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Politique sociale
Groupes sociaux
Les Chambres fédérales ont approuvé une modification de la loi sur le séjour et l'établissement des étrangers' qui sanctionne plus sévèrement le travail clandestin. – Même si au cours de la votation populaire du 5 avril 1987, une majorité des électeurs s'est prononcée en faveur d'un durcissement de la politique d'asile, la question des réfugiés continue de diviser tant le monde politique que la population. – Différents rapports consacrés à l'égalité des sexes, qui confirment que la femme demeure l'objet de discriminations, ont été publiés.
Politique à l'égard des étrangers
La population étrangère en Suisse a atteint son niveau le plus élevé depuis les années 1974/75. Avec un total de 978 737 personnes, elle a connu une progression de 2,4% par rapport à 1986. La proportion d'étrangers se monte ainsi à 15% de l'ensemble de la population résidant en Suisse. Si la situation économique continue d'évoluer favorablement et que le gouvernement ne modifie pas la pratique en matière de contingents, le seuil psychologique d'un million d'étrangers pourra être atteint au cours des prochaines années [1].
Le Conseil fédéral a procédé à la révision de l'Ordonnance limitant le nombre des étrangers. Les effectifs maximaux de main-d'oeuvre étrangère sont fixés au même niveau que ceux de l'année écoulée. Le gouvernement a justifié sa décision par la nécessité de consolider la politique de stabilisation qui exige une politique restrictive même en période de forte demande de main-d'oeuvre étrangère. Il a estimé que le statu quo demeurait encore la meilleure solution pour assurer un rapport équilibré entre l'effectif de la population suisse et celui de la population étrangère. Les deux grandes centrales syndicales suisses, l'USS et la CSC, ont dénoncé à la fois le laxisme des autorités et le fait que nombre d'employeurs se sont engagés à nouveau dans la voie du moindre effort qui consiste, selon eux, à recruter des étrangers au lieu d'intensifier le perfectionnement professionnel. L'USS préconise une politique envers les étrangers qui limite le nombre des entrées, mais garantisse aux travailleurs occupés en Suisse et à leurs familles, les mêmes droits sociaux qu'aux indigènes et un statut juridique sûr. Pour leur part, les associations économiques et la majorité des cantons, qui avaient plaidé en faveur d'une augmentation des effectifs en invoquant le manque de personnel qualifié, ont fait connaître leur désappointement en prenant connaissance des décisions du gouvernement [2].
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Parallèlement à l'activité de ses groupes de travail sur l'intégration sociale des étrangers et à sa collaboration avec les associations et les services d'aide aux étrangers, la Commission fédérale pour les problèmes des étrangers (CFE) a participé à deux actions au plan national en 1987. Une campagne spécifique d'information sur le SIDA a été lancée avec l'Office fédéral de la santé publique, pour la première fois, en direction des étrangers. Par ailleurs, la CFE a obtenu de la fondation Pro Helvetia le financement de cinq projets d'éducation des adultes pour les étrangers.
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Avec l'adoption de la révision sur le droit d'asile, les thèmes liés à la surpopulation étrangère semblent avoir quelque peu perdu de leur acuité et de leur effet mobilisateur. Ainsi, l'initiative "Contre la surpopulation étrangère", lancée en 1986 par la section de Winterthour de l'Action nationale, mais sans le soutien de son comité directeur, n'a pas atteint le nombre de signatures requises. Son texte exigeait de limiter à 500 000 le nombre d'étrangers en Suisse en échelonnant la diminution à raison de 12 000 personnes par an et de fixer à quinze ans au lieu de dix ans en général, le délai pour obtenir le permis d'établissement [3].
Quant à l'initiative "Pour la limitation de l'immigration", lancée en 1983 par l'Action nationale, le Conseil fédéral en a proposé le rejet sans contre-projet. Déposée en 1985, ladite initiative vise à ramener puis à maintenir la population globale de notre pays au seuil des 6,2 millions d'habitants. Pour y parvenir, le nombre des autorisations de séjour accordées chaque année ne devrait pas excéder les deux tiers des étrangers ayant quitté la Suisse au cours de l'année précédente. Au terme d'une durée de 15 ans ou moins si la population atteignait plus rapidement la limite fixée, entrerait en vigueur une disposition générale postulant l'équilibre entre arrivées et départs. Les initiants entendent également abaisser l'effectif-plafond actuel des saisonniers et contingenter les frontaliers et l'admission définitive des réfugiés.
Le Conseil fédéral a justifié son rejet en indiquant que, face à la pénurie de main-d'oeuvre qualifiée, toute diminution préconisée du nombre des étrangers exerçant une activité lucrative aurait des répercussions néfastes sur l'économie suisse et plus particulièrement dans les secteurs du textile et de l'habillement, de la santé, du bâtiment, de l'hôtellerie et du nettoyage. En outre, la demande de produits et services diminuerait entraînant, par conséquent un recul des affaires qui menacerait l'emploi des Suisses. Qui plus est, a poursuivi le gouvernement, l'acceptation d'une telle initiative irait immanquablement à l'encontre des efforts européens visant à favoriser la libre circulation des personnes et affecterait nos relations avec l'étranger. Le patronat a également fustigé cette initiative qui, à ses yeux, ignore les réalités économiques de notre pays. Les syndicats l'ont également stigmatisée car elle réduirait selon eux à néant tous les progrès qui ont pu être réalisés pour améliorer la situation juridique et humaine des travailleurs immigrés en Suisse [4].
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Les Chambres fédérales ont approuvé la révision de la loi sur le séjour et l'établissement des étrangers (LSEE). Les modifications de la loi précitée, qui renforcent la lutte contre le travail clandestin, peuvent être classées en deux catégories distinctes. Premièrement, celles qui visent à réprimer de manière plus sévère l'activité des passeurs qui consiste soit à faciliter l'entrée ou le séjour illégal d'une personne, travailleur étranger ou requérant d'asile, soit à lui apporter de l'aide aux préparatifs qu'elle aurait engagés à cet effet. Ces nouvelles dispositions visent à ériger en infraction autonome l'activité des passeurs qui devient ainsi un délit qualifié s'il y a dessein d'enrichissement illégitime ou appartenance à une organisation de passeurs. Les coupables seront dorénavant passibles d'une peine d'emprisonnement et d'une amende pouvant atteindre un maximum de 100 000 francs.
L'inclusion des passeurs de réfugiés dans la répression des activités des filières a donné lieu à un vif débat. La gauche craignait en effet d'exposer à des sanctions graves, à la fois les réfugiés qui entrent clandestinement et leurs protecteurs. E. Kopp, au nom du gouvernement, a précisé que si l'on voulait combattre efficacement les filières, il était impossible dans la pratique de faire une différence entre demandeurs d'emploi et demandeurs d'asile. Mais la conseillère fédérale s'est voulue rassurante et a certifié qu'il ne s'agissait ni de durcir notre politique d'asile ni de punir les personnes ou les paroisses qui abritent des demandeurs d'asile dont la demande a été refusée. Ainsi, celui qui prête assistance à une personne qui se réfugie en Suisse n'est pas punissable si ses mobiles sont honorables.
Le deuxième volet de la modification renforce les dispositions pénales qui peuvent s'appliquer aux employeurs qui engagent de la main-d'oeuvre sans autorisation. Le montant de l'amende pourra atteindre 5000 francs pour chaque étranger employé illégalement. Ce maximum est ramené à 3000 francs si la faute n'est pas intentionnelle. En cas de récidive, dans un délai de cinq ans, en plus de l'amende, le juge pourra punir de l'emprisonnement jusqu'à six mois. A ce propos, le Conseil des Etats a légèrement assoupli le projet du Conseil fédéral en ce sens qu'il a supprimé les minima relatifs aux amendes et prescrit que, dans les cas de très peu de gravité, le juge pourra renoncer à prononcer toute peine.
Même si les associations patronales ont reconnu l'opportunité de ces dispositions, elles n'ont cependant pas manqué de souligner que le travail au noir est un phénomène dont l'ampleur dépasse le problème proprement dit de l'occupation illégale de la main-d'oeuvre étrangère et que, dès lors, le durcissement de la loi ne saurait être considéré comme un remède. Pour leur part, les syndicats se sont félicités des modifications apportées à la LSEE. Pour l'USS, l'emploi de travailleurs clandestins est contraire à notre politique à l'égard des étrangers, entraîne une absence de protection sociale pour les travailleurs, introduit une concurrence faussée entre les entreprises et met en cause la paix sociale puisqu'il permet de contourner les conventions collectives. Et l'USS de conclure en indiquant que si certaines branches et certaines régions connaissent des difficultés de main-d'oeuvre, ce n'est pas au mépris de la loi que celles-ci pourront être résolues [5].
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Réfugiés
Même si elle est jugée trop rigoureuse par certains, la politique d'asile menée par E. Kopp a bénéficié néanmoins d'un large soutien populaire lors du scrutin du 5 avril 1987. Dans un climat passionnel et après une campagne qui fut pour le moins animée, la révision du droit d'asile, à savoir la révision de la loi sur l'asile et son corollaire, la révision de la loi sur le séjour et l'établissement des étrangers (LSEE), ont été acceptées de façon assez nette par respectivement 67,3% (1 180 082) et 65,7% (1 122 027) de oui. Tous les cantons se sont prononcés en faveur des deux objets. Quant à la participation au scrutin, elle s'est élevée à respectivement 42,4% et 42,2% [6].
La loi fédérale sur l'asile de 1979 définit en particulier la notion de réfugié et prévoit à l'intention du candidat à l'asile une procédure réglée dans les moindres détails, assortie de voies de recours y compris jusqu'au Conseil fédéral. Approuvée par les Chambres en 1981, elle subit une première révision en 1983 qui tendait à accélérer la procédure. La suppression de la voie de recours auprès du Conseil fédéral et la prérogative donnée au DFJP de renoncer à entendre le requérant en personne lorsque sa demande d'asile est manifestement infondée avaient constitué les principales innovations. Aux craintes de l'arbitraire lancées par la gauche, le gouvernement avait répondu en fixant dans une ordonnance la liste exhaustive des cas où l'on pouvait considérer une demande d'asile comme manifestement infondée. Ce régime entra en vigueur en juin 1984.
Mais ces nouveaux instruments législatifs en matière d'asile se révélèrent rapidement lacunaires et imprécis, voire impropres à maîtriser l'ampleur et la complexité du phénomène d'afflux des réfugiés. En effet, en raison de la détérioration de la situation économique mondiale et de la multiplication de l'atteinte aux droits de l'homme, la Suisse, à l'instar des autres pays occidentaux, doit faire face à un fort accroissement de demandes d'asile allant de pair avec une modification de l'origine des demandeurs. La complexité de la procédure et la pénurie de fonctionnaires résultant du blocage du personnel fédéral décrété par les Chambres en 1972, avaient entraîné un amoncellement de dossiers en instance. Très vite, la première révision se révéla insuffisante. Pour faire face à cette montagne de dossiers en suspens, E. Kopp proposa la solution dite globale qui aurait permis, si elle avait été acceptée, d'admettre en bloc tous les requérants qui avaient déposé leur demande avant le 1er janvier 1984 ou 1983. Mais, face à l'hostilité manifestée par les cantons alémaniques, elle dut y renoncer. L'idée d'une solution globale fut définitivement écartée par le Conseil national en 1986.
En raison de la hausse ininterrompue des requêtes d'asile et de la pression des cantons et de la classe politique, le Conseil fédéral proposa en 1985 une deuxième révision du droit d'asile, révision qui touchait la loi sur l'asile et la LSEE. Le nouveau texte, approuvé par les Chambres en 1986, devait permettre de simplifier et d'accélérer la procédure, de dissuader un certain nombre de candidats potentiels à l'asile et d'élargir la marge de manoeuvre des autorités fédérales. Mais il répondait aussi à l'inquiétude, entretenue et amplifiée par l'extrême droite, suscitée au sein de la population par l'arrivée de nombreux réfugiés du tiers-monde. Et d'aucuns de prétendre que le parlement et le Conseil fédéral auraient cédé aux pressions de l'Action nationale et des Vigilants et auraient été impressionnés par leurs succès électoraux.
Ces modifications furent rapidement l'objet de critiques virulentes et un comité d'action, regroupant des partis politiques de gauche, des organisations syndicales, religieuses et tiers-mondistes, déposa une demande de référendum contre les deux révisions. Parmi les dispositions contestées figuraient les pouvoirs étendus conférés au Conseil fédéral en cas d'affluence extraordinaire de requérants d'asile, la désignation de postes frontière auxquels les requérants d'asile devront obligatoirement se présenter pour entrer en Suisse, la cantonalisation de la procédure qui permet à l'autorité fédérale de renoncer à entendre le requérant lorsqu'il ressort du dossier établi par le canton que la demande ne remplit pas les conditions de l'octroi du statut de réfugié politique et la détention jusqu'à trente jours à l'égard d'un étranger à la veille d'un refoulement et dont on a lieu de craindre qu'il va s'y soustraire. Certains points de la révision comme la répartition équilibrée des demandeurs entre les cantons, l'assignation d'un lieu de séjour au requérant, l'interdiction de travailler limitée à trois mois et l'aide au retour dans le pays d'origine, n'avaient pas été contestés. Dans leur réquisitoire, les opposants ont reproché au gouvernement de faire preuve d'une rigueur excessive et ont fustigé ce projet qui, à leurs yeux, rend notre politique d'asile inhumaine et contraire à notre tradition d'accueil. Autre grief invoqué, le fait que les modifications de la loi sur l'asile et de la LSEE ne sont guère susceptibles de résoudre de manière satisfaisante les problèmes actuels qui ne relèvent pas de la simple technique législative, mais découlent des situations politique et économique internationales.
Approuvées à l'unanimité par les démocrates du centre, à une forte majorité par les radicaux et les libéraux et timidement par les démocrates-chrétiens, les modifications de lois ont également bénéficié du soutien du Vorort de l'Union suisse du commerce et de l'industrie, de l'Union centrale des associations patronales, de l'Union suisse des arts et métiers et de l'Union suisse des paysans ainsi que des mouvements nationalistes. Aux adversaires de la révision, les partisans ont répliqué en soulignant avec insistance que celle-ci ne remettait aucunement en cause la conception suisse de l'asile, mais visait à simplifier la procédure dans le domaine de l'octroi de l'asile, permettant ainsi aux autorités compétentes d'apporter tout le temps nécessaire à l'examen des requêtes justifiées. Autres arguments avancés par les partisans de la révision, la possibilité de lutter contre les abus pratiqués à l'égard de notre politique d'asile et contre les passeurs professionnels, ainsi que la capacité de traiter les demandes plus rapidement de façon à ne pas donner de faux espoirs aux candidats qui ne remplissent pas les conditions pour obtenir le statut de réfugié. Sans donner à proprement parler un mot d'ordre négatif, les principales communautés religieuses de Suisse, l'Eglise catholique romaine, l'Eglise catholique chrétienne et l'Eglise protestante se sont prononcées contre la révision du droit d'asile [7].
Le 5 avril 1987, le peuple et les cantons ont accepté par 67,3% de oui la révision du droit d'asile et par 65,7% celle inhérente à la loi sur le séjour et l'établissement des étrangers (LSEE). L'analyse VOX réalisée à l'issue du scrutin a démontré que la révision du droit d'asile avait clairement partagé l'opinion publique en deux camps opposés. Le premier a perçu la nouvelle révision comme un simple aménagement technique permettant la continuité d'une politique cohérente visant à mieux résoudre les problèmes des réfugiés. Ce faisant, il a fait sienne l'argumentation officielle. Dans le. camp opposé, on a interprété cette modification de lois comme un durcissement de la politique d'asile et un frein à la politique humanitaire. Cette analyse a également fait apparaître une nette polarisation entre les générations. Si 76% des personnes âgées de plus de 60 ans ont accepté la révision, ce pourcentage est tombé à 46% pour la classe d'âge de 20 à 29 ans. Le dégré d'acceptation était non seulement lié à l'âge mais aussi fortement au niveau d'éducation. En effet, il est apparu que plus la formation professionnelle était poussée, plus le rejet était massif. Si les Suisses romands se sont montrés moins favorables à la révision du droit d'asile, on ne peut pas pour autant en conclure qu'il existe un fossé entre les deux régions linguistiques, a relevé l'analyse Vox. Et celle-ci de conclure en soulignant que le résultat de la votation s'interprète comme une approbation claire de la politique des autorités fédérales et une volonté de leur donner les moyens de la poursuivre [8].
Révision de la loi sur l'asile. Votation du 5 avril 1987
Participation: 42,4%
Oui: 1 180 082 (67,3%)
Non: 572 330 (32,7%)

Mots d'ordre:
Oui: PRD, PDC*, UDC, PLS, AN; Vorort, UCAP, USAM USP.
Non: PSS, PES, AdI , PEP, POCH, PST; USS, CSCS.
* Recommandations différentes des partis cantonaux
Révision de la loi sur le séjour et l'établissement des étrangers. Votation du 5 avril 1987
Participation: 42,2%
Oui: 1 122 027 (65,7%)
Non: 585 460 (34,3%)

Mots d'ordre:
Oui: PRD, PDC*, UDC, PLS, PEP, AN; Vorort, UCAP, USAM, USP.
Non: PSS, PES, AdI*, POCH, PST; USS, CSCS.
* Recommandations différentes des partis cantonaux
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Conséquence de la révision du droit d'asile, le Conseil fédéral a édicté l'Ordonnance sur l'asile et l'Ordonnance sur l'admission provisoire et sur l'internement des étrangers qui rassemblent les dispositions d'exécution des lois sur l'asile d'une part, sur le séjour et l'établissement des étrangers d'autre part.
L'Ordonnance sur l'asile règle dans le détail la procédure d'entrée à la frontière ainsi que la mise en place des centres d'enregistrement depuis lesquels les demandeurs d'asile seront répartis dans les cantons sur la base d'une clé de répartition. La nouvelle procédure stipule que tout candidat à l'asile doit déposer sa demande dans l'un des ving-cinq postes frontière d'entrée obligatoire. Les requérants qui s'adressent à un poste frontière qui n'est pas habilité à recevoir leurs demandes se verront refuser l'autorisation d'entrer en Suisse et seront renvoyés à l'un des postes habilités à les recevoir. A ce stade, les autorités fédérales peuvent déjà décider si une demande d'asile peut faire l'objet d'une procédure ou non. L'Ordonnance sur l'asile précise également que l'autorisation d'entrée en Suisse ne sera octroyée qu'aux réfugiés arrivant directement du pays où ils sont menacés, sans avoir séjourné dans un pays tiers.
Le candidat à l'asile autorisé à entrer en Suisse sera ensuite dirigé vers l'un des quatre centres d'hébergement, à savoir Genève, Bâle, Chiasso ou Kreuzlingen (TG), où seront effectuées les formalités d'enregistrement. Une fois celles-ci terminées, le requérant sera attribué à un canton en fonction des intérêts légitimes des uns et des autres. La procédure se poursuit ensuite au niveau cantonal. Le requérant, accompagné d'un représentant d'une oeuvre d'entraide reconnue, sera interrogé de façon détaillée par l'instance cantonale. Enfin, le délégué aux réfugiés décidera de lui attribuer ou non l'asile politique. Le requérant peut, comme par le passé, recourir auprès du DFJP contre une décision négative.
Des programmes d'occupation sont également prévus pour les demandeurs séjournant en Suisse depuis trois mois au moins. En outre, une aide au retour sera offerte à ceux qui veulent rentrer. Un bureau d'aide au départ sera financé par les services du délégué aux réfugiés. Il conseillera le demandeur sur les questions liées au départ et préparera celui-ci jusqu'à l'échéance du délai fixé. L'Ordonnance sur l'admission provisoire et l'internement des étrangers précise la notion juridique d'admission provisoire qui ne remplace pas le renvoi mais ne fait que suppléer à son inexécution. L'admission provisoire exclut en principe le regroupement familial. L'ordonnance fixe aussi les motifs pouvant entraîner une mesure d'internement.
Les partis et organisations religieuses et tiers-mondistes qui s'étaient déjà élevés contre la révision du droit d'asile, ont réitéré leurs critiques à l'égard des nouvelles ordonnances. Ils redoutent que la politique d'asile ne se fasse désormais plus qu'aux frontières et craignent que les centres d'enregistrement ne deviennent des lieux fermés. Aux critiques des cantons et des oeuvres d'entraide quant à l'efficacité et l'opportunité des postes frontière, l'ordonnance soumise à la procédure de consultation ne prévoyant aucune sanction contre les requérants ayant franchi illégalement la frontière, le Conseil fédéral a répondu en introduisant une nouvelle disposition permettant aux polices cantonales de refouler directement les candidats à l'asile arrêtés dans le voisinage de la frontière après l'avoir franchie illégalement. Pour les milieux favorables aux réfugiés, cette disposition n'est pas conforme à la loi révisée sur l'asile d'après laquelle tout réfugié entré en Suisse a droit à l'examen de sa demande. Mais le porte-parole du délégué aux réfugiés de souligner que des accords avec tous les Etats voisins, hormis l'Italie, ont été conclus au sujet du refoulement après une entrée illégale [9].
Afin d'éviter que les. requérants n'utilisent une escale aérienne en Suisse pour déposer une demande d'asile, le Conseil fédéral a décidé d'introduire Cès le lei février 1988 l'obligation d'un visa de transit pour les ressortissants de dix pays du tiers-monde, dont le Sri Lanka, le Zaïre et le Chili [10].
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Rejeté en 1985 parla majorité des cantons et écarté en 1986 par le Conseil national, le principe de la solution globale a à nouveau été évoqué. D'abord par le PLS qui a adopté une résolution demandant aux cantons de reprendre avec les autorités fédérales l'examen des moyens pouvant conduire à une solution d'ensemble en faveur des demandeurs d'asile résidant en Suisse depuis de nombreuses années. Puis, par le Conseil d'Etat genevois qui, lui aussi, a plaidé en sa faveur. A l'exception des radicaux et des vigilants, pour qui ce principe conduirait à des injustices et des mensonges, tous les groupes représentés au Grand Conseil ont appuyé la démarche du gouvernement genevois. Enfin, le canton de Fribourg a déposé une initiative allant dans le même sens. Mais, malgré ces requêtes, E. Kopp a rappelé que le Conseil fédéral n'envisageait pas d'appliquer la solution globale. Pour les anciens réfugiés, a-t-elle précisé, les cantons disposeront toujours de permis de séjour humanitaire ou pourront prononcer des mesures d'internement administratif [11].
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Un nombre record de demandes d'asile ont été déposées en Suisse en 1987. En effet, ce ne sont pas moins de 10 913 étrangers qui ont requis l'asile, soit 28% de plus qu'en 1986. Dans le même temps, le nombre des cas traités par les collaborateurs du délégué aux réfugiés a augmenté dans la même proportion. L'asile a été accordé à 829 personnes alors que les demandes de 8292 personnes ont été rejetées en première instance. Le groupe le plus important parmi les requérants ayant reçu le statut de réfugié politique était constitué par les Asiatiques (551 personnes), suivis des Européens de l'Est (191), des Africains (54) et des Américains du Sud (33) [12].
La politique à l'égard des étrangers menée par le Conseil fédéral vise en premier lieu à limiter l'admission de nouveaux arrivants de façon à stabiliser la population étrangère résidante. Cet aspect semble également marquer la politique d'asile. En effet, le nombre des réfugiés installés en Suisse est demeuré stable depuis près de dix ans et s'établit aux environs de 30 000 personnes. La Confédération accueille un nombre presque constant de demandeurs d'asile depuis les années septante et cela malgré le décuplement des demandes. Le taux d'acceptation a chuté de 72% en 1982 à 9% en 1987. Cependant, compte tenu des permis humanitaires délivrés aux cantons, ce taux se situe en réalité aux environs de 20% [13].
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La décision d'expulser une trentaine de requérants tamouls dont la demande a été rejetée a donné lieu à une véritable épreuve de force entre la Confédération et le gouvernement bernois, canton où ceux-ci ont déposé leur demande d'asile. En effet, les autorités bernoises ont tergiversé à exécuter une mesure d'expulsion décrétée par les autorités fédérales, en arguant de la tension régnant sur l'île de Sri Lanka. La demande d'internement déposée par le gouvernement bernois en faveur de ces requérants tamouls a été rejetée par le délégué aux réfugiés qui s'est également refusé à réexaminer les cas. Malgré le refus d'obtempérer affiché par le Conseil exécutif bernois et les appels à la clémence émanant du Haut commissariat des Nations Unies pour les réfugiés, des Eglises et des organisations d'entraide, mais aussi de partis politiques, comme le Parti socialiste, les Organisations progressistes, l'Alternative démocratique et la Liste Libre, le Conseil fédéral n'a pas remis en question les choix du DFJP. Dans sa prise de position, il a justifié son attitude en indiquant que l'élément déterminant en matière d'asile ne résidait pas dans le fait que des violations des droits de l'homme soient révélées dans le pays d'origine, mais dans le fait que le requérant d'asile, en tant qu'individu, soit davantage menacé que le reste de la population. Et de poursuivre en soulignant que les Tamouls menacés de rapatriement disposaient sur le plan social de parents ou de connaissances dans une région calme de l'île.
Alors que la situation semblait s'envenimer et que l'on s'acheminait vers une crise politique, un compromis bien helvétique a pu finalement être trouvé sous la forme d'un groupe de travail. Composé du délégué aux réfugiés, d'un représentant de l'exécutif bernois et des Eglises, ainsi que de membres d'organisations d'entraide, il aura pour tâche de préparer le voyage de retour des Tamouls et d'examiner cas par cas si de nouveaux éléments justifient de surseoir à la mesure d'expulsion. Mais il n'aura en aucun cas la compétence de revoir les dossiers des réfugiés dont la demande a été rejetée. Cette affaire a illustré de façon très nette les problèmes posés par l'exécution de lois et de décisions fédérales dans un domaine où la Confédération fait exécuter ses décisions politiques par les gouvernements cantonaux [14].
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Le Parti républicain suisse a lancé une initiative populaire "Pour la limitation de l'accueil des demandeurs d'asile". Elle propose une modification de la Constitution fédérale selon laquelle la Suisse ne pourrait plus accorder l'asile que temporairement à des Européens dont la vie ou l'intégrité physique seraient menacées dans leur pays en raison de leurs opinions politiques, de leur race ou de leur religion..En principe, l'asile ne pourrait plus être donné à des réfugiés extra-européens. Le président du Parti républicain considère qu'en limitant l'origine des réfugiés à l'Europe, la Suisse renouerait avec sa tradition d'asile. L'Action nationale n'a pas donné officiellement son soutien à l'initiative, de crainte que celle-ci ne fasse concurrence avec sa propre initiative "Pour la limitation de l'immigration" qui, elle aussi, vise à limiter l'accueil des réfugiés. D'autres motifs, comme l'absence de quotas maximaux pour l'accueil de réfugiés et de toute référence à la présence en Suisse d'une population étrangère des pays voisins, ont également motivé le refus de l'AN [15].
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Condition de la femme
Les Chambres fédérales ont pris connaissance du rapport du Conseil fédéral consacré à l'égalité des droits entre hommes et femmes et du programme législatif qui lui est assorti. Ce rapport gouvernemental, publié en février 1986 et faisant suite à une motion, dresse une liste de toutes les inégalités qui existent encore dans le droit fédéral et dans les différentes législations cantonales dans des domaines aussi divers que ceux des services publics, du droit du travail, du droit de vote, du service militaire et des assurances sociales. Si la majorité des députés a constaté qu'il existe toujours des inégalités liées au sexe, elle n'a cependant montré aucun empressement à accélérer le mouvement en faveur d'une réalisation de l'égalité juridique qui, a-t-elle relevé, est une question d'évolution des mentalités. Si les femmes présentes sous la coupole ont salué ce rapport, elles n'ont cependant pas manqué de souligner que des discriminations scandaleuses subsistent encore, notamment dans les domaines des salaires et des assurances sociales [16].
S'ils sont d'accord sur le principe de l'égalité, les partis politiques le sont moins sur les mesures à prendre et surtout sur l'urgence des réformes qui restent à faire. Une étude réalisée sur la base de l'examen des débats de la dernière législature s'est attachée à montrer la position des groupes parlementaires face au principe de l'égalité entre hommes et femmes. Si tous les partis, à l'exception de l'Action nationale, déclarent soutenir le principe de l'égalité des sexes, il n'en va pas toujours ainsi lorsque des sujets précis sont débattus aux Chambres fédérales et qu'il s'agit de prendre des mesures concrètes. Le bilan de la législature 1983-1987, portant sur le travail effectué par les parlementaires en vue de la concrétisation de l'égalité entre hommes et femmes, a permis de dégager deux groupes distincts selon l'intensité de leur engagement en faveur des femmes: le premier, composé de l'extrême gauche (POCH, PST et PSA), du Parti socialiste, de l'Alliance des indépendants, des écologistes et du Parti évangélique, a oeuvré de façon concrète en faveur d'une réalisation de l'égalité; le second, regroupant le Parti radical, le Parti démocrate-chrétien, le Parti libéral et l'Uhion démocratique du centre, s'est montré plus réservé et discret lorsqu'il s'agissait de mettre sur pied l'égalité effective des deux sexes. Quant à l'Action nationale, elle s'est distinguée par son hostilité aux revendications féminines [17].
Ce même clivage est apparu au Conseil national lors du débat sur l'initiative parlementaire Fetz (poch, BS) qui chargeait les Chambres fédérales d'élaborer une loi contre la discrimination de la femme. Si les députés ont décidé de ne pas lui donner de suite, ils ont par contre adopté deux textes qui, eux aussi, vont dans le sens d'une plus grande égalité entre les sexes. Le premier, un postulat émanant de la commission du Conseil national, prie le Conseil fédéral de prévoir des mesures pratiques de nature à instaurer l'égalité des droits et ceci en priorité dans le domaine du travail, de la famille, de la sécurité sociale et de la fiscalité, parallèlement aux travaux en cours en relation avec le programme législatif"Egalité des droits entre hommes et femmes". Le second, une motion déposée par J. Stamm (pdc, LU) et adoptée sous la forme d'un postulat, invite le Conseil fédéral à créer un service fédéral qui aurait la compétence pour faire appliquer au niveau de la Confédération l'article constitutionnel établissant l'égalité des droits entre l'homme et la femme [18].
Même si ce principe est ancré depuis 1981 dans notre Constitution, les réalisations concrètes en vue d'y parvenir demeurent encore bien timides. Certes, la révision du droit matrimonial a permis de faire un pas en direction d'une plus grande égalité des rôles au sein de la famille, mais dans des domaines comme celui du droit des assurances sociales ou du droit fiscal, les femmes font toujours l'objet de discriminations. C'est cependant sur le marché du travail que les inégalités sont les plus criardes. Elles découlent moins d'une situation juridique que de conditions de faits. Comme le Conseil fédéral semble douter de l'opportunité de proposer une loi d'exécution de l'article de la Constitution établissant l'égalité entre l'homme et la femme en matière de rémunération, il importe donc que les entreprises et les administrations y aillent de leur propre chef pour établir des programmes d'action en vue de parvenir à concrétiser l'égalité des salaires et l'accès à toutes les fonctions au sein de leur établissement.
C'est précisément pour apporter sa contribution à l'égalité des femmes dans la vie professionnelle en leur ouvrant la possibilité d'accéder aux mêmes carrières et aux mêmes postes à responsabilité que les hommes que s'est constitué en 1986 le Comité d'action "Taten statt Worte". Ce comité s'était adressé à des entreprises, à l'administration fédérale et aux administrations cantonales afin qu'elles participent à la concrétisation de l'égalité des sexes en intégrant dans leurs objectifs la promotion de l'égalité, en désignant des personnes responsables de cet objectif. Près de quarante entreprises ont répondu favorablement à cet appel en présentant des programmes d'action qui ont pour ligne de force commune d'oeuvrer en faveur d'un véritable changement de mentalité, non seulement au niveau de la direction des entreprises et auprès des cadres, mais aussi au niveau des femmes elles-mêmes. Parmi ces différents programmes, l'un concerne par exemple l'information et la sensibilisation des femmes et des collaborateurs en général aux possibilités de promotion à tous les niveaux hiérarchiques. Un autre porte sur le recrutement et donne, à qualification égale, la préférence à une collaboratrice dans le but d'établir un équilibre entre les deux sexes. Il peut viser enfin à l'amélioration générale des conditions de travail pour les femmes, non seulement par l'aménagement du temps de travail en fonction de la famille, mais aussi par la réalisation réelle de l'égalité des salaires ou encore l'engagement de collaboratrices pour des professions typiquement masculines. Devant le succès rencontré en Suisse alémanique, il s'est créé un groupe analogue en Suisse romande qui, tout en tenant compte de la spécificité de la Suisse latine, travaillera en collaboration avec son homologue alémanique [19].
La Commission fédérale pour les questions féminines a présenté un rapport intitulé "Femmes et hommes: Faits, perspectives et utopies". Celui-ci entend, par toute une série de mesures, améliorer la situation des femmes et activer leur intégration dans tous les secteurs de la société. Au niveau de l'éducation et de la formation, le rapport suggère un assouplissement du système en étalant le temps imparti à la formation dans la vie par la multiplication des possibilités de recyclage et de perfectionnement pour tout le monde. Au niveau de l'activité professionnelle, il insiste sur l'urgence d'une plus large ouverture du marché du travail aux femmes par l'aménagement d'horaires de travail plus flexibles et par l'application du principe de l'égalité des salaires. Il s'agit ensuite de consentir à de réels efforts pour humaniser le monde du travail. Enfin, il faudra revaloriser l'activité familiale et bénévole en posant pour principe que toute activité humaine doit être reconnue comme travail et bénéficier par conséquent de la protection et du prestige dévolu jusqu'ici au travail rémunéré. Cet assouplissement de l'organisation du travail devrait, selon les auteurs du rapport, déboucher sur une revalorisation de l'activité familiale, tant pour les hommes que pour les femmes. Ils ont insisté sur la nécessité de donner aux parents la possibilité de combiner activité professionnelle et vie familiale [20].
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La question de l'interruption de grossesse demeure toujours dans l'impasse. En effet, le Conseil national a rejoint la position adoptée par le Conseil des Etats en 1981, en refusant par 85 voix contre •74, la décriminalisation de l'avortement pendant les douze premières semaines de la grossesse. Pourtant, cette même chambre avait approuvé en 1981 l'initiative parlementaire de sa commission qui proposait de compléter le code pénal afin de permettre aux cantons d'instituer, à certaines conditions restrictives, la solution des délais. Appelé une nouvelle fois à se prononcer en 1982, le Conseil national avait décidé de suspendre ses travaux et d'attendre le résultat de la votation populaire "Droit à la vie". Malgré le rejet de cette initiative en 1985, la commission du Conseil national chargée du dossier avait proposé le rejet de toute solution fédéraliste. Farouches opposants à l'initiative, les démocrates-chrétiens, appuyés par les démocrates du centre et les radicaux alémaniques, ont expliqué leur refus par des considérations juridiques et politiques. Ils ont en particulier stigmatisé l'inconstitutionnalité du projet qui, à leurs yeux, porterait atteinte à l'unité du code pénal. Ils se sont refusés à recantonaliser le code pénal dans un domaine où la vie humaine est concernée. De leur côté, les partisans de la solution fédéraliste, libéraux, radicaux romands, indépendants, écologistes et socialistes, ont tenu à légaliser ce qui existe dans les faits, plusieurs cantons ayant déjà institué la solution des délais. Quant au Conseil fédéral, il a tenu à répéter qu'il était opposé à une cantonalisation de l'avortement, le droit à la vie étant un droit fondamental et irrévocable.
Le Conseil national a également rejeté un postulat de la minorité de la commission qui chargeait le Conseil fédéral de soumettre au parlement un nouveau message sur la question de l'interruption de grossesse qui, en tenant compte des votations populaires, propose une solution des indications [21] .
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Politique familiale
La Suisse, à l'instar des autres pays européens, est touchée par une chute du taux de natalité qui, si elle se poursuit, risque de mettre en danger à la fois son économie et ses institutions sociales. Même si à elles seules elles ne sauraient constituer un soutien efficace à une politique nataliste, il n'en demeure pas moins vrai que les allocations familiales peuvent libérer de nombreuses familles des contraintes économiques. En réponse à un postulat du conseiller national Darbellay (pdc, VS), des chercheurs se sont justement attachés à mettre en évidence la relation entre les revenus d'une personne seule, d'un couple ou d'une famille avec ou sans enfants afin de disposer d'un même niveau de vie. De leurs conclusions, il ressort qu'un couple élevant un seul enfant devrait disposer d'un revenu supplémentaire de 24% pour atteindre un niveau de vie équivalent à celui d'un couple sans enfants. Le deuxième enfant devrait encore coûter 19% de plus et le troisième 17%. Les allocations familiales et les autres prestations ne parviennent cependant pas à compenser la perte du pouvoir d'achat qui résulte de la venue au monde d'un ou plusieurs enfants [22].
Le Conseil national a accepté sous la forme d'un postulat une motion Jung (pdc, LU) invitant le Conseil fédéral à procéder à d'éventuelles modifications de la loi sur les allocations familiales dans l'agriculture qui vont dans le sens d'une plus forte augmentation des prestations que dans d'autres secteurs ainsi que dans le sens d'un élargissement du cercle des personnes qui ont droit aux allocations [23].
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La nécessité d'améliorer concrètement l'assise financière des familles, et, plus précisément, des couples mariés par rapport aux couples vivant en union libre, a conduit le parlement à adopter, à une nette majorité, un arrêté spécial limité dans le temps sur l'impôt fédéral direct qui allège la charge fiscale des couples mariés et des familles grâce à l'adaptation d'un barême distinct pour les époux et les célibataires. Initialement comprise dans une modification complète du système financier de la Confédération, cette réforme fiscale a été extraite de l'ensemble du dossier afin qu'elle puisse entrer plus rapidement en vigueur. Plusieurs députés socialistes n'ont cependant pas manqué de faire un rapprochement entre la rapidité avec laquelle le bloc bourgeois a débattu du dossier et l'échéance toute proche des élections fédérales. Et ceux-ci de craindre qu'une précipitation malsaine ne mette en danger tout le paquet de la réforme. Si la majorité bourgeoise était guidée par le principe de non-répercussion sur d'autres sujets fiscaux des dégrèvements en faveur de la famille, le chef du DFF, Otto Stich, était d'avis qu'il fallait compenser en partie le coût résultant des allégements pour les familles par une taxation supérieure sur les hauts revenus et les célibataires. La version de la majorité bourgeoise a finalement triomphé de celle proposée par le Conseil fédéral. Au cours du vote final, dans une chambre comme dans l'autre, les socialistes se sont abstenus ou ont voté contre l'arrêté. Ils ont estimé d'une part qu'il n'était pas judicieux de sortir ce chapitre particulier de la réforme de l'ensemble de la fiscalité fédérale et, d'autre part, que la solution adoptée n'était pas assez sociale [24].
En raison du caractère provisoire de la réforme fiscale relative à l'imposition des couples, le Parti radical-démocratique a décidé de maintenir sa première initiative populaire visant à réduire la charge fiscale pesant sur les couples mariés et les familles. Le projet, qui part du principe que les couples mariés avec enfants sont défavorisés fiscalement par rapport aux concubins, prévoit d'alléger l'imposition des familles d'environ 510 millions de francs, dont 350 à charge du fisc fédéral et le reste à charge des cantons [25].
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Avec le soutien des autorités fédérales et d'une majorité silencieuse, la Fondation Pro Juventute avait arraché de 1926 à 1973 quelque 600 enfants jenisches à leurs parents. Cet épisode historique douloureux, connu sous le nom de l'oeuvre des "Enfants de la grand'route" a à nouveau été évoqué. En effet, le DFI a ouvert une procédure de consultation, proposant aux cantons, dépositaires officiels des dossiers, d'adhérer à un accord administratif inter-cantonal prévoyant la conservation et la mise en valeur centralisées des dossiers concernant les enfants jenisches enlevés à leurs familles. Les cantons ont approuvé la conclusion de cette convention qui va permettre dorénavant aux personnes pouvant prouver qu'elles veulent retrouver leur famille, rectifier le contenu de ces documents ou faire valoir des prétentions financières fondées, de consulter ces dossiers de tutelle et d'adoption qui se trouvent présentement aux archives fédérales. Au cours d'une conférence de presse, P. Bernasconi, au nom de la Fondation Pro Juventute, a adressé des excuses aux Jenisches et a prêché en faveur d'une réconciliation. En 1986, le président de la Confédération, A. Egli, avait déjà présenté des excuses officielles aux gens du voyage [26].
Les problèmes relatifs à la fécondation artificielle et aux manipulations génétiques sont traités au chapitre I, 7b, (santé).
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Jeunesse
Dans le cadre de l'élaboration d'une politique fédérale de la jeunesse, le Conseil fédéral a présenté son message concernant l'encouragement des activités extra-scolaires en faveur de la jeunesse. Le projet a pour but, d'une part d'ancrer dans une loi sur les activités de jeunesse le soutien matériel de la Confédération aux activités extra-scolaires en faveur de la jeunesse qui présentent un intérêt national et, d'autre part, d'introduire par le biais d'une modification du code des obligations, un congé non rétribué pour les personnes assumant des responsabilités au sein d'organisations de jeunesse. Même si la procédure de consultation a permis de dégager une appréciation globalement positive, certaines critiques furent néanmoins formulées à l'encontre du principe de l'aide fédérale et surtout de l'introduction du congé jeunesse. Les opposants, tous les cantons romands, à l'exception du canton du Valais, et les organisations des milieux de l'économie et des employeurs, ont estimé que dans ce domaine précis, l'aide doit émaner en priorité des milieux privés, des cantons et des communes. Ils ont également jugé inadmissible l'intervention de l'Etat dans les relations entre employeurs et salariés [27].
Le Conseil des Etats a accepté une motion Schoch (prd, AR) sous la forme d'un postulat invitant le gouvernement à préparer une révision du code civil abaissant l'âge de la majorité de 20 à 18 ans. Cela ne signifie pas qu'une personne âgée de 18 ans aurait le droit de vote, mais qu'elle deviendrait sujet de droits et d'obligations [28].
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Sélection bibliographique
A. Garrido, Le débat de la politique fédérale à l'égard des étrangers, Lausanne 1987;
M. Vuilleumier, Immigrés et réfugiés en Suisse: aperçu historique, Zurich 1987;
V. Bory, Dehors, Lausanne 1987. Dans cet ouvrage, l'auteur analyse le phénomène de la xénophobie en Suisse depuis le début de ce siècle.
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R. Nef, Mehr Staatsraison, weniger Menschlichkeit? Eine statistische Analyse der Abstimmung über das Asylgesetz auf der Basis von 2920 Gemeinden, Zürich 1987;
M. Jurt, La Suisse, terre d'accueil, terre de renvoi, Lausanne 1987;
U. Gfeller, Le temps des réfugiés, Lausanne 1987. Dans cet ouvrage, trois personnalités, E. Kopp, J. P. Hocké et G.-A. Chevallaz, présentent leur vision personnelle sur cet affrontement entre partisans et adversaires d'une politique d'asile ouverte sur le monde.
C. Fischer / P. Knoepfel, "Scheinbar unscheinbare Metamorphosen", in Cahiers de l'IDHEAP, Lausanne 1987 (analyse juridique détaillée du dérapage administratif en matière de politique d'asile).
"Demandeurs d'asile: un scrutin délicat", in Civitas, 42/1987, p. 56 ss.;
E. Gygax, "Übernahme von Flüchtlingen durch die öffentliche Fürsorge", in Zeitschrift für öffentliche Fürsorge, 84/1987, p. 27 ss.;
P.J. Opitz, "Das Weltflüchtlingsproblem im 20. Jahrhundert", in Politik und Zeitgeschichte, 1987, B26/27, p. 25 ss.
Interview de P. Arbenz au sujet des affaires Maza (internement) et Salihi (expulsion): L'Hebdo, 24, 11.6.87.
Commentaires de plusieurs personnalités romandes sur l'issue du scrutin sur la politique d'asile: L'Hebdo, 15, 9.4.87.
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POCH, Die Gleichberechtigung verwirklichen! Für eine schweizerische Antidiskriminierungsgesetzgebung, Zürich 1987;
SAP, Frauwärts!: zur Verwirklichung der Gleichberechtigung, Zürich 1987;
B. Meyer, "Frauen an die Macht?! Politische Strategien zur Durchsetzung der Gleichberechtigung von Mann und Frau", in Politik und Zeitgeschichte, 1987, B9/10, p. 25 ss.;
"Frauen Gleichberechtigung und mehr", in Diskussion, 1987, Nr. 3;
V. Schaller, "Die vielfältig entwickelte Frau, Frauenförderung, ein Dilemma", in Emanzipation, 13/1987, Nr. 9, p. 3 ss.
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M. Dondénaz, Avortement, interruption de grossesse: le cas de la Suisse, Lausanne 1987.
Sur l'historique concernant le débat politique sur l'avortement: Domaine public, 853, 26.2.87.
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S. Grossenbacher, Familienpolitik und Frauenfrage in der Schweiz, Grüsch 1987;
M. Weibel-Spring, "Grenzen und Möglichkeiten der Familie heute", et J. Schmucker-von Koch, "Die aktuelle Lage der Familie", in Civitas, 42/1987, p. 331 ss. et 357 ss.;
S. Grossenbacher, "Das Konkubinat im steuerpolitischen Schussfeld", et A. Sauser, "Möglichkeiten einer gerechteren Ehepaarbesteuerung", in Questions au féminin, 10/1987, no 1, p. 22 ss. et 46 ss.;
T. Huonker, Fahrendes Volk, verfolgt und verfemt: jenische Lebensläufe, Zürich 1987.
"Revenu familial et sécurité sociale pour les familles dans les pays membres du Conseil de l'Europe", in RCC, 1987, p. 193 ss. et 237 ss.
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Arbeitsgruppe Historische Jugendforschung (éd.), Jugendpolitik und Jugendforschung: Beiträge aus der Schweiz und der Bundesrepublik Deutschland, Bern 1987;
Bachofen, Fremdbestimmt, selbstbestimmt, mitbestimmt: ein Beitrag zur Partizipation Jugendlicher in politischen und sozialen Gruppierungen, Zürich 1988.
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[1] Rapp. gest., 1987, p. 188. Cf. aussi A. Kipfer, "Effectif de la population résidante permanente de nationalité étrangère et de la population active de nationalité étrangère à la fin de décembre 1987", in La Vie économique, 61/1988, no 5, p. 28 ss.
[2] RO, 1987, p. 1334 ss. Réactions: USS, 26, 2.9. et 32, 14.10.87. Cf. aussi presse du 6.10.87.
[3] FF, 1987, Il, p. 1400; cf. aussi Volk+Heimat, 1987, Nr. 10 ainsi que APS, 1986, p. 169.
[4] FF, 1988, I, p. 557 ss.; cf. aussi APS, 1985, p. 154. Réactions: USS, 38, 2.12.87; RFS, 48, 1.12.87.
[5] BO CN, 1987, p. 1240 ss. et 1519; BO CE, 1987, p. 32 ss. et 571; FF, 1987, III, p. 235 ss.; RO, 1988, p. 332 s. Voir aussi APS, 1986, p. 168 s.
[6] FF, 1987, II, p. 829 ss.; presse du 6.4.87.
[7] Loi sur l'asile: RO, 1987, p. 1674 ss. LSEE: RO, 1987, p. 1665 ss. Historique: APS, 1986, p. 169. Prise de position et réactions: Syndicats: USS, 6, 11.2.; 7, 18.2. et 14, 15.4.87. Patronat: SAZ, 5, 29.1. et 15, 9.4.87. PRD: Revue politique, 66/1987, no 1. PSS: SP Pressedienst, 223, 10.3.; 224, 23.3. et 225, 6.4.. Extrême droite: Volk+Heimat, 1987, Nr. 4 et 5.
[8] Vox, Analyse de la votation fédérale du 5 avril 1987, Genève.
[9] RO, 1987, p. 1669 ss. et 1680 ss. Procédure de consultation: presse du 20.5. et du 10.9.87. Cf. aussi L'Hebdo, 49, 3.12.87. Nouvelles dispositions: presse du 18.11.87.
[10] RO, 1988, p. 125 ss.
[11] PLS: L'Opinion libérale, 1987, no 6; JdG, 16.3.87. Conseil d'Etat GE: JdG, 16.3.87. Initiative: Délib. Ass. féd., 1987, IV, p. 16.
[12] Presse du 20.1.88.
[13] Annuaire statistique de la suisse, Berne 1987; cf. aussi APS, 1986, p. 169 (notes).
[14] Presse de janvier 1987. Prise de position du CF: Documenta, 1987, no 1, p. 4.
[15] FF, 1987, II, p. 767 ss. Voir aussi Volk+Heimat, 1987, Nr. 9.
[16] BO CN, 1987, p. 440 ss. ; BO CE, 1987, p. 636 ss. Cf. aussi supra, part. I, 7c (AVS).
[17] L'Hebdo, 39, 17.9.87; TAM, 38, 19.9.87.
[18] Initiative Fetz: BO CN, 1987, p. 463 ss. et APS, 1986, p. 175. Motion Stamm: BO CN, 1987, p. 986 et APS, 1986, p. 175 (notes). Cf. aussi SAZ, 3, 15.1.87 ainsi que Domaine public, 873, 27.8.87.
[19] TA, 5.3.87; BaZ, 10.8., 13.8., 26.8. et 27.8.87; Bund, 26.8.87; NZZ, 27.8.87. Domaine public, 873, 27.8.87.
[20] Femmes et hommes: Faits, perspectives et utopies, Commission fédérale pour les questions féminines, Berne 1987.
[21] BO CN, 1987, p. 1 ss. Cf. aussi Domaine public, 853, 26.2.87. ainsi que APS, 1986, p. 176.
[22] Presse du 25.11.87.
[23] BO CN, 1987, p. 976 ss.
[24] BO CN, 1987, p. 1115 ss.; BO CE, 1987, p. 522 ss. Presse du 24.9. et du 8.10.87.
[25] FF, 1987, II, p. 358 ss.
[26] Procédure: presse du 14.7.87. Excuses: presse du 8.5.87.
[27] FF, 1988, I, p. 777 ss.; cf. aussi APS, 1986, p. 176.
[28] BO CE, 1987, p. 17 ss.
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