscher (udc, ZH) a souligné en plénum que de nombreux endroits n'acceptent plus les paiements en liquide – transports publics, parcomètres ou cantines. Il s'est donc demandé «à quoi ça sert d'ancrer la monnaie dans la Constitution, si elle finit par n'être acceptée nulle part». Répondant pour la commission, Sydney Kamerzin a déclaré que l'acceptation de l'argent liquide comme moyen de paiement constitue un autre aspect de la monnaie liquide, qui ne constitue pas l'un des objectifs de l'initiative et ne doit par conséquent pas être traité dans le contre-projet. La majorité de la commission a également prôné le rejet de la proposition de la minorité Ryser, arguant qu'il faut éviter de mêler politique monétaire et politique sociale, qui demeure une compétence cantonale.
Les fractions du PLR et du Centre ont indiqué suivre toutes les recommandations de la majorité de la commission. L'UDC a seulement soutenu la minorité Hübscher contre l'avis de la commission, alors que les Vert-e-s ont soutenu la minorité Ryser. Ces deux partis ont également soutenu la proposition de la commission sur l'utilisation du terme «franc suisse». Les Vert'libéraux se sont montrés partagés: une partie des membres de la fraction a jugé le contre-projet superflu, car, comme l'initiative, il créerait «une base légale inutile pour un problème inexistant». La fraction socialiste a fait part de la même réflexion à la tribune, rappelant que l'initiative n'aurait aucune conséquence réelle, car ses objectifs sont déjà mis en œuvre dans les lois. Finalement, le PVL s'est prononcé contre l'initiative et les propositions de minorité, sans donner de mot d'ordre sur le contre-projet. Le PS a proposé de refuser l'initiative, mais d'accepter le contre-projet «en grinçant des dents», ainsi que la proposition de la minorité Ryser.
Lors des longs débats qui ont suivi, le vert'libéral Beat Flach (AG), prônant le rejet de l'initiative et du contre-projet, a effectué une analogie avec une proposition fictive pour continuer à oser porter des chapeaux. A une époque, tout le monde en portait. C'était la mode et bien pratique pour se déplacer à pied. Pour différentes raisons, plus grand monde n'en porte aujourd'hui. Cependant, si on le souhaite, on peut toujours décider de porter un chapeau. Selon l'élu argovien, personne ne veut, ni ne peut abolir l'argent liquide aujourd'hui, à l'instar du port des chapeaux. A contre-pied de cet argument, Jean-Luc Addor (udc, VS) a déclaré que rien ne nous protège vraiment du risque de suppression du cash, l'obligation d'accepter les pièces de monnaie et les billets de banque comme moyens de paiement inscrite dans la LUMMP étant de droit dispositif.
Au terme des débats, la conseillère fédérale Karin Keller-Sutter a reconnu le caractère symbolique du contre-projet, les deux demandes de l'initiative figurant déjà dans la loi. Malgré cela, le Conseil fédéral est prêt à leur donner une plus grande signification en les inscrivant dans la Constitution. Karin Keller-Sutter a également précisé que l'utilisation du terme «franc suisse» à la place de «franc» ne revêtait pas une importance fondamentale, et que la proposition de la commission pouvait donc être acceptée. Elle a en revanche demandé le rejet des propositions de minorités.
Lors des votes, les deux propositions de minorités ont été rejetées, ne récoltant pas de soutien au-delà de leurs camps respectifs. Le contre-projet avec l'adjonction «franc suisse» a été accepté à 185 voix contre 6 (pas d'abstention) lors du vote sur l'ensemble. Enfin, le délai pour le traitement de l'initiative a été allongé d'une année, jusqu'à août 2026.