Zuletzt aktualisiert: 25.10.2019, 17:34 Uhr

Dossier: Armee XXI Als PDF speichern

Rapport de la Commission d’étude pour les questions stratégiques («Rapport Brunner»)

Le conseiller fédéral Adolf Ogi a mis sur pied une commission d'études pour les questions stratégiques présidée par l'ancien secrétaire d'Etat Edouard Brunner. Ce groupe de réflexion, composé d'une quarantaine de membres représentant toutes les sensibilités de la population sur les questions relatives à la défense nationale, devra réfléchir à une refonte complète de la politique suisse de sécurité. Bénéficiant d'une totale liberté de réflexion, il devra formuler des propositions sur une réforme de l'organisation de l'armée, et notamment examiner la question du maintien du système de milice. Il aura également à se prononcer sur des formes plus poussées de collaboration militaire avec les pays européens.

Dans l’ensemble, les conclusions du rapport Brunner ont suscité des réactions favorables dans la presse et lors de sa mise en consultation. Les partis gouvernementaux ont salué l’ouverture du débat sur la politique de sécurité et le renforcement de la collaboration internationale. Seule l’UDC a émis des réserves face à un engagement plus grand à l’étranger. La CPS du Conseil national s’est prononcée de façon positive et celle du Conseil des Etats a annoncé que la réforme de l’armée devrait avoir lieu avant 2005. La SSO a rappelé que le cœur de compétences de l’armée doit rester la défense. Parmi les détracteurs, l’USS et le GSsA ont critiqué la possibilité de confier à l’armée certaines tâches de police. Le conseiller national Blocher (udc, ZH), seul membre de la Commission Brunner a avoir refusé l’adoption du rapport, a lui présenté ses propres conclusions dans un document intitulé «Mutations stratégiques». Il s’y oppose à «un activisme international déguisé en entreprise morale» et combat une politique de sécurité qu’il estime naïve, hâbleuse et pastichée.

Sous la présidence de l’ancien ambassadeur Edouard Brunner, la Commission d’étude pour les questions stratégiques a remis un rapport qui analyse la nouvelle donne mondiale en matière de menaces pour la sécurité de la Suisse et propose des solutions pour adapter sa politique en la matière. Ce rapport est le prélude à la nouvelle réforme de l’armée qui prendra le nom d’armée «XXI» et devrait débuter au plus tôt en 2003.
Pour ce qui est de la situation géostratégique, le Commission Brunner pose que la Suisse se trouve dorénavant dans un espace élargi de sécurité, contrairement à une dizaine d’années plus tôt et qu’elle n’en a pas encore pris pleinement conscience. Même si des foyers d’instabilité subsistent non loin du territoire helvétique comme dans les Balkans, le rapport considère comme peu prévisible une situation militaire classique ayant des conséquences directes pour la Suisse, si ce n’est sous la forme de dysfonctionnements économiques, sociaux ou démographiques.
A propos des menaces, des dangers nouveaux et des moyens d’y faire face, la Commission dresse d’abord le constat que selon toute vraisemblance, les Etats entourant la Suisse n’entreront plus en conflit armé entre eux et n’attaqueront pas la Suisse. L’hypothèse d’un échec total de l’intégration européenne ne pourrait en aucun cas survenir de manière imprévisible et soudaine. Aussi, c’est en contribuant à renforcer cette dynamique que la Confédération peut le mieux protéger ses intérêts. La Commission Brunner prend également acte du fait que cette fin de siècle est marquée par une forte tendance des pays démocratiques à collaborer afin d’assurer la paix à long terme. Elle recommande ainsi que la Suisse dépasse ses vieilles réticences face à tout engagement international, et qu’elle s’engage plus intensément dans la coopération, surtout dans les domaines de l’instruction, de la technologie et de la politique de sécurité. Elle suggère de mettre un accent particulier sur les secteurs de l’exploration par satellites, de la surveillance de l’espace aérien et du renseignement. Concernant la sécurité intérieure, la Commission met en évidence également des insuffisances dans la coopération internationale et par conséquent recommande de trouver des modalités permettant de se rapprocher de l’espace de sécurité européen.
Selon le rapport, la Suisse est donc puissamment armée face à des périls devenus improbables et démunie face aux dangers véritables. C’est pourquoi il lui est préconisé d’adapter les effectifs et l’équipement aux nouvelles priorités du moment, tout en conservant cependant un savoir-faire militaire et industriel pouvant être réactivé en cas de besoin. Il s’agirait par exemple d’étudier la possibilité d’attaques ciblées de missiles provenant de pays lointains. Par ailleurs, la Commission montre que les formes que peuvent prendre les menaces n’ont pas toutes des réponses militaires. Ainsi en va-t-il des catastrophes naturelles et technologiques pouvant avoir un impact transfrontalier, du crime organisé, du terrorisme, de la prolifération des armes atomiques, biologiques et chimiques, des pressions internationales, des perturbations dans le domaine de l’informatique, de l’information et de la désinformation ainsi que des désordres, des conflits intérieurs et de la criminalité. Selon l’avis exprimé dans le rapport, il devrait être constitué au sein de l’armée un corps d’intervention capable de gérer le danger d’interventions terroristes lourdes.
Concernant les migrations, même si elle reconnaît qu’elles ne constituent pas une menace stratégique à proprement parler, la Commission Brunner recommande d’en atténuer les causes par le biais de l’aide, de la coopération et de l’assistance, mais pose la tradition humanitaire comme devant être maintenue. Toutefois, en cas de situation extraordinaire, les services de la police frontière devraient être renforcés par l’armée.
Dans le domaine de la solidarité internationale, la Commission s’est prononcée pour que la Suisse participe dorénavant plus activement et non plus seulement de façon financière et verbale. A cet effet, elle recommande que soit mis sur pieds un corps suisse de solidarité, capable d’intervenir dans des missions de secours, de paix et d’appui aux civils. Cette unité serait armée pour sa propre défense et disposerait de moyens de transport autonomes. Elle serait incorporée à l’armée. En outre, la commission recommande la création d’un centre de formation opérationnelle pour les activités de déminage.
Quant à la neutralité armée, elle doit être adaptée à la lumière des nouvelles réalités, suggère le rapport. Il s’agit de continuer dans la voie suivie jusqu’alors, soit une interprétation souple et pragmatique de ce concept. Ainsi, en aucun cas, la neutralité ne doit devenir un obstacle à des engagements nécessaires pour la sécurité et la dignité de l’Etat. Pour le moins, la collaboration avec l’OTAN dans le cadre du PPP et d’autres formes de coopération doivent être favorisées.
Pour ce qui est des conséquences pour les instruments de la politique de sécurité, la Commission Brunner s’est prononcée pour le maintien de l’armée de milice, dont elle reconnaît également la valeur pour la cohésion de l’Etat. Toutefois, elle propose des aménagements de ce système, comme par exemple l’accomplissement de l’obligation de servir en une seule période et la formation d’unités professionnelles pour des tâches spécifiques (corps de solidarité, missions à risques, technologies sophistiquées). Elle recommande également de donner la compétence aux cantons d’organiser la protection civile et d’en réduire fortement les effectifs. L’obligation de servir pourrait être effectuée au sein de cette dernière. Autre innovation proposée: la création d’un Conseil de sécurité dépendant directement du président de la Confédération. Cet organe serait à même de prévenir et de gérer les crises et constituerait un instrument réformé du service des renseignements. Enfin, le rapport Brunner conclut en signifiant qu’une défense efficace passe par la conviction des citoyens et que par conséquent, il faut définir une ligne qui soit claire, susceptible de recueillir une plaine adhésion.

Nomination du divisionnaire Alfred Roulier pour la position de chef de la doctrine

Le divisionnaire Alfred Roulier a été nommé chef de la doctrine. Ce nouveau poste dans l’armée suisse servira notamment à concrétiser les options du rapport Brunner. Il s’agira pour lui de travailler dans la ligne des nouveaux rapport sur la politique de sécurité et plan directeur de l’armée. Un autre divisionnaire, Josef Schärli, commandera lui le Groupe de la promotion de la paix et de la coopération en matière de sécurité (Grppc). Ce nouvel organisme, intégré au sein de l’état-major général, est appelé à coordonner les actions du DDPS en relation avec l’étranger. Par ailleurs, le Conseil national a transmis un postulat de sa commission de gestion (Po. 97.3549) priant le Conseil fédéral d’examiner si en cas de promotions dans l’armée, les candidats doivent fournir un extrait de casier judiciaire.

Motion Frick: Réalisation d’une «National Guard» suisse dans le cadre de la réforme de l’«Armée XXI» (Mo. 99.3152)

Le conseiller aux Etats Bruno Frick (pdc, SZ) a proposé la création de troupes équipées et formées essentiellement pour aider les autorités civiles. Intégrée dans le cadre de la réforme « Armée XXI », cette « garde nationale helvétique » serait notamment engagée lors de catastrophes, mais également dans des missions de protection ou de sécurisation de la population et des installations. Elle ne serait par contre pas destinée au maintien de l’ordre public. Cosignée par 14 autres députés, cette motion a finalement été transmise comme postulat sur proposition du Conseil fédéral. Le gouvernement ne désirait en effet pas intégrer un texte modifiant les structures, alors que le processus de réforme oscille encore entre la stratégie et la doctrine.

Rapport «La sécurité par la coopération» (RAPOLSEC 2000) (99.056)

Intitulé «la sécurité par la coopération», le rapport sur la politique de sécurité de la Suisse (RAPOLSEC 2000) a été délivré par le Conseil fédéral à l’Assemblée fédérale. Dressant un état des lieux des dangers potentiels actuels et futurs et définissant en conséquence les grandes options stratégiques à prendre, il doit constituer le fondement des projets de réforme de l’armée et de la protection de la population. C’est en 1990 que le dernier rapport sur ce sujet avait été publié.
Depuis cette époque, la situation de la Suisse en matière de sécurité s’est dans l’ensemble améliorée, constate-t-on dans RAPOLSEC 2000. Avant toute chose, la menace militaire conventionnelle est devenue relativement réduite avec désormais des délais de préalerte de plusieurs années. Par contre, le Conseil fédéral semble craindre l’avènement de différends nucléaires régionaux, mais écarte la thèse d’un conflit interétatique proche ou généralisé. Le rapport met aussi en évidence l’éventualité d’une importation de conflits par le biais des requérants d’asile ou de chefs de groupes politiques étrangers résidant en Suisse. D’un point de vue économique, il est cité « les restrictions à la liberté des échanges et les pressions économiques », mais également le potentiel d’instabilité et d’injustice sociale que contient la dynamique économique mondiale, ainsi que les dangers liés aux atteintes portées à l’environnement. La menace pourrait par ailleurs se concrétiser contre les infrastructures informatiques et de communication, ceci allant des perturbations de l’économie jusqu’à la paralysie des capacités politiques et militaires. Sur ce dernier point, le rapport prévoit l’influence prépondérante des développements technologiques sur la sécurité et met en avant la tendance à des engagements militaires effectués à grande distance avec des moyens humains réduits. De même, le développement et la diffusion des toxiques de combats biologiques pourraient jouer dans les conflits de l’avenir un rôle décisif. Parmi les autres dangers, le rapport mentionne encore la criminalité et le crime organisé, le terrorisme, l’espionnage, l’extrémisme violent, les violations des droits de l’homme, les frictions dues à l’évolution démographique et aux migrations et les grandes catastrophes naturelles.
La nouvelle politique de sécurité de la Suisse est basée sur une stratégie de coopération nationale et internationale, explique le Conseil fédéral. A l’intérieur du pays, la conduite stratégique est effectuée par le Conseil fédéral au niveau de la Confédération et au niveau des cantons par les gouvernements cantonaux. L’organisation de défense générale est remplacée par une coopération globale et souple en matière de sécurité. Confédération, cantons, communes et organisations privées sont intégrés dans le dispositif et un Organe de direction pour la sécurité (ODS) sera institué pour garantir une coordination optimale. Cet organe d’état-major sera chargé des travaux préparatoires du Conseil fédéral et devra détecter les dangers, élaborer des scénarios, des stratégies et suivre de façon permanente l’évolution de la situation de la sécurité. La création de l’ODS entraînera la suppression du Conseil de la défense, de l’Etat-major de la défense et du groupe de coordination de la Délégation du Conseil fédéral pour la sécurité. A l’étranger, la politique se compose de préférence de l’engagement préventif, mais au besoin également de l’engagement réactif afin de gérer les crises par des actions multinationales collectives coordonnées, de stabiliser des régions agitées et, de manière plus générale, de renforcer réciproquement les mesures de sécurité.
En comparaison du rapport 90, trois nouvelles tâches stratégiques sont énumérées selon un ordre de probabilité: la promotion de la paix et la gestion des crises (reconstruction des régions endommagées par la guerre, gestion pacifique des crises internationales), la prévention et la maîtrise des dangers existentiels (catastrophes naturelles et anthropiques, perturbations de l’ordre intérieur) et la défense (maintien de la capacité de défendre la souveraineté, le territoire, l’espace aérien et la population). La neutralité est maintenue, « mais ne doit pas devenir un obstacle à la sécurité ». RAPOLSEC 2000 met en effet en garde contre un sentiment de sécurité trompeur offert par la neutralité, dans la mesure où les affrontements n’auront sans doute plus lieu entre les Etats, mais à l’intérieur des Etats.
Selon le rapport, l’adhésion de la Suisse à l’OTAN n’est actuellement pas nécessaire et celle à l’UE ne poserait pas de problèmes par rapport à la politique de sécurité et au concept de neutralité. Dans cette hypothèse, la Suisse serait, sauf exception, tenue d’appliquer les politiques communes, mais en tant que non-membre de l’OTAN, elle pourrait bénéficier d’un statut de simple observateur à l’UEO (Union de l’Europe occidentale). Quant à l’adhésion à l’ONU, elle est jugée favorablement du point de vue de la politique de sécurité. La Suisse ne serait d’ailleurs pas tenue de mettre à disposition des troupes armées.
Pour les militaires, les principales modifications proposées par RAPOLSEC 2000 concernent l’envoi de personnel et de contingents de troupes à l’étranger. L’armée passe aussi d’une stratégie de la dissuasion à une stratégie de la coopération. Le principe d’une armée de milice est maintenu et une nouvelle réduction des effectifs est programmée. Par contre, certaines unités seront placées dans un degré de disponibilité plus élevé en fonction des nouvelles missions. Le mot-clef de cette réorganisation se nomme interopérabilité. A savoir que l’armée doit devenir apte à une coopération multinationale, notamment dans le cadre du Partenariat pour la paix (PPP).
La protection de la population (PP) est également touchée par cette réforme. Le Conseil fédéral propose notamment l’intégration de la Protection Civile actuelle dans le nouveau dispositif, l’octroi aux cantons de la compétence d’engagement (la Confédération réglant les questions de base), la possibilité de participer à la gestion des crises dans le cadre du Partenariat pour la Paix, la représentation au sein de l’ODS et le maintien de l’infrastructure de protection (abris). En outre, les sapeurs-pompiers, les services techniques, la voirie, la santé publique et les organisations de sauvetage feront également partie de cette organisation. Concernant l’approvisionnement économique du pays, le rapport relève que le sabotage, le terrorisme et les catastrophes naturelles relèguent au second plan l’éventualité d’une guerre ou d’un encerclement. Par conséquent, seules des réserves minimales sont conservées dans le commerce, l’industrie et l’agriculture.
Selon le Conseil fédéral, l’obligation de servir (armée ou PP) doit être maintenue. En outre, des possibilités d’effectuer le service militaire en une seule période et d’introduire la notion de soldats contractuels doivent être créées, tout comme la mise en place de composantes professionnelles pour certaines tâches spécifiques. Quant à la répartition des citoyens entre la PP et l’armée, le rapport présente trois variantes qui toutes entraîneraient une révision de la Constitution fédérale. La première maintiendrait une école de recrues pour tous avec par la suite une affectation à la PP ou au service militaire. La deuxième diviserait dès le recrutement les troupes destinées à la PP et celles destinées à l’armée, ceci sans liberté de choix et avec une instruction séparée. La troisième serait similaire à la deuxième, mais avec la liberté du choix pour les individus, sous réserve de la couverture des effectifs dans les deux entités. Pour les deux dernières variantes, l’instruction relative à la PP serait principalement du ressort des cantons. Les femmes ne seront pas touchées par l’obligation de servir, si ce n’est de façon partielle dans le cadre des sapeurs-pompiers, mais leur participation doit être encouragée préconise le rapport. Concernant le service civil, le Conseil fédéral pose qu’à l’avenir, sa disponibilité opérationnelle sera faible, sa mise sur pied s’effectuant dans un délai de plusieurs semaines.

Par 114 voix (prendre acte du rapport en l’approuvant) contre 44 (prendre acte du rapport) et 25 abstentions, la chambre du peuple a accepté ce rapport sur la politique de sécurité. Une proposition Zisyadis (pdt, VD) de prendre acte du rapport en le désapprouvant avait auparavant été écartée par 103 voix contre 31. Ce dernier a fait savoir que son parti combattrait par voie de référendum la révision de la loi fédérale sur l’armée et l’administration militaire qui découle de ce rapport.

Le 1er janvier 2000 sont entrées en vigueur les dispositions relatives aux directives sur l’organisation de la conduite de la politique de sécurité. La Délégation du Conseil fédéral pour la sécurité, l’Organe de direction pour la sécurité, l’Organe de coordination du renseignement de la Confédération et le Bureau d’appréciation de la situation et de détection précoce auront notamment pour tâche d’aider à la réalisation des nouvelles dispositions issues de RAPOLSEC 2000. Ce rapport, rendu public en 1999 par le Conseil fédéral, a été approuvé par le Conseil des Etats (24 voix pour, 5 voix contre), faisant suite à la décision favorable de la Chambre du peuple l’an passé (114 voix pour, 44 voix contre, 25 abstentions).

Révision de la législation militaire dans le cadre de la réforme Armée XXI (MCF 01.065)

Entouré de plusieurs conseillers d’Etat, Adolf Ogi a présenté sa conception de la future Protection de la population (PP) appelée à remplacer la PC. Issu d’un groupe de travail Confédération – cantons, ce document sera soumis à la consultation des cantons jusqu’à la fin de l’année sous revue. La mise en place de la PP et d’ « Armée XXI » devraient se dérouler simultanément. Le chef du DDPS à refusé de chiffrer la diminution des effectifs qui aura lieu et le futur âge limite d’obligation de servir. Le document propose d’instaurer le libre-choix entre l’armée et la PC, de renforcer les missions purement civiles de cette dernière et de l’intégrer dans la protection de la population avec les polices, les sapeurs-pompiers, les services sanitaires et les services de sauvetage. Les cantons joueraient un rôle de premier plan et la Confédération un rôle subsidiaire.

Immédiatement après l’acceptation par la chambre du peuple de RAPOLSEC 2000, le chef du DDPS Adolf Ogi a dressé les grandes lignes de réforme de la future « Armée XXI ». La durée de l’école de recrues devrait être portée à six mois au lieu de quatre, mais le nombre de jours de service à effectuer restera identique. Cela signifie que le nombre de cours de répétition diminuera à six et retrouvera un rythme annuel. Les soldats achèveront donc leurs obligations militaires autour de 30 ans. A cette innovation, il sera ajouté la possibilité d’effectuer son service en un seul bloc de dix mois (six de formation et quatre à l’étranger ou en Suisse dans le cadre de missions effectuées par l’armée de façon subsidiaire). Les tâches d’instruction et de conduite seront séparées. A l’avenir l’armée comptera donc des soldats contractuels, des soldats « service long », des professionnels (gardes-fortifications et instructeurs) et des militaires effectuant leurs cours de répétition.

L’année a été marquée par la bataille des chiffres d’«Armée XXI», qui ont donné lieu à nombre de spéculations aussi bien sous la Coupole que dans les débats publics. Principal objet de querelle au sein du Conseil fédéral, la taille – et le budget relatif – de la future armée ont été abondamment discutés. Le conflit entre les intérêts de l’économie suisse et l’organisation militaire du pays fut largement cristallisée en une opposition personnelle entre Pascal Couchepin et Adolf Ogi, au point que leur controverse a fait l’objet d’une discussion lors d’une séance du Conseil fédéral, afin que les différents entre ses membres ne s’expriment plus sur la place publique. Cette «micro-crise» entre le domaine économique et militaire a rythmé l’élaboration finale de la réforme, entre un ministre de l’Economie qui s’est maintes fois engagé en faveur d’une armée réduite – moins de 120'000 hommes, sans réservistes – et un chef de la Défense partisan d’une armée forte d’au moins 200'000 soldats. Les prises de position de Kaspar Villiger et de diverses associations patronales en faveur d’un amaigrissement des troupes, de leur budget et des contraintes militaires, ont été fréquentes. Dans le camp des défenseurs d’une armée aux larges épaules, la Société suisse des officiers (SSO) s’est prononcé pour un effectif de 180'000 hommes, dont 70'000 réservistes, rejoignant les projections d’Adolf Ogi.
Celui-ci, pressé par ses collègues de donner des informations concrètes afin de couper court aux spéculations de toutes sortes, a officialisé en juin les grandes lignes d’«Armée XXI». Les effectifs en ressortent très amaigris: 119'000 soldats, avec une réserve variable de zéro à 80'000 hommes. Si à première vue ces chiffres abondent dans le sens de Pascal Couchepin et des ténors de l’économie helvétique, le nombre des réservistes constitue une fourchette conséquente. Le budget militaire devrait atteindre un plafond de CHF 4.3 milliards en 2003, date de sa mise en application. Ce chiffre porterait à environ 10% la part des dépenses militaires dans le budget de la Confédération, contre 35% en 1960. Après que le Conseil fédéral a donné son aval à la fin de l’année, les derniers points ont été précisés: l’âge limite du service sera porté à 30 ans, le nombre de jours sous les drapeaux sera de 280 et l’école de recrue durera six mois d’affilée. Elle devra être effectuée entre 18 et 22 ans. Les cours de répétition seront au nombre de six, dureront chacun 19 jours et retrouveront le rythme annuel d’avant 1995. La porte est plus que jamais ouverte à un «service long» d’une seule traite, qui devrait occuper environ 4000 soldats par école de recrue. «Armée XXI» s’articulera sur un système souple de «modules», avec pour noyau six à huit brigades de combat. S’y ajouteront des formations logistiques et de soutien au combat, ainsi que des forces aériennes opérationnelles. Les corps d’armée et les régiments disparaîtront. Les quatre corps d’armée actuels, flanqués de l’état-major général, du commandement des Forces terrestres et de celui des Forces aériennes, laisseront la place à deux entités: l’armée de terre et l’armée de l’air. Le commandement sera assuré par un triumvirat comprenant les chefs des Forces terrestres et aériennes ainsi que le chef de l’état-major général. Fidèles à RAPOLSEC 2000, les objectifs de «Armée XXI» se fixeront sur trois missions de base : défense, soutien à la paix et sauvegarde des conditions d’existence (aide en cas de catastrophes, etc.). Si l’armée demeurera de milice, la part des professionnels devrait s’élever jusqu’à 5000 ou 8000 soldats, contre 3600 actuellement. Le projet sera soumis à la consultation en janvier 2001, afin que le Conseil fédéral livre son projet au parlement en juin suivant. D’ores et déjà, les réactions partisanes à ces nouvelles directives ont divisé la sphère politique: trop cher pour le PS, trop long pour le PRD, seuls le PDC et l’UDC abondent du bout des lèvres dans le sens du DDPS. La Société suisse des officiers (SSO) a émis des réserves quant aux références et aux objectifs de l’armée, fixés hâtivement selon elle.

En début d’année, le DDPS a remis au Conseil fédéral le plan directeur d’Armée XXI, dont les grandes lignes avaient été exposées l’année précédente. Changement d’importance survenu entre temps sur l’initiative du commandant de corps Jean Abt: la possibilité pour les recrues de partager leur école en deux périodes de trois mois, étalées sur deux ans. Le plan directeur entérine aussi la décision d’ouvrir tous les fonctions militaires aux femmes, ainsi que la disparition des troupes du train et des cyclistes. Il a aussi précisé l’un des points essentiels de la réforme: la centralisation du recrutement dans six centres, qui accueilleront dès 2002 les jeunes appelés pour un séjour de deux ou trois jours. L’objectif de ce nouveau système est de cerner au mieux les profils psychologiques des recrues et d’éviter ainsi un taux trop important d’abondons en cours de service militaire. Alors que ce taux s’élevait à 8% en 1980, il a atteint un peu moins de 15% en 2000. Ce phénomène représenterait 90'000 jours de service et un coût évalué à CHF 10 millions. Entre six et sept centres de recrutement seront opérationnels dès 2003. A ce sujet, le gouvernement a reçu les doléances mi-inquiètes, mi-offusquées, du Tessin. Ce dernier ne serait pas inscrit sur la liste des cantons chargés d’abriter les nouveaux centres de recrutement. Le conseiller d’Etat Luigi Pedrazzini (pdc), chef des Affaires militaires du Tessin, s’en est ouvert à Samuel Schmid, invoquant «une question de principe» et rappelant l’importance pour le canton italophone de conserver un contrôle direct sur le recrutement de ses ressortissants, soit environ 1300 jeunes gens par année.
Sans remettre en cause les points essentiels du plan directeur, le gouvernement a toutefois demandé au département de Samuel Schmid de faire en sorte de réduire le budget prévu annuellement, de CHF 4.3 milliards à 4 milliards, demande que Samuel Schmid a déclaré incompatible avec les objectifs de fonctionnement d’Armée XXI et son souci d’autonomie. Cet argument a porté ses fruits, puisque le Conseil fédéral, lors de la mise en consultation du plan directeur quelques semaines plus tard, a finalement maintenu le budget militaire initial. Le renforcement de la part des investissements voulu par le DDPS fut un argument important dans le maintien de ce budget: sur CHF 4.3 milliards, 2 milliards seront alloués aux investissements, soit un plan de dépenses de CHF 29 milliards répartis sur 15 ans. La mise en application d’Armée XXI est prévue pour le 1er janvier 2003.
Au cours de sa mise en consultation, le plan directeur a subi de très nombreuses critiques de sources politiques, civiles et militaires. Plus tôt dans l’année, un groupe de hauts gradés avait déjà publié dans la presse une lettre où il jugeait la réforme inconstitutionnelle, car ne tenant plus compte du principe de défense autonome inscrit dans la Constitution. Une fois le projet transmis en consultation, la Société suisse des officiers (SSO) a émis le souhait d’y voir adapté des modifications, notamment dans les domaines de l’organisation et de la formation. Au niveau des partis, le PS, jetant un véritable pavé dans la mare, a plaidé pour une défense professionnelle de 15'000 hommes. Si l’armée de milice devait être maintenue, le parti préconiserait un maximum de 120'000 soldats au total, pour 200 jours de service et un budget de CHF 2.5 milliards. Le tout répondrait à une analyse des menaces probables, effectuée chaque dix ans. Pour sa part, le PRD, pourtant largement initiateur de la réforme, a demandé une révision entière de la réforme. Le parti a déploré l’abandon du train et la trop longue période d’affilée de l’école de recrue, handicap pour l’économie et pour la formation universitaire. Il a plaidé pour une école de 280 jours maximum, une plus grande prise en considération des commandements régionaux et, partant, une marge de manœuvre de l’état-major général plus limitée. Enfin, il a soulevé les risques d’une armée à deux vitesses, avec une professionnalisation accrue du secteur militaire. Toujours dans un registre conservateur, l’UDC s’est élevée contre les projets d’ouverture et de coopération internationale de la réforme. Elle a rejeté l’option du service long (300 jours), ferment de professionnalisation, ainsi que la limite d’âge fixée à 30 ans. L’ASIN a voué aux gémonies le projet, le jugeant «incohérent, superficiel et dépassé». Lors de l’assemblée des délégués udc, Samuel Schmid a même été violemment désavoué par les membres de son parti: 291 voix contre 49 ont proposé le renvoi du plan directeur au Conseil fédéral. Parmi les partis gouvernementaux, seul le PDC a approuvé le projet dans son ensemble, soulignant au passage l’importance de la nature de milice de l’armée suisse.
Les associations d’étudiants ont contesté le nouveau calendrier de l’école de recrues, le jugeant inadapté aux contraintes universitaires. Alors que 16 semaines d’école de recrue traditionnelles empêchaient déjà les nouveaux universitaires d’assister au début des cours en octobre (pour les deux tiers d’étudiants qui choisissent d’effectuer leur service en été), les 24 semaines d’affilée prévues par Armée XXI apparaissent comme un obstacle infranchissable au cursus des universitaires. L’Union nationale des étudiants suisses (VSS/UNES) a aussi rappelé que l’abaissement de la limite d’âge pour servir, de 42 à 30 ans, concentre les obligations militaires sur une durée inadéquate pour les recrues universitaires – un quart des 20'000 personnes appelées chaque année sous les drapeaux –, contraintes à jongler difficilement entre leurs examens et leurs jours de service. L’association a peur que le DDPS ne cherche à encourager, par ce calendrier, le choix d’un service long de la part des étudiants.
Face à cette volée de voix discordantes, le DDPS a été contraint de retarder le calendrier de mise en application d’Armée XXI, et d’en modifier les points conflictuels. Les quatre changements par rapport au plan directeur: la durée de l’école de recrue est ramenée à 21 semaines au lieu de 24, soit 262 jours d’affilée; la troupe du train, chère aux conservateurs, est finalement maintenue; le poids des unités blindées est revu à la baisse, passant de trois à deux brigades; enfin, le système de service long (300 jours d’affilée) ne pourra pas excéder un cinquième des effectifs, répondant ainsi aux craintes d’une professionnalisation de l’armée. La mouture finale du texte a été transmise en octobre au parlement.

C’est durant l’année sous revue que le projet de réforme de l’armée a finalement été traité au parlement. Le Conseil des Etats s’est saisi de cet objet lors de la session de printemps. Sa Commission de la politique de sécurité (CPS) a tout d’abord estimé qu’il devait appartenir au parlement, et non plus au gouvernement, de définir la durée du service militaire et les limites d’âge. L’importance de cette décision pour les individus et l’économie justifiait de retirer cette compétence au gouvernement. Dans la discussion concernant la durée de l’Ecole de recrue (ER), la CPS a estimé que le gouvernement, bien qu’ayant réduit ses exigences de 24 à 21 semaines suite à la procédure de consultation, en demandait encore trop et elle a soutenu le modèle de 18 semaines avec un cours de répétition (CR) supplémentaire. Le DDPS a rappelé que 21 semaines, contre 15 actuellement, représentaient une durée incompressible pour assurer une instruction crédible aux nouveaux équipements, plus complexes, et compenser la baisse des effectifs. Pour le président de la CPS, le radical Hans Hess (OW), 18 semaines étaient plus adaptées aux besoins de l’économie et des étudiants. La commission a également demandé au gouvernement de présenter un nouveau concept de direction s’orientant plus vers des structures de commandement régional. Elle a émis le souhait que les neuf brigades permanentes prévues soient rattachées à trois ou quatre Etats-majors de divisions régionaux. Ces revendications éloignaient encore un peu plus la réforme du concept d’origine d’Armée XXI qui prévoyait la formation de brigades ad hoc, issues des divers bataillons, en fonction des besoins de l’engagement. C’est notamment sous la pression des cantons que cette conception hors-sol, axée sur la modularité et la flexibilité des unités, a été remise en question. Concernant le nombre de soldats en service long (SSL), la CPS a estimé qu’il ne devrait pas excéder les 10% des ER, alors que le gouvernement en souhaitait le double.
Le premier document traité a été la Plan directeur de l’Armée XXI présentant les grandes orientations de la réforme. Le débat au plénum a permis à de nombreux parlementaires de développer leurs convictions en matière de politique de défense. La vision la plus proche de l’armée actuelle a certainement été celle de Carlo Schmid (pdc, AI). Sceptique par rapport à l’interopérabilité des forces armées, il rappelé que l’ami d’aujourd’hui pouvait devenir l’ennemi de demain. Rare parmi les parlementaires bourgeois à faire preuve d’enthousiasme pour Armée XXI, le radical Fritz Schiesser (GL) n’a pas manqué de souligner que le maintien de certaines unités relevaient plus du folklore que de priorités stratégiques clairement définies. Dans une assemblée peuplée de nombreux cadres supérieurs de l’armée, le socialiste Michel Béguelin (VD) s’est retrouvé bien seul lorsqu’il a évoqué la nécessité d’une discussion publique sur l’alternative entre une armée de milice ou professionnelle. Après l’acceptation du Plan directeur, l’examen de détail a commencé. Sur la question de la longueur de l’école de recrue, le conseiller fédéral Schmid, qui défendait les 21 semaines puis s’est dit prêt à descendre jusqu’à 20, a été désavoué par les parlementaires qui ont soutenu la solution de la commission : 18 semaines et 6 CR (20 voix contre 17). Cette variante était principalement soutenue par des conseillers aux Etats bourgeois, sensibles aux arguments de l’économie privée et des milieux académiques, et par des socialistes. Le transfert de la compétence de déterminer la longueur du service du gouvernement au parlement a été confirmée par 30 voix contre 12. Le chef du DDPS a subi un autre revers avec le maintien de l’ancrage territorial des troupes et l’abandon de l’idée de brigades flottantes. A l’Etat-major de conduite de l’armée ont été ajoutés quatre Etats-majors de division auxquels seront soumises neuf brigades, dont trois de montagne, les cantons concernés en ayant finalement obtenu une supplémentaire. Sur les SSL, un compromis à 15% (environ 3000 personnes), entre les 20% demandés par le DDPS et les 10 % des défenseurs d’une milice forte, a finalement été trouvé (24 voix contre 17). Pour le département de la défense, ces soldats doivent avant tout être utilisés de manière flexible pour les tâches subsidiaires de l’armée comme l’aide en cas de catastrophe et la protection de bâtiments et permettre de ne plus mobiliser des CR. Les partisans d’une solution minimale craignaient pour leur part une professionnalisation rampante de l’armée. Certaines décisions n’ont pas provoqué de grands débats. Il en a été ainsi de la baisse des effectifs de 360'000 à 120'000 hommes auxquels il convient d’ajouter 20'000 conscrits et 80'000 réservistes. Le maintien des tirs obligatoires hors service et des colonnes du train ont également passé la rampe sans problème. De nombreux commentateurs ont souligné la nature hybride du projet par rapport aux objectifs des concepteurs d’Armée XXI. Ils ont notamment estimé que les concessions faites aux lobbies, particulièrement aux cantons en matière de décentralisation du commandement, ôtaient une grande part de modularité à l’institution. Le projet a finalement été adopté par 25 voix, sans opposition.
La CPS du Conseil national a proposé de rendre son aspect originel au projet en désavouant la chambre haute et en faisant un pas en direction du gouvernement. Elle a proposé de fixer la durée de l’ER à 21 semaines, puis de laisser la compétence de déterminer le temps de service et la cadence des CR au Conseil fédéral. Les commissaires de gauche, accompagnés de quelques élus issus des rangs bourgeois, ont toutefois estimé que la menace actuelle ne nécessitait pas une prolongation aussi radicale de la formation. Le plénum a suivi la CPS. Un certain nombre de propositions allant dans le sens d’une limitation de la détention d’armes et de munitions hors service ont également été examinées par la Chambre basse. Une proposition de suppression des tirs obligatoires a été rejetée. Une requête soutenue par les socialistes et les verts demandant l’entreposage des armes de service à l’arsenal entre les périodes de service a été rejetée par 104 vois contre 69. La séparation de la munition de l’équipement individuel, demandée par le démocrate chrétien genevois Jean-Claude Vaudroz et appuyée par les libéraux, a été refusé par 91 député contre 83. Le Conseil National a également estimé que le parlement devait donner son aval pour la subordination de soldats à d’autres départements, cela afin de garder un contrôle des engagements subsidiaires, notamment dans le domaine policier. Concernant le commandement, une solution plus centralisatrice que celle de la chambre haute, et se rapprochant du modèle du gouvernement, a été soutenue. Le maximum de 15% de soldats en service long a été confirmé, malgré l’opposition d’un certain nombre de députés démocrates du centre. Si la chambre basse a accepté la baisse des effectifs dans les mêmes proportions que le Conseil des Etats, elle s’est opposée, par 94 voix contre 73, à un ancrage territorial aussi poussé que celui soutenu par la chambre haute. Malgré la position régionaliste soutenue par une forte minorité bourgeoise, le modèle choisi était plus conforme aux attentes du gouvernement, concédant toutefois l’inscription d’Etats-majors de régions dans l’articulation de l’armée. Lors du vote sur l’ensemble, la révision de la loi sur l’armée a été acceptée par 101 voix contre 18 (dont 8 verts, 4 socialistes et 4 udc) et 27 abstentions (dont 19 socialistes et 5 udc) et l’ordonnance sur son organisation par 73 voix contre 6 (tous udc).
Lors du deuxième passage au Conseil des Etats, des concessions ont été faites en matière de durée de l’ER. Les sénateurs, conformément aux propositions de leur commission, se sont alignés sur le modèle défendu par le national. Alors que 2/3 des recrues devraient effectuer 21 semaines et 6 CR (par exemple dans l’infanterie ou l’artillerie), le tiers restant n’en effectuerait que 18 avec un CR supplémentaire (par exemple les troupes sanitaires ou du génie). La chambre haute a confirmé sa volonté de confier au parlement la compétence de fixer la durée du service et laissé au gouvernement le soin de déterminer quelles unités seraient soumises aux régimes long ou court. Une forte minorité, composée de socialistes et de radicaux, a maintenu son soutien aux 18 semaines. La volonté d’assurer un ancrage régional a été réaffirmée avec la demande de conserver trois des quatre Etats-majors de divisions existants (est / ouest / montagne). Le projet modulaire du conseiller fédéral Schmid, soutenu par le Conseil national, s’est, une fois de plus, heurté aux réflexes régionalistes et à la peur d’une centralisation excessive du commandement de l’armée.
Lors de la session d’automne, le Conseil national s’est rapproché, par 98 voix contre 43, du modèle défendu par la chambre haute. Si la gauche a plaidé, en vain, pour le maintien du concept gouvernemental, une majorité a soutenu l’existence de quatre Etats-majors de régions territoriales, formule plus souple que les trois Etats-majors de division proposés initialement par la chambre haute. Selon Samuel Schmid, ce compromis allait dans le sens du Plan directeur de l’armée et répondait aux exigences de la nouvelle armée. Une dizaine de divergences ont été liquidées tacitement, dont la durée de l’ER, fixée à 21 (la règle) et 18 semaines (l’exception) en fonction des armes et qui pourra être effectuée en deux périodes en fonction de critères précis.
Les deux chambres ont adopté la réforme en votation finale lors de la session d’hiver. Ce sont quatre textes qui ont été soumis au vote. Au Conseil national, la loi fédérale sur l’armée et l’administration militaire (Armée XXI - LAAM) a été acceptée par 112 voix contre 37 et 30 abstentions. Ce sont principalement des démocrates du centre, accompagnés de quelques députés de gauche (verts, socialistes et l’extrême gauche), qui ont refusé le texte. Les abstentionnistes se comptaient majoritairement dans les rangs socialistes. L’arrêté fédéral concernant l’administration de l’armée a été soutenu par 143 députés, 12 oppositions, principalement de gauche, et 3 abstentions. L’ordonnance de l’Assemblée fédérale sur l’organisation de l’armée a été avalisée par 109 députés, refusée par 32, 37 s’abstenant. Le rapport de force était comparable à celui constaté pour la LAAM. La loi fédérale sur la taxe d’exemption de l’obligation de servir n’a été combattue que par 35 députés, exclusivement socialistes ou verts, contre 125 partisans et 14 abstentionnistes, principalement socialistes. La chambre haute a approuvé les quatre textes à l’unanimité.

De 350'000 militaires actuellement, les effectifs passeront à 220'000 dont 140'000 actifs et 80'000 réservistes. Le nombre de jours de service pour les soldats passera de 300 à 260, et diminuera de manière différenciée pour les cadres. L’âge du licenciement sera abaissé à 30 ans pour les soldats, contre 42 ans actuellement. La durée de l’école de recrue augmentera de trois (à 18 semaines) ou de six semaines (à 21 semaines), selon les incorporations. La version longue concernera une majorité de conscrits et sera complétée par six Cours de répétition de 19 jours qui seront accomplis entre 21 et 26 ans. Un Cours supplémentaire est prévu pour les autres incorporations. Une nouveauté sera introduite avec la possibilité d’effectuer, pour 15% des recrues de chaque année civile et sur une base volontaire, un « service long » de 300 jours représentant la totalité du service obligatoire. La structure actuelle, basée sur les compagnies, les bataillons (ou groupes), les régiments, les brigades, les divisions et les corps d’armée, devrait être simplifiée avec la suppression des régiments et des divisions. Les bataillons (ou groupes) formeront des brigades directement soumises à des régions territoriales. Cette nouvelle structure de commandement devrait permettre, selon le Conseil fédéral, d’accroître la souplesse d’intervention grâce à la constitution de formations en fonction des engagements. Les femmes, jusqu’ici exclues des fonctions de combat, pourront désormais, toujours sur une base volontaire, accéder à toutes les fonctions.

Diverses organisations conservatrices ou d’officiers de milice ont menacé, durant toute la phase parlementaire, de lancer un référendum contre la réforme Armée XXI. C’est plus particulièrement la loi sur l’armée (LAAM) qui était visée. Le Groupe de travail des officiers de milice, la Communauté d’intérêt milice ou encore Pro Libertate (lobby des propriétaires d’armes à feu) ont régulièrement fait connaître leur opposition au projet Armée XXI. De même, le mouvement Action service actif a rappelé en milieu d’année qu’avec cette nouvelle organisation la capacité de défense autonome nationale n’était plus garantie, l’indépendance du pays menacée et le secteur alpin négligé. Cette menace a finalement été mise à exécution à peine le projet avait-il été avalisé par le parlement. Le comité était présidé par l’ancien divisionnaire Hans Wächter et comprenait de nombreuses organisations dont l’Action service actif, composée d’anciens de la Mobilisation de 39-45, les Démocrates suisses, la Communauté d’intérêt pour la milice, composée d’officiers considérant la Société suisse des officiers comme trop réformatrice, ou encore le groupe de jeunes conservateurs Young4Fun, fondé en 2001 à Winterthur.

Malgré l’absence de soutien des partis gouvernementaux, les signatures pour les référendums (armée et protection civile) ont été déposées lors de la deuxième moitié du mois de janvier. Le camp des opposants conservateurs s’est amenuisé au fil de la campagne et la gauche s’est en grande partie désintéressée de l’objet. Cette dernière s’est concentrée sur les thèmes à teneur plus sociale au menu de la votation de mai. Le camp conservateur s’est trouvé diminué par les divisions internes de l’UDC. Ce parti a finalement accepté le projet en assemblée, principalement grâce à l’engagement de son conseiller fédéral Samuel Schmid, en charge du dossier. De nombreuses sections cantonales ont toutefois rejeté Armée XXI. Quant à l’ASIN, d’ordinaire prompte à combattre tout projet de réforme de la défense nationale ou marquant une volonté d’ouverture du pays, son comité a décidé de ne pas donner de mot d’ordre et de ne pas soutenir financièrement les opposants. Le manque de moyens du principal comité opposé à la réforme (Bürgerkomitee für eine unabhängige und leistungsfähige Milizarmee in einer neutralen und sicheren Schweiz), dirigé par l’ancien divisionnaire Hans Wächter, et la difficulté de coordonner l’action des nombreux groupes le composant ont été soulignés par de nombreux commentateurs. Début avril, un « Comité fédéral pour une Suisse souveraine, neutre et démocratique », regroupement d’organisations proches des milieux conservateurs, a condamné une dérive politique vers l’OTAN et la création de dépendances techniques et organisationnelles par rapport à l’étranger. De plus, la capacité de la nouvelle armée à défendre l’intégralité du territoire a été mise en question. En fin de campagne de votation, durant la dernière semaine d’avril, un comité de parlementaires, présidé par le conseiller national Thurgovien Alexander Baumann (udc) et composé d’une dizaine de députés, est venu renforcer le camp de l’opposition. Ils ont rappelé le danger que représentait le projet pour la milice, ainsi que le risque d’aboutir à une armée à deux classes. Ils ont en outre prétendu que les coûts allaient exploser et qu’à terme c’était l’entrée dans l’OTAN qui était visée par le DDPS. Les rangs de l’opposition parlementaire étaient nettement plus réduits que lors du vote au plénum. Sur les 18 UDC qui avaient refusé le projet au parlement, ils n’étaient plus que huit dans ce comité. On y trouvait la frange la plus conservatrice du parti représentée par le Zurichois Ulrich Schlüer, accompagné du président de l’ASIN Hans Fehr, de Toni Bortoluzzi (ZH) ou encore de Christoph Mörgeli (ZH). L’unique député des Démocrates suisses, le bernois Bernhard Hess, ainsi que le représentant de l’Union démocratique fédérale, le bernois Christian Waber, s’étaient associés à cette démarche. De nombreux poids lourds de l’UDC, tels le président du parti Ueli Maurer ou Christoph Blocher, malgré leur opposition aux changements législatifs, ne figuraient pas dans ce comité, de même qu’aucun romand. Il convient de préciser que la gauche, au sein de laquelle se trouvaient certains opposants, avait d’emblée refusé d’être associée à un tel comité parlementaire.
Le conseiller fédéral Samuel Schmid, ainsi que des représentants des gouvernements cantonaux, ont lancé la campagne à l’occasion d’une conférence de presse organisée à la mi-février. Ils ont rappelé qu’Armée XXI était le meilleur compromis pour avoir une défense nationale moins chère, moderne, plus souple et répondant aux menaces de son temps. Ils ont également rappelé que la coopération internationale ne remettait pas en cause la neutralité. Ils ont souligné que la formation serait améliorée, avec des cours de répétition à un rythme annuel. De plus, l’abaissement de l’âge de libération, combiné au raccourcissement de la formation des cadres, devraient faciliter le recrutement de volontaires pour un service d’avancement. Le chef du DDPS a également défendu la réorganisation de la protection civile et estimé que la meilleure coopération entre les institutions chargées de la sécurité (polices, pompiers, services sanitaires, protection civile) justifiait le soutien aux modifications légales. Le conseiller d’Etat valaisan Jean-René Fournier (pdc), président de la Conférence des directeurs cantonaux des affaires militaires, a fait part de l’appui des 26 cantons aux deux projets de réformes, estimant qu’ils prenaient en compte la limitation croissante des ressources financières et les structures fédéralistes de la Suisse.
Un comité favorable aux réformes, intitulé « 2 x oui pour l’Armée XXI et pour la protection de la population » et fort de 116 parlementaires bourgeois, s’est présenté aux médias à la fin du mois de février. Outre les arguments de l’efficacité et de la modernité, les avantages de la réduction des jours de service pour les vies familiales et professionnelles ont été mis en exergue. La capacité de cette nouvelle structure à faire face aux nouvelles menaces (terrorisme, extrémisme) a également été invoquée. Les délégués du parti socialiste ont recommandé de voter blanc à la réforme Armée XXI. Trois sections cantonales ont cependant accepté Armée XXI (Fribourg, Neuchâtel, Thurgovie). L’Assemblée des délégués de l’UDC s’est laissée convaincre par son conseiller fédéral Samuel Schmid, même si elle n’a accepté la réforme de l’armée que de justesse (165 voix contre 161). Douze sections cantonales et les Jeunes UDC se sont en outre opposés à la réforme de l’armée. Le PRD et le PDC ont recommandé l’approbation des projets. Au sein du parti écologiste, les délégués se sont montrés plus réceptifs aux changements proposés, alors que le groupe parlementaire avait nettement refusé le texte (8 non et une abstention), et ont recommandé de voter blanc. La composition du comité référendaire, principalement des personnalités conservatrices et des officiers à la retraite, a poussé les écologistes à ne pas rejoindre le camp des opposants. Concernant la loi sur la protection de la population, les prises de position des partis et associations ont peu varié par rapport à celles sur Armée XXI.
Les deux réformes ont été largement soutenues par la population et par l’unanimité des cantons. Celle de l’armée a été acceptée par 76% des votants. Celle de la protection de la population l’a été encore plus largement avec 80% d’approbation. Cette dernière n’a été que marginalement présente dans le débat. Bien que la majorité des cantons n’était pas requise, le résultat illustre le large soutien populaire aux réformes, même dans les cantons considérés comme plus conservateurs. Les cantons de Berne, Fribourg, Vaud et Neuchâtel ont été les plus enthousiastes et ont accepté Armée XXI à plus de 80% alors qu’Uri (63% de oui), Schaffhouse (62%) et Schwyz (60%) ont été les plus sceptiques. La plus forte résistance constatée dans les cantons périphériques peut s’expliquer par les conséquences de la réorganisation de l’armée. La fusion de places d’armes, la centralisation des arsenaux ou l’affaiblissement de l’ancrage territorial des troupes étaient de nature à les rendre méfiants. L’ancien divisionnaire Hans Wächter, responsable du principal comité d’opposants, a estimé que c’était la fin de la Suisse « telle que nous la connaissons ». Le conseiller national UDC thurgovien Alexander Baumann, chef de fil du comité parlementaire défavorable aux réformes, a fustigé la propagande d’Etat, à hauteur de plusieurs millions de francs, menée par le DDPS. Ce dernier a répliqué que l’information aux soldats aurait également été faite sans référendum. De nombreux commentateurs ont souligné l’importance de l’engagement de Samuel Schmid dans la campagne. Par la sobriété de ses interventions et sa capacité à convaincre les régions périphériques qu’elles ne seraient pas les grandes perdantes de ces changements, le ministre de tutelle est parvenu à neutraliser bon nombre d’oppositions.


Modification de la loi sur l’armée et l’administration militaire. Votation du 18 mai 2003.

Participation: 50%
Oui: 1 718 452 (76,0%)
Non: 541 577 (24,0%)

Mots d'ordre:
– Oui: PDC, PRD, UDC (12*), PCS, PEV, PL; Economiesuisse, USP, UCAPS, USAM, USS.
– Non: DS, PSL, UDF, PdT.
– Blanc: PS (3*), PE.
– Liberté de vote: Lega.
– Pas de mot d’ordre: CSC.
* Recommandations différentes des partis cantonaux.


L'analyse VOX a montré que même les sympathisants de l’UDC ont majoritairement soutenu les réformes et accepté celle de l’armée à 64% et de la protection de la population (71%). Les sympathisants des autres partis gouvernementaux l’on fait encore plus nettement : 77% d’approbation d’Armée XXI par les socialistes (81% pour la protection de la population) contre 87% par les radicaux (88%) et 91% par les démocrates-chrétiens (93%). Au niveau des caractéristiques sociales et politiques ayant joué un rôle dans l’orientation du vote, le clivage entre défenseurs de valeurs modernistes ou traditionalistes s’est révélé significatif. Les citoyens estimant défendre une Suisse moderne ont accepté Armée XXI à 83% (86% pour la protection de la population) alors que ceux se réclamant d’une Helvétie gardienne des traditions ne l’ont fait qu’à 63% (68%). Le critère de la confiance dans le gouvernement semble également avoir eu un impact sur le niveau de soutien aux projets. Contrairement aux scrutins précédents sur l’armée, la ligne de conflit entre ses opposants et ses partisans ne semble pas avoir joué de rôle, les niveaux de soutien des deux camps étant très proches. Les commentateurs ont estimé que la nature des objets permettait de comprendre le peu de différences. La question ne concernait ainsi pas l’existence de l’institution mais uniquement le maintien d’une structure, l’Armée 95, jugée dépassée par les deux camps.

Révision de la loi fédérale sur la protection de la population et sur la protection civile (MCF 01.062)

Dossier: Revisionen der Zivilschutzgesetzgebung

Dans la foulée des restructurations d’«Armée XXI», Adolf Ogi a levé le voile sur le nouvel aspect de la protection civile. Celle-ci passera dès 2003 d’environ 300'000 à 120'000 hommes, avec une responsabilité accrue de la part des cantons. Alors que le débat avait parfois laissé présager de l’introduction du libre choix entre l’armée et la protection civile, la priorité restera aux besoins de l’armée, l’obligation de servir demeurant inscrite dans la Constitution. Le recrutement se fera conjointement pour les deux: la protection civile pourra ainsi être effectuée dès 20 ans, et la limite d’âge s’abaissera de 50 à 40 ans. 6000 personnes devront être trouvées chaque année pour accomplir ce service, dans un nouveau réseau plus vaste de «protection de la population» où les cantons joueront un rôle essentiel. Les gestions des catastrophes et autres situations d’urgence devront être intégrées aux cahiers des charges des corps de police et de sapeurs-pompiers cantonaux, et la Confédération jouera un rôle subsidiaire. Sa participation financière pourrait ainsi se réduire à moins de CHF 100 millions par année.

Le gouvernement a accepté le projet de réforme de la protection civile (PC), de ses structures et de ses priorités. Le texte, qui doit encore être agréé par le parlement, prévoit une réduction des dépenses d’environ 30% par rapport aux chiffres de 1998, soit un budget annuel passant de CHF 400 millions à 276 millions. Les effectifs de la PC subiront eux aussi une cure d’amaigrissement: ceux-ci devraient se stabiliser à 120'000 personnes, au lieu des 270'000 astreints en 2001. Cette réduction pourra s’effectuer principalement grâce à l’abaissement parallèle de la limite d’âge (40 ans au lieu de 50). En outre, les personnes ayant achevé leurs obligations militaires ne seront plus affectées à la PC. Un recrutement commun de deux jours sera réalisé avec l’armée. Sur les plus de 30'000 hommes qui passent chaque année cette étape, environ 6000 seront affectés à la protection civile, sans que cette option ne découle d’un libre-choix: le service militaire reste obligatoire, de même que la construction d’abri antiatomiques dans les immeubles.
Au niveau de l’organisation et des priorités, le nouveau texte réglemente en détails la collaboration entre les cinq organisations engagées dans des situations de crise : la police, les sapeurs-pompiers, les services de la santé publique, les services techniques et enfin la PC. La Confédération coordonne ces services, et demeure responsable en cas de guerre, de danger atomique ou d’épidémie. Les cantons assument leurs engagements en cas de catastrophes et autres situations d’urgence, perspectives sur lesquelles la réforme met un accent particulier. Elle fait ainsi passer les cantons en première ligne dans le domaine de la protection des populations, nouveauté qui s’accompagne aussi d’un changement dans la répartition des coûts: sur les CHF 276 millions prévus, 200 millions devraient être à la charge des cantons. Réunie en fin d’année, l’Union suisse pour la protection civile a fait part au gouvernement de ses craintes vis-à-vis de cette réforme.

Le système de protection de la population, qui consiste en une coordination de l’action de cinq types d’organisations partenaires (police, sapeurs-pompiers, santé publique, services techniques comme l’eau ou l’électricité et protection civile), a été réformé parallèlement à l’armée. Se basant sur le rapport sur la politique de sécurité de 1999, le gouvernement a estimé que les changements géostratégiques des années 90 avaient rendu la perspective d’une guerre improbable. Le nouveau système a, par conséquent, été conçu pour gérer des catastrophes ou des situations d’urgence. Dans un premier temps, les deux chambres ont accepté, sans trop de discussions, le Plan directeur de la protection de la population (MCF 01.066) définissant les grands axes de la réforme. Bien que déplorée par la gauche, qui a invoqué la tendance européenne, l’obligation de servir a été confirmée, de même que l’obligation de construire des abris de protection civile, contestée par la socialiste bernoise Simonetta Sommaruga. L’obligation de payer des indemnités pour utiliser les abris publics a été maintenue. Cette redéfinition des priorités n’a pas été aussi controversée que la réforme de l’armée, malgré l’apparition de divergences mineures entre les deux chambres. Au final, les principaux changements concernaient la baisse des effectifs (de 280'000 à 120'000 hommes que l’on pourrait augmenter en cas de conflit armé), une durée du service obligatoire plus courte (de 50 ans à 40 ans), la libération de militaires ayant déjà accompli leur service, un recrutement centralisé commun avec l’armée de 2 à 3 jours (sans que les conscrits puissent cependant choisir), une instruction de base de 2 à 3 semaines (au lieu de 5 jours). La loi sur la protection de la population et sur la protection civile (LPPCi), a été acceptée en votation finale à l’unanimité par la chambre haute (44 voix). Au national, 156 conseillers nationaux ont soutenu la réforme, un parlementaire s’y est opposé et 26 se sont abstenus, essentiellement des socialistes et des verts. C’est à fin novembre qu’un comité bourgeois, dont certains membres appartenaient aussi à celui contre la réforme de l’armée, a annoncé le lancement d’un référendum contre la loi. Il estimait notamment que cette nouvelle réglementation ne répondait pas aux menaces actuelles pesant sur la population. Les attentats de New York du 11 septembre 2001 auraient notamment montré que le risque de conflit armé existait et qu’aux guerres conventionnelles, aux dangers du terrorisme, aux catastrophes s’ajoutaient désormais le risque d’attaques biologiques et l’utilisation de l’arme nucléaire dans certaines régions du globe.

Loi fédérale sur la protection de la population et sur la protection civile. Votation du 18 mai 2003.

Participation: 50%
Oui: 1 829 339 (80,6%)
Non: 441 498 (19,4%)

Mots d'ordre:
– Oui: PDC, PRD, UDC (12*), PS, PE, PCS, PEV, PL, UDF, Lega; Economiesuisse, USP, UCAPS, USAM, USS.
– Non: DS, PSL.
– Liberté de vote: PdT(1*).
– Pas de mot d’ordre: CSC.
* Recommandations différentes des partis cantonaux.

La loi fédérale sur la protection de la population et sur la protection civile (LPPCi), largement approuvée par le peuple suisse lors du scrutin du 18 mai 2003 (80,6% de oui), est entrée en vigueur le 1er janvier 2004. L’introduction de cette révision implique un certain nombre de changements au niveau de l’organisation même de la protection civile. Parmi les principales réformes introduites, une diminution des effectifs, qui passent d’environ 280'000 personnes à un maximum de 120'000, l’âge limite pour l’obligation de servir qui est ramené de 50 à 40 ans, et le recrutement. Pour ce dernier, l’incorporation n’est plus séparée d’avec la journée de recrutement de l’armée, mais se déroule désormais en commun avec l’armée sur 2 à 3 jours. Avec cette révision, les militaires libérés ne sont en outre plus obligés de servir dans la protection civile.

Introduction d'un service long à l'armée

En prémisse à la réforme, une première expérience pilote de service long a démarré en été. Les 210 volontaires ont passés un semestre d’instruction à Savatan (VS), avant de rejoindre Coire (GR) pour un entraînement de quatre mois sur le terrain. Le DDPS table sur un contingent de 3000 volontaires engagés dans ce service dès 2003, afin de pouvoir disposer d’une force permanente de soldats prêts à participer aux multiples opérations d’aide en cas de catastrophe ou d’assistance à la population.

Création du détachement de reconnaissance de l’armée (DRA) dans le cadre de la réforme Armée XXI

Dans le cadre d’Armée XXI, l’Etat major a annoncé son intention de constituer une unité d’élite chargée, en temps de paix, de secourir des Suisses à l’étranger et d’effectuer des opérations de reconnaissance sur le terrain. En temps de guerre, ce corps de plusieurs dizaines d’hommes – mais inférieur à cent – serait chargé d’opérations derrière les lignes ennemies, comme le marquage d’objectifs pour avion. Cette unité spéciale, qui accompagnerait l’approbation d’Armée XXI, aurait pour nom «détachement de reconnaissance de l’armée» et impliquerait pour les volontaires une formation spéciale de 18 mois à Isone (TI).

En avril de l’année sous revue, la délégation de sécurité (chefs du DDPS, des Affaires étrangères et du Département de justice et police) a donné son aval à la création d’une troupe d’élite de l’armée, le Détachement de reconnaissance de l’armée ou DRA. Les premiers soldats doivent débuter leur formation le 1er juillet 2005 et une première troupe pourra être opérationnelle à partir de 2007. Le DRA devrait être complet en 2011.

Révision de la loi sur le service civil (LSC) (MCF 01.060)

Le Conseil fédéral a transmis aux Chambres sa proposition pour la révision de la loi sur le service civil, dont la modification majeure concerne une notable réduction de sa durée: de 1.5 fois la période du service militaire, l’engagement civil passera à 1.3 fois, soit 390 jours d’affilée au lieu de 450. Le projet du gouvernement, ratifié en fin d’année par la commission de sécurité du Conseil national, conserve avant tout à ce service la notion de «remplacement», en réaction à l’initiative parlementaire déposée par Ursula Wyss (ps, BE) (Iv.pa. 01.406) demandant la prise en considération égale de l’engagement militaire et civil, dès lors équivalents dans leur durée (300 jours) et soumis au libre choix de l’appelé. Cette initiative a été refusée par la Chambre du peuple par 93 voix contre 52. Dans son texte, le gouvernement maintient ainsi l’existence des commissions indépendantes chargées de déterminer la sincérité des motivations, pour des causes éthiques, politiques ou religieuses.

Le débat sur la révision de la loi sur le service civil (LSC) s’est également inscrit dans le projet de la réforme de l’armée, les modifications de la loi sur l’armée et l’administration militaire (LAAM) ayant, par exemple, des répercussions sur la LSC. L’entrée en matière a été acceptée lors de la session de printemps, par 132 voix contre 27, malgré la proposition du zurichois Ulrich Schlüer (udc) de ne pas ouvrir la discussion. Le débat n’a finalement pas eu lieu au national car une coalition hétérogène a soutenu la demande de Roland Wiederkehr (adi, ZH), allant dans le sens des arguments développés par la gauche, de renvoi en commission (98 voix contre 63). Tous les socialistes (45) et verts (10) présents, une grande partie du groupes UDC (27), les évangéliques et indépendants (5), sept démocrates-chrétiens et un radical ont soutenu ce renvoi. La nature du soutien n’était toutefois pas la même. Si l’opposition de l’UDC en était une de principe, les émules d’Ulrich Schlüer estimant que la loi en vigueur était suffisante, la gauche demandait une remise en question fondamentale du système d’admission. La proposition de renvoi donnait en effet mandat à la commission compétente de revoir le projet et d’accorder la priorité à la « preuve par l’acte » dans la procédure d’admission. Ce changement de système se rapprocherait du libre choix dans la mesure où l’audition personnelle, qui doit permettre de déterminer si l’individu est objecteur de conscience au sens de la loi, serait remise en question. Le projet du Conseil fédéral ne prévoyait ni la « preuve par l’acte », ni le libre choix.
La Commission de la politique de sécurité du national s’est ensuite exprimée pour une durée du service civil 1.5 fois supérieure à celle du service militaire. Une minorité de gauche et le Conseil fédéral ont défendu un coefficient moindre de 1.3. La CPS a également refusé de supprimer l’examen de conscience. Pour la majorité, l’accomplissement du service civil ne pouvait pas découler d’une simple décision administrative et une évaluation des motivations s’imposait. Pour une minorité, la preuve par l’acte permettrait un traitement plus rapide et moins coûteux des cas. Plus généralement, une majorité de la commission a estimé qu’il était inutile d’alourdir la réforme de l’armée, déjà attaquée par un référendum, avec un changement de système au niveau du service civil. Le Conseil national a suivi sa commission sur le coefficient de rallongement, par 88 voix (dont 40 udc, 28 radicaux, 13 pdc, 5 pl) contre 82 (dont dont 51 ps, 14 pdc, 2 prd, 8 pe) et le maintien de l’examen de conscience par 86 voix (dont 37 udc, 32 prd, 12 pdc, 5 pl) contre 82 (dont 49 ps, 16 pdc, 10 pe). Au vote sur l’ensemble, 92 voix favorables contre 56, une nette différence gauche droite s’est dessinée, les démocrates du centre accompagnés des radicaux et des démocrates chrétiens ont fait face aux socialistes accompagnés des verts.

La Conseil des Etats, en tant que deuxième conseil, a examiné la loi sur le service civil (LSC) lors de sa session de printemps. Après une entrée en matière sans opposition, le plénum, en suivant sa commission, s’est aligné sur le Conseil national. Le seul point qui ait donné lieu à une discussion concernait la durée du service civil, que le Conseil national avait voulu maintenir à 1.5 fois la durée du service militaire. Une minorité, emmenée par la radicale Langenberger (VD) et le socialiste Béguelin (VD), a toutefois proposé de revenir à la solution du gouvernement et de passer à un coefficient de 1.3. Ils ont avancé, sans succès, des arguments concernant la pénibilité du service civil. Ils ont estimé qu’on ne devait pas la sous-estimer, prenant l’exemple de l’exercice de tâches d’encadrement de personnes. Ils ont également souligné sa meilleure compatibilité avec les exigences économiques. Le radical bâlois Hans Fünfschilling a rappelé qu’avec le maintien de l’examen du conflit de conscience, la preuve par l’acte n’était plus nécessaire et un rabaissement à 1.3 lui semblait sensé. Ces arguments n’ont convaincu que 13 députés contre 27 favorables au maintien du 1.5 déjà entériné par le Conseil national. Ce dernier a ensuite confirmé sa position et ainsi formellement aplani les divergences. Au vote final, alors que le texte a été accepté par 35 voix sans opposition au Conseil des Etats, le clivage gauche-droite a été très clair au National. Les 169 voix favorables au projet provenaient des rangs bourgeois, alors que l’opposition (67 voix) se composait principalement d’élus roses-verts (52 ps, 10 pe).

L’Organe d’exécution du Service civil, rattaché au DFE, a précisé les principaux changements consécutifs à l’entrée en vigueur de la nouvelle loi et des ordonnances, prévue en 2004. La première conséquence devait être la libération du service, à la fin de l’année sous revue, pour environ 3000 personnes qui auront atteint 30 ans révolus au 1er janvier 2004. Dans le sillage de la réduction de la durée du service militaire, celle du service civil va aussi être revue à la baisse. Avec l’ouverture de sept centres régionaux (Lausanne/VD, Mels/SG, Nottwil/LU, Rivera/TI, Rüti/ZH, Sumiswald/BE, Windisch/AG) sur les emplacements des centres de recrutement de l’armée, la coordination entre les deux systèmes devrait être accrue. Une audition des requérants pourra ainsi déjà avoir lieu pendant le recrutement. Concernant les affectations, une plus grande liberté pour la planification des affectations sera donnée aux civilistes. Ils devront toutefois effectuer une affectation de longue durée (180 jours) dans le cadre de programmes prioritaires relevant de domaines comme les soins, l’encadrement de personnes ou de la protection de l’environnement. Les domaines prioritaires ne sont toutefois pas définitivement fixés. Cette limitation du choix des affectations avait été critiquée par les milieux concernés. Ainsi des civilistes, soutenus par une centaine d’organisations, se sont opposés, à la fin du mois de novembre, à la généralisation de programmes prioritaires. C’est lors d’une conférence de presse qu’ils ont évoqué les risques inhérents à l’entrée en vigueur de la nouvelle loi et de ses ordonnances d’application. Ils y voyaient une concurrence pour les personnes actives dans ces domaines. De plus, ils craignaient que les grandes institutions comme les hôpitaux universitaires n’absorbent des centaines de civilistes, au détriment des petites organisations.

Liquidation de grandes quantités de matériel militaire dans le cadre de la réforme Armée XXI

Le chef du DDPS a annoncé en septembre la liquidation, échelonnée dans le temps, de grandes quantités de matériel militaire. Il a lié ces mesures au projet Armée XXI. La baisse des effectifs découlant de la réforme ne signifierait pas une baisse des coûts mais nécessiterait une réallocation des ressources à disposition du département selon Samuel Schmid. Le parc de véhicules blindés devra être réduit, ainsi que la flotte de l’armée de l’air. Le principal moyen envisagé pour se débarrasser de ce matériel devenu superflu est sa vente. Cette mission, confiée au Groupement de l’armement devrait toutefois, selon les autorités, s’avérer être difficile à accomplir sur un marché saturé. En terme d’emplois, il est prévu de supprimer 2000 places. Cette réduction devrait permettre une baisse de 20% des coûts en matière de personnel. Afin d’éviter tout licenciement, les emplois seront progressivement supprimés jusqu’en 2010. Des mises à la retraite anticipée ou des aides à la reconversion sont également prévues. Le département espère à l’horizon 2007 économiser environ 100 millions de frais d’exploitation par an, montant dès lors disponible pour des investissements.

Nomination de Christophe Keckeis au poste de chef de l’armée

Dossier: Chefs der Armee

Le nouveau chef de l’armée a été désigné à la fin du mois d’octobre. Il s’agit du divisionnaire Christophe Keckeis, commandant remplaçant des Forces aériennes. Ce parfait bilingue a été choisi parmi les 12 candidats (sur 18 au total) au terme d’un procédure de sélection que Samuel Schmid a tenu à diriger personnellement. Avant la mise en œuvre intégrale d’Armée XXI, il occupera la tête de l’Etat-major général en remplacement de Hans-Ulrich Scherrer. Cette nouvelle fonction de chef de l’armée n’existera en effet qu’avec la réalisation de la réforme de l’armée. Sa principale tâche sera, dans un premier temps, de veiller à son bon déroulement. Hiérarchiquement, il sera placé juste en-dessous du chef de département et devra notamment faire le lien entre l’armée et la politique, cette dernière ayant le dernier mot. Sous ses ordres se trouveront en revanche les Forces aériennes et terrestres, l’instruction supérieure des cadres, la base logistique de l’armée, l’état-major de planification et celui de conduite.

Révision du code pénal militaire (MCF 02.081)

C’est en novembre que le Conseil fédéral a publié le message relatif au projet de révision du code pénal militaire (CPM) consacré aux dispositions concernant les fautes de discipline. Les principales innovations concernent l’introduction d’un nouveau catalogue de mesures disciplinaires, la prolongation des délais régissant la prescription de la poursuite et la prescription de l’exécution, et enfin la définition plus précise de la faute disciplinaire. L’introduction de la privation de sortie et de l’amende disciplinaire élargissent l’éventail des mesures et devraient permettre l’application de sanctions plus appropriées et plus efficaces. Ces premières modifications depuis 1979 permettront aussi d’adapter ce régime de sanctions à la réforme Armée XXI et à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’Homme.

Dans sa réponse à une interpellation du conseiller national Salvi (ps, VD), le Conseil fédéral a estimé que le système d’amendes disciplinaires introduit en mars 2004 fonctionnait de manière satisfaisante, et qu’il n’était par conséquent pas question de le supprimer. Pour le gouvernement, la palette des sanctions est mieux adaptée et le droit des soldats à recourir garanti. À la fin de l’année sous revue, soit un peu moins de deux ans après l’introduction de ces sanctions disciplinaires, des amendes pour près d’un demi-million de francs ont déjà été infligées aux soldats.

Licenciements et nouveau concept de «stationnement de l’armée» suite aux restrictions budgétaires imposées dans le cadre de la réforme Armée XXI

C’est à la fin du mois de mai, après la votation populaire, que le chef de l’Etat-major Christophe Keckeis a annoncé l’impact des restrictions budgétaires imposées par la Confédération. Cette diminution des moyens, de CHF 4.3 milliards à 4 milliards selon des estimations, allait particulièrement toucher la formation, avec une diminution du nombre des instructeurs professionnels (de 5300 prévus à 4500). Il a également estimé que ces économies ne pourraient se faire sans licenciements, malgré le gel des engagements et de nombreuses mises à la retraite anticipée.

Début juin, le DDPS a annoncé que des mesures d’économie l’obligeaient à renoncer à la mise à la retraite anticipée de plus de 100 collaborateurs âgés de 58 et 59 ans. Cette décision touchait le personnel du Corps des gardes-fortifications, des Forces aériennes et de l’Office fédéral des exploitations des Forces terrestres. A la mi-juillet, le département a fait volte-face et a annoncé que 40 collaborateurs âgés de 58 ou 59 ans allaient finalement obtenir leur retraite anticipée. Ces autorisations ont été accordées à titre exceptionnel et pour résoudre des cas difficiles, les autres devant être réexaminés en 2004. Une enquête interne, dirigée par l’ancien chef de l’Etat-major général Arthur Liener, a par ailleurs été chargée de déterminer les causes de ces dysfonctionnements. Le conseiller fédéral Samuel Schmid s’est excusé personnellement auprès des personnes touchées et a déploré que toutes les mises à la retraite annoncées ne puissent finalement pas être accordées. Les conclusions de l’enquête interne ont été livrées à la fin du mois d’août de l’année sous revue. Sur les 132 cas de retraites anticipées, 92 n’étaient pas justifiés. Il ressort de ce document que les changements organisationnels intervenus au début de l’année sous revue, principalement en vue de la mise en œuvre de l’Armée XXI, ont certainement eu une influence néfaste dans le domaine du personnel.

Le budget initial de CHF 4.3 milliards prévu pour le lancement d’ « Armée XXI » étant passé finalement en dessous de la barre des 4 milliards, le DDPS a confirmé en début d’année sa décision de réduire drastiquement les effectifs du personnel dans plusieurs domaines d’activités de l’armée. Ces mesures concernent environ 2500 postes du domaine de la défense d’ici à 2010. La réduction du personnel concerne trois niveaux : l’infrastructure de l’instruction (lieux de recrutement, occupation et utilisation de places d’armes et de tir, emplacements de commandements), l’infrastructure de l’engagement (exploitation d’aérodromes, installations de conduite et de transmission en surface ou souterraines) et l’infrastructure de la logistique (arsenaux, PAA, magasins de matériel, installations de la logistique souterraines, hôpitaux militaires). Le 6 décembre, le DDPS a présenté son concept de « stationnement de l’armée », qui prévoit un plan de réduction drastique de l’infrastructure militaire, et notamment d’aérodromes, d’arsenaux et de places de tir. Les fermetures et les licenciements consécutifs de personnel permettront ainsi, selon les estimations du département, de réduire annuellement les dépenses en matière de personnel d’au moins CHF 100 millions d’ici à fin 2007 et d’environ 240 millions d’ici à fin 2010. Si les cantons touchés par ces mesures ont la possibilité de prendre position par écrit jusqu’à début février 2005, leur marge de manœuvre reste cependant très étroite. Le DDPS communiquera ensuite, vers le milieu de l’année 2005, sa décision définitive aux cantons et la procédure du plan sectoriel sera alors engagée. L’approbation définitive de ce plan sectoriel militaire par le Conseil fédéral est planifiée pour l’année 2006.

Suite à la présentation par le DDPS, fin 2004, du nouveau concept de « stationnement de l’armée » prévoyant un plan de réduction drastique de l’infrastructure militaire, et notamment du nombre d’aérodromes, d’arsenaux et de places de tir, de vives réactions sont apparues lors de la procédure de consultation qui courait jusqu’au début du mois de février 2005. La majorité des critiques ont toutefois émané des cantons alémaniques – les cantons romands étaient en effet plus ou moins d’accord avec la version du concept de stationnement présentée en décembre 2004 –, dont plusieurs gouvernements des cantons concernés par les adaptations structurelles (parmi eux Glaris, les Grisons, Obwald, Thurgovie, Uri et Zurich). Choqués par la volonté du DDPS de fermer les aérodromes militaires de Dübendorf (ZH) et d’Alpnach (OW), officiers des forces aériennes zurichoises et hommes politiques alémaniques, dont les conseillers nationaux UDC Max Binder (ZH) et Roland Borer (SO), ont vivement protesté contre cette décision, qui aurait, selon eux, de graves conséquences au niveau des capacités d’engagement aérien en Suisse orientale. Ces personnes ont en outre présenté une alternative au projet du DDPS, qui prévoyait le maintien de l’aérodrome de Dübendorf et de celui d’Alpnach.

Malgré les vives oppositions rencontrées, la CPS-CN s’est prononcée en faveur du nouveau concept de stationnement de l’armée. La commission, consciente du fait que de nombreux emplois disparaîtraient avec la mise en œuvre de ce dernier (2500 emplois d’ici 2010), a cependant déclaré que cela était le prix à payer pour le maintien d’une armée performante. De leur côté, les conseillers aux Etats Hermann Bürgi (udc, TG) et Philipp Stähelin (pdc, TG), de même que les conseillers nationaux thurgoviens UDC Alexander Baumann, Peter Spuhler et Hansjörg Walter, se sont mobilisés en faveur du maintien de la place d’armes de Frauenfeld (TG). Plus de 15'000 personnes ont signé une pétition contre cette fermeture.

La fronde à l’encontre des adaptations structurelles induites par le nouveau concept de stationnement de l’armée élaboré par le DDPS n’a pourtant pas faibli suite à cela, bien au contraire. Le chef du DDPS, le conseiller fédéral Samuel Schmid, a fini par accepter un certain nombre de concessions et de compensations (souvent accordées pour sauver des emplois), notamment dans les cas de l’aérodrome d’Alpnach, de l’arsenal de Coire et de la place d’armes de Frauenfeld, entre autres.

Au mois de juillet, le DDPS a approuvé le nouveau concept de stationnement de l’armée. Il a en outre déclaré être d’accord pour apporter des aménagements à celui-ci, en tenant compte des revendications des cantons de Suisse centrale et de Zurich. Une large consultation aura lieu au début de l’année 2006, avant que le Conseil fédéral ne se prononce définitivement. Samuel Schmid a cependant précisé que le nombre de suppressions d’emplois ne diminuerait pas, et que les postes épargnés à certains endroits seraient compensés ailleurs.

Le conseiller national Max Binder (udc, ZH) a déposé en fin d’année une initiative parlementaire, qui demandait au parlement de faire de nouvelles propositions pour optimiser le nouveau concept de stationnement des Forces aériennes, en tenant compte en particulier du site de Dübendorf (ZH).

Modifications au niveau de la structure des troupes dans le cadre de la réforme Armée XXI

Dans le sillage de l’acceptation du rapport « Evaluation de l’information de la Confédération en situation de crise », le Conseil fédéral a proposé de dissoudre l’Etat-major du Conseil fédéral DIPRA (Division Presse et Radio) et l’Etat-major Centrale d’information du Conseil fédéral. Le gouvernement a estimé qu’en considérant les nouvelles menaces internationales et l’évolution des médias, le remplacement des médias civils par des structures militaires n’était plus nécessaire. Il a cependant précisé qu’une convention de prestation allait être signée avec la SSR pour s’assurer l’usage de la radio, afin de s’adresser à la population en cas de nécessité.

La réforme de l’armée a introduit un certain nombre de modifications au niveau de la structure même des troupes. Le 27 octobre de l’année sous revue, le Conseil fédéral a décidé de dissoudre deux états-majors de milice, la Division presse et radio de l’armée (DIPRA) et la Centrale d’information de la Chancellerie fédérale (CEN INFO), faisant ainsi suite à une proposition faite en 2003. Cette suppression a été effective à la fin de l’année 2004.

Réforme du système de recrutement

Le nouveau système de recrutement a été appliqué pour la première fois à la mi-janvier à Mels (SG). Encore programmé sur deux jours jusqu’à la fin de l’année sous revue, au lieu d’un seul précédemment, il en durera trois dès 2004. L’accent est mis sur une procédure de sélection permettant de fortement diminuer le taux de personnes déclarée inaptes durant les premières semaines de l’école de recrue. Cette proportion a atteint 20% dans les années nonante. L’objectif des autorités est de le faire descendre à 5%. Son introduction ne dépendait pas de l’acceptation de la réforme par le souverain dans la mesure où le nouveau système était également compatible avec l’ancienne législation. Les appelés doivent subir de nombreux tests élaborés en collaboration avec la division de psychologie appliquée de l’Université de Zurich. Les plus de 650 questions se divisent en douze catégories dont les ressources psychologiques, l’intelligence, la compréhension de textes, la logique ou encore la motivation. Un examen médical, ainsi que des épreuves sportives, font également partie de cette procédure. Avec un tel système, l’armée espère pouvoir mieux déterminer les aptitudes des personnes pour les différentes fonctions. Après trois jours, ces personnes seront incorporées dans l’armée, admises au service civil (voir infra) ou considérées comme inaptes. Six autres centres de recrutement ont vu le jour : Lausanne (VD), Nottwil (LU), Rivera (TI), Rüti (ZH), Sumiswald (BE) et Windisch (AG). L’ancien recrutement était organisé par les cantons. De nombreuses organisations de jeunesse se sont insurgées contre la teneur très intime de certaines questions, notamment relativement au comportement sexuel, aux opinions politiques ou à la prise de stupéfiants. Le DDPS a indiqué qu’indépendamment de cette polémique, il avait l’intention de modifier le questionnaire controversé en raison de sa publication sur Internet, rendue possible par un centre bernois de conseil aux objecteurs de conscience. Cet accès public aurait fait perdre de sa pertinence au test et nécessitait sa reformulation.

Cérémonie de passage d’Armée 95 à Armée XXI

C’est à la mi-décembre de l’année sous revue que la cérémonie de passage d’Armée 95 à Armée XXI a eu lieu à Berne. Le Comandant de Corps Christophe Keckeis, chef désigné de l’armée, s’est vu remettre le fanion des mains du conseiller fédéral Samuel Schmid. Au nombre de 10'000, des représentants des autorités civiles et militaires, mais également de simples citoyens, se sont réunis pour assister, en musique, au lancement de cette réforme.

C’est au 1er janvier 2004 qu’est entrée en vigueur la réforme de l’armée « Armée XXI », succédant à « Armée 95 ». La cérémonie organisée à l’Arena de Berne le 16 décembre 2003 pour fêter ce passage a finalement coûté moins cher que prévu. Les coûts se sont élevés à CHF 990'000 et les recettes ont presque atteint les 820'000 (un don de CHF 600'000 effectué par le Don national suisse étant compris dans ce montant), alors que le budget initial prévoyait CHF 1'200'000 de dépenses et CHF 400'000 de recettes.

Nouvelle formation d’intervention pour l’aide en cas de catastrophe

La nouvelle Formation d’intervention pour l’aide en cas de catastrophe, crée également dans le cadre de la réforme « Armée XXI », est entrée en fonction à la mi-juillet. Elle remplace le régiment d’aide en cas de catastrophe et plusieurs régiments de sauvetage d’ « Armée 95 ».

Modifications de l’organisation de l’armée et de la loi fédérale instituant des mesures destinées à améliorer les finances fédérales («Etape de développement 2008/11 de l’armée») (MCF 06.050)

En mai, le Conseil fédéral a donné son accord à la mise en œuvre des mesures proposées par le DDPS en vue d’adapter les priorités pour l’armée, et d’optimiser de ce fait la réforme de cette dernière, engagée en 2004 (« Armée XXI »). Prévues pour entrer pleinement en vigueur à partir de 2008, ces diverses mesures ont été rendues nécessaires, selon le DDPS, par l’évolution des menaces – le terrorisme étant une menace réelle, alors que la probabilité qu’une guerre classique éclate en Europe est peu probable – et la réduction des moyens financiers mis à sa disposition. Le déplacement des priorités se fera au profit des engagements de sûreté (protection d’ouvrages, de bâtiments ou d’axes, engagements dans les secteurs-frontière), ce qui permettra notamment d’affecter les unités formées pour ces opérations de sûreté aux engagements en faveur des autorités civiles (protection de conférences, tâches de surveillance). À ce titre, les capacités consacrées à la défense militaire classique du territoire seront à l’avenir réduites de moitié : seuls 18'000 soldats se concentreront en effet désormais sur cette tâche. Malgré l’adaptation des priorités de l’armée, le conseiller fédéral Samuel Schmid, chef du DDPS, a précisé que les missions de celle-ci ne changeaient pas, son but restant la défense du pays. Il a ajouté que les effectifs totaux de l’armée seront maintenus à 220'000 hommes, répartis entre 120'000 actifs, 20'000 recrues et 80'000 réservistes. Le système de milice, tout comme l’obligation de servir sont en outre conservés. Dans la ligne des efforts menés jusqu’alors au niveau de la politique de sécurité, l’armée devra également pouvoir engager simultanément 500 militaires pour des opérations de maintien de la paix à l’étranger à partir de 2008. Ce remaniement de l’armée doit entraîner, selon les estimations du DDPS, des économies d’environ CHF 150 millions par année, l’augmentation des effectifs affectés à des missions de maintien de la paix engendrant de son côté des coûts supplémentaires de l’ordre de CHF 35 à 45 millions par an. Le Conseil fédéral a toutefois dû constater que les économies ainsi réalisées étaient insuffisantes pour atteindre les objectifs du programme d’allégement budgétaire 2004, qui demandait 145 millions d’économies supplémentaires. Le DDPS a communiqué que celles-ci seraient donc réalisées dans les investissements. Dans le cadre de cette redéfinition des priorités de l’armée, Samuel Schmid a cependant averti que l’armée aurait toujours besoin de CHF 4 milliards par année. Dans le cas contraire, le conseiller fédéral a averti qu’il faudrait revoir les missions de celle-ci, ses effectifs ou encore son niveau technologique. D’un point de vue juridique, les mesures prises par le Conseil fédéral n’ont pas entraîné de modifications de lois. En revanche, les chambres devront se prononcer sur la révision d’une ordonnance, en 2006, afin que le remaniement puisse être mis en œuvre dès le 1er janvier 2008, et être mené à bien jusqu’en 2011.
Dans un sondage réalisé peu après l’annonce de ces mesures, 60% des personnes interrogées se sont déclarées favorables à ces dernières, 26% contre, alors que 15% n’avaient pas d’opinion sur la question.

Plusieurs interventions parlementaires ont également été déposées en relation avec les nouvelles mesures proposées par le DDPS. Parmi celles-ci, un postulat du conseiller national Baumann (udc, TG) (Po. 05.3460) a demandé au Conseil fédéral de remettre au parlement un rapport intermédiaire sur la politique de sécurité avant de mettre en œuvre les mesures de transformation de l’armée décidées au mois de mai. Le conseiller national a estimé que les nouvelles priorités fixées par le Conseil fédéral à l’armée n’étaient pas suffisamment justifiées, et que ce dernier se devait d’expliquer en détails de tels changements de stratégie, les conséquences qui en résultaient, de même que les nouveaux objectifs et les moyens qui permettraient de les atteindre. Une des principales inquiétudes des parlementaires était que le gouvernement les tienne à l’écart de la conception et/ou de l’approbation de ces nouvelles mesures. Dans sa réponse à une interpellation de la groupe de l'udc (Ip. 05.3240), le Conseil fédéral a précisé que les étapes de développement planifiées ne requéraient pas de modifications de lois formelles – notamment de la loi fédérale sur l’armée et l’administration militaire (LAAM) –, mais qu’il s’efforcerait d’intégrer les milieux publics, le parlement et les partis politiques dans les travaux sous une autre forme. Le gouvernement a déclaré en outre que la réalisation de certaines décisions impliquerait la modification de l’ordonnance sur l’organisation de l’armée, et qu’il procéderait dans ce contexte à une consultation avant que le message ne soit approuvé à l’intention du parlement.

Les réactions à ce remaniement des priorités de l’armée ont été nombreuses. Si le PDC et une partie du PRD ont apporté leur soutien – sous certaines conditions – à ces adaptations, la Société suisse des officiers et l’UDC ont crié au démantèlement de la défense classique. De leur côté, le PS, les Verts et le GSsA ont affirmé leur volonté de briser le tabou de l’obligation de servir. S’appuyant sur le rejet du programme d’armement 2004 par les chambres, les socialistes ont notamment fait plusieurs propositions concrètes en présentant leur conception de l’armée suisse et de sa mission dans un papier de position publié au mois de mai. Selon eux, la tâche principale de l’armée doit désormais être l’engagement dans des missions de maintien de la paix organisées sous l’égide de l’ONU ou de l’OSCE. À ce titre, ils ont réclamé la création d’un bataillon d’environ 1500 soldats au maximum, qui puisse être engagé à tout moment dans des missions de paix à l’étranger. Dans cette perspective, le PS a proposé une armée de 50'000 hommes, composée d’un noyau dur de 12'000 militaires professionnels et de 38'000 volontaires de milice, c’est-à-dire des personnes dont l’activité professionnelle principale serait une activité civile, mais qui s’engageraient contractuellement à suivre une formation militaire. Or, comme les socialistes l’ont précisé, cela impliquerait la levée de l’obligation de servir, incompatible avec des effectifs aussi modestes. Quant aux coûts d’une telle armée, ils seraient de CHF 2.5 milliards au lieu des 4.7 milliards inscrits au budget de l’année sous revue. ((Notons que la Jeunesse socialiste a critiqué le papier de position du PS, jugeant que celui-ci n’allait pas dans la bonne direction. Pour la JS en effet, l’armée ne doit aucunement être réformée, mais supprimée) Le PS a appelé le PRD et le PDC à réfléchir avec lui sur ces réformes. Les socialistes n’ont cependant pas souhaité y associer l’UDC, jugée « trop éloignée » pour permettre l’entame d’un dialogue. Les démocrates du centre ont de leur côté réitéré en fin d’année leurs vives critiques vis-à-vis du projet de remaniement de l’armée du Conseil fédéral – prenant le relais de celles émises par la Société suisse des officiers – et ont attaqué de ce fait indirectement le conseiller fédéral UDC Samuel Schmid.

Suite à la mise en consultation de l’avant-projet au mois de janvier, le gouvernement a présenté son message concernant les modifications de l’organisation de l’armée et de la loi fédérale instituant des mesures destinées à améliorer les finances fédérales au mois de mai. Les mesures proposées correspondaient à des adaptations légales concernant la réalisation de l’étape de développement 2008/2011 de l’armée. Elles étaient présentées aux chambres fédérales en deux projets distincts : le premier concernait la loi fédérale instituant des mesures destinées à améliorer les finances fédérales, et le second la révision de l’ordonnance de l’Assemblée fédérale sur l’organisation de l’armée. Pour le Conseil fédéral, la montée du terrorisme a modifié la nature des dangers qui menacent la Suisse. Dans ce contexte, il a proposé de renforcer les capacités de l’armée pour des engagements subsidiaires et la sûreté sectorielle. Cela a conduit, avec les restrictions financières résultant des programmes d’allégement budgétaires 03 et 04, à un redimensionnement des moyens destinés à la défense face à une attaque militaire dirigée contre le pays. A ce titre, le Conseil fédéral a proposé que les capacités de l’armée concernant les engagements probables soient augmentées au moyen d’un recentrage des armes de combat lourdes sur l’infanterie. Il a également proposé une réorganisation des structures de conduite à l’échelon de l’armée et des brigades, afin d’augmenter la flexibilité et la capacité d’adaptation. De plus, afin d’octroyer à l’armée une plus grande sécurité en matière de planification, le Conseil fédéral a proposé de modifier la loi fédérale instituant des mesures destinées à améliorer les finances fédérales, de telle sorte que le plafond de dépenses soit prolongé de trois années supplémentaires (projet 1). Le gouvernement souhaitait en effet que le plafond déjà attribué dans le cadre du Programme d’allégement budgétaire 04 soit ainsi prolongé jusqu’à la fin de la réalisation de l’étape de développement 2008/2011.

Au Conseil national, les deux projets ont fait l’objet de propositions de renvoi au Conseil fédéral, dont une déposée par la minorité de la Commission de la politique de sécurité emmenée par Ulrich Schlüer (udc, ZH). Le conseiller national UDC Pirmin Schwander (SZ) a de son côté plaidé pour une non-entrée en matière sur le second projet. Ulrich Schlüer a motivé sa position en expliquant qu’il était prématuré d’envisager une nouvelle réforme au stade actuel de la refonte prévue par Armée XXI. Tout en rappelant la nécessité de garantir le mandat constitutionnel et l’importance de ne pas réduire la capacité défensive de l’armée, le zurichois a exigé que les domaines et les moyens d’intervention de l’armée sur le plan de la sécurité intérieure soient clairement définis par le Conseil fédéral, et que la Suisse ne soit ainsi pas contrainte de rejoindre une alliance militaire. Cette argumentation n’a toutefois pas été suivie par les radicaux, ni par le PDC. Le conseiller fédéral Samuel Schmid a, pour sa part, souligné que l’étape de développement 2008/2011 était « modérée et supportable », et en a profité pour mettre en garde les députés contre un éventuel retard, qui risquerait de compromettre le passage progressif à cette étape. Les députés ont finalement décidé d’entrer en matière sans opposition sur le premier projet, et par 153 voix contre 11 pour le second, rejetant l’ensemble des propositions de renvoi.

Dans le cas du premier projet (Loi fédérale instituant des mesures destinées à améliorer les finances fédérales), les députés ont été saisis de deux propositions de minorité. La première, présentée par le socialiste Hans Widmer (LU), portait sur un abaissement du plafond des dépenses pour l’armée à 10 milliards de francs. La seconde, formulée par l’écologiste Josef Lang (ZG) et soutenue par les socialistes, préconisait la suppression d’un tel « plancher », qui privilégie l’armée en lui assurant un certain niveau minimal de dépenses. Ces deux propositions ont cependant été rejetées au plénum, par 109 voix contre 60, et par 109 voix contre 61, respectivement. Au vote sur l’ensemble, le projet du Conseil fédéral a été adopté par 109 voix contre 64.

S’agissant du second projet (Ordonnance de l'Assemblée fédérale sur l'organisation de l'armée), le député Hans Widmer (ps, LU) a déposé une proposition de minorité qui visait à réduire de moitié le nombre de réservistes (ramené ainsi à 40'000). Le bernois Paul Günter (ps) a demandé, quant à lui, une réduction des effectifs de l’armée de 140'000 à 100'000 hommes, les socialistes souhaitant par là marquer leur opposition à la multiplication des interventions de l’armée sur le plan de la sécurité intérieure. Le plénum a toutefois rejeté ces deux propositions, respectivement par 112 voix contre 63, et par 108 voix contre 61. Au vote sur l’ensemble, l’ordonnance en question a finalement été rejetée par 101 voix contre 73, socialistes et démocrates du centre la combattant.

Suite à l’examen des deux projets concrétisant la réalisation de l’étape de développement 2008/2011 de l’armée suisse par le Conseil national fin 2006, le Conseil des Etats s’est saisi de cet objet au mois de mars. L’entrée en matière sur les deux projets (loi fédérale instituant des mesures destinées à améliorer les finances fédérales et révision de l’ordonnance de l’Assemblée fédérale sur l’organisation de l’armée) n’a pas été contestée. La question était de savoir si le choix de la petite réforme de l’armée proposée par le Conseil fédéral était uniquement un compromis justifié sur le plan politique ou s’il constituait également une solution objectivement fondée. Le gouvernement, suite au rejet du second projet par le Conseil national, avait en effet été contraint de faire des concessions : d’un concept d’origine qui prévoyait une réduction de moitié des bataillons de chars ainsi qu’un développement des opérations militaires de promotion de la paix, il a renoncé, dans le nouveau concept, à accroître les interventions à l’étranger, et s’est contenté de réduire le nombre de bataillons de chars de 8 à 6 (au lieu de 4). Malgré de nombreuses critiques de députés issus de tous bords, cette seconde mouture a été adoptée à l’unanimité (26 voix contre 0 et 9 abstentions) par les députés, de même pour le premier projet (35 voix contre 0 et 1 abstention). En vote final, le premier projet a été adopté par 125 voix contre 68 au Conseil national et à l’unanimité au Conseil des Etats.

Le Conseil des Etats ayant émis une divergence sur le second projet, le Conseil national a à nouveau débattu de celui-ci au mois de juin. Le démocrate du centre Theophil Pfister (SG) a alors proposé de ne pas entrer en matière sur ce projet, tandis que Pirmin Schwander (udc, SZ) a déposé une proposition de renvoi au Conseil fédéral. Les deux députés ont motivé leurs propositions respectives par le fait que les étapes de développement prévues allaient à l’encontre des impératifs de sécurité actuels et risquaient de fragiliser le système de milice. Ces deux propositions ont toutefois été rejetées à une large majorité par le plénum. Lors de la discussion par article, une minorité Schlüer (udc, ZH) a demandé que soit précisé à l’art. 2 de l’ordonnance que « l’armée accomplit dans son ensemble les missions qui lui sont attribuées », afin d’éviter toute différenciation entre les unités de combat et les troupes affectées à des missions de surveillance. Si la majorité de la commission estimait qu’une telle précision était inutile, le conseiller fédéral Samuel Schmid a toutefois soutenu la proposition de minorité, soulignant que cette précision permettrait de mettre fin aux désaccords en levant certains malentendus. Les députés ont finalement soutenu la proposition de minorité par 92 voix contre 67. Dans la suite des débats, la question de la réduction du nombre de bataillons de chars a constitué le principal point d’achoppement. Alors que la minorité représentée par le groupe UDC proposait que le nombre de six bataillons de chars soit expressément mentionné dans l’ordonnance, Verts et socialistes ont déposé une proposition de minorité visant à une réduction de leur nombre à quatre. A l’instar du Conseil des Etats, le plénum a cependant décidé de laisser cette décision au Conseil fédéral et a approuvé l’ensemble du projet par 106 voix contre 46. Le Conseil des Etats a ensuite éliminé de manière tacite les divergences qui subsistaient.